Pacific 231 de Arthur Honegger

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Vie artistique sous l’occupation

Si Pacifique 231 est composée entre les deux guerre (1923) j’ai choisit d’évoquer le contexte de la vie artistique sous l’occupation parce que cette période et intéressante. Elle touche et stimule le compositeur et concerne aussi mon travail sur Jean Anouilh.

Hormis quelques intellectuels, qui prennent les armes tous les acteurs du champ culturel traverse une période spéciale entre 1940 et 1944 parce que la France souffre, de l’oppression nazie, parce qu’il y a la censure du gouvernement de Vichy et aussi, qu’une partie du public portait l’uniforme allemand.

L’auteur Guégan qui à examiner l’attitude des artistes sous l’Occupation – parle d’une zone de liberté dans laquelle s’engouffrent les créateurs comme le public, car elle entretient une forme de respect de soi. La culture serait une forme de résistance qui aura contribué à la libération des esprits et du pays. » dit-il.

Les nazis laissent se développer à Paris une vie artistique, alors qu’à Berlin ils brûlent les livres et l’art dégénéré.

Certain livre interdit sont diffusés clandestinement comme Le Silence de la mer de Vercors, et le poème Liberté de Eluard. Dans la peinture, Matisse s’est retiré à Nice, Picasso se mouille peu. Les artistes et intellectuels juifs connaissent un sort dramatique. On spolie les juifs de leur collections d’art.

Bio résumée

Né de parents zurichois, Honegger acheva sa formation à Paris. Il est marqué par une éducation protestante et est très attaché au renouveau de la musique classique. Il a beaucoup composé car il désirais illustrer à travers sa musique les transformations de la société.

Honegger écrit pour le théâtre, la radio et le cinéma aussi bien que pour la salle de concert : ballets, chansons, concertos, musique de chambre, musiques de films, opéras, oratorios, symphonies.

 

En 1921, il connaît le succès avec le Roi David. Son œuvre la plus célèbre, créée en 1923, est Pacific 231, premier de trois mouvements symphoniques et dédiée à la locomotive à vapeur du même nom. Il existe deux autres mouvements qui sont liés à Pacific 231 et qui s’intitulent Rugby et Mouvement symphonique no 3.

Durant la guerre, Honegger refuse de quitter Paris, et réagit à la dégradation de la situation internationale en écrivant et composant, ses mouvements évoquent la mort, le deuil, puis la libération. C’est pendant cette période qu’il vie notamment de commandes pour musique de film.

Il a fréquenté Paul Claudel, Paul Valéry (écrivains), Jean Cocteau, Pablo Picasso (peinture), Louis Jouvet (théâtre), Abel Gance (Cinéma) et certains lui ont fourni des sujets pour ses œuvres.

 

Entre classicisme et modernité

Porté par la volonté de renouveau qui caractérise le monde de la musique à son époque, Honegger n’abandonne pas pour autant les compositeurs classique qui l’ont inspirés.

Le compositeur voue un culte à Bach (1685-1750) et à Beethoven(1770-1827), cultivant volontiers les grandes formes classiques, son écriture, d’un lyrisme vigoureux et tend vers un dramatisme (qu’on retrouve particulièrement dans ses oratorios comme Jeanne au Bûcher).

Le succès est immédiat et se renouvelle notamment parce que le compositeur s’efforce d’être accessible à l’homme de la rue en intéressant aussi le musicien.

« Il me parais indispensable, pour aller de l’avant, d’être solidement attaché à ce qui nous précède. Il ne faut pas rompre le lien de la tradition musicale. Une branche séparée du tronc meurt vite » répondra t-il à Cocteau qui lui reprochait son attachement à la tradition.

Il est en même temps très influencé par Igor Stravinsky l’un des compositeurs les plus influents dans la modernité musicale du XXe siècle

 

L’artiste adhèrera au Groupe des Six*( Georges Auric, Louis Durey, Darius Milhaud, Francis Poulenc et Germaine Tailleferre), un groupement de musiciens aux styles divers. Parrainée par Jean Cocteau et Erik Satie, elle prôna un retour à la musique légère, simple ou même comique. Le choix esthétiques du groupe des six reflétaient le désir de sortir du wagnérisme et de l’impressionnisme de Debussy.

Plus généralement, cet après-guerre est l’époque du rejet, dans l’art et la littérature, de certains styles trop raffiné ou luxuriants, en usage jusque-là. Dans ces Années folles, la simplicité, parfois proche de l’art populaire ou du cabaret, s’impose facilement, parallèlement à l’apparition du surréalisme (mouvement au cinéma, en littérature et arts plastique exemple Dali qui critique la bourgeoisie).

