La cosmologie Kiefer et autres éclats de perles

Anselm Kiefer. La Vie secrète des plantes

Anselm Kiefer. La Vie secrète des plantes

Collections
Durant l’été, la collection Lambert propose quatre expositions ambitieuses  qui investissent tous les champs de la scène artistique

Le musée d’art contemporain d’Avignon poursuit son partenariat avec de grandes collections privées et les institutions nationales et internationales.

Avec Je te pardonne, organisée avec l’Association Leila Alaoui et la Galleria Continua on retrouve le travail de la photographe et vidéaste marocaine Leila Alaoui décédée à l’âge de 34 ans lors des attaques terroristes de Ouagadougou. Une approche sensible et respectueuse des identités émane de ce travail que révèle sa série Les Marocains au travers desquelles l’artiste dresse le portrait majestueux des différentes communautés de son pays.

L’éclectique Collection Agnès B
Le Directeur de la collection, Éric Mézil a opéré une sélection parmi les oeuvres de la Collection agnès b accumulées sur trois décennies. Un voyage dans le temps,  qui évoque, l’amour, les rêveries, , le cinéma expérimental, l’adolescence, la modernité et l’ouverture. Ce parcours éclectique dessine un portrait en creux de la styliste mécène. Il révèle sa passion pour la musique, l’Afrique et les avant-gardistes avec des œuvres de Cheri Samba,  Seidou Kaïta ou Malik Sidibé, comme son goût certain pour franchir les frontières établies.

Keith Haring père du Street art
Autre grand moment, qui vaut à lui seul le déplacement, l’exposition consacrée à Keith Haring. A travers 30 peintures, dessins, objets et sculpture monumentale, est raconté le parcours fulgurants (1958-1986 de l’artiste précurseur du Street art américain. En résonance avec l’exposition au sous-sol où sont exposées des oeuvres de Jean-Michel Basquiat, Robert Mapplethorpe, Andy Wahrol et Patty Smith.

On vous conseil de finir la visite avec les dix toiles grand format de l’artiste Allemand d’Anselm Kiefer. L’exposition, La Vie secrète des plantes organisée dans le cadre du 40e anniversaire du Centre Pompidou, se prête en effet au moment contemplatif qui s’impose après les émotions multiples procurées par cette visite. Et rien ne serait mieux prétendre au rétablissement de notre perception pour affronter le monde, que la minutieuse et mystérieuse cosmologie Kiefer.

JMDH

Collection Lambert, 5, rue Violette, Avignon. Expositions ouvertes  tous les jours de 11h à 19h

Source La Marseillaise 12/08/2017

Voir aussi :   Rubrique Art, rubrique Exposition, Keith Haring parcours fulgurant,

L’art on the beat

2a06accffb9e8171d1a0f94eff864a5bLes œuvres néo-psychédéliques de Neal Fox assument gaiement l’imaginaire des drogues, comme expression d’une vie intense et artiste. Sous l’apparente naïveté de la fresque, dans laquelle se croisent Gainsbourg et Kerouac, s’élève un chant contre la paranoïa ambiante !

Face aux terroristes et aux bourreaux, à tous ceux qui ne rient pas, y compris les acharnés du pouvoir, l’exposition de Neal Fox est une bénédiction en faveur d’un art dionysiaque ! Une œuvre qui rend un hommage graphique aux troubadours de la beat generation, et à des personnages qui semblent sortir d’un film de Jarmusch.

La Galerie Suzanne Tarasiève propose jusqu’au 28 juillet la troisième exposition personnelle de Neal Fox. Empruntant son titre à un film policier américain de 1938 (réalisé par Michael Curtiz), Angels with Dirty Faces exploite la force de l’encre de Chine et du papier pour ressusciter les figures anthologiques de la contre-culture (musicale, artistique et littéraire).

Au milieu de ces figures iconiques et modernes résonne la voix de son grand-père, pilote britannique pendant la Seconde Guerre Mondiale qui en vint par la suite à écrire des romans de gare, à présenter des talk-shows et à fréquenter les bars de Soho, avec des artistes comme Francis Bacon. Bien que Neal Fox n’ait que très peu connu son grand-père, il semble avoir infuser tout l’héritage de sa créativité? et de sa gaité, qui se retrouvent dans ses narrations réalisées au pinceau.

Le travail de Neal Fox se distingue des formes d’art conceptuelles. Il est tout entier consacré au dessin à l’encre et à la culture contemporaine.

