Jean Joubert libre enfance

jean-joubertC’est un poète et un romancier discret dont l’exigence habite les paroles. Il combat pour une poésie ouverte, limpide et maîtrisée dans sa forme qui restitue l’émotion pleine. Avec une certaine prédilection pour exprimer la lumière de l’enfance et sa perte : Portrait.

La voix du grand poète Jean Joubert s’est éveillée à Châlette-sur-loing, près de Montargis en 1928. A vingt ans, il quitte son Guâtinais natal pour s’installer en Languedoc. Il réside aujourd’hui dans un village de l’arrière pays au Nord de Montpellier. On croise son élégance discrète dans certaines rencontres littéraires.  » C’est quelqu’un de très simple dans sa façon d’être, confie son amie de longue date, Annie Estève, qui assure la direction artistique de La Maison de la Poésie dans la région. « Jean Joubert a une profonde nostalgie de l’enfance que l’on retrouve dans sa façon d’être. Dans cette capacité de pouvoir espérer, de jouer, de regarder. Il aime transmettre à la jeunesse et il le fait avec une extrême bienveillance. C’est un homme lumineux et aussi très secret. Il ne fait pas partager ses chagrins, ses soucis. Cela il préfère le taire.

Fils unique d’une famille modeste. Jean Joubert grandit dans un univers d’agriculteurs et d’ouvriers.  » Je considère avoir eu une enfance heureuse. Ce qui est une vision paradoxale car j’ai connu la guerre à la fin de mon enfance. J’ai grandi dans un monde à la fois rural et urbain. » Cette juxtaposition d’univers semble avoir traversé le parcours de l’écrivain. « A Châlette, il y avait encore des troupeaux, et de l’autre côté de la rivière une zone industrielle, avec des usines comme St Gobain et d’autres. »

Son père travaillait dans l’usine anglaise de pneus Huchitson. « J’ai visité son lieu de travail pour la première fois en 1936. Il m’a fait entrer dans l’usine qui était alors occupée par les grévistes. Je me souviens de la visite des ateliers. J’ai découvert les conditions de travail très dures des ouvriers.? »

Faut-il voir là l’origine de son ancrage à gauche? Sans doute, mais l’influence de son oncle Georges, anarchiste pacifiste et sabotier de son métier n’y est pas non plus étrangère. « C’est à lui que je dois mon goût pour la littérature. J’ai reçu de son héritage les œuvres complètes de Zola que j’ai conservées. C’était un homme très convaincu qui avait toujours un livre dans les mains quand ce n’était pas un sabot. Il était marié à une institutrice qui refusait de faire chanter la Marseillaise à ses élèves. Toute ma famille se tenait loin de l’église. Un jour le curé du village a dit : Les Joubert, c’est une famille perdue. Cette formule m’est restée.  »

De l’enfance reste aussi la nature. La grande forêt de Montargis que lui fait découvrir son père.  » Papa m’a aussi initié au jardinage. J’ai toujours eu un jardin dont je me suis occupé. Sauf cette année. Ce qui n’est pas très bon signe. J’ai trop de chose à faire. » Jean Joubert ne s’attarde guère sur sa mère si ce n’est pour dire très sobrement : « Je l’ai au fond du cœur « . Dans le très bon numéro que vient de consacrer la revue Souffles* au poète, l’auteur Béatrice Libert remonte le fil. Elle relève quelques mots de Joubert écrits après la mort de sa mère :  » Comme tu m’as porté,/ en rêve je te porte/ vers des sommets de lumière et de neige « . Jean Joubert revient au cœur de son enfance, habité par les personnages et le « paysage d’eaux lentes et de brumes «  dans son beau roman Les Sabots rouges qui vient d’être réédité aux Editions de l’Ecluse.