Très indépendant, Honegger reste étranger aux principes du mouvement et ennemi de tout système aussi bien de Schoenberg de toute autre école comme la musique sérielle (langage musicale qui révolutionne l’écriture 12 sons).

Le style de Honegger

 

Arthur Honegger est un compositeur qui, paraît difficile à cerner à cause de la diversité de son œuvre. Il utilise tous les registres, du quatuor à cordes à l’opéra, et respectant autant les acquis du passé que les apports de ses contemporains. Toute sa vie, il a été marqué par des compositeurs allemands (Beethoven, Bach) mais aussi français (Debussy), ce qui contribue à situer son œuvre en marge des courants musicaux. Si l’on peut lui attribuer un style personnel, il n’est en revanche d’aucune école estimant les systèmes de classification trop stricts en musique.

Il est à la recherche d’une musique authentique, capable de porter un message et veut se renouveler à chaque œuvre, il a exploré différents genres et techniques en s’intéressant tout autant à l’harmonie de Debussy, à la rythmique de Stravinsky, à la forme beethovenienne, aux innovations de Schönberg et même à la musique électronique.

La diversité de la musique d’Honegger reflète sa volonté de faire de la musique un moyen d’expression à démarche humaniste. L’apparente simplicité de certains passages de sa musique doit être examinée dans le sens de l’objectivité.

Il cherche à émouvoir, avec des œuvres religieuses, ce qui explique le succès de Jeanne d’Arc au bûcher entre autres. Il a aidé les compositeurs des générations suivantes tels qu’Olivier Messiaen.

 

Un goût pour le cinéma

En 1923, Arthur Honegger compose ses premières partitions pour le cinéma. Il signe la musique de La roue d’Abel Gance puis Napoléon.

Honegger cherche à traduire les impressions que lui procurent le film.

Il écrit la bande originale de 37 films, dont Crime et châtiment (1935), après sa mort Jean-Luc Godard utilise ses partitions pour Détective (1984) et Maurice Pialat pour Van Gogh (1991).

 

Pacific 231

 

La partition fut composée en 1923 et créée à Paris en 1924.

Circonstances de composition et de diffusion :

L’œuvre a longtemps été la plus célèbre de Honegger. Le titre fait allusion à une locomotive à vapeur, la « Pacific » qui fit la renommée des chemins de fer français.

A propos de ce poème symphonique* en un mouvement, Honegger déclare :

« J’ai toujours aimé passionnément les locomotives ; pour moi, ce sont des êtres vivants Je n’ai pas cherché l’imitation des bruits de la locomotive, mais la traduction d’une impression visuelle et physique. La construction musicale part de la contemplation objective : respiration de la machine au repos, l’effort du démarrage, l’accroissement progressif de la vitesse pour aboutir à l’état lyrique, au train de 300 tonnes lancé en pleine nuit à 120 à l’heure… J’ai voulu donner le sentiment d’une accélération mathématique du rythme, tandis que le mouvement lui-même se ralentit ».

Pacific 231 est une œuvre très personnelle mais la fascination pour les machines et la mécanique se propageait dans les arts, la musique et le cinéma. En 1922 sortit le film dAbel Gance, La Roue, qui est à l’origine du projet Pacific 231.

La technologie prise comme contenu de l’œuvre rappelle les conceptions développées par les Futuristes italiens,(L’Art des Bruits, 1913)*, auxquels les usines, les trains, les avions et les machines modernes servirent de modèles .

L’ambition de transposer artistiquement l’ère des machines résonna d’un large écho. Ainsi la musique mécaniste fut-elle valorisée, à une certaine période, en concordance avec la glorification de l’industrialisation et Honegger connu un commun succès dans les deux blocs de la guerre Froide.

 

Analyse de l’œuvre

L’orchestre symphonique utilisé par Honegger est important en taille.

Honegger résume son style

« Mes préoccupations générales sont restées les mêmes que celles qui présidèrent à la composition de toutes mes œuvres symphoniques :

  • Rigueur de la forme
  • Recherche de thèmes suffisamment claires pour attirer l’attention de l’auditeur et lui permettre de suivre le développement de l’histoire
  • « Si cette œuvre exprime ou fait ressentir des émotions, c’est qu’elles se sont présentées tout naturellement, puisque je n’exprime ma pensée qu’en musique, et peut-être sans en être absolument conscient. »

 Sapho Dinh

Source : Exposé Mai 2013

FILM Jen Mitry Arthur Honegger

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Miro : Des libres racines aux constellations

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Exposition.  Miro «Vers l’infiniment libre et l’infiniment grand » Le Musée Paul Valéry à Sète nous ouvre les portes de l’univers onirique de l’artiste. A découvrir jusqu’au 9 novembre.