Avec cette nouvelle exposition, l’artiste fait appel à des figures d’icônes, d’Arthur Rimbaud à David Bowie, qui, à la manière d’anges ou d’archanges, prennent le rôle de gardiens spirituels ou de messagers.

En incorporant des forces poétiques puissantes et reconnaissables dans ses dessins, appartenant à des périodes différentes, l’intention de Neal Fox est de les inclure dans des conversations existentielles et de tracer des parallèles entre des mouvements artistiques et des auteurs.

L’art on the beat

Par exemple, La Décadanse (2017) figure Rimbaud en archange regardant par-dessus l’épaule de Jane Birkin et de Serge Gainsbourg (ce dernier faisait souvent référence au jeune poète dans l’écriture de ses chansons). Dans The Siesta (2017), le même poète se laisse aller à une sieste à demi-consciente avec Vincent van Gogh. Ils contemplent ensemble la nature, allongés sur le dos, recomposant ainsi Des glaneuses (1857) de Jean-François Millet, avec des yeux solitaires et hallucinés.

De tous les ingrédients jetés dans le mixeur culturel de Neal Fox, les poètes modernes et leur caractère visionnaire restent les plus importants. Dans l’ordre chronologique l’on trouve Rimbaud et Baudelaire, pionniers de l’utilisation de narcotiques et de l’alcool dans leur quête d’inspiration. Ils sont suivis par les poètes de la Beat Generation (Allen Ginsberg et Jack Kerouac entre autres), qui poursuivirent cette quête avec la forme en vers libre, un vocabulaire plus familier et des images empruntées à la culture contemporaine.

L’imaginaire des drogues

En découvrant cette exposition, on en vient à regretter cette époque de tolérance mutuelle entre folie et société qui caractérisa si joyeusement la période des années 60. Ces années au sortir de la guerre où l’homme accepta comme rarement cette part maudite de lui-même, en reconnaissant des droits à la folie, en assumant l’imaginaire des drogues comme autant d’ingrédients nécessaires d’une vie intense et artiste.

Bref, en sachant comme le disait Deleuze : « qu’on n’a jamais pensé que par elle et sur ses bords, et que tout ce qui fut bon et grand dans l’humanité entre et sort par elle, chez des gens prompts à se détruire eux-mêmes, et que plutôt la mort que la santé qu’on nous propose. »

À la vue des dessins psychédéliques de Neal Fox, on redécouvre incrédule la complicité de la folie avec cette vision humaniste, emblématique des sixties. Certains n’y verront qu’une forme de naïveté, pour le coup « béate ». Mais cette innocence n’est-elle pas préférable à l’esprit de paranoïa qui semble avoir pris le pas sur le monde !

Et, l’ivresse dionysiaque et la Divine folie qui parcourent les œuvres de Neal Fox, sont un contrepoint délicieux à une culture dans laquelle on dresse trop souvent une image aseptisée d’un art, consensuel, rassembleur, sensé, soporifique, qui prétendrait nous anesthésier, et nous soigner des affres de la vie !

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L’ange, Kerouac

En 1943, des médecins militaires aux États-Unis diagnostiquaient, à propos d’un jeune marin de 19 ans, un état de démence précoce et de tendances schizoïdes. A leurs yeux, il avait tout pour déplaire : « Il imagine des symphonies entières dans son esprit ; il peut entendre chaque note. Il voit des pages de mots imprimés. » Plus grave : il a quitté l’école soudainement, car « il pensait qu’il n’avait rien de plus à apprendre » et voulait être écrivain. Jean Louis Lebris de Kerouac serait sans doute aujourd’hui tombé sous le coup de la raison comportementaliste !

Non seulement pour des raisons « génétiques », mais aussi pour des raisons de troubles du comportement, Mozart ou Beethoven, Bowie enfants asociaux, auraient été sans doute réadaptés, à coup de psychothérapies comportementalistes ou de neuroleptiques.

 

Prompts à se détruire !

Dans cette galerie des prétendants au redressement universel, on aurait pu évidemment citer, Artaud, Paul Celan, internés et de plus suicidaire pour le second ! Et, enfin, pour les dépressifs notoires : l’écrivain américain F.S.Fitzgerald, et tous ces artistes américains du XX e siècle qui seront happés par le suicide, la folie, mais aussi plus spécifiquement par l’usage des drogues ou de l’alcool : Malcolm Lowry, Hemingway, Pollock, Warhol, Kerouac, les écrivains dits de la beat génération et la majorité des musiciens de jazz ou de rock.