Après de brillantes études de lettres, Jean Joubert se spécialise en littérature anglo-américaine et se met à l’écriture. Il poursuit parallèlement une carrière d’enseignant dans un lycée de Montpellier puis à l’Université Paul Valéry. En 1954, son premier recueil de poésie Les lignes de la main est couronné par le Prix Artaud de Rodez dont le jury est présidé par un certain Frédéric Jacques Temple. Au début des années 60, l’auteur s’attaque à l’art romanesque puis à la littérature jeunesse.  » Je suis plutôt un poète qui écrit des romans qu’un romancier qui s’adonne à la poésie « , précise-t-il. L’auteur dit son peu de goût pour la poésie hermétique.  » La poésie est un moment de perception, de réjouissance, un rêve communicable. Elle permet d’aller plus loin. Etant poète je considère que je suis à la fois un homme, une femme, un enfant, un adolescent, un vieillard, un oiseau…« 

Jean Joubert appartient à cette génération d’écrivains vrais et entiers. C’est un franc-tireur qui se refuse aux figures de style ou aux courants intellectuels du moment mais ouvre volontiers, comme le définissait Breton, « au poème qui cogne à la vitre ».

Jean-Marie Dinh

* Souffles revue de l’association des écrivains méditerranéens février 2010.

Bibliographie selective

Poésie Roman et Conte de Jean Joubert a découvrir

L’œuvre de Jean Joubert compte une centaine d’œuvres. En 1975, il obtient le Prix Renaudot pour l’Homme de sable.  » Cela ne m’est pas monté à la tête, mais cela m’a fait du bien, » souligne l’auteur. Parmi ses autres romans on retient : La forêt blanche, éditions Grasset 1969. Les Sabots rouges, éditions Grasset 1979 réédité chez l’Ecluse en 2007. Le lézard grec, Grasset, 1984. Mademoiselle Blanche, Grasset, 1990.

Parmi ces œuvres poétiques Cinquante toiles pour un espace blanc, éditions Grasset, 1987. Les vingt-cinq heures du jour, éditions Grasset Anthologie personnelle, éditions Actes Sud, 1997. Etat d’urgence : Poèmes, 1996/2008, Editions Editinter, 2008.

Littérature pour la jeunesse Hibou blanc et souris bleue, l’école des loisirs, 1978, Les enfants de Noé, un roman d’anticipation écologique prix de la Fondation de France du meilleur roman pour la jeunesse, l’école des loisirs, 1988.

Voir aussi : Rubrique Poésie, Quelques prévisions de veillées poétiques, Voix de la Méditerranée le contenu d’une union , L’espace des mots de Pierre Torreilles, Salah Stétié, Rubrique Rencontre Jean Joubert, Bernard Noël, Gabriel Monnet,

Bonnes gorgées d’Irlande pour rincer le monde

cunningham

Montpellier Danse 2010 Roaratorio. A partir d’un texte de Joyce, Cunningham crée une pièce dont la modernité éclatante résonne encore.

Avec cette pièce jouée pour la première fois en 1983, le géant de la danse contemporaine américaine, disparu l’année dernière, pénètre l’univers littéraire du roman Finnegan Wake de Joyce, pour en donner à entendre le paysage mental.

A propos de conscience, il s’avère peut-être utile de réaffirmer que la danse est un art où l’émotion prime sur la compréhension. Ce qui ne veut pas dire que la naissance du mouvement, condamné à une disparition immédiate, pourrait se passer pour autant, d’une conséquente période de gestation. « ?En posant ce signe d’égalité entre la pensée et la danse, Merce Cunningham m’a en quelque sorte, autorisé à faire le pont entre l’intellect et la danse?« , confie Jean-Paul Montanari dans le livre édité (Actes-Sud) à l’occasion de se trentième anniversaire.

L’esprit d’invention est au cœur de Roaratorio qui dépasse la simple transposition de l’œuvre littéraire pour incarner la langue au-delà du langage en usant du vecteur musical. La composition tient lieu de décor et, au-delà, matérialise proprement le rapport de la culture irlandaise au monde. Elle s’appuie sur une création de John Cage. Un magnifique festin de bruits recueillis en Irlande, de sons envoyés par toutes les radios du monde et d’éclats de mots.

