Tunisie, les éditocrates repartent en guerre

Election Tunisie. Photo Jamal Saidi Reuters

C’est la première élection libre tenue dans le monde arabe depuis plus de cinquante ans – à l’exception, particulière, de la Palestine où le scrutin s’était tenu sous occupation. La campagne a été animée, la participation massive malgré tous les Cassandre qui prétendaient le peuple déçu par l’absence de changements, comme si le peuple ne s’intéressait qu’aux questions de subsistance et pas à la liberté et à la démocratie. Bien sûr, les élections n’ont pas été parfaites. Certains ont évoqué le poids de l’argent, notamment avec cet homme d’affaires basé à Londres qui a réussi à obtenir un grand nombre de députés (sans doute en amalgamant les rescapés de l’ancien régime). Mais peu de démocraties ont réussi à régler le problème des rapports entre la politique et l’argent – que l’on songe aux Etats-Unis ou à la France. Les Tunisiens ne s’y sont pas trompés et tous les observateurs ont noté non seulement la forte participation, mais aussi l’émotion et la joie de personnes qui faisaient la queue pendant des heures pour glisser un bulletin dans l’urne.

Mais voilà : certains n’acceptent la démocratie que lorsque les électeurs votent comme ils le souhaitent. Que le peuple palestinien sous occupation vote pour le Hamas, et l’Occident organise le blocus du nouveau gouvernement et sa chute. Que les Tunisiens votent pour Ennahda, et voilà nombre de nos éditorialistes, ceux-là même qui affirmaient que le printemps arabe avait vu la disparition des islamistes, s’interroger gravement et reprendre une vieille antienne : les Arabes ne sont pas mûrs pour la démocratie ou, comme ils l’écrivaient avant, mieux vaut Ben Ali que les islamistes.

Heureusement, tous ne sont pas sur la même longueur d’ondes, mais le titre « Après le régime de Ben Ali, celui du Coran » du journal de 7 heures de France-Inter le 25 octobre résume la position de toutes les chaînes de Radio France, mobilisée sur un anti-islamisme primaire.

Dans L’Express, Christophe Barbier, celui-là même qui qualifiait la guerre israélienne contre Gaza de « guerre juste », écrit (« Après le printemps arabe, l’hiver islamiste ? », 25 octobre) :

« C’est une peur qui chemine alors que les armes se taisent et que s’élève le brouhaha des urnes. Une peur un peu honteuse, tant l’irénisme est de rigueur, et tenace aussi, le remords d’avoir si longtemps soutenu des dictateurs, avec, pour seule raison, cynique mais valable, d’être en sécurité sur nos rives. Une peur nourrie par les cris des coptes massacrés en Egypte, les premières élections en Tunisie et l’engagement du Conseil national de transition libyen à faire de la charia la “source première de la loi”. Cette peur, c’est celle de l’islamisme, celle d’un pouvoir barbu et liberticide, dont les imams psychopathes remplaceraient les militaires d’opérette et les despotes débauchés d’hier. »

« Valable » ? Valable de soutenir Ben Ali et Moubarak, le roi du Maroc et les généraux algériens ? S’agissant des coptes égyptiens, faut-il rappeler qu’ils ont été (aux côtés de musulmans qui manifestaient avec eux) massacrés par l’armée, présentée comme une garante face aux islamistes ? Quant à la dénonciation des « imams psychopathes », on reste sans voix…

« Jamais cette crainte n’a abandonné les esprits occidentaux, même si le vacarme de la fête droits-de-l’hommiste l’a reléguée depuis janvier dans l’arrière-boutique de la foire-fouille sondagière. Elle ressort aujourd’hui parce que nous sommes dans un marécage idéologique, un entre-deux politique où les potentats sont déchus, mais les démocraties, pas encore installées. Balbutiantes et vacillantes, elles sont comme un enfant effrayé par ses premiers pas dans un monde vertigineux. Arabes et Occidentaux, tous épris de paix et de liberté, nous sentons que quelque chose a gagné, qui était juste, mais qu’autre chose aujourd’hui menace, qui est terrible. Et si rebelles et révoltés avaient œuvré, à leur insu, pour préparer le règne des imams ? Et si nous avions fourni, enfants béats de Danton et de Rousseau, le moteur démocratique au véhicule islamiste ? S’imposer par une révolution ou une guerre civile n’est rien à côté d’élections gagnées : l’islamisme pourrait bien, demain, affirmer être légitime selon les critères mêmes de l’Occident. Que répondrons-nous ? »

Eh bien, nous répondrons que c’est le jeu de la démocratie. C’est ce que font les partis de la gauche tunisienne, dont certains s’apprêtent à gouverner avec les islamistes. Car, nous le savons tous, des élections libres donneront dans tout le monde arabe un poids important aux islamistes (dans ses différentes déclinaisons, et Ennahda en Tunisie n’est pas les Frères musulmans en Egypte ou au Maroc) et le choix est clair : soit le retour aux dictatures que l’Occident a soutenues sans états d’âme ; soit la confiance dans la démocratie, dans les peuples, qui, même musulmans, aspirent à la liberté et non à une dictature de type taliban.

