Démantèlement de la SNCF : avec 30 ans de retard, Macron va-t-il répéter les mêmes erreurs que les Britanniques ?

 Photo : Barry Lewis CC via flickr

Le gouvernement envisage d’accélérer la libéralisation du rail et la transformation, sinon le démantèlement, de la SNCF. Les recettes proposées sont les mêmes que celles qui ont été appliquées aux autres entreprises publiques, de France Télécom à EDF, et qui n’ont bénéficié ni aux salariés ni aux usagers. L’exemple de la libéralisation des chemins de fer britanniques, initiée dans les années 1990 et marquée par une succession de faillites et de scandales, devrait pourtant inciter à la prudence. Au Royaume-Uni, un mouvement pour la ré-appropriation de ce service public par les usagers et les salariés prend de l’ampleur.

Le 15 février, Jean-Cyril Spinetta, ancien PDG d’Air France et ancien président d’Areva, a rendu public un rapport sur l’avenir de la SNCF et du rail en France. Ce 19 février, le gouvernement vient d’ouvrir une période de concertation sur ce nouveau chantier, en recevant direction de l’entreprise publique et syndicats. Transformation de la SNCF en société anonyme, ouverture à la concurrence des lignes ferroviaires, voire de la gestion du réseau, fin programmée du statut de cheminot, suppression des dessertes jugées non rentables… Les préconisations du rapport Spinetta n’ont rien pour surprendre, tant elles correspondent aux « recettes » appliquées précédemment à d’autres entreprises publiques, de France Télécom à EDF, en passant par La Poste. Elles ont immédiatement été reprises à son compte par le gouvernement, qui a annoncé l’ouverture d’une période de concertation en vue de leur mise en œuvre.

La « réforme » – ou le « démantèlement » – du service public ferroviaire serait rendue nécessaire et inéluctable par la dette de la SNCF et les exigences européennes de libéralisation du rail – l’ouverture à la concurrence étant fixée en 2020 pour les lignes nationales de transport de passagers. Ceux qui poussent ce projet – parmi lesquels il faut compter la direction de la SNCF elle-même – feraient pourtant bien de regarder ce qui se passe de l’autre côté de la Manche.

Le rail britannique est libéralisé dès les années 1990. British Rail, l’ancien service public, est alors divisé en plusieurs morceaux avant d’être vendu. Le réseau ferroviaire est séparé de la gestion des lignes, elles-mêmes réparties en plusieurs concessions régionales. Moins connu : la flotte des trains est confiée à des entreprises séparées, qui les louent au prix fort aux opérateurs des lignes, assurant à leurs actionnaires des millions de profits garantis d’année en année.

Hausse de 23 % des billets de train depuis la privatisation

C’est la privatisation du réseau ferroviaire – envisagée en filigrane pour la France par le rapport Spinetta, qui propose la transformation de SNCF Réseaux en société anonyme – qui en Grande-Bretagne a dégénéré le plus rapidement. Les problèmes de coordination et de perte d’expertise ont entraîné de nombreux incidents, qui ont culminé avec la catastrophe ferroviaire de Hatfield en 2000, laquelle a coûté la vie à quatre personnes. Le gouvernement s’est trouvé contraint de renationaliser le réseau dès 2002, et n’a jamais tenté de le privatiser à nouveau.

La gestion des lignes elles-mêmes est également marquée par des faillites et des scandales à répétition. Selon un sondage réalisé en 2017 pour la campagne We Own It (« Ça nous appartient »), qui milite pour la renationalisation ou la remunicipalisation des services publics au Royaume-Uni, 76% des Britanniques interrogés se déclarent en faveur d’un retour du système ferroviaire sous contrôle 100% public. Bien que les prix du train au Royaume-Uni soient parmi les plus chers d’Europe, ces services continuent d’être largement financés par les contribuables, tout en assurant des profits confortables à leurs opérateurs. Selon les chiffres mêmes du ministère britannique des Transports, les prix du train ont augmenté de plus de 23 % depuis la privatisation en valeur réelle (c’est à dire compte tenu de l’inflation). Les équipements ont vieilli. Et les firmes qui opèrent les lignes font l’objet des mêmes critiques sur la ponctualité des trains, les nombreuses annulations, les conflits sociaux, les wagons bondés et la qualité du service que la SNCF en France.

