Dernier cri, le festival qui laisse sans voix

Anetha, entre dub acide et beats impénétrables. Photo dr

Anetha, entre dub acide et beats impénétrables. Photo dr

La seconde édition de  Dernier Cri débute ce soir à la Villa Rouge et se répand en ville jusqu’au 13 novembre. Soirées débat, expo, cinéma, le festival explore et donne du sens à la culture technoïde.

Dernier Cri, ce sont des soirées où se produisent une flopée de DJs talentueux qui écument les capitales européennes, mais c’est aussi la volonté de revenir aux sources de la culture techno pour en diffuser les fondements. La première édition organisée en 2015 à Montpellier par Pascal Maurin, Jacqueline Caux et Edith Roland, a fait carton plein.

Pour la seconde, qui débute ce soir à la Villa Rouge, le festival poursuit les collaborations amorcées l’an passé  avec ses partenaires montpelliérains. Ce sera le cas avec la Panacée pour une conférence-débat de Vincent Carry, le directeur du festival Les Nuits Sonores à Lyon.

Le cinéma Diagonal renouvelle également sa participation avec la projection du film Andreas Dresen Le Temps Des Rêves suivie d’une rencontre avec Tilman Brembs, photographe allemand contemporain de cette décennie mardi 8 novembre de 17h45 à 20h30. Tilman Brembs sera aussi présent avec une exposition des photos d’archives saisies pendant des rave party berlinoises de 1990 à 1997. On pourra découvrir dès lundi son exposition à L’Anacrouse (5 place du petit Scel,  entrée libre à partir de 19h).

La ligne artistique reste la même avec une programmation qui reflète l’humeur du moment, les DJs et lives qui marquent notre époque et qu’on a très envie d’écouter et de découvrir sur scène. Les soirées ont lieu dans les bars et clubs qui programment des soirées électro tout au long de l’année (Rockstore, Antirouille, Villa Rouge, Zoo, PZ et le Montpe’l). Après Marseille, Lyon sera mis à l’honneur cette année le 11 novembre.

Côté nouveautés, le festival en partenariat avec l’Ecole des Beaux Arts de Montpellier propose la projection d’un doc-reportage en quatre épisodes réalisé par les étudiants lors d’un séjour à Manchester à la recherche du lieu mythique « l’Hacienda » et une master class animée par le producteur Ben Vedren.

Ouverture à La Villa Rouge
Riche  affiche pour débuter sur des charbons ardent avec trois DJs français programmés ce soir à la Villa Rouge : Bambounou, Terence Fixmer et Aneta. A seulement 26 ans, Bambounou s’est rapidement imposé comme l’un des producteurs/DJs les plus prometteurs de la scène house et techno. Il a commis trois album sur le label berlinois 50WEAPONS évoluant d’une house fiévreuse à une techno précise et ultra contemporaine, n’oubliant pas d’y incorporer des sonorités break, garage, expérimental et ambient.

Terence donne lui dans l’Electronic Body Music (EBM), sous-genre de la musique industrielle. Il poursuit une carrière de producteur avec des sorties très remarquées notamment sur le label berlinois Ostgut.

Anetha est une jeune DJ productrice parisienne établie à Londres depuis peu. Adepte du vinyle only, oscillant entre dub, lignes acides et beats impénétrables, elle nous transporte dans une techno aussi envoûtante que raffinée. Nuit agitée en perspective…

JMDH

Source ; La Marseillaise 05/11/2016

Voir aussi : Rubrique Musique,rubrique FestivalDernier cri. État de la culture techno, rubrique Montpellier,

Lanegan fait long feu

Mark Lanegan étoile noire du rock us. photo dr

Mark Lanegan étoile noire du rock us. photo dr

 

Concert. La meilleure veine rock de Seattle débarque. Mark Lanegan ex-complice de Kurt Cobain lundi au Rockstore.