Autre éditorialiste, Jean Daniel, toujours mal à l’aise quand il s’agit de l’islam et qui a mis si longtemps à dénoncer la dictature de Ben Ali. Son texte publié le 26 octobre, « Tunisie. Victoire programmée pour les islamistes » (Nouvelobs.com) est un mélange d’erreurs factuelles – que signalent d’ailleurs ses lecteurs sur le forum – et des préjugés qui animent une bonne partie de la gauche française.

« Le plus triste, c’est que cette victoire altère les couleurs du Printemps arabe, décourage les insurrections modernistes, et galvanise les insurgés religieux. La Tunisie était un exemple à suivre pour tous les nouveaux combattants arabes de la démocratie. Elle est devenue un modèle pour les mouvements religieux. Dieu vient de dérober au peuple sa victoire. »

Insurgés modernistes ? insurgés religieux ? Sur la place Tahrir tant célébrée, tous les vendredis, des milliers de manifestants faisaient la prière. A quel courant appartenaient-ils ? moderniste ? religieux ?

« Une bonne partie des opinions publiques, tant en Occident que dans les pays arabo-musulmans, s’étaient détournées des compétitions sportives ou de la crise financière mondiale pour s’intéresser à ce qu’il se passait dans un petit pays méditerranéen de 12 millions d’habitants. » (…)

Avaient-elles tort ?

« Les Tunisiens se sont donné le droit de vote. Encore fallait-il que les élections fussent libres. Elles l’ont été pour la première fois et chacun s’est incliné devant le civisme allègre des citoyens qui, par leur vote à près de 90%, étaient supposé charger les 217 constituants d’établir une forme d’Etat de droit en respect avec les principes essentiels qui font une démocratie. Le combat reste ouvert mais il est compromis. On va voir si les Tunisiens savent se reprendre et organiser une coalition qui empêche les 70 nouveaux constituants d’imposer leurs lois. »

Les Tunisiens doivent « se reprendre » ? Quelle condescendance à l’égard de ces ex-colonisés qui ont le front de ne pas voter comme les intellectuels parisiens le souhaitent.

Et Jean Daniel dresse un étrange parallèle avec l’Algérie : « Si une vigilance, parfois ombrageuse, s’est imposée aux familiers de l’histoire du Maghreb dès qu’il a été question d’élections libres en Tunisie, c’est parce qu’ils gardaient à l’esprit ce qui s’était passé, en Algérie, entre le 5 octobre 1988 et le 14 janvier 1992. Bilan : environ 150 000 morts. » Que signifie ce charabia ? Entre octobre 1988 et les élections de janvier 1992, il n’y a pas eu 150 000 morts. Les morts sont venus après que l’armée a arrêté le processus démocratique. Ce coup d’Etat fut, selon Jean Daniel, « populaire aux yeux de l’opinion démocratique » et « a sans doute protégé l’Algérie d’une victoire des ennemis islamistes de la démocratie ».

Populaire aux yeux de l’« opinion démocratique » ? Faut-il rappeler que de nombreux partis non confessionnels, comme le Front des forces socialistes (FFS) ou même le Front de libération nationale (FLN), ont pris position contre le coup d’Etat ? Et qui peut prétendre que ce coup a protégé la démocratie ? S’il existe un pouvoir autoritaire et corrompu aujourd’hui dans le monde arabe, c’est bien celui des généraux algériens.

« Pour nombre de laïcs ou simplement de républicains, fussent-ils les plus musulmans, l’expression “islam modéré” est un oxymore : il y a contradiction absolue entre les deux mots. Pour d’autres, la capacité de résoudre les problèmes considérables que la construction et le développement de la Tunisie vont poser est assez faible sans l’appui des forces qui se disent encore islamistes mais qui ne sont souvent que conservatrices. Elles répondent au besoin d’ordre et d’autorité qui, dans l’histoire, est toujours apparu après le chaos provoqué par des journées insurrectionnelles. »

Nombre de laïcs, de républicains contestent l’expression islam modéré ? Jean Daniel confond les musulmans qui s’expriment abondamment dans les médias occidentaux avec l’opinion dans le monde arabe. Les deux plus importantes forces de gauche en Tunisie ont accepté le principe d’une collaboration avec Ennahda, preuve qu’elles croient qu’il existe non pas un « islam modéré », mais des organisations islamistes qui acceptent les règles de la démocratie.

