Le grand échec du mur entre les Etats-Unis et le Mexique

Le vernissage de l'expo a eu lieu sous l'ère Bush

Plus de trois ans après, la grande barrière de la frontière mexicaine et ses mouchards high-tech ne parvient pas à stopper les afflux des immigrés, attirés par l’Eldorado américain. Prévue pour être totalement effective en 2011, elle ne le sera pas avant 2017. Et encore.

Elle devait dessiner la postérité de l’ère Bush  sur 3 500 kilomètres de désert, comme un monument sécuritaire aux grandes peurs de l’après 11 septembre; à la lutte contre les incursions de terroristes, d’immigrants clandestins ou de suppôts des cartels de la drogue sud- américain.

Mais la « grande barrière » de la frontière mexicaine, un mur de métal, de béton et de mouchards high tech qui devait se dérouler, dès 2011, de San Diego, sur la côte pacifique, jusqu’à Brownsville au Texas, ne sera vraisemblablement pas terminée avant la fin de la décennie. En 2017, ou plus tard encore, et pour un prix à faire pâlir ses promoteurs républicains, confiaient, cette semaine, des membres de l’administration Obama.

Lancé en octobre 2006  par un vote d’un Congrès acharné à colmater une frontière poreuse et incontrôlable en raison des distances, devenu « un risque majeur d’infiltration de membres d’Al Qaeda » aux Etats-Unis, le « mur de la haine » honni par les organisations de protection des immigrants, devait consister en une double enceinte grillagée haute de trois mètres cinquante, hérissée de miradors et sertie d’un no man’s land patrouillé par les gardes frontières, eux-mêmes secondés par un système de senseurs et de télésurveillance unique au monde.

Traversée plus de 3000 fois en trois ans

S’il n’a jamais été question de fermer physiquement toute la longueur de la frontière, mais de clore une série de tronçons vulnérables, sur une distance totale d’environ 1 000 kilomètres, même ce premier projet laisse à désirer.

Au prix de 3,5 milliards de dollars, les Etats frontaliers et le gouvernement fédéral n’ont pour l’instant réussi qu’à installer une clôture bricolée faite de grillages ou de plaques de métal, destinée surtout à empêcher le passage illégal à travers champs de véhicules  chargés de clandestins ou de cocaïne mexicaine.

Avec une efficacité discutable: selon le GAO, la Cour des Comptes américaine, ces portions de barrières ont été traversées plus de 3 000 fois en trois ans, découpées ou trouées à 1 300 reprises par les immigrants ou leurs passeurs, les fameux « coyotes » experts du terrain, qui n’ignorent rien des habitudes des « border patrols ».

En héritant de l’édifice inauguré par l’administration précédente, Janet Napolitano, nouvelle Secrétaire à la « Homeland Security », supervisant tous les agences liées à la sécurité du territoire, et ancienne gouverneur d’Arizona, un Etat frontalier, ne s’est pas privé de sarcasmes: « On peut toujours rehausser une barrière à 3,5 mètres ironise t-elle.  Mais cela aura pour conséquence essentielle l’invention d’une échelle plus haute ».

Les zones de barbelés n’offrent aucune panacée sécuritaire. La dissuasion la plus efficace reste l’immensité du désert, où l’on retrouve chaque année près de 300 cadavres de migrants vaincus par la chaleur et la soif; et, dans une moindre mesure, le zèle des garde-frontières.

Les radars multiplient les fausses alertes

Voilà pourquoi le « Fence Project », le projet de barrière, s’accompagne d’un investissement de plus de 8 milliards de dollars dans une surveillance électronique de nouvelle génération, hybride de vidéo terrestre, de senseurs de nouvelle génération, appuyé par les satellite espions du Pentagone et de la Homeland Security.

Le système, testé par son maître d’oeuvre, une filiale de la division militaire de Boeing, sur un tronçon de 50 kilomètres de frontière en Arizona, se révèle un échec cuisant. Aux dires même de Mark Borkowski, directeur du projet « barrière électronique » au Department of Homeland Security, « la dimension technologique s’est avérée un défi imprévu. Nous avons toujours cru que ce serait un jeu d’enfant ».

Or, les radars de nouvelle génération multiplient les fausses alertes au moindre mouvement d’une branche d’arbre ou à chaque passage d’un animal. Le temps de réponse des satellites, coordinateurs de l’ensemble, apparaît incompatible avec la rapidité des mouvements humains, et l’astuce des passeurs, qui expédient des leurres dans le champs des radars, mobilisent les drônes et les patrouilles avant de lancer une incursion d’immigrants, ou de trafiquants de drogue à des dizaines de kilomètres de là. La police, impuissante, assiste sur ses écrans dernier cri, au défilé des clandestins.