Le chanteur de Seattle Mark Lanegan est une étoile noire du rock américain. Il a successivement été membre de The Jury un band monté avec le Kurt Cobain le chanteur guitariste de Nirvana, de Screaming Trees qui éclusait en pratiquant une douce mélodie entre psyché et hard rock. Il a partagé la destinée des métallos Queens of the Stone Age avec qui il a cartonné au Royaume-Uni.

Lanegan est de ceux qui proclamèrent la liberté en alignant des accords brouillons mais avec l’énergie (innocente) qui soulève les foules. Il peut aussi vous subjuguer avec des ballades mortelles comme One Hundred Years, Bombed ou Strange Religion. PJ Harvey, fan de toujours apparaît à plusieurs reprises sur ses albums, récemment sur le titre Come to Me du LP Bubblegum.

« A mes débuts, on disait que je chantais comme Jim Morrison et que je lui ressemblais, maintenant on dit que je chante comme Tom Waits et que je lui ressemble. Ça s’appelle vieillir» lâche l’antihéros. Ne vous y fiez pas trop pour autant, car quand la bête se réveille ça devient fulgurant.

JMDH

Lundi 24 août au Rockstore à 20h prix des places  20 euros.

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Dimoné : « J’arrive à me trouver grotesque. »

Concert Rockstore nov 2014. Photo Marc Ginot

Concert Rockstore nov 2014. Photo Marc Ginot

Si c’était une couleur ? Le noir. Si c’était une paire de pompes ? Deux boots. Si c’était une figure du coin ? Dimoné, le rocker poète nourri à la contre-culture. Celles des hautes années du rock montpelliérain, OTH, les Shériffs, les Vierges… A l’époque il sévit à la basse dans Les Sulfateurs espagnols.

« J’étais dans la colonie. Acteur du collectif au coeur d’une énergie palpable dans la musique comme dans les mouvements sociaux étudiants. » Plutôt prudent face au rock français qui s’institutionnalise et la grande trahison de la gauche : « La politique est vouée à décevoir une part de moi qui est farouche. »

Évidemment la vie lui a joué des tours : « J’aimais le mythe du rocker mort à 27 ans mais quand c’est toi et que tu n’es pas mort, comment tu fais ?». Dimoné, difficile à saisir, impossible à fixer, fluctuant, et pourtant toujours Dimoné. Toujours la même métamorphose.

Prendre le risque

Dimoné a fait des expériences sociales diverses. Un père éducateur spécialisé, une mère au foyer : « je viens d’un milieu où on a l’idée qu’il faut travailler. Les métiers du spectacle m’ont accueilli. J’ai appris à monter des estrades pas à me trouver directement dessus

La compagnie de Dimoné est agréable, elle enrichit. Il est profond mais pas triste, prend le risque de vivre et aussi celui de mourir, joue avec cet éternel balancier. « J’ai entrepris la reconquête de mes tourments. Cela m’a ouvert le chemin sinueux des énigmes qui sont en moi maquillées de mystère. Pourquoi je porte la moustache ? Pourquoi cette barbe d’abeille ?», dit-il en se prenant une longue gorgée de bière.

Chez lui, imprudence et imprévu semblent avancer la main dans la main. Il fut un temps où on le voyait sur scène conjurer le temps en dansant, abdominaux à l’air. En novembre son concert au Rockstore tenait d’une autre facture. « J’ai coupé le fil de quelque chose. Je suis moins attaché à ma carcasse. Je n’ai pas le même désir de séduire. J’arrive à me trouver grotesque. »

L’oeuvre se révèle dans le temple du rock montpelliérain mêlant texte, musique, intimité avec le public. « Jouer à Montpellier c’est différent. Je ne fais pas le show parce que je pourrais être dans le public. » Reste le côté sacrificiel du moment de scène. « Il faut que tu correspondes à ce qu’on attend et que tu surprennes. Il faut accepter de se faire manger et manger, passer par la transpiration. Tu t’abîmes, paies de toi, tu disparais un peu à chaque fois. »

Dimoné bâtit sa légende malgré lui. Celle d’un artiste audacieux affrontant les défis de la vie et de son art qui débute par le texte. « D’abord le texte. Puis, quand le matériau mot est là, je le redistribue. L’auteur que j’ai été ventile en étant un peu irrévérencieux avec le texte. Pendant longtemps je pensais faire du rock-n-roll. Je sais aujourd’hui que je fais un métier. »

L’album Bien hommé mal femmé est à caler dans la platine. Dimoné s’exprime par son contraire et son complémentaire. « Ce n’est pas ce qu’on dit qui est intéressant, c’est de le dire.» Un filon en attendant que les dérives nous submergent.