Des entreprises privées qui laissent tomber les lignes qu’elles gèrent

Tout récemment, Virgin Trains et le groupe de transport Stagecoach, les deux entreprises privées qui ont obtenu la gestion de l’East coast main line – partie du réseau reliant Londres à Édimbourg en longeant la côte Est – ont annoncé qu’elles abandonneraient leur concession trois ans avant la fin du contrat. Et qu’elles ne payeront pas les redevances qu’elles devaient verser à l’État. Apparemment, la concession n’était pas aussi profitable que ces entreprises l’avaient espéré. Cet abandon représente un manque-à-gagner de plus de 2 milliards de livres (2,25 milliards d’euros) pour le trésor public britannique. Ironie de l’histoire : l’East coast main line a été gérée directement par le gouvernement de 2009 à 2014 suite à la défaillance successive de deux prestataires privés. Elle a été re-privatisée en 2015. Ces événements n’ont pas empêché le ministère britannique des Transports de confier – et sans mise en concurrence – le contrat de concession d’une autre ligne ferroviaire, InterCity west coast, aux deux mêmes entreprises, Virgin et Stagecoach.

Le gouvernement britannique se trouve ainsi régulièrement contraint, du fait de la défaillance des acteurs privés, de renationaliser aux frais du contribuable des services qu’il avait privatisés. Un scénario qui n’est pas sans rappeler le sauvetage et la renationalisation des banques durant la crise financière de 2008. Faut-il transformer ces renationalisations involontaires en entreprises ou régies publiques pérennes ? Beaucoup commencent à se poser la question. Ils ont été rejoints par le Labour (parti travailliste) qui, sous l’égide de Jeremy Corbyn et de son numéro deux John McDonnell, a adopté pour les élections de juin 2017 un programme radical de renationalisation des services publics, suscitant l’opprobre des milieux d’affaires et de l’aile néolibérale du parti. Ce programme semble avoir trouvé un écho dans l’électorat, puisque le Labour est passé à deux doigts d’une victoire surprise et reste en position de l’emporter en cas d’élections anticipées.

La Grande-Bretagne, laboratoire européen de la privatisation

Des années Thatcher aux années Blair, le Royaume-Uni est le pays européen qui a mené le plus loin la privatisation et la libéralisation des services publics. Eau, rail, télécommunications, gaz et électricité, poste, transports urbains, prisons… Il n’y a guère que le service public national de la santé, le NHS, qui ait résisté jusqu’à présent. Les autorités britanniques ont aussi massivement développé les montages financiers de type « partenariat public privé » pour construire écoles, hôpitaux et autres infrastructures. La vague néolibérale a gagné l’intérieur même de l’État : un grand nombre de fonctions administratives de base – la gestion de certaines aides sociales, la collecte de la redevance télévisée, les services de probation, les demandes d’asile… – sont aujourd’hui confiées à des entreprises privées. Les marchés de sous-traitance administrative absorberaient aujourd’hui l’équivalent de 250 milliards d’euros, soit le tiers des dépenses publiques britanniques !

Cette politique a fait la fortune d’hommes d’affaires et d’entreprises qui se sont spécialisées sur ce créneau et vu leur chiffre d’affaires exploser en quelques années. Elle a aussi donné lieu à des scandales à répétition – comme la gestion des allocations handicapés par l’entreprise française Atos (lire notre article) – et à des faillites retentissantes. Mi janvier, l’entreprise de BTP Carillion, à laquelle le gouvernement britannique et les collectivités locales ont confié de nombreux chantiers d’infrastructures, a soudainement déclaré faillite, laissant les pouvoirs publics et des milliers de travailleurs sur le carreau. Avant de mettre la clé sous la porte, les actionnaires et les dirigeants de Carillion se sont copieusement servis. Le scénario pourrait se répéter avec Capita, une firme spécialisée dans les services financiers qui s’est enrichie en multipliant les contrats de sous-traitance à partir des années 1990. Elle aussi vient soudainement d’annoncer des difficultés financières.