Le réalisme et la qualité du mixage s’emparent de l’espace pour en bouleverser les normes. Dans un contexte nouveau, se déploie l’énergie transcendée des corps qui peuplent l’espace de leur humanité. C’est toute la vie quotidienne, sociale et populaire qui défile en accéléré et passe devant les yeux par vagues régulières. On est saisi par la vivacité constante des gestes, la magie animale, les mouvements d’ensemble dans les changements de direction. Comme si les regroupements et les séparations obéissaient à une présence invisible. L’impression aérienne d’une grande légèreté nous emporte. On a le sentiment que les pieds ne touchent plus le sol. La liberté apparente masque la rigueur technique et la maîtrise spatiale.

Avec Roaratorio, Cunningham pénètre une œuvre majeure de Joyce publiée quarante ans plus tôt. Cette exploration en profondeur en fait à plusieurs égards une référence du processus de création. Entre poésie et chaos cette pièce invente un monde nouveau. Elle a permis à l’artiste le redéploiement de l’invention chorégraphique, sa présentation près de trente ans plus tard en ouverture de Montpellier Danse paraît symbolique. Elle peut aussi faire écho aux ressources créatives inépuisables de la danse contemporaine à l’heure où d’aucun serait enclin à baisser les bras.

Jean-Marie Dinh

Lorsque plus rien ne sort de l’intuition, la proposition Cunningham ne manque ni d’habileté ni de mérite. N’est-ce point puiser dans le renouvellement de l’inconscient que d’ouvrir sur l’invisibilité d’un tout?? La pièce Roaratorio, présentée aux Ursulines par la Merce Cunningham compagny, c’est à peu près ça. Un tout danse qui rejoint le tout d’un festival célébré non sans ambages mais avec un certain désabusement pour son trentième printemps. De nature complexe, le spectacle d’ouverture s’avère régénérant et le pari du choix artistique apparaît une fois de plus réussi.

Voir aussi : Rubrique Danse festival 2010 Jiri Kylian, Akram Khan,

Khaled Al Khamissi données sur la conscience de la rue égyptienne.

"Le génie et l'humour font partie de notre culture".  Photo :David Maugendre

Khaled Al Khamissi est l’auteur de Taxi, un premier roman qui tisse un portrait sans concession du système politique égyptien à partir de 58 discussions avec les chauffeurs de taxi du Caire.

D’où vous est venue l’idée de ce livre ?

« En 2005, j’ai vu que la rue du Caire bouillonnait. Face à l’échec total du système politique, la colère montait et les manifestations, les émeutes, les grèves dans les usines se multipliaient. Cela m’a donné l’envie d’écrire un livre qui évoque cette singularité égyptienne à partir de ce qu’on entend dans la rue.

Pourquoi les chauffeurs de taxi ?

Parce que la rue est vraiment représentative d’une société et les chauffeurs y passent leur vie et partagent les difficultés des gens qui y vivent. Selon les chiffres, 58% de la population égyptienne vit en dessous du seuil de pauvreté. Je pense qu’en réalité c’est beaucoup plus. Dans le livre, il y a 58 personnages qui s’adressent à un passager. Du point de vue de la forme, j’ai privilégié le dialogue à la narration. On saisit la personnalité, y compris le physique des chauffeurs, à travers leurs propos.

Etes-vous allé sur le terrain pour puiser votre matière littéraire ?

Non. C’est le fruit de toute ma vie. Si un jour, maintenant tout de suite, je vous enferme dans une cellule et que je vous demande d’écrire sur un objet, les montres par exemple, il y aura toute votre vie dans vos écrits.

Les gens qui parlent sont en mouvement et ils décrivent un système totalement figé…

C’est un théâtre mouvant qui ouvre sur un espace à la fois public et privé. Le taxi est un lieu d’échange par excellence entre deux personnes qui ne se connaissent pas et qui ne se reverront jamais. La stagnation du système produit une ébullition. Tout cela présentait un intérêt dramatique. Et un intérêt sur la forme littéraire qui vient de la prose arabe. Dans les mille et une nuits, ce sont des nuits, dans mon livre ce sont des chapitres.

Vos personnages balayent une réalité sociale, politique, économique. Cette conscience reflète-elle vraiment celle de l’homme de la rue ?