Jean-Marie Dinh

Subchronique

Le bien nommé Dimoné malfamé

IMG_9496-e1413441499991Dimoné, le dandy fumeux, vient de sortir un nouvel album, Bien hommé mal femmée. Le plus souvent, on a l’impression que c’est à nous qu’il s’adresse, qu’il nous parle de conditions de vie connue, sans nous mettre au courant des tristes nouvelles du CAC 40, juste pour parler des choses du monde, en cachant sa peine. De ces choses on ne retient rien ou presque à la première écoute. Après sa voix nous appartient. Le corpus poétique de cet album aborde la question du genre, maintes observations y ont creusé d’invisibles et discrètes lacunes. Main négligente et genoux tremblant, naufrage du corpus dont l’existence se perçoit en creux. Photographie, presque de famille, transformée qui s’envisage comme une expérience de l’extrême, de lanceur de couteaux poussé aux limites de ses possibilités. Une vie d’artiste partagée où l’amour se meut dans les milieux artistiques, oscillant entre poésie, art littérature, théâtre et rock n roll. Reste le jeu de l’illusion. Comme il est illusoire de vouloir rattacher Dimoné à une école. Une forme de fascination, pour la naissance, l’apparition, l’évanouissement, l’incarnation de l’image pour être un objet du monde, quelque chose de noir mais aussi de lumineux.

Voir aussi : Rubrique Musique, rubrique Montpellier, rubrique Rencontre,

Rockstore: L’esprit vivant du rock hante cette salle

 
 

Bonne anniversaire par Jean-Marie Dinh

 

Tout le monde en parle. On célèbre ce soir à juste titre les 25 piges du Rockstore. Un lieu mythique et à la fois un panthéon vivant où se croisent les générations. L’événement est soutenu par la mairie devenue propriétaire  en 2009 (1).  Mais l’histoire de cette salle de  concert, qui figure aussi comme un haut lieu de la vie nocturne, est avant tout celle d’une salle privée.  Les journalistes Eric Delhaye et Jérémy Bernède ont pisté les traces légendaires en signant au Diable Vauvert un livre (2) sur l’esprit du lieu.

On y retrouve les plus chauds instants du rock que Montpellier a vécus en live et en couleur. Dès le début des années 80, le Grand Odéon (l’ancienne enseigne) figure comme une  étape incontournable des tournées rock. C’est l’air gothique du Rockstore. On y croise des monstres comme Iggy Pop, The Cramps, The Cure, Siouxsie, les Lords Of The Nex Church… Tandis que la scène locale se distingue en portant haut le fanion de la ville en pleine apogée du rock français avec des groupe comme OTH, les Vierges,  les Sherrifs ou Pascale Comelade.

Le vendredi 3 octobre 1986 voit l’ouverture du Rockstore, après le rachat du Grand Odéon par un quatuor d’aventuriers sans le sou. Mu par sa passion, l’intègre Philippe Winling, actuel cogérant de l’établissement avec  Stéphane Al-Mallak, demeure le dernier acteur de cette bande des quatre.

C’est en fouillant dans la  mémoire du lieu que l’on découvre à quel point il est lié à l’histoire sociale, politique et culturelle de Montpellier. Le Rockstore a participé à l’explosion des radios libres. Il s’est maintenu dans le paysage, sans vendre son âme, en se confrontant aux orientations des politiques locales. Il est toujours resté ouvert aux artistes locaux, et a su faire le tri, en s’adaptant à l’évolution des genres musicaux.