Plus largement, les clivages qui divisent la Tunisie ne se résument à celui entre laïcs et islamistes. D’autres questions se posent à la société, aussi bien sociales que politiques, des choix du développement comme celui de la politique internationale et régionale. Rien ne serait plus dangereux que de faire des combats dans le monde arabe des combats entre deux blocs homogènes, laïcs et islamistes. Non seulement parce que la victoire de ces derniers serait certaine, mais aussi parce que ce n’est pas le principal clivage de la société.

Oui, Ennahda est une organisation conservatrice, notamment sur le plan des mœurs et de la place des femmes ; elle est libérale en matière économique ; son fonctionnement a longtemps été vertical (comme tous les partis de la région), même s’il est désormais contesté par les nouvelles générations et les nouvelles formes de communication. Il ne s’agit donc pas de donner une image idéalisée du mouvement, mais de reconnaître que, comme le Hamas en Palestine, il est une partie de la société, et que son exclusion signifie l’instauration d’une dictature militaire.

D’autres éditoriaux reprennent cette même ligne islamophobe. On pourra lire bien d’autres contributions sur le thème, que ce soit Alain-Gérard Slama dans Le Figaro du 26 octobre (« Elections en Tunisie : sous le jasmin, les cactus », heureusement ce texte n’est pas en accès libre sur le site du journal) ; ou encore Martine Gozlan, ou l’inénarrable Caroline Fourest, qui écrit notamment sur son blog : « Dire qu’Ennahdha est “modéré” parce qu’il existe des salafistes très excités, c’est un peu comme expliquer que Le Front national de Marine Le Pen est de “gauche” parce qu’il existe des skinheads. »

Mais ne tombons pas dans la paranoïa : fort heureusement, d’autres textes font la part des choses.

On notera la tribune de Bernard Guetta dans Libération du 26 octobre, « L’impardonnable faute des laïcs tunisiens » – encore que l’idée d’un nécessaire front des laïcs me semble contestable.

Et aussi l’éditorial du Monde (27 octobre), « Et si, en Tunisie, la démocratie passait par l’islam ? » :

« L’annonce concomitante du retour de la charia en Libye, avant la poussée électorale attendue d’autres forces islamistes en Egypte, risque ainsi d’alimenter l’incompréhension face à des révolutions menées pour les droits de l’homme qui ne se traduisent pas instantanément par l’adoption des valeurs que les Occidentaux revendiquent. C’est singulièrement vrai sur la question des droits qui doivent être reconnus aux femmes. Ce serait cependant faire injure aux Tunisiennes et aux Tunisiens que de décréter, toutes affaires cessantes et sans qu’il soit nécessaire de voir les vainqueurs à l’ouvrage, que le succès d’Ennahda sonne le glas de leur “printemps”. En l’occurrence, si une loi mérite l’attention, dans les pays qui vont voter pour la première fois autrement que sous la matraque et pour un parti unique, c’est sans doute moins la loi islamique qu’un code autrement plus prosaïque : la loi électorale. »

« La réussite des transitions arabes passe nécessairement par l’adhésion du plus grand nombre à un projet commun, et donc par le compromis et la négociation. A cet égard, le système proportionnel retenu en Tunisie qui écrête les raz de marée électoraux au lieu de les amplifier et contraint le vainqueur à trouver des alliés est judicieux ; il permet d’éviter une situation à l’algérienne, lorsque le Front islamique du salut retourna à son profit en 1991 un système conçu pour favoriser le FLN. »

« La volonté exprimée par des opposants historiques tels que Moncef Marzouki et Mustapha Ben Jaafar, dont les partis ont obtenu des résultats encourageants, de trouver des terrains d’entente avec Ennahda dessine un tout autre chemin, celui d’un apprentissage de la démocratie qui passe moins par l’anathème que par le dialogue. Sans faire preuve d’un angélisme excessif, il est permis de le juger prometteur. »

Et les élections tunisiennes seront à marquer d’une pierre blanche sur la longue voie des peuples arabes vers la démocratie.

Alain Gresh (Le Monde Diplomatique)

Voir aussi : Rubrique Tunisie, Les mosquées sont aussi pleines que les cafés,  rubrique Médias,

La Palestine devient membre à part entière de l’Unesco

Les Palestiniens ont enregistré lundi 31 octobre à Paris une victoire diplomatique aussi symbolique que significative sur la voie de la reconnaissance de leur Etat, en obtenant le statut de membre à part entière de l’Unesco, l’une des principales agences de l’ONU.