C’est toute l’idée du livre. La majorité de la population porte chaque jour ce type de regard vis-à-vis des problématiques auxquelles elle se confronte. Le peuple égyptien est un peuple millénaire. Cette culture est omniprésente dans notre terre, notre âme, notre cerveau. Et elle s’exprime d’autant plus que le peuple est contraint à des problématiques de dictature depuis 20 000 ans. Il y a une réelle sagesse du peuple égyptien.

Une sagesse et un sens de l’humour hors du commun…

Le génie et l’humour font partie de notre culture. Ils circulent à travers la tradition orale depuis fort longtemps. On trouve des blagues sur les murs des temples antiques, on trouve des caricatures sur des papyrus vieux de plusieurs millénaires. Et on retrouve tout cela dans les rue du Caire.

Vous pointez une graduation sur l’échelle des contraintes. Une différence par exemple entre Sadate et Moubarak, qui ne respecte plus les citoyens ?

Je pense que nous sommes réellement à la fin d’un cycle, l’odeur de la fin d’une période est là. Toutes les possibilités réelles de survie sont arrêtées. On ne peut plus aller dans les pays du golf pour trouver du travail, ni en Irak, ni en Europe, ni aux Etats-Unis et l’échec interne d’un modèle de développement économique différencié fait qu’il n’y a plus d’offres d’emploi. La situation est bloquée. Le peuple égyptien attend un grand projet. »

recueilli par Jean-Marie Dinh

Né au Caire, Khaled Al Khamissi est producteur, réalisateur et journaliste. Diplômé de sciences politiques de l’université du Caire et de relations internationales de l’université de Paris- Sorbonne, il a publié en 2007 ce premier livre, devenu rapidement un best-seller et aussitôt traduit en plusieurs langues européennes. Son deuxième opus, Safînat Nûh (L’Arche de Noé), paraîtra au Caire à la fin de 2009.

Taxi, éditions Actes-sud 18,8 euros.

Taxi, éditions Actes-sud 18,8 euros.

Portant chacune sur un aspect particulier de la vie sociale, économique ou politique en Egypte, ces cinquante-huit conversations avec des chauffeurs de taxi du Caire composent un tableau fascinant de ce pays à un moment clé (avril 2005-mars 2006) du règne du président Hosni Moubarak – qui sollicitait alors un cinquième mandat. Tout y est, en effet : les difficultés quotidiennes de la grande majorité de la population, la corruption qui sévit à tous les échelons de l’administration, l’omniprésence et la brutalité des services de sécurité, le blocage du système politique, les humiliations sans fin que la population subit en silence, les ravages du capitalisme sauvage…

Consignés en dialecte égyptien avec un humour décapant et un admirable sens de la mise en scène, ces échanges librement reconstitués par l’auteur, sinon entièrement inventés par lui, relèvent à la fois de la création littéraire et de l’enquête de terrain. S’ils font connaître les griefs des “gens d’en bas”, ils laissent aussi entrevoir les raisons pour lesquelles le pouvoir en place tient bon malgré sa décrépitude et son impopularité.

C’est sans doute cette combinaison inédite de lucidité politique, de tendresse pour les plus faibles et d’humour qui explique la diffusion de Taxi, dans sa version originale, à plus de cent mille exemplaires.

Voir aussi : Rubrique cinema  Egypte foisonnante

A proximité d’une tempête intérieure

A trente trois ans Céline Curiol est certainement un des auteurs les plus prometteurs de sa génération. Photo DR

A trente trois ans Céline Curiol est certainement un des auteurs les plus prometteurs de sa génération. Photo DR

Avec Exil intermédiaire, Céline Curiol nous entraîne sur les terre intérieures de l’intimité féminine à travers l’histoire croisée de deux femmes. Deux femmes dont toutes les certitudes s’estompent. Très loin de la surface, des liens se défont pendant que d’autres se tissent sous le regard de leur entourage.

On passe d’une héroïne à l’autre,  chacune dispose d’une voix intérieure et extérieure. L’auteur laisse le soin au lecteur de choisir son angle dans ce cocktail impressionniste. Le rythme de l’écriture à la fois lent et violent explore les instants d’une mue qui s’opère avec force détails, presque en temps réel.

