Portugal: des militaires dans la rue pour dénoncer l’austérité

Des militaires portugais défilent contre l'austérité à Lisbonne le 15 mars 2014 (AFP, Patricia de Melo Moreira)

De Brigitte HAGEMANN (AFP)

Lisbonne — Plusieurs milliers de militaires portugais en civil ont manifesté samedi contre les mesures d’austérité du gouvernement de centre droit, signe d’un malaise croissant à l’approche du 40ème anniversaire de la Révolution des Oeillets du 25 avril.

Entre 4.000 et 5.000 manifestants, selon les organisateurs, ont défilé derrière des banderoles dénonçant « l’humiliation » des militaires et des tentatives de « démantèlement des forces armées ».

Le cortège a démarré au son de la chanson « E depois do Adeus » (et après les adieux) de Paulo de Carvalho. Elle avait donné le signal de départ de la Révolution menée en 1974 par des militaires qui ont renversé la dictature salazariste.

« Les militaires sont sereins, mais pas soumis. Ils ne sont assujettis à la volonté de personne », a averti Antonio Lima Coelho, président de l’Association nationale des sergents (ANS) des Forces armées, dans un discours très critique envers le gouvernement.

« Vive la démocratie, vive la Constitution », a-t-il lancé à la foule rassemblée devant le Parlement, avant d’entonner solennellement l’hymne national.

D’autres manifestants ont chanté « Grândola Vila Morena », l’hymne de la Révolution des Oeillets qui retentit fréquemment dans des manifestations anti-austérité au Portugal.

Plusieurs anciens « capitaines d’avril » ont fait le déplacement: « j’ai fait la guerre coloniale, j’ai fait le 25 avril, et maintenant je me retrouve dans une nouvelle dictature, celle de Merkel et des marchés », s’est lamenté l’un d’entre eux, le colonel Sidonio, 72 ans.

Les manifestants agitaient des drapeaux noirs pour attirer l’attention sur la « réalité dramatique » vécue, selon eux, par de nombreux militaires qui n’arrivent plus à faire face aux dépenses familiales.

« La situation des militaires se détériore de jour en jour. Ils sont toujours plus nombreux à ne plus pouvoir payer leur loyer, financer l’éducation de leurs enfants ou rembourser leurs prêts », a commenté à l’AFP Manuel Pereira Cracel, président de l’Association des officiers des forces armées (AOFA).

Après presque 40 ans de service, ce colonel a vu son salaire baisser à 1.800 euros nets par mois, soit 700 euros de moins qu’en 2010, avant le début du programme de rigueur au Portugal.

– ‘Absence d’espoir’ –

« C’est une atteinte à notre dignité. Les hommes politiques d’aujourd’hui sont totalement insensibles à notre sort », a-t-il poursuivi.

Ce mécontentement est également palpable dans les rangs des forces de l’ordre. Plus de 15.000 policiers en colère, selon les organisateurs, avaient manifesté le 7 mars à Lisbonne, dans un climat de grande tension qui tranche avec le calme affiché par les militaires.

« Les militaires sont tenus à une certaine réserve, ils n’ont pas l’habitude de manifester dans la rue », a expliqué le colonel Pereira Cracel.

En contrepartie d’un prêt international de 78 milliards d’euros accordé en mai 2011, le Portugal applique une sévère cure de rigueur budgétaire, qui s’est traduite par des coupes draconiennes dans les salaires et retraites des fonctionnaires, dont plusieurs milliers ont encore manifesté vendredi.

« Rendez-moi mon salaire! », « gouvernement dehors! », pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les militaires.

Mario Ramos, un sergent âgé de 50 ans, a vu son salaire fondre de 1.400 euros nets en 2010 à 1.100 euros cette année. « Comment voulez-vous que je paie avec cela les frais universitaires pour mes filles, soit 2.400 euros par an? », se désole-t-il.

Les militaires se sentent particulièrement lésés par les réductions d’effectifs et des réductions jugées « brutales » dans leurs revenus qui entament leur motivation et leur capacité à remplir leur mission.

Peut-on imaginer une nouvelle révolte, à l’approche des commémorations de la Révolution du 25 avril?

« Les révolutions ne s’annoncent pas, elles se font », a répondu, laconique, le colonel Pereira Cracel. Avant de se dire « préoccupé par l’état d’esprit des militaires, caractérisé par l’indignation et l’absence d’espoir ».

Voir aussi : Rubrique UE, un rapport accablant sur l’activité de la troïka, rubrique Portugal, rubrique Société, Mouvements sociaux,

GB: nouvelle envolée du chômage chez les jeunes, plus de 20% sans emploi

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Le taux de chômage a atteint un nouveau record chez les jeunes Britanniques, grimpant à 20,5%, contre un taux resté globalement stable à 7,9% pour l’ensemble de la population, selon des statistiques officielles publiées le 16 février. Le nombre de chômeurs au sens du Bureau international du travail (BIT) a progressé de 44.000 sur les trois mois achevés en décembre par rapport aux trois mois achevés en novembre, pour s’établir à 2,49 millions, a indiqué l’Office des statistiques nationales (ONS).

Le taux d’ensemble est néanmoins resté le même, à 7,9%. Les 16-24 ans ont été les plus frappés, représentant à eux seuls 66.000 nouveaux inscrits et 965.000 chômeurs au total, un nouveau record depuis le début de la compilation de ces statistiques en 1992. Plus d’un jeune sur cinq (20,5%) sur le marché du travail se trouve désormais sans emploi.

Le chômage des femmes a quant à lui atteint un record depuis 1997.

L’évolution du chômage est scrutée avec une attention particulière alors que les coupes budgétaires sans précédent décidées par le gouvernement britannique commencent seulement à faire sentir leurs effets. Selon des prévisions officielles, le plan d’austérité du gouvernement du Premier ministre conservateur David Cameron devrait entraîner la disparition de 330.000 emplois publics sur quatre ans.

Les chiffres publiés mercredi ont conforté les analystes dans leur attente d’une hausse continue du chômage en 2011.  Insistant comme ses confrères sur l’envolée du chômage des 16-24 ans, Howard Archer, de IHS Global Insight, a souligné « l’inquiétude sur la situation des jeunes dont beaucoup seront sans travail pendant longtemps » étant donnée la situation de l’économie.


AFP

Voir aussi : Rubrique Grande Bretagne, Les britanniques à l’heure du travail forcé, Rubrique UE, La crise de la zone euro, mode d’emploi,