« Remettre ces industries entre les mains de ceux qui les font fonctionner et les utilisent »

Cette succession d’événements et l’audace du Labour de Jeremy Corbyn ont changé le sens du vent. « C’est incroyable à quel point la situation et le débat public sur la privatisation et la nationalisation ont changé en seulement un an », se félicite Cat Hobbs, animatrice de la campagne We Own It. Au point que même le Financial Times, peu suspect de sympathies envers le Labour, a publié un bilan sans complaisance des privatisations au Royaume-Uni, admettant que le recours au secteur privé n’est pas toujours adapté et qu’une régulation gouvernementale plus active apparaît nécessaire pour empêcher les abus.

Du côté des travaillistes, on n’entend pas se contenter d’aménagements marginaux. « Face à l’ampleur des problèmes, nous devons aller aussi loin que le gouvernement travailliste dans les années 1940 [qui avait créé ou nationalisé les grands services publics britanniques au sortir de la Deuxième guerre mondiale],voire encore plus loin », affirmait récemment Jeremy Corbyn, lors d’un événement sur les « modèles alternatifs de propriété » organisé par son parti [1].

S’ils revendiquent l’objectif de renationaliser ces services, les leaders actuels du Labour assurent qu’ils n’entendent pas en revenir aux monopoles centralisés et bureaucratiques d’antan. Ils envisagent des services publics plus décentralisés, donnant un large rôle au secteur coopératif, et gérés de manière plus démocratique. « Nous devons remettre ces industries entre les mains de ceux qui les font fonctionner et les utilisent au quotidien, les travailleurs et les usagers. Personne ne sait mieux qu’eux comment les gérer », déclare John McDonnell, numéro deux du parti. « Nous devons être aussi radicaux que Thatcher l’a été en son temps. »

Quand les privatisations britanniques profitent aux entreprises publiques françaises

Les privatisations britanniques ont largement profité aux entreprises étrangères, en particulier françaises : Atos ou Steria pour la sous-traitance administrative, Vinci, Bouygues et Eiffage pour les partenariats public-privé, Sodexo pour les prisons, EDF pour l’énergie… Côté transports, des filiales de la RATP gèrent des lignes de tramway à Manchester et de bus à Londres. Keolis, filiale privée de la SNCF – à 70%, les 30% restant appartenant au fonds de pension public québécois, la Caisse des dépôts et placements –, est déjà présente sur plusieurs concessions au Royaume-Uni, notamment la plus importante, « Thameslink, southern and Great northern » (Nord et sud de Londres), marquée récemment par des conflits sociaux [2], et « Southeastern » (Sud-est du pays). Paradoxe : ces nouveaux marchés issus des anciens services publics sont souvent dominés par des entreprises qui sont la propriété de l’État français, et qui font chaque année traverser la Manche à de généreux dividendes tirés de la gestion des services privatisés britanniques.

Pendant que la Grande-Bretagne se lançait corps et âme dans des privatisations tous azimuts, les dirigeants français suivaient en effet une tout autre stratégie : celle de transformer les anciens monopoles publics – Air France, France Télécom, EDF-GDF, La Poste, SNCF, etc. – en entreprises commerciales sous le contrôle plus ou moins dilué de l’État, tirant profit de leur situation de rente en France et de la protection du gouvernement pour s’étendre à l’étranger… y compris en acquérant les services privatisés par d’autres pays. Cela explique sans doute pourquoi les dirigeants français ne se sont toujours opposés que très mollement aux politiques d’ouverture à la concurrence impulsées depuis Bruxelles. C’est exactement le modèle poursuivi depuis une dizaine d’années par la direction de la SNCF (lire notre enquête) et que le rapport Spinetta vient valider aujourd’hui en proposant la transformation de l’entreprise ferroviaire en société anonyme.

Olivier Petitjean

Source Bastamag 20/02/2018

CDN Montpellier. Valeurs de l’hospitalité et de l’accompagnement

Nathalie Garraud et Olivier Saccomano entrent dans leur fonction au CDN.  Photo JMDH

Nathalie Garraud et Olivier Saccomano entrent dans leur fonction au CDN. Photo JMDH

Théâtre
Nommés par Audrey Azoulay dans des conditions un peu tendues de la succession à Rodrigo Garcia au CDN de Montpellier, Nathalie Garraud et Olivier Saccomano présentent un projet innovant et se tournent résolument vers l’avenir.