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Prétendre apporter la santé, la sécurité, par des méthodes de dressage ou d’éradication qui réduisent le sujet à ses comportements ou pire à une caractéristique génétique, est une des préfigurations de l’eugénisme qui pourrait nous attendre ! Reconnaître, qu’il y aura toujours une partie de l’humanité qui échappera à cette normalisation, que l’on n’arrivera jamais à « l’homme parfait » qui ne fumera pas, ne se droguera pas, fera l’amour suivant les normes en vigueur et se soumettra sans broncher aux règles et aux conventions sociales, serait au contraire une forme de sagesse à méditer.

Comme l’écrit la psychanalyste, Elisabeth Roudinesco : « Nous vivons dans une société troublée par la mondialisation, l’évolution des normes morales et la perte des repères religieux et identitaires, une société de plus en plus puritaine, qui veut le risque zéro, qui poursuit les pédophiles mais autorise et valorise la pornographie. Il y a un vrai combat philosophique derrière tout cela : veut-on des individus soumis aux contraintes de l’efficacité économique et de l’hédonisme réduit à la question du corps ou bien des sujets lucides et autonomes, mais peut-être moins contrôlables ? »

Bowie, Bacon, Burroughs, Kerouac ; autant d’hommes prompts à se détruire pour dépasser les identités factices dans lesquelles nous sommes englués, pour expérimenter de nouvelles formes de vie. Au lieu d’éradiquer la vie, en accomplir tous les possibles !

Galerie Suzanne Tarasiève

Source Libération 12 /O7/2017

Voir aussi : Rubrique Arts, Abstraction la seconde école de Paris, Artistes méconnus de RDA, Cy Twombly tire un trait, rubrique Exposition,

Les voyages subtils et coupables de William Gedney

Kentucky, 1964 et 1972.  Photo William Gedney

Kentucky, 1964 et 1972. Photo William Gedney

Expo Photo
Après note sur l’asphalte, une Amérique mobile et précaire, l’exposition William Gedney prolonge la saison américaine du Pavillon Populaire avec une ouverture sur la photographie documentaire de 1955 à 1984. à découvrir jusqu’au 17 septembre
Montpellier

Au Pavillon Populaire, où l’accès est libre et gratuite, le directeur artistique Gilles Mora fait une nouvelle fois partager sa passion pour la photographie américaine avec l’exposition dédiée à William Gedney Only the Lonely 1955-1984. « Gedney, si semblable, si différent : seuls sont les solitaires », commente laconiquement le commissaire d’exposition, nous invitant à investiguer librement dans l’univers de l’artiste.

Cette œuvre peu connue, pourrait incarner la photographie américaine documentaire des années 1960 à 1989. En digne et modeste héritier de la Street Photographie qui émerge aux États-Unis à la fin des années 30, ce photographe sensible use toute sa carrière de la même technique. Déambulant dans les rues et les campagnes l’appareil toujours chargé en main, Gedney semble incarner un témoin fugitif, qui fixe en direct, capte en noir et blanc et restitue des images sur des petits formats qui laissent une large place à l’interprétation.

C’est la première rétrospective d’envergure consacrée à William Gedney après l’exposition au Moma Museum of Modern Art de New York. Le parcours transversal proposé à Montpellier a été réalisé à partir des archives de William Gedney, déposées à Durham au Royaume-Uni, la nature de leur classement, permet d’obtenir une vue globale de l’œuvre réalisée par Gedney.

L’artiste partage avec Walker Evans qu’il admirait, le désir de laisser une existence propre à ses sujets, et de mettre tout en œuvre pour le montrer avec une force du détail et une certaine neutralité de la mise scène. De même, il éprouve peu d’intérêt pour sa carrière, privilégiant l’esthétique et sa liberté personnelle dont une fange, celle de son homosexualité, fut vécue dans la clandestinité. L’œuvre subtile de Gedney ne donnera lieu à aucune publication ou exposition importante de son vivant.

Immersion dans les songes

En s’ouvrant sur la richesse de ses projets le parcours de l’exposition démontre l’importance de cet artiste qui puise son inspiration de la rue, de la nuit et l’adolescence. The Farm (1955-1959) semble traduire en quelques clichés cette phrase consignée dans un de ses carnets : « Chaque fait débouche inévitablement sur un mystère

Dans Brooklyn 1955-1979 Gedney poursuit la même démonstration dans un environnement urbain. On retrouve la sensation de stagnation qui semble habiter l’âme de l’artiste. Comme il aurait pu le faire avec la littérature, Gedney utilise la subjectivité du médium photographique comme une langue personnelle.

