Après l’appartement, la coûteuse rénovation du bureau de Thierry Lepaon

4517793_3_829d_thierry-lepaon-le-7-avril-a-paris_946901e42571ab1bd64ef6fcd5c83df1Il y a un « corbeau » qui s’active à la CGT contre le secrétaire général, Thierry Lepaon. Dans son édition du 26 novembre, Le Canard enchaîné révèle le devis du montant des travaux, effectués en début d’année dans le bureau de plus de 50 m2 du patron de la centrale : 62 179,44 euros, dont 21 588 pour le renouvellement complet du mobilier.

Le 4 novembre, lorsqu’il s’était expliqué, sans convaincre, devant le comité confédéral national (CCN) sur le devis des travaux de son logement de fonction (105 000 euros), M. Lepaon avait évoqué, sans précision, ceux réalisés dans son bureau et ceux du secrétariat général. Mardi, ces révélations sont survenues alors que la commission exécutive de la CGT était réunie. M. Lepaon a assuré que depuis plus de quinze ans il n’y avait pas eu de travaux dans les locaux qui lui sont attribués.

Ce nouveau coup dur pour M. Lepaon, déjà très affaibli, intervient une semaine avant les élections, le 4 décembre, dans les fonctions publiques. Dans une brève déclaration, la CGT réfute les « prétendues révélations » du Canard, ajoutant qu’elle « s’emploie actuellement à faire toute la lumière sur les dysfonctionnements concernant le montant et l’engagement des dépenses de la confédération ». Et elle met en avant « des travaux de mise aux normes handicapés du complexe » de Montreuil. Mais ce texte n’a pas été adopté, comme lors des précédentes révélations, par l’ensemble du bureau confédéral, quatre de ses dix membres – Eric Aubin, Sophie Binet, Valérie Lesage et Mohammed Oussedik – ayant proposé des modifications qui n’ont pas été retenues.

« IL EST STOÏQUE »

Pour les syndiqués de base, cette nouvelle pilule va être dure à avaler, ce devis de près de 62 000 euros représentant 43 fois le montant d’un smic mensuel brut (1 445 euros). « Il y a beaucoup de cartes qui volent actuellement, raconte un dirigeant, sous couvert d’anonymat, et cela a évidemment un impact sur les élections dans les entreprises. » Alors que M. Lepaon avait refusé la création d’une commission du CCN pour examiner les dépenses de la confédération depuis son élection, en mars 2013, laissant opérer la seule commission financière de contrôle et chargeant lourdement Eric Lafont, le trésorier confédéral, ces nouvelles révélations accroissent la suspicion sur ce qu’il pourrait avoir encore à cacher.

A ceux qui l’approchent, M. Lepaon donne l’impression de n’être ni inquiet ni trop affecté. « Tout cela semble glisser sur lui comme si ça ne le perturbait pas, observe un responsable confédéral. Il est stoïque. » Mais, ajoute-t-il, « je crains qu’il y ait d’autres choses qui arrivent derrière ces révélations ». M. Lepaon, qui a reçu individuellement, comme il l’avait annoncé, les neuf autres membres de son bureau confédéral, pour faire plier les « rebelles » – sans résultat –, devra attendre le CCN de février pour y faire entrer deux fidèles. Mais cette réunion du parlement cégétiste s’annonce déjà à hauts risques. Pour l’heure, le trône du patron de la CGT est de plus en plus fissuré.

Michel Noblecourt

Source Le Monde 26/11/2014

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La « mauvaise passe » de la CGT s’annonce durable

Par Michel Noblecourt

Commentant la crise que traverse la CGT à propos du devis des travaux de l’appartement de fonction de Thierry Lepaon, Bernard Thibault a estimé, mercredi 5 novembre sur Europe 1, que la centrale traverse « une mauvaise passe« . Dans l’Humanité du 7 novembre, l’ancien secrétaire général de la CGT, aujourd’hui membre du conseil d’administration de l’Organisation internationale du travail (OIT), revient sur cet « épisode« , comme l’écrit le quotidien communiste : « Je fais confiance, déclare-t-il, à tous ceux qui sont élus pour trouver les réponses adaptées à la situation. Nous devons conserver une CGT unie, avec toutes ses forces. Le pire serait de rajouter à cet environnement hostile aux salariés, au syndicalisme, une division ou des déchirures au sein de la CGT. Il faut trouver les modalités pour agir dans l’unité la plus large déjà au sein de la CGT« . L’utilisation du pluriel quand il parle de « ceux qui sont élus » sans citer le nom de son successeur fait dire aux opposants à Thierry Lepaon que « Thibault l’a lâché« .