Nathalie Garraud est metteur en scène, Olivier Saccomano, est auteur dramatique. Ce duo, entré en fonction en janvier, pilote désormais le Centre National Dramatique de Montpellier. Ils sont plutôt jeunes et exposent les idées directrices de leur projet avec une fraîcheur qui semble tenir à la fois de la réflexion et de la spontanéité artistique.

« On travaille en troupe depuis douze ans, explique Nathalie Garraud, La troupe, cela signifie que nous avons développé un processus de création où l’on avance chacun dans notre pratique ensemble, acteur, metteur en scène, auteur, techniciens, plasticiens associés… Nous sommes très heureux d’être ici. Cette notion de troupe est pour nous une pierre angulaire du projet que nous allons mettre en oeuvre au CDN de Montpellier avec les habitants du territoire , les artistes, et tous les partenaires de la région.»

Visiblement, l’expérience a déjà commencé avec l’équipe du CDN de Montpellier. « Les réunions pour clarifier les modes de fonctionnements et les rapports de travail se succèdent dans un climat convivial et collaboratif », confie une membre de l’équipe.

Défendre le travail dans la durée
Un des axes clé du projet, déjà impulsé avec la Compagnie du Zieu qui travaille sur des cycles de création, consiste à rompre avec le rythme du circuit de diffusion théâtrale qui tant à imposer un modèle de consommation de spectacles. Un modèle qui contraint fréquemment les artistes à créer des pièces sans leur permettre de les jouer, et donc de faire connaître leur travail ce qui rend aussi difficile le contact entre public et artiste.

Le projet  de Nathalie Garraud et Olivier Saccomano, entend appréhender cette problématique en usant d’un autre rapport au temps. « Politiquement, la question centrale  à défendre c’est la durée, explique Olivier Saccomano, nous avons conçu le projet afin qu’il permettre un rapport aux oeuvres et à la dimension artistique, qui sera portée par des artistes avec lesquels nous nous associons dans la durée

La saison prochaine la troupe ne proposera pas de création. En revanche elle tournera avec deux spectacles déjà conçus (Othello variation pour trois acteurs et Ceux qui grondent, un spectacle de petite forme jeune public.) sur tout le territoire, dans des théâtres, des Maison pour Tous, et d’autres lieux comme les établissements scolaires, les prisons, les maisons de retraite…

Zone de rencontres
Pour construire cette programmation d’un nouveau genre la troupe du CDN s’appuie sur plusieurs artistes associés qui seront accueillis dans la durée. A raison d’une équipe artistique par mois qui présenteront plusieurs pièces sur deux semaines et s’emploieront à accompagner leur expression sur le territoire en allant à la rencontre du public ou à travers les dispositifs d’éducation artistique.

Parmi les artistes impliqués on attend Marie Lamachère dont le théâtre engagé s’inscrit dans le réel, l’auteur Dieudoné Langouna, Directeur artistique du festival Mantsina sur scène à Brazzaville, Ema Dante, auteur et metteur en scène sicilienne qui pratique un théâtre social d’avant-garde, le collectif théâtral libanais Zoukak, le professeur d’histoire et d’esthétique du théâtre Olivier Neveux, et l’artiste plasticienne chorégraphe Mylène Benoit.

Pour le duo fraîchement nommé à la tête d’un pilier de la politique publique en faveur de l’art dramatique, « la responsabilité est aussi, celle d’inventer

JMDH

Blocages et opérations escargot : le gouvernement contraint de revoir les zones agricoles défavorisées en Occitanie

Opération escargot et blocus des agriculteurs dans la région de Toulouse, le 7 février. Eric Cabanis AFP

Opération escargot et blocus des agriculteurs dans la région de Toulouse, le 7 février. Eric Cabanis AFP

Plus de 1 000 communes sont concernées par une réforme des zones agricoles, qui débouchera sur de nouvelles aides financières en provenance de l’Europe (75 %) et de l’Etat (25 %).