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Kentucky, 1964 et 1972. Photo William Gedney

Le travail remarquable sur le Kentucky 1964 et 1972, prend pour sujet principal la présence humaine, directe ou indirecte, dans des situations spontanées et dans des lieux autour de la maison ou près de véhicules qui permettraient de s’en éloigner mais qui demeurent sur place comme pour signifier un ailleurs concrètement inaccessible. William Gedney saisit le non dit de cette oppressante réalité, la manière dont elle influe, en captant les songes des personnages qui se trouvent devant lui.

Dans San Francisco 1965-1967  se profile le goût de la liberté et de l’amour, que Gedney capte avec souplesse laissant percevoir son attirance non ostentatoire pour les corps masculins. Le photographe  américain est un des seuls de son époque à s’intéresser à ce qui se passe à l’extérieur. Il étend son territoire photographique à l’Europe et à l’Inde poursuivant l’écriture d’une grande chorégraphie des corps et des âmes perdues.

JMDH

William Gedney

William Gedney

Source : La Marseillaise 24/07/2017

Voir aussi ;   Rubrique Artrubrique Photo rubrique Exposition, rubrique Montpellier,

Bacon Nauman, intense présence dans un stupéfiant face-à-face

Francis  Bacon  et Bruce Nauman, un face à face  sidérant au Musée Fabre de Montpellier

Francis Bacon et Bruce Nauman, un face à face sidérant au Musée Fabre de Montpellier

Exposition
A l’occasion des dix ans de la réouverture du musée Fabre et des 40 ans de la création du Centre Pompidou, Montpellier accueille un choc artistique inédit entre Françis Bacon et Bruce Nauman proposé par Cécile Debray en charge des Collections modernes du Centre national d’art parisien. A ne pas manquer à Montpellier du 1 juillet au 5 novembre.

Les œuvres de l’autodidacte irlandais Francis Bacon, marqué à ses débuts par le surréalisme, et celles de l’américain Bruce Nauman, inspirées par le mouvement Dada, dialoguent au Musée Fabre dans un espace parfaitement scénographié pour rendre compte de cette confrontation. Bien qu’issu de générations et de pratiques différentes, ce face-à-face fait sens. L’idée a surgi par hasard dans l’esprit de Cécile Debray alors qu’elle visitait une exposition à New York et s’est soudainement trouvée en présence d’une œuvre de chaque artiste.

« Cette confrontation permet de relire la peinture de Bacon, trop connu au niveau du marché de l’art à travers la vision de richissimes collectionneurs. Cela a pu lui faire perdre de sa radicalité, indique la commissaire qui vient d’être nommée à la direction du musée de l’Orangerie, la rencontre avec Bruce Nauman agit un peu comme une remise à niveau qui redonne à son oeuvre toute sa puissance. »

Force de la véhémence artistique

Bruce Nauman  Sans titre 1970 from studies from holograms. Photos dr

Bruce Nauman Sans titre 1970 from studies from holograms. Photos dr

Cette exposition de stature internationale devrait faire date. L’exercice périlleux pour mener le projet à terme a été conduit avec maîtrise et rigueur. La qualité du choix des œuvres, une soixantaine, issues de différents musées et de collections privées, et le remarquable travail réalisé sur l’interpénétration des expressions, des genres et des époques,  apparaissent comme les facteurs clés de cette réussite.

Francis Bacon était attaché aux références de la tradition picturale pour mieux les subvertir tandis que Nauman s’en débarrasse comme le montre son installation en ouverture du parcours. L’artiste qui s’enduit de peinture devant les caméras procède à une déconstruction de la peinture métaphorique en introduisant l’image visuelle comme médium et le corps comme langage.

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L’exposition démontre comment par des moyens distincts, les deux artistes conçoivent l’art comme une expérience. Bacon fit toujours figure d’indépendant dans la peinture contemporaine. Il a traité de sujets religieux sans aucune soumission à la représentation. Nauman évolue aussi en rupture avec le questionnement artistique de son époque privilégiant l’importance du processus créatif et la volonté artistique.

Le parcours est découpé en cinq sections qui explorent les pistes de dialogue entre les deux œuvres. Au-delà d’une fascination commune pour le corps et ses possibles déformations et transformations, le visiteur est amené à ressentir la force du cadre, voire de la cage, dont usent les deux artistes pour exprimer l’aliénation ou le non-sens de la condition humaine. La confrontation avec l’animalité chez Bacon trouve son pendant chez Nauman dans le goût développé chez l’américain pour l’anthropomorphisme.