Les faits d’armes de l’équipe fondatrice sont désormais dans la légende. On peut librement imaginer qu’ils ont un soir eu cette idée déjantée d’incruster une Cadillac dans la façade comme on pose un poing sur le mur, la tête enfouie sous le bras après une soirée arrosée. C’est devenu l’emblème du temple du rock à Montpellier et ça l’est toujours !

(1) La salle fut maintenue au centre-ville en tant que lieu de diffusion dédié aux musiques actuelles. De quoi apaiser les milliers de pétitionnaires qui s’opposaient à son transfert vers Odysséum.

(2) : Rockstore, Aux éditions Diable Vauvert 25 euros

Une nouvelle page s’ouvre en accord majeur

Il y aura du monde ce soir au 20 de la rue de Verdun où fidèle à sa tradition anti-VIP, le Rockstore assure le lancement de l’événement avec une soirée entrée libre.  « On attend des vieilles figures », confie Philippe Winling. Il n’y aura pas de concert : « On ne voulait pas que les gens soient aspirés, on a privilégié les rencontres et les retrouvailles. » Cette célébration des 25 ans fait suite à la volonté de marquer un nouveau départ depuis le rachat des murs par la mairie. « La ville s’occupe de la mise aux normes de l’immeuble. Et nous laisse carte blanche pour l’exploitation. On fonctionne en bonne intelligence. Je pense que la municipalité reconnaît l’apport public de notre travail. D’ailleurs, depuis deux ans, elle n’est jamais intervenue. »

L’esprit de ce mariage de raison transparaît dans la plaquette qui livre le menu des festivités. « L’équipe municipale que je conduis a tenu à maintenir cette salle en centre-ville contre vents et marées à l’heure où d’autres avaient envisagé son déménagement à la périphérie. C’est un acte politique et culturel fort, un message clair à destination de la jeunesse montpelliéraine », réaffirme le maire Hélène Mandroux.

Dans le rôle de grand témoin  « historique » Philippe Winling relève le rôle majeur de Radio Alligator : « On a commencé à émettre en tant que radio pirate*. En 81, on était marié avec Midi Libre qui avait accepté de partir avec une radio rock avant de choisir le réseau NRJ. Quand on s’est retrouvés tout seuls, ça nous a poussés à imaginer un nouveau concept territorial. On a mis en adéquation la musique live et la population dans un rayon de 30 km. Les gens entendaient les groupes à la radio et venaient en concert. Cette expérience profitait aussi aux groupes qui pouvaient se faire entendre au-delà de la salle de concert. Ce modèle de proximité fait partie de l’identité du lieu. Il a perduré même après la radio. »

En 25 ans l’atmosphère du Rockstore a mué, en conservant ses valeurs. Sa vocation créatrice notamment en matière de  lien social est restée intacte. Il suffit de pousser les portes pour se sentir chez soi. Passé une certaine heure, les visiteurs noctambules victimes du couvre feux du centre-ville n’ont qu’à suivre le parcours de l’expo photos issue du livre anniversaire. Il les conduira à bon port,  de la rue Foch à la rue de Verdun, en passant par la rue de la Loge.

Côté programmation, l’affiche du mois d’octobre invite à prendre son agenda. On attend notamment Laurent Garnier le 6, les Britanniques d’US 3 le 15, le collectif australien  Architecture in Helsinki autour du fantasque Cameron Bird le 25, et  l’incontournable John Cale  le 30, qui signe aussi une autobiographie Au diable Vauvert (toujours eux). La météo pour finir qui nous assure que les travaux de la toiture seront terminés en 2011. Et annonce pour 2012, l’ouverture d’un autre grand chapitre puisque qu’il est question de s’attaquer à l’acoustique !

*L’encadrement légal des radios libres correspond à l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir en 1981.

Voir aussi : Rubrique Montpellier, rubrique Musique, On line le site du Rockstore,