« La Conférence générale (qui réunit l’ensemble des Etats membres, ndlr) décide de l’admission de la Palestine comme membre de l’Unesco », dit la résolution adoptée par 107 voix pour, 52 abstentions et 14 voix contre, parmi les pays présents lundi au siège de l’Unesco à Paris.

« L’entrée de la Palestine porte le nombre d’Etats membres de l’Unesco à 195 », a déclaré l’organisation dans un communiqué. La quasi-totalité des pays arabes, africains et latino-américains se sont prononcés pour l’adhésion des Palestiniens, de même que la France qui avait pourtant émis de sérieuses réserves ces derniers jours sur la démarche palestinienne. « L’Unesco, ce n’est ni le lieu ni le moment. Tout doit se passer à New York », jugeait encore vendredi le ministère français des Affaires étrangères.

« Prématuré »

Car beaucoup d’Occidentaux estimaient que la candidature à l’Unesco ne pouvait précéder l’aboutissement de la démarche entreprise par les Palestiniens auprès de l’ONU à New York.

Le président palestinien Mahmoud Abbas avait solennellement demandé le 23 septembre à l’ONU de reconnaître l’Etat palestinien. Cette demande doit être examinée le 11 novembre par le Conseil de sécurité, où elle pourrait être frappée d’un veto américain.

« Nous pensons que c’est contreproductif. C’est une mesure prématurée », a répété lundi devant la Conférence générale de l’Unesco la sous-secrétaire américaine à l’Education, Martha Kanter.

Les Etats-Unis, l’Allemagne et le Canada ont voté contre, tandis que parmi les Européens, l’Italie et le Royaume Uni se sont abstenus.

« Ce vote permettra d’effacer une infime partie de l’injustice faite au peuple palestinien », a déclaré devant la Conférence générale le ministre des Affaires étrangères de l’Autorité palestinienne, Riyad al-Malki.

Embarras américain

Il a assuré que la demande palestinienne était déconnectée de ses démarches à l’ONU à New York et précisé que les Palestiniens avaient besoin de l’aide de l’Unesco pour protéger leur patrimoine historique et culturel.

Cette admission palestinienne embarrasse particulièrement les Américains, qu’elle place dans une position délicate vis-à-vis de l’Unesco. La pleine adhésion des Palestiniens, qui bénéficiaient jusqu’à présent du statut d’observateur, devrait provoquer l’arrêt immédiat de leur contribution financière à l’organisation, soit 70 millions de dollars et 22% de son budget.

Après l’avoir boycotté pendant 20 ans (1984-2003) pour protester contre sa mauvaise gestion et son idéologie tiers-mondiste, les Etats-Unis participent désormais activement aux programmes de l’agence, y voyant un moyen de diffuser certaines valeurs occidentales sans se mettre en première ligne.

Les diplomates de l’Unesco insistent notamment sur l’importance à leurs yeux des programmes en faveur des femmes et des filles dans certains pays.

Les Américains sont tenus par deux lois du début des années 1990 qui interdisent le financement d’une agence spécialisée des Nations unies qui accepterait les Palestiniens en tant qu’Etat membre à part entière, en l’absence d’accord de paix avec Israël.

Dotations retirées

« La décision d’aujourd’hui va compliquer notre capacité à soutenir les programmes de l’Unesco », a confirmé l’ambassadeur américain auprès de l’Unesco, David Killion.

Pour l’Unesco, les conséquences financières seront considérables. Israël devrait suivre les Américains et retirer lui aussi sa dotation. Selon l’ambassadeur israélien Nimrod Barkan, le budget de l’Unesco serait ainsi amputé d’un quart de son montant.

« Cela deviendra impossible pour l’Unesco de remplir sa mission », a-t-il estimé Nimrod Barkan.

La directrice générale de l’Unesco Irina Bokova admettait vendredi que l’organisation devrait probablement réduire la voilure.

« Il faudra couper des programmes, réajuster l’équilibre de notre budget. Mais ce n’est pas seulement un problème financier, c’est un problème qui concerne l’universalité de notre organisation », affirmait-elle.