Les périphériques intérieurs et extérieurs de Toulouse fermés, l’A62 close entre Langon (Gironde) et la ville rose, la circulation des trains interrompue entre Bordeaux et Sète (Hérault), les transports scolaires suspendus dans le Tarn-et-Garonne… Le gouvernement a dû revoir sa copie sur les « zones agricoles défavorisées », mercredi 7 février, face au mouvement de protestation des agriculteurs d’Occitanie.

Dans ces zones soumises à des contraintes naturelles (sols, sécheresse…) ou économiques (rendements à l’hectare, densité..), les agriculteurs sont éligibles à des indemnités de l’Union européenne liées à ce handicap naturel (ICHN). Depuis 1976, une carte détaille sur le territoire français ces zones, calquées sur des communes. Elle permet de répartir une aide importante de la politique agricole commune (PAC), environ un milliard d’euros par an. La Commission européenne veut modifier cette carte début 2019 et a donc demandé à la France de nouvelles propositions sur deux types de zones : les zones défavorisées simples et les zones affectées de handicaps spécifiques, les zones de montagne en étant exemptées.

Une première proposition a été rejetée en 2013 par Bruxelles. Et la nouvelle étude, initiée par Stéphane Le Foll, alors ministre de l’agriculture, publiée mi-janvier, a provoqué la colère du monde agricole, uniquement en Occitanie. 1 058 communes pouvaient être exclues de ces zones, dont 181 dans le Tarn-et-Garonne, et 40 % des communes classées en Haute-Garonne.

Blocage d’un convoi de l’A380

« Il s’agit d’espaces agricoles qui ont pour contraintes d’avoir un climat ou un relief particulier, des terres pauvres ou très pentues ou bien d’accueillir un système d’élevage précis », souligne Luc Mesbah, secrétaire général de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA) de Haute-Garonne. « Cela représente une perte sèche de 5 000 à 12 000 euros par an et par agriculteur, la plupart éleveurs de bovins », explique Alain Iches, de la FDSEA 82. Dans le Tarn, 300 éleveurs seraient touchés et la perte de revenus atteindrait presque les deux millions d’euros.

Dès le 24 janvier, à Montauban (Tarn-et-Garonne), un millier d’agriculteurs ont bloqué les routes et le 29 ils ont annoncé la création d’une ZAD, en référence à Notre-Dame-des-Landes – sauf qu’il s’agit là d’une « zone agricole à défendre ». Rapidement rejoint par les Jeunes Agriculteurs (JA) et les autres départements (Tarn, Gers, Haute-Garonne, Lot ou Aude), le mouvement a grossi jusqu’au lundi 5 février avec le blocage d’autoroutes et même d’un convoi de l’A380 partant de Toulouse.

« Dans une région qui compte 170 000 emplois dans l’agriculture, contre seulement 70 000 dans l’aéronautique, on n’imagine pas que le gouvernement ne revienne pas sur ses propositions », déclarait ce jour-là Alain Iches. Les syndicats, qui avaient été reçus une première fois par le ministre Stéphane Travert le 2 février à Paris, avaient donc décidé d’une nouvelle journée d’action, plus importante.

Barrages de bottes de foin, de pneus ou de fumier, tout avait été minutieusement installé, mercredi, par des dizaines de manifestants sur leurs tracteurs, affluant de nombreux départements. Aux alentours de 17 heures, alors que Toulouse était totalement isolée, une nouvelle délégation composée de syndicalistes et d’élus était reçue au ministère à Paris.

L’ex-région Midi-Pyrénées ne perdrait plus que 182 communes au lieu de 472

A l’issue de celle-ci, une modification importante du projet de la carte a été actée, avant une nouvelle réunion du groupe de travail national qui doit proposer un nouveau projet au président de la République fin février. L’ex-région Midi-Pyrénées ne perdrait plus que 182 communes au lieu de 472, dans le Tarn-et-Garonne 30 communes seraient concernées au lieu de 180, et la Haute-Garonne ne perdra que 22 communes en zone défavorisée au lieu des 182 initialement prévues.