Il faut dire que le comité confédéral national (CCN) qui a débattu les 4 et 5 novembre de « l’affaire Lepaon » s’est terminé dans la plus grande confusion, ce qui accrédite l’idée que cette « mauvaise passe » va être durable. La confédération a diffusé, au soir du 5 novembre, « une déclaration des organisations de la CGT dont les principes ont été votés à l’issue du CCN« . Ce texte dénonce « une campagne de dénigrement visant toute la CGT, à travers les attaques dont fait l’objet notre secrétaire général, auquel nous réaffirmons notre solidarité et notre confiance« . Le seul problème est que la réunion du parlement de la centrale s’est terminée dans le plus grand désordre et… qu’il n’y a eu aucun vote.

« Lepaon  a refusé toutes les propositions des fédérations et des unions départementales qui lui auraient offert une sortie de crise« , raconte un dirigeant. Il a rejeté l’idée que la lettre qu’il compte adresser à tous les adhérents de la CGT émane du CCN (alors que ce sont ses membres qui disposent des fichiers). Il a fait de même avec la demande de création d’une commission du parlement cégétiste qui aurait réalisé un audit des dépenses de la confédération depuis le début de son mandat pour en rendre compte à un CCN extraordinaire. Il a enfin rejeté la proposition d »élargir la commission financière de contrôle à des membres du CCN. Le texte diffusé par la confédération indique seulement que les différentes instances « vont travailler ensemble pour que cette situation ne se reproduise pas ».

« S’il avait accepté nos propositions, commente un frondeur, il aurait obtenu un vote à une large majorité ou à l’unanimité. Mais Thierry est incapable d’écouter et d’entendre une assemblée. Il s’est mis les trois quarts du CCN à dos« . « Je ne me l’explique pas, ajoute-t-il, si ce n’est qu’il a des choses à cacher. Cela ne fait que rajouter à la suspicion ». Durement critiqué par Thierry Lepaon, Eric Lafont, le trésorier confédéral, « commence à se lâcher« , selon une source. Selon une autre source, « il se raconte à Montreuil qu’ils étaient trois à avoir accès au coffre fort de la comptabilité où était rangé le fameux devis: Thierry Lepaon, Eric Lafont et Michel Doneddu« , l’ancien trésorier confédéral. Les mêmes rappellent que, lors du congrès de Toulouse, en mars 2013, Michel Doneddu militait pour être remplacé non par Eric Lafont mais par Philippe Lattaud, aujourd’hui membre du bureau confédéral. Autant dire qu’en interne les règlements de compte ne font que commencer…

Alors qu’une commission exécutive est prévue le 12 novembre, Thierry Lepaon doit recevoir dans les prochains jours chacun des dix membres du bureau confédéral pour, selon sa formule, « s’assurer de leur engagement et adhésion à l’esprit d’équipe« . Sont dans le collimateur les quatre « frondeurs » qui ont refusé de voter « la note interne » diffusée le 29 octobre en réplique aux informations du Canard enchaîné: Eric Aubin, Sophie Binet, Valérie Lesage et Mohammed Oussedik. Seront-ils sommés de se soumettre sous peine d’être démis? « Pour virer un membre du bureau confédéral, explique un dirigeant, il faut qu’il repasse par le CCN. Il en est de même pour les deux membres supplémentaires qu’il envisage de nommer« . Or la prochaine réunion du parlement cégétiste est programmée en février. En attendant, Thierry Lepaon sort encore plus affaibli par cet « épisode« .

Source : Blog Michel Noblecourt 07/11/2014

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