AFP

Reconnaître la stratégie palestinienne

L’Unesco a récompensé par sa décision les efforts des Palestiniens modérés pour trouver une solution diplomatique au Proche-Orient, ce à quoi ni les Etats-Unis ni Israël ne devraient s’opposer, estime le quotidien libéral La Stampa : « Si les Palestiniens prennent les armes, on crie aussitôt que la violence empêche la paix. S’ils tentent de recourir au levier diplomatique, on y voit une initiative unilatérale qui empêche la paix. Nous aimerions donc bien savoir – notamment des Etats-Unis, d’Israël et même de l’Italie qui s’est abstenue lors du vote à l’Unesco – ce que les Palestiniens devraient faire. Il est douteux de prétendre que la reconnaissance par l’Unesco équivaut à une menace. La nouvelle stratégie tout à fait habile des Palestiniens s’inscrit au cœur des institutions internationales et des nouveaux équilibres mondiaux. Les Etats-Unis et Israël feraient bien de reconnaître l’intelligence de cette stratégie et de réagir avec la même intelligence. »

La Stampa (Italie)

La réaction trop vive de Washington

En réaction à l’adhésion de la Palestine à l’Unesco, les Etats-Unis ont suspendu le versement de leur contribution financière. Washington prend ainsi le risque de s’isoler, estime le quotidien conservateur Frankfurter Allgemeine Zeitung : « L’adhésion de la ‘Palestine’ à l’Unesco est pour les Palestiniens un résultat honorable qui pourrait les rapprocher un peu plus d’une entrée aux Nations unies. Israël et les Etats-Unis devraient se demander si cette adhésion de la ‘Palestine’ a un poids si important qu’ils doivent se retirer de l’organisation. Washington l’a déjà fait une fois et s’était ainsi isolé tout seul.

Frankfurter Allgemeine Zeitung (Allemagne)

Livre

Palestine Israël un Etat, deux Etats ?

Quatrième de couverture

Israël et la Palestine doivent-ils former un, ou deux Etats ? Soulevé dès le début du XXe siècle, ce vieux débat revient au premier plan de l’actualité. Et pour cause : plus de six décennies après le plan de partage de la Palestine (1947), plus de quatre après l’occupation de la Cisjordanie et de Gaza (1967), et près de vingt ans après les accords d’Oslo (1993), Israël continue de coloniser la Palestine mandataire. Autrement dit, ni la lutte armée ni le combat politico-diplomatique n’ont réussi à réaliser l’autodétermination du peuple palestinien.

Face à l’intransigeance du gouvernement israélien et à la pusillanimité de la “communauté internationale”, comment réussir demain ce qui a échoué hier ? Cette question, née de l’échec même du prétendu “processus de paix”, de nombreux Palestiniens se la posent, et avec eux beaucoup de leurs amis à travers le monde. Et quand bien même l’Organisation des Nations unies, en cet automne 2011, accueillerait enfin l’Etat de la Palestine en son sein, la question de l’avenir institutionnel des deux peuples se trouvera au centre des futures négociations.

Clarifier les enjeux de ce débat, voilà le but de cet ouvrage collectif qui en approfondit toutes les dimensions : juridiques, démographiques, économiques, politiques et diplomatiques. Pour peser atouts et faiblesses des différentes solutions, neuf spécialistes, choisis à la fois pour leur compétence reconnue et la diversité de leurs sensibilités, font le point : Gadi Algazi, Isabelle Avran, Monique Chemillier-Gendreau, Youssef Courbage, Leila Farsakh, Farouk Mardam Bey, Julien Salingue, Dominique Vidal et Raef Zreik.

Historien et journaliste, Dominique Vidal a écrit de nombreux ouvrages sur le conflit israélo-palestinien et son histoire, notamment Comment Israël expulsa les Palestiniens 1947-1949 (Editions de l’Atelier, Ivry-sur-Seine, 2008) et – avec Alain Gresh et Emmanuelle Pauly – Les 100 clés du Proche-Orient (Fayard, Paris, 2011). Il a aussi dirigé avec Bertrand Badie Nouveaux acteurs, nouvelle donne. L’Etat du monde 2012 (La Découverte, Paris, 2011).

Collectif sous la direction de Dominique Vidal
Coédition Sindbad / Institut des Etudes palestiniennes
Prix : 23,00 € En librairie le 2 novembre

Voir aussi : Rubrique Palestine, rubrique Essais,

Nadia El Fani « En Tunisie les mosquées sont aussi pleines que les cafés »

Nadia El Fani :  » L’engagement ce n’est pas d’attendre la majorité ». Photo David Maugendre.

Nadia El Fani.Lauréate du prix international 2011 de la laïcité, la réalisatrice franco-tunisienne revient sur les écrans avec le documentaire, Laïcité inch’Allah.