Tim Peters, directeur des essais chez Boeing Global Security systems, bat sa coulpe sans finasseries. « Nous faisons tout pour régler les problèmes, assure t-il . Et nous reconnaissons que les attentes de nos clients n’ont pas été satisfaites ». Les logiciels sont à revoir, autant que les solutions simplistes en vogue dans les années 90.

Philippe Coste  L’Expresse

Sebastian Pinera remporte l’élection présidentielle au Chili

 

Sebastian Pinera

Le milliardaire de droite Sebastian Pinera a remporté dimanche le second tour de l’élection présidentielle au Chili face à Eduardo Frei, mettant fin à 20 ans de domination de centre gauche sur la vie politique du pays. Pinera a récolté près de 52% des suffrages contre à peine plus de 48% à Frei, candidat de la coalition de gauche, qui a rapidement reconnu la victoire de son adversaire. « Je tiens à féliciter Sebastian Pinera », a dit l’ancien président, au pouvoir de 1994 à 2000. « Je lui souhaite de réussir pendant son mandat. » La victoire de Pinera, âgé de 60 ans, marque un retour de la droite sur la scène politique en Amérique du Sud, où la gauche a enchaîné les victoires électorales ces dernières années, de Montevideo à Buenos Aires et de Caracas à La Paz. « Nous avons besoin d’un État fort et efficace avec plein de muscles et peu de graisse », a déclaré Pinera devant des milliers de partisans en liesse dimanche soir à Santiago. « Nous avons besoin d’un État qui aide les gens dans le besoin et les classes moyennes à aller de l’avant », a ajouté le milliardaire, qui prendra ses fonctions au mois de mars.

C’est la première fois que la droite devance la gauche dans une présidentielle au Chili depuis la fin de la dictature du général Augusto Pinochet et le retour de la démocratie en 1990. La très populaire présidente sortante, la socialiste Michelle Bachelet, ne pouvait légalement briguer un nouveau mandat. Mais nombre de Chiliens s’étaient dit déçus par la coalition de centre-gauche « Concertacion », estimant que le gouvernement aurait pu mieux utiliser les milliards de dollars de revenus tirés de l’exploitation du cuivre. Ils semblaient également lassés par la vieille garde politique du pays. « DE L’AIR FRAIS » « Les gens voulaient du changement. Ils voulaient respirer après 20 ans de règne de la Concertacion », a déclaré Patricia Acosta, une publiciste de 39 ans célébrant la victoire de Pinera.

Formé à l’université américaine de Harvard, Pinera est classé 701e fortune mondiale par le magazine Forbes. Il était le favori des marchés financiers. Soucieux de faire entrer « de l’air frais » et d’apporter du « changement » au pays, le candidat de la droite a su se démarquer de l’héritage de la dictature militaire, endeuillée par la mort ou la « disparition » de plus de 3.000 personnes et quelque 28.000 cas de torture. L’un de ses frères fut ministre de Pinochet et une partie de son entourage a travaillé pour la dictature. L’homme d’affaires, qui a fait fortune en introduisant les cartes de crédit au Chili, s’est engagé à relancer l’économie en créant un million d’emplois. Il promet un taux de croissance annuel de 6% grâce à des allègements fiscaux pour inciter les entreprises à recruter. L’économie du Chili, qui repose sur le cuivre et les exportations de saumon, d’agrumes et de vins, émerge de sa première récession en dix ans. Ses détracteurs estiment que le projet de Pinera dépend trop largement de la capacité du secteur bancaire à créer des emplois et d’une reprise générale progressive assortie d’une demande maintenue pour le cuivre. Il risque aussi d’avoir des difficultés à faire adopter ses réformes à un Congrès divisé. Il a promis par ailleurs de céder ses parts dans la compagnie aérienne LAN avant sa prise de fonctions en mars. Certains analystes estiment que le ralliement à Frei du producteur de films Marco Enriquez-Ominami – arrivé en troisième position au premier tour avec 20% des voix -, mercredi, a été trop tardif et trop tiède pour lui permettre une victoire qui aurait été autrement arithmétiquement logique.

Reuter

Voir aussi : Rubrique Amérique Latine , Chili,En finir vraiment avec l’ère Pinochet , On Line, Du retour des Chicago boys,

Venezuela: Chavez exproprie une chaîne d’hypermarchés franco-colombienne

hugo-chavezLe président socialiste du Venezuela Hugo Chavez a ordonné dimanche l’expropriation de la chaîne d’hypermarchés franco-colombienne Exito (groupe Casino), accusée d’avoir augmenté ses prix à des fins « spéculatives » après la dévaluation de la monnaie locale le 8 janvier.
« La chaîne Exito passe sous contrôle de la République, en raison de nombreuses infractions aux lois vénézuéliennes », a déclaré M. Chavez sous les applaudissements lors de son programme radio-télévisé hebdomadaire, « Alo Presidente » (Allo Président). « Jusqu’à quand allons-nous permettre qu’une multinationale vienne faire cela ici? J’ordonne que l’on ouvre une enquête et j’attends la nouvelle loi pour entamer une procédure d’expropriation de la chaîne Exito », a ajouté le chef de file de la gauche radicale latino-américaine. M. Chavez a demandé au parlement, où ses partisans sont largement majoritaires, d’adopter « en urgence » une réforme de la loi de défense du consommateur, afin de permettre à l’Etat d' »exproprier » les commerces qui augmentent leurs prix à des fins « spéculatives ».