Le récit se nourrit d’un coté sombre et captivant où la déchéance redoutée nourrit la stimulation.  » Sur l’échelle de valeurs des gens honnêtes auxquels appartenait son mari, elle chuterait au-dessous du seuil tolérable.  » La conscience qui respire dans la langue, côtoie la spontanéité.

A trente trois ans, Céline Curiol est certainement un des auteurs les plus prometteurs de sa génération. Remarquée par Paul Auster à New York où elle a vécu dix ans, elle se laisse guider par un désir de confrontation auquel elle se livre avec exigence et sincérité.  » Comme l’ambiguïté devient pernicieuse lorsqu’elle est entretenue aux dépens de ceux que l’on est censé aimer ! « 

Conscient ou pas, l’exil a toujours pour corollaire le courage. Celui d’une femme qui après s’être amarrée à son mariage s’en détache, comme on se détache de New York  » où la régression est interdite « . Après y avoir vécu suffisamment pour le comprendre, l’écrivain vient de rejoindre Paris.

On retrouve dans ce quatrième livre le thème de la délivrance par l’écriture déjà présent dans son roman d’anticipation Permission. Miléna, jeune romancière, recherche courageusement une validité qui arrive comme une réponse impossible. Dans le triomphe de l’impuissance se niche un charme fragmenté.  » Elle songea à un ruisseau glougloutant, paisible, entre les pierres : le cours de son existence, pas la moindre lame d’émotion dont se servir comme un tremplin. D’ailleurs, qu’avait-elle fait de sa journée ? « 

Exil Intermédiaire s’inscrit comme un roman de transition géographique et personnel. Une sorte d’antidote au conformisme psychique, qui maintient en alerte.

Jean-Marie Dinh

Cette obscure pensée qui respire

PétalesLe titre Pétales coiffe le dernier recueil de courtes nouvelles de l’auteure mexicaine Guadalupe Nettel. Pétales, le mot semble exquis, fragile, respirable, tout à fait convenable à la pratique de la prose. C’est oublier que les pétales donnent parfois une sensation de fermeté lorsqu’ils caressent la paume de notre main ou tombent au hasard sur votre torse ou votre poitrine.

La nouvelle qui offre son titre au livre nous met en présence d’un jeune homme de vingt ans doté d’un sens olfactif hors du commun. Pour exploiter ce don, ou par timidité, le personnage a fait de son étonnante capacité une vocation qu’il exerce dans les toilettes des dames à la recherche de la fleur.

 » Je préférais découvrir les femmes dans le seul lieu où elles ne se sentaient pas observées : les toilettes. Ici, quand on a appris à décrypter, une simple trace liquide glissant sur la paroi blanche peut révéler une dépression nerveuse ou une contrariété récente. Il y avait toujours quelque chose à découvrir, une réaction nouvelle capable de déclencher en moi l’euphorie du novice… « 

Comme ses personnages, Guadalupe Nettel esquisse en six histoires embarrassantes, un inventaire furtif de ce qui nous échappe précisément parce que nous ne souhaitons pas les regarder. La force de ces injections légères touche autant l’objet érotique que les petites – ou grandes – lâchetés tapies au fond de nous.

Passée la porte des évidences, tout est possible. La puissance de l’écriture nous entraîne avec une déconcertante évidence sur les lieux de notre quotidien, au travail, dans un jardin botanique ou dans la vie domestique. Scrutant notre bien pensante débauche, l’auteur révèle la nature imparfaite avec les yeux voyeurs de l’enfance. Les traces et les odeurs nous conduisent de surprise en surprise. De celles qui vous transforment et auxquelles on ne peut que conseiller de s’abandonner.

Jean-Marie Dinh

guadalupe-nettel

Guadalupe Nettel est née à Mexico en 1973. Elle est l’auteur de trois recueils de nouvelles : Juegos de artificios, Les jours fossiles, Pétalos (2008) et d’un roman : L’hôte, publié simultanément aux éditions Anagrama et aux éditions Actes Sud en 2006.