Nadia El Fani, 51 ans, est réalisatrice de films. Fille d’un des ex-dirigeants du Parti communiste tunisien (à qui elle a consacré un film) elle s’est installée en France il y a dix ans parce qu’elle étouffait sous le régime de Ben Ali. En 2003, dans Bedwin Hacker, elle avait anticipé les événements en démontrant que la contestation viendrait d’Internet. Par la suite elle a eu envie de faire un film sur l’athéisme en terre d’islam. En filmant le peuple de la rue dans ses pratiques quotidiennes, Nadia El Fani dénonce l’hypocrisie religieuse. Sur le terrain politique, elle plaide pour un Etat laïc, appelant à la modification de l’article 1 de la Constitution tunisienne qui déclare que l’Islam est la religion d’Etat. Des opposants islamistes ont initié une campagne haineuse à son encontre, via les réseaux sociaux. Le compte « Pour qu’il y ait dix millions de crachats sur la tête de cette truie chauve » a totalisé près de 35 000 « j’aime ». Le propos sur la laïcité de son dernier documentaire Laïcité inch’Allah est central à deux semaines des élections en Tunisie. Il dépasse les frontières de ce pays laboratoire.

Après avoir abordé le thème de la résistance au ramadan obligatoire, vous vous êtes clairement engagée en faveur de la laïcité en Tunisie…

 
La question centrale du film est celle de la liberté. De la liberté de penser et de vivre, de celle de faire ses choix. Pour asseoir cet espoir, de nombreux démocrates tunisiens se sont engagés pour combattre en faveur de la laïcité. Parce que c’est la seule petite porte par laquelle nous pouvons entrer pour faire émerger l’hypocrisie de la religion et sortir du mensonge. Beaucoup de partis « instrumentalisent » les croyances  pour imposer un pouvoir politique illégitime. Au Maroc, Mohamed VI se prétend le commandeur des croyants en tant que descendant du prophète. Ce n’est pas le cas en Tunisie.

Comment s’est déroulé le tournage ?

 
J’ai débuté le tournage sous Ben Ali, en août 2010. Je voulais montrer comment les gens vivent le ramadan obligatoire. Les mosquées sont pleines comme les cafés sont pleins. La majorité des gens ne font pas ramadan mais se cachent. Quand la révolution a démarré, j’étais en plein montage. Je suis retournée en Tunisie en décembre pour participer au mouvement. La question de la laïcité a été un des premiers sujets débattus après la chute de Ben Ali. On voit dans le film la place que prend ce débat. D’ailleurs c’est ce point qui a fait apparaître les islamistes qui s’en sont pris aux femmes. Sinon, la situation sur place était très stimulante. Nous vivions un état de grâce. Les feux rouges ne fonctionnaient plus, on se laissait passer. C’était une agora permanente. Je me suis engagée aux cotés des progressistes parce que je pense qu’il est extrêmement important que l’on inscrive le principe de laïcité dans la future constitution.

Comment les tunisiens vont s’y retrouver avec l’explosion du nombre de listes * électorales ?

 
Il faut souligner que depuis la chute de Ben Ali l’Etat fonctionne en Tunisie. Les services publics ne se sont pas arrêtés , il n’y a pas de coupure de courant, et les fonctionnaires sont payés. Ce qui est bon signe pour un pays qui vient de sortir de la révolution. Dans ce type de situation l’émergence des partis est assez normale. Les petits partis essaient de faire campagne mais ils n’ont pas de moyens, à la différence des partis islamistes qui sont soutenus par l’étranger. Le peuple a mené un combat exemplaire et il reste très vigilant.

Vous défendez la liberté citoyenne mais aussi la liberté artistique ?

 

On ne quémande pas sa liberté artistique, cela s’arrache. On doit l’exercer. On manque en revanche d’un courant fort pour la défendre. Chez les intellectuels, les prises de positions claires sont rares.

Vous avez reçu des menaces des islamistes tunisiens…

 
Les islamistes ont manipulé mon propos et déformé  mon état d’esprit. Je ne combat pas contre l’Islam. Je ne dénigre pas les musulmans sincères. J’évoque le glissement de la religion de la sphère privée à la sphère publique. Je défends l’idée que chacun à le droit de penser et d’agir en toute indépendance. Dans un Etat où il est décrété que tout le monde appartient à la même religion, il est d’autant plus compliqué de se réclamer d’une idée et d’une pensée au mieux ignorée, au pire dénigrée et combattue.

Quel est le poids de l’histoire ? Comment la société tunisienne se situe-t-elle par rapport à la laïcité, le peuple tunisien vous semble-t-il mûre ?