Au cabinet du ministre, on assure que « rien n’était figé » : « Nous allons donc opérer des ajustements, avec une nouvelle carte. En intégrant de nouvelles communes et en en faisant sortir d’autres. Mais globalement la région Occitanie conserve la même enveloppe financière. »

Yvon Parayre, président de la chambre d’agriculture de Haute-Garonne, s’est dit « satisfait à 90 % » car le nouveau plan permet « de réintégrer des communes grâce aux critères que nous avons proposés ». « Je comprends la gêne pour les citoyens mais ils ont pris conscience, je crois, que nous avons besoin des éleveurs pour fournir des produits de qualité en quantité suffisante », ajoute-t-il.

Cette spécificité de la région, très axée sur l’élevage bovin, fait dire à José Bové, député européen et ancien syndicaliste paysan : « Aujourd’hui la PAC ne protège pas, on ne fait que réguler la disparition des éleveurs. La vraie question est de savoir comment vont se négocier les futurs accords internationaux et l’importation massive de viande d’Argentine ou du Brésil. » En milieu de nuit, les barrages avaient été levés, après une dégustation de cochon grillé.

Philippe Gagnebet

Source Le Monde 08/02/2018

Quelle place donnerons nous à la culture en 2018 ?

Concert du Festival de Radio France Montpellier Occitanie place de l’Europe à Montpellier.

Concert du Festival de Radio France Montpellier Occitanie place de l’Europe à Montpellier.

Tels qu’ils sont présentés par les institutions et les responsables politiques, les intentions et les budgets en faveur de la culture sur le territoire sont au beau fixe. Mais peu d’acteurs s’interrogent sur ce que sous-tend vraiment la notion de culture et de compétence culturelle…

Alors que la Valette (Malte), capitale européenne de la culture en 2018, débute en préambule les festivités avant la cérémonie officielle d’ouverture prévue pour le 20 janvier, les conditions climatiques, politiques, sociales et démocratiques du monde, ne cessent de se dégrader. Si bien qu’on peut s’interroger au niveau global comme local, sur le rôle que pourra bien jouer la culture cette année pour défendre l’ouverture d’esprit, la tolérance, et les idées si nécessaires au savoir vivre ensemble qu’au domaine démocratique.

L’aspect culturel de la construction européenne devrait être un élément essentiel mais le chemin pour y parvenir paraît bien long. L’idée de désigner une capitale européenne de la culture s’inscrit sur le papier avec une volonté affichée de rapprocher les Européens en mettant en avant la richesse et la diversité des cultures du continent. En pratique cette précieuse désignation sert souvent à mettre en oeuvre des plans de rénovation urbaine assez éloignés des objectifs affichés. Ce n’est alors pas la culture qui transforme la ville mais la ville qui se transforme en prenant la culture pour alibi.

Ambitions culturelles
Après Marseille en 2013, le maire Philippe Saurel a annoncé sa volonté de candidater pour que Montpellier soit Capitale Européenne de la culture en 2028. L’idée n’est pas saugrenue et elle a le mérite de se trouver en correspondance avec un axe de développement culturel structurant et constant que les différents maires de Montpellier ont maintenu depuis Georges Frêche.

« Il faut bâtir  hashtag #MontpellierDestination Culture. Nous disposons des ingrédients pour y parvenir, se félicité Philippe Saurel,  la croissance de la ville, sa jeunesse, 30% des habitants ont moins de 30 ans. Le caractère universitaire  d’une ville monde . C’est-à-dire une ville dans laquelle se reflète tous les visages de la planète.» Cette volonté de conforter l’image de Montpellier à la culture se traduit dans les chiffres. Elle représente 64M d’investissement en fonctionnement jusqu’à la fin du mandat de Phillipe Saurel.

Le budget national de la culture sera conforté en 2018. Il avoisine les 10 milliards d’euros. Le ministère de la Culture  fixe « la vie culturelle, la cohésion sociale et le dynamisme économique des territoires» au rang de ses priorités.  En 2018, le ministère de la Culture augmentera la part de ses crédits déconcentrés,  » pour que son action se déploie au plus près des acteurs de terrain» a assuré la ministre de la Culture Françoise Nyssen  lors de sa première visite à Montpellier.  Dans sa profession de foi pour 2018, la ministre de la Culture assure que les collectivités locales, associations, et citoyens bénéficieront d’un montant de 860 M, (en hausse de 6 %) afin de renforcer, sur tout le territoire, l’action publique en faveur de la culture et de lutter contre le sentiment d’abandon qu’exprime une partie des Français.