La chaîne colombienne Exito, dont l’actionnaire majoritaire est le groupe français Casino, possède plusieurs grands magasins au Venezuela.     « Cela doit passer sous contrôle de la nation. Cela peut faire partie de Comerso », a affirmé M. Chavez, en faisant référence à la Corporation de Marchés socialistes, un nouveau réseau de commerces vendant à des prix cassés divers types de produits. Il y a dix jours, le gouvernement a dévalué le bolivar, qui s’échangeait depuis 2005 au taux de 2,15 bolivars pour un dollar, et instauré un double taux de change pour stimuler la production nationale, dans un pays largement importateur.

Le bolivar s’échange désormais à 2,60 bolivars pour un dollar pour les importations des produits de base (santé, alimentation, équipements) et à 4,30 bolivars pour les autres (voitures, télécommunications, électronique…). Les économistes redoutent que cette dévaluation n’alimente l’inflation dans un pays où les prix ont augmenté de 25% en 2009. Par peur d’une valse des étiquettes, bon nombre de Vénézuéliens se sont rués dans les magasins au lendemain de l’annonce gouvernementale pour acheter notamment des appareils électroménagers importés.     En réaction, le président Hugo Chavez avait menacé d’exproprier les commerçants qui augmenteraient les prix de manière abusive.     Peu après, un hypermarché de Caracas appartenant au groupe Exito avait été le premier magasin investi par la garde nationale. Des dizaines d’autres commerces ont depuis subi le même sort.

M. Chavez, arrivé au pouvoir en 1999, a déjà exproprié plusieurs entreprises vénézuéliennes et étrangères depuis 2007 dans le cadre de sa politique de nationalisations de plusieurs secteurs stratégiques, comme le pétrole, l’électricité, les télécommunications, la sidérurgie, le ciment ou les banques.

Le Japon croûle sous une dette monstrueuse

Il croûle sous une des dettes les plus élevées du monde, emprunte plus qu’il ne gagne et refuse d’envisager de nouvelles sources de revenus: ce qui, pour un particulier, mènerait à la saisie et l’interdiction bancaire n’attire à l’Etat japonais que des sermons vite oubliés.

Alors que la situation budgétaire de la Grèce, du Mexique ou de Dubaï agitent ces dernières semaines les marchés mondiaux, le Japon, malgré des finances publiques dans un état tout aussi désastreux sur le papier, ne semble inquiéter ni les investisseurs, ni les agences de notation.

Pour la première fois depuis 1946, le Japon va émettre plus de dette qu’il ne percevra d’impôts lors de l’année budgétaire 2009-2010, qui s’achève fin mars. Selon l’OCDE, qui admoneste régulièrement Tokyo à ce sujet, son déficit budgétaire dépassera les 10% du produit intérieur brut l’an prochain. Sa dette publique flambera à 204% du PIB: en la matière, seul le Zimbabwe fait pire.

A l’origine du problème: les plans de relance mis en oeuvre à répétition depuis les années 1990, ainsi qu’un système fiscal peu lucratif pour l’Etat, avec notamment une taxe sur la consommation exceptionnellement basse pour un pays développé (5%). De plus, le nouveau gouvernement de centre-gauche de Yukio Hatoyama s’est engagé à n’augmenter aucun impôt avant 2013.

« Si nous étions le Botswana, on verrait immédiatement que nous prenons l’eau. Mais le Japon est comme le Titanic: notre économie est tellement grosse que personne ne s’aperçoit que nous coulons », déplore Noriko Hama, économiste à la Doshisha Business School de Kyoto.

N’importe où ailleurs, pareille situation budgétaire « mènerait droit à une annulation forcée de la dette ou même à l’instauration d’un Etat fasciste », poursuit-elle. Mais pas au Japon, dont la dette continue de jouir du troisième ou quatrième meilleur score possible chez les agences de notation.

« Le montant de la dette, en soi, ne dit pas tout concernant les qualités du Japon en tant que débiteur », justifie James McCormack, analyste chez Fitch.

« Des taux d’intérêt très bas permettent à l’Etat de contracter une dette exceptionnellement lourde, tout en déboursant des intérêts identiques à ceux que doivent payer d’autres pays dont l’endettement est moindre », explique-t-il.