 
Ce n’est pas ma préoccupation de savoir si la société est mûre ou pas. Moi je m’emploie à propager des idées progressistes. Les islamistes  se servent de cela comme arguments. Il disent : On vient de faire une révolution, on a plein de chose à régler. La Laïcité n’est pas une priorité. Cela disant, ils confisquent juste la liberté de penser. Mais comment peut-on réfléchir aux principes de la démocratie en faisant cette impasse ? L’engagement ce n’est pas d’attendre la majorité. Avant la révolution, les forces de progrès n’ont pas attendu que tous les feux passent au vert pour dire qu’il y avait des choses à régler.

Ne faut-il pas pour autant que cette avancée soit portée par un élan populaire ?

On ne peut pas dire à la place du peuple que celui-ci n’est pas prêt pour la laïcité. Il faut en revanche expliquer que piétiner la laïcité c’est un problème de liberté. Il y a  cinquante ans au moment de l’indépendance, on a déjà éliminé la réflexion sur cette question majeure. On ne peut pas continuer de refuser le problème aujourd’hui.

Recueilli par Jean-Marie Dinh

111 partis politiques se présentent le 23 octobre prochain pour l’élection d’une Assemblée constituante.

Tunisie. Election de l’Assemblée constituante du 20 au 23 octobre.

Comment voter en France

L’Instance Régionale Indépendante pour les ElectionsFrance Sud informe les citoyens tunisiens résidents en France que les élections de l’assemblée constituante tunisienne auront lieu les 20, 21 et 22 octobre de 8h à 18h. Il s’agit d’élire des députés pour les tunisiens du sud de la France qui siègeront au sein de l’assemblée constituante en choisissant une liste parmi les 23 candidates.

Le vote aura lieu dans 71 bureaux répartis sur tout le territoire du sud de la France. Les électeurs peuvent consulter les listes électorales pour vérifier leurs bureaux de vote d’inscription à l’adresse

Les électeurs inscrits doivent se rendre au bureau de vote munis de leur Carte d’Identité Nationale Tunisienne ou de leur passeport tunisien. Le reçu d’inscription est fortement recommandé. Les électeurs non inscrits pourront également voter. Ils devront aller au bureau de vote le plus proche munis de leur Carte d’Identité Nationale Tunisienne ou de leur passeport tunisien et de leur carte consulaire. S’ils constatent qu’ils ont été inscrits automatiquement, ils pourront voter sur place, sinon, ils seront dirigés vers des bureaux spéciaux.

Le scrutin a lieu en un seul tour. Les sièges sont répartis au niveau des circonscriptions selon un mode de représentation proportionnelle à scrutin de liste.Irie France 2 a été créée par l’Instance Supérieur Indépendance pour les élections (ISIE) afin d’organiser, d’observer et de veiller au bon déroulement des élections dans la circonscription électorale France 2.

La campagne électorale est interdite dans les lieux de culte, sur les lieux de travail et dans les établissement scolaires et universitaires A Montpellier le bureau de vote est ouvert du jeudi 20, au samedi 22 octobre, de 8h à 18h. Il est situé Espace Jacques 1er d’Aragon (salle polyvalente), place de la révolution francaise, 117, rue des états généraux.

Contact: irie.france2@gmail.com

Voir aussi : Rubrique Tunisie, rubrique Rencontre,

Trois femmes prix Nobel de la paix

Le prix Nobel de la paix a été conjointement attribué vendredi, pour la première fois de son histoire, à trois femmes: deux Libériennes, la présidente Ellen Johnson Sirleaf -actuellement en campagne- et la militante Leymah Gbowee, et une Yéménite, la journaliste Tawakkol Karman.

Première femme arabe à recevoir la prestigieuse récompense, la Yéménite a été la première à réagir et a immédiatement dédié son prix au « printemps arabe », cet élan de révolte populaire qui a renversé ou ébranlé plusieurs régimes autoritaires en Afrique du Nord et au Moyen-Orient cette année.

Les trois lauréates sont récompensées « pour leur lutte non violente en faveur de la sécurité des femmes et de leurs droits à participer aux processus de paix », a déclaré le président du comité Nobel norvégien, Thorbjoern Jagland.

Ellen Johnson Sirleaf, la « dame de fer »

Première femme à être démocratiquement élue à la tête d’un pays africain en 2005, Mme Sirleaf, 72 ans, a oeuvré pour la reconstruction d’un pays ravagé par 14 ans de guerres civiles, qui ont fait quelque 250.000 morts et laissé une économie exsangue. Elle reçoit le Nobel quatre jours seulement avant une élection présidentielle incertaine au cours de laquelle la « Dame de fer », comme elle est surnommée, brigue un second mandat.

« Depuis son investiture en 2006, elle a contribué à assurer la paix au Liberia, à promouvoir le développement économique et social, et à renforcer la places des femmes », a fait valoir M. Jagland.