Une Chambre en Inde d’Ariane Mnouchkine au Printemps des Comédiens 2017.

Une Chambre en Inde d’Ariane Mnouchkine au Printemps des Comédiens 2017.

Zones blanches et paupérisation artistique
Sur le terrain pourtant ce sentiment est bien réel. A travers les différences sociales et territoriales s’expriment les zones blanches de la culture. La perception des inégalités culturelles s’observe à travers le caractère plus ou moins élitaire de la fréquentation des lieux de culture consacrés comme les théâtres et les musées. Mais pas seulement, les études sur le sujet laissent apparaître que la sensibilité aux inégalités culturelles s’inscrit dans une vision critique de la société française et traduit un intérêt marqué pour les questions de justice sociale.

Dans le secteur du spectacle le développement des activités artistiques sur le territoire est en recul. Les artistes subissent une crise qui s’inscrit dans la durée. Le phénomène de paupérisation  artistique est intimement lié à la mutation d’un secteur ou les prescripteurs eux-même peinent à s’y retrouver entre les objectifs de remplissage, et la qualité de l’offre.

Maillage culturel du territoire
Dans un contexte de baisse des dotations publiques, pour renforcer l’égalité d’accès à la culture et maintenir un aménagement culturel équilibré du territoire, la Région Occitanie a adopté un budget (96,1M) en augmentation de 12% pour la culture et le patrimoine. Le Conseil Départemental de l’Hérault maintient lui aussi une politique volontariste en matière culturelle. Il versera 4,8 M à la Métropoles de Montpellier pour le maintient des festivals sur le Domaine d’O dont de la partie Nord relève depuis le début de l’année de La Métropole. Les festivals Arabesques, Folie Lyriques ; Nuits d’O, le Printemps des comédiens et Saperlipopette seront donc pérennisés ainsi que la saison d’hiver du Domaine d’O. Plus à l’Ouest, l’institution départementale projette de lancer cette année un vaste projet sur le Domaine départemental de Bayssan à Béziers. Un Théâtre en dur va remplacer le chapiteau et un amphithéâtre de plein air verra le jour.

Aux volontés politiques affirmées de  la Région, du département et de la Métropole s’ajoute l’initiative volontariste des villes comme Sète, Frontignan ou Lodève qui ont fait de la culture un axe de développement.

Difficile maillage culturel du territoire
La multiplicité des acteurs publics naguère à l’origine des financements croisés qui pouvaient bénéficier aux acteurs et aux structures artistiques a été remise en question. Par la réduction des budgets publics, d’une part, notamment celle de l’Etat qui garantissait une certaine qualité de l’offre artistique, et par la réforme territoriale d’autre part. On peut le mesurer avec la menace qui plane sur l’Opéra Orchestre national de Montpellier depuis la création de la grande Région Occitanie. Les économies d’échelle impactent par ailleurs les mécanismes de la gouvernance des politiques culturelles comme on le constate à l’échelle de la Métropole de Montpellier dans la redistribution des postes et des fonctions en dépit de l’expérience acquise.

L’aspect culturel sous-tend la notion d’appartenance commune et de lien à cultiver. Universalité des valeurs et diversités des expressions sont les deux faces d’une même monnaie qui ne peut sonner au fond d’un tiroir caisse.

Jean-Marie Dinh

Source La Marseillaise 20/01/2018

Voir aussi : Actualité locale, rubrique Politique, Politique culturelle, rubrique Montpellier,

La Marseillaise veut s’en sortir avec moins de salariés et moins de journaux

 » Dans la foulée d’un communiqué du SNJ-CGT et du Filpac-CGT publié le 22 décembre, qui marquait une prise de distance notable avec la stratégie de la direction, certains salariés planchent sur un projet alternatif de reprise en vue de l’audience du 28 mai. Une piste qui ne serait pas la moindre des révolutions, pour un titre qui a vu l’emprise du parti communiste se renforcer ces dernières années. »
Julien Vinzent

marsactu-la-marseillaise-veut-sen-sortir-avec-moins-de-salaries-et-moins-de-journaux

Source : Marsactu 24/01/2018