De même son intérêt pour la fragmentation du geste – qui aurait pu faire pont avec l’hommage du Festival Montpellier Danse à Cunningham – flirte avec les corps mutilés de Bacon. La piste de la rotation suggérant l’idée de répétition est aussi de circonstance  dans le rapprochement opéré entre les deux artistes.

La confrontation de ces deux parcours  renouvelle en profondeur le regard porté sur ces deux grands artistes du XXe siècle qui chacun à leur manière  questionne la dualité entre nature et culture.

Jean-Marie Dinh

Source La Marseillaise 29/06/2017

Voir aussi :   Rubrique Art, rubrique Exposition, rubrique Montpellier,

Les visions gravées et renouvelées de l’estampe

La Gravure de Rembrandt.  Photo dr

La Gravure de Rembrandt. Photo dr

 

Impressions fortes, l’estampe en 100 chefs-d’œuvre, l’exposition d’été du Musée de Lodève se glisse sur les pas de l’étonnante histoire de cet art multiple, outil de savoir et de connaissance, ancêtre de la photographie et véritables œuvres d’art. à découvrir au Cellier des évêques du 8 juillet au 5 novembre.

Fascinant projet autour des plus grands artistes du genre que celui de l’exposition Impressions fortes proposée par le Musée de Lodève qui présente du 8 juillet au 5 novembre une collection exceptionnelle de gravures ; appartenant à la Fondation suisse William Cuendet et Atelier de Saint Prex. L’invitation entreprend ni plus ni moins de bouleverser le rapport du spectateur à la gravure en fournissant un panel quasi complet de toutes les techniques de la gravure d’hier et d’aujourd’hui. Le terme  estampe définit l’image obtenue par différents procédés de reproduction à l’aide d’une matrice, ainsi que ces procédés eux-mêmes. On revient avec cette exposition aux formes vives de l’Estampe à partir de 100 chefs-d’oeuvre faisant appel à la pensée effervescente de  ses grands maîtres : Dürer, Rembrandt, Goya, Degas, Morandi, Bonnard,Vuillard…

Fondée en 1977, par les héritiers de William Cuendet, pasteur et collectionneur invétéré d’estampes, et les membres de l’atelier de gravure de Saint-Prex, la fondation compte 10?000 œuvres du 15e au 21e siècle. Le noyau initial est constitué de 53 planches de Rembrandt et 117 planches de  Dürer, auxquelles sont venues s’ajouter une bonne partie de l’oeuvre gravée de Corot et de nombreux autres dons d’oeuvres du 17e au 21 e siècle. Sont ainsi réunis les chefs-d’oeuvre qui font référence et une production en court, réalisée par de jeunes artistes soucieux de s’inscrire dans l’histoire de l’art.

La double vie des gravures
La dimension thématique de l’exposition élargit le point de vue à l’ensemble de cet art en prenant en compte la double vie de la gravure. « La gravure entretient d’un côté un lien étroit avec le développement du livre et contribue à l’élargissement des connaissances. De l’autre elle s’inscrit dans une dimension artistique pure avec des paysages, portraits et scènes intimes, indique Ivonne Papin Drastik la directrice du musée, qui assure le commissariat de l’exposition avec  Florian Rodari, l’histoire de l’estampe abordée dans l’exposition recoupe l’histoire de l’imprimerie. Avec la lithographie qui émerge au début du 19e siècle les images circulent en Europe en colportant savoirs et styles

Le parcours de l’exposition se divise en 7 sections thématiques. Dans la partie L’estampe au service du livre. On pourra découvrir les images de Dürer et de Rembrandt, en relation avec les textes de la bible qui expliquent la passion développée par le pasteur Cuendet, La partie Le Vedutisme et Venise, montre bien en quoi l’estampe a joué en faveur des connaissances aussi bien scientifiques que géographiques.

L’estampe acquiert une valeur propre au sein du monde de l’art. Elle a tout de suite été pratiquée par de grands artistes désireux non seulement de diffuser largement leurs oeuvres mais également d’explorer les ressources particulières à ce médium original comme le met en lumière la partie Recherches techniques et le travail exceptionnel de Claude Mellan, ou le volet Intimité qui témoigne de l’attrait prononcé pour les scènes de genre, par des artistes comme Degas, Toulouse-Lautrec ou Fantin-Latour.

Cette exposition s’inscrit comme une introduction à la découverte de mille horizons techniques historiques et esthétiques.

JMDH

Source La Marseillaise 03/06/2017