D’abord soutien de Charles Taylor entré en rébellion contre le régime de Samuel Doe, elle en devient l’adversaire à la lumière des violences qui vaudront au chef de guerre devenu président (1997-2003) d’être jugé à La Haye pour des crimes de guerre et contre l’humanité. Son accession au pouvoir a été rendue possible par le travail sur le terrain de Leymah Gbowee, « guerrière de la paix » à l’origine d’un mouvement pacifique qui contribuera, notamment à l’aide d’une « grève du sexe », à mettre fin à la deuxième guerre civile en 2003.

Lancée en 2002, l’initiative originale de cette travailleuse sociale quadragénaire voit les femmes -toutes confessions religieuses confondues- se refuser aux hommes tant que les hostilités se poursuivent, ce qui oblige Charles Taylor à les associer aux négociations de paix peu avant sa chute.

Leymah Gbowee, la militante pacifiste

« Leymah Gbowee a mobilisé et organisé les femmmes au-delà des lignes de division ethniques et religieuses pour mettre fin à une longue guerre au Liberia et assurer la participation des femmes aux élections », a noté M. Jagland.

Fondé en 1822 par des esclaves noirs affranchis venus des Etats-Unis, le Liberia connaît toujours une paix fragile du fait des vives tensions ethniques et de la présence de mercenaires difficilement délogeables dans sa forêt tropicale.

Tawakkol Karman, figure emblématique de la révolution arabe

La troisième lauréate, Tawakkol Karman, « aussi bien avant que pendant le printemps arabe », a elle aussi joué « un rôle prépondérant dans la lutte en faveur des droits des femmes, de la démocratie et de la paix au Yémen », a-t-il ajouté.

Journaliste née en 1972, cette jeune femme frêle est une figure emblématique du soulèvement populaire contre le président contesté Ali Abdallah Saleh dans un pays conservateur où les femmes ne jouent pas de rôle de premier plan en politique. Elle a été un des principaux meneurs des manifestations estudiantines de janvier qui ont donné le coup d’envoi au soulèvement, ce qui lui valu d’être brièvement arrêtée.

Les Femmes et le prix Nobel

Jusqu’à présent, seules 12 femmes avaient reçu le prix Nobel de la paix en 110 ans d’histoire, la dernière étant l’écologiste kényane Wangari Maathai (2004) qui vient de décéder.

« Ce prix est un tribut à toutes les femmes dans le monde et à leur rôle dans les processus de paix et de réconciliation », a réagi le Premier ministre norvégien, Jens Stoltenberg.

Remise du prix à Oslo le 10 décembre 2011

Le prix sera remis aux trois lauréates à Oslo le 10 décembre, date-anniversaire de la mort de son fondateur, l’industriel et philanthrope suédois Alfred Nobel. Il consiste en une médaille, un diplôme et un chèque de 10 millions de couronnes suédoises (environ un million d’euros) que les trois lauréates se partageront.

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Le Conseil national syrien

Le Conseil national syrien (CNS) est une autorité politique de transition créée à l’occasion de cette révolte syrienne de 2011. Il a été créé à la fin du mois d’août et lancé les 1er et 2 octobre 2011 à Istanbul, en Turquie1, pour coordonner tous les opposants à mener des opérations contre le régime de Bachar el-Assad, aussi bien en Syrie que dans des pays tiers2.

Un Conseil national de Syrie (arabe : ?????? ?????? ??????) avait été initialement formé en 2005 pour protester contre le régime Assad.

Ce conseil regroupe plusieurs membres d’opposants comme les Frères musulmans, des libéraux mais aussi des partis kurdes et assyriens3. Il est composé de 190 membres et son président est Burhan Ghalioun4.

Le 9 octobre 2011, le ministre des affaires étrangères syrien Walid al-Mouallem annonce que le régime prendra des mesures contre les pays qui reconnaîtront le CNS5. Un jour plus tard, le Conseil national de transition libyen est la première autorité à reconnaître officiellement le CNS comme unique représentant du peuple syrien6. La France lui apporte son soutien le 10 octobre7.

Le 29 novembre 2011, l’Armée syrienne libre reconnait l’autorité du Conseil national syrien8.

Le 6 décembre 2011, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah accuse le CNS de vouloir détruire la Syrie et déclare « Le soi-disant Conseil national syrien, formé à Istanbul, et son leader Burhan Ghalioun (…) se font concurrence pour présenter leurs lettres de créance aux États-Unis et à Israël ». Ces déclarations font suite aux dires de Burhan Ghalioun qui estimait que si la Syrie était dirigée par le CNS, les liens militaires avec l’Iran, le Hezbollah et le Hamas seraient coupés9.

Source Wikipédia

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