M. McCormack met également en avant « l’énorme stock d’épargne » des Japonais, dans lequel le gouvernement a encore bien de la marge pour puiser.

Autre facteur positif: la dette nippone est, à plus de 93%, détenue par des investisseurs japonais. Dans un pays en proie à une déflation record et où la Bourse a chuté de près de 75% en 20 ans, des bons du Trésor au rendement de l’ordre de 1,3% continuent d’offrir un taux d’intérêt réel intéressant.

Cette quasi-absence de dette en devises rend improbable un scénario de crise du type Mexique ou Argentine. « Il est toujours possible de monétiser une dette en monnaie locale », rappelle Hervé Lievore, stratège chez AXA.

La monétisation consiste à faire tourner la planche à billets pour acheter les nouveaux bons du Trésor. Une pratique dangereuse, génératrice d’hyperinflation et que la Banque du Japon a exclue, mais qui, en dernier recours, reste toujours préférable à la faillite de l’Etat.

« Le seul rayon de soleil, dans cet affreux problème de la dette, est qu’elle est entièrement détenue à l’intérieur du pays et donc beaucoup plus gérable », notait le secrétaire général de l’OCDE Angel Gurria, de passage fin novembre au Japon. « La question est: quand cela va-t-il commencer à inquiéter les marchés? Eh bien, nous ne voulons pas le savoir, car alors il sera trop tard ».

Afp

« Si le climat était une banque, il serait déjà sauvé » l’étonnant discours d’Hugo Chavez à la COP15

President of Venezuela Addresses General Assembly

À l’occasion de l’ouverture de la COP21 à Paris, retour sur le discours prononcé par Hugo Chávez, ex-président de la République du Venezuela, au Sommet Climatique des Nations Unies à Copenhague (COP15) le 16 décembre 2009. Dans cette prise de parole engagée, M. Chávez fait le lien entre inégalités sociales et changements climatiques. Selon lui, le capitalisme est intrinsèquement lié à la crise environnementale et combattre l’un ne peut se faire sans combattre l’autre. 5 « COP » plus tard, son discours, qui met en garde contre les échecs répétés des grandes conférences climatiques, semble toujours d’actualité.

Toutes les grandes conférences internationales sur le climat ont été un échec jusqu’à aujourd’hui. Lors de chaque nouvelle conférence, la panique est de plus en plus grande et des moyens plus élevés sont injectés dans des discussions dont rien ne semble aboutir. Et pour cause, les bases mêmes des rouages productivistes ne sont pas questionnés. En 2009, pour la COP15, M. Chávez prenait la parole devant les Nations Unis, à l’occasion du Sommet Climatique de Copenhague. Outre son orientation politique qui lui est propre, ainsi qu’au peuple qu’il représente (majorité chrétienne), il va tenir un discours d’une étonnante clarté sur notre incapacité à mettre en cause les rouages profonds du système qui accable l’environnement, dont la course effrénée à la croissance ininterrompue et le cercle prétendument vertueux de la production / consommation.

Surtout, il est l’un des premiers à faire le lien publiquement entre les inégalités de richesses au niveau international et les inégalités face à la crise climatique – thèse développée dans le dernier livre de Naomi Klein : Tout peut changer – Capitalisme et changement climatique). Aujourd’hui, on constate que les plus touchés par le changement climatique sont en effet les plus pauvres. Ce sont pourtant les habitants des pays… qui ont le moins contribué au réchauffement. On notera également que M. Chávez rendit un bel hommage à Hervé Kempf, directeur du journal Reporterre, devant les représentants de l’ONU.

En dehors de tout parti pris partisan, ce discours face à tous les chefs d’États semble sortir des normes en proposant une vision alternative de la question écologique : sortir du capitalisme débridé pour prendre collectivement des  décisions qui réguleraient le marché en faveur de la préservation de l’environnement. Faut-il faire émerger un éco-socialisme ? À chacun d’en juger.

« L’activité humaine actuelle dépasse le seuil du développement durable et met en danger la vie sur la planète. Mais, je tiens à le souligner, nous sommes là aussi profondément inégaux. Les 500 millions de personnes les plus riches, soit 7%, sept pour cent, de la population mondiale, ces 7% sont responsables de 50% des émissions polluantes, alors que la moitié la plus pauvre de la population de la planète – la moitié, 50% – n’émet que 7% des gaz polluants. »

Source Mondialisation 16 décembre 2009

Voir aussi : Actualité Internationale, Rubrique Ecologie, rubrique Politique, Politique Internationale, Société civile, Grande action de désobéissance pour le climat, rubrique SociétéCOP21 : Annuler les manifs, c’est se déclarer vaincus face à la menace,