 Miro au Musée Paul Valéry, s’avère une escale incontournable pour tous ceux qui rêvent de croissance ou trouvent notre vie corseté un peu terne. Ceux qui ont déjà fait la visite savent que le titre de cette exposition : Vers l’infiniment libre vers l’infiniment grand, s’avère particulièrement bien choisi.  « L’exposition met en évidence l’extrême liberté de l’artiste sur les plans de l’esthétique, de son regard sur les guerres qui, en Espagne et en Europe, ont traversé son époque, de la représentation de la femme, et son aspiration à introduire dans ses oeuvres une cosmologie personnelle spontanément liée à l’immensité des espaces célestes.» commente la directrice du Musée Maïté Vallès-Bled.

C’est au milieu des années vingt que Miro qui travaille à Paris, trouve un style personnel. Sous l’influence des surréalistes, il donne vie à un monde d’irréalité, univers oniriques peuplés d’étranges créatures tout en développant la poétique d’un langage pictural novateur et initiateur. L’artiste conservera son indépendance d’esprit à l’écart des surréalistes. Ce qui ne l’empêche pas  d’entretenir des liens amicaux avec Delnos, Eluard, ou Péret et  une relation cordiale avec Breton qui lui concède que sa production « atteste d’une liberté qui n’a pas été dépassée

Joan-mirc peinture de 1952. Photo : Blog en revenant de l'expo

Joan-mirc peinture de 1952.

Le parcours de l’exposition est construit avec un louable soucis , celui du respect de la démarche artistique. Il démontre en l’occurrence que ce que cherche Miro est plus important que ce qu’il trouve. Une manière de réaffirmer que l’art n’est pas une histoire de circulation d’objet d’art mais bien une aventure profonde.

Le visiteur suit ainsi la quête esthétique et intérieure de Miro. Face aux oeuvres on saisit rapidement que l’artiste a dépassé la recherche plastique, plus de perspectives, de profondeur et de claire obscure.Les dimensions réelles n’ont plus cours, l’artiste s’exprime dans un langage plastique qui lui appartient. Il suffit de se laisser prendre au jeu de la narration pour nous retrouver entraînés au coeur de la poésie et de la joie.

L’infini dans l’art

Nous nous trouvons face à des formes simples dépouillées et identifiables « Les formes s’engendrent en se transformant » disait l’artiste.  Les lignes sont pures et les boules presque rondes. Avec un sens des volumes fascinant, Miro créé un univers de signes et de symboles. L’artiste affirme autant son aptitude à produire des formes que sa capacité incroyable d’en sortir. On touche là à la dimension spirituelle de l’artiste.

« Si nous ne tâchons pas de découvrir l’essence religieuse, le sens magique des choses, nous ne ferons qu’ajouter de nouvelles sources d’abrutissement à celles qui sont offertes aujourd’hui aux peuples, sans compter », écrit-il dans Cahiers d’art en 1939.

Quand la forme sort de la forme,  elle devient un sens transmis à autrui, une énergie de naissance, une force.

Oiseau dans la nuit 1967

Oiseau dans la nuit 1967

Miro révolté

Miro sait que l’art n’est pas la vie et que celle-ci impose de franchir des obstacles. Son travail ouvre des voies à la beauté et à son contraire, la menace. Les positions politiques de l’artiste transparaissent silencieusement à travers des références aux tonalités sombres que l’on retrouve dans son oeuvre, face à la Guerre civile espagnole, ou encore mai 1968. Il s’est réfugié à Paris en 1936. C’est un homme courtois mais loin d’être insensible.

Un jour, que Franco faisait exécuter un révolutionnaire et Miro était en train de peindre en écoutant la radio, il raconte avoir baissé son pantalon pour déféquer sur sa toile et s’exclamer «quelle belle matière».

Sur un autre chemin, celui de la liberté apparaît une représentation de la relation homme/femme. « La femme n’échappe pas au rejet général de Miro pour la conventions qui régissent la représentation de la figure humaine. souligne Stéphane Tarroux. « Ce que j’appelle femme, ce n’est pas la créature femme, c’est un univers » précise l’artiste. Dans une belle scénographie, l’exposition présente une dizaine de toiles interdépendantes réalisées à plusieurs mois d’intervalle de la série femme et oiseau.

Quitter la terre

Vipère exaspérée devant l'oiseau rouge 1955

Vipère exaspérée devant l’oiseau rouge 1955

Le goût prononcé du peintre espagnol pour l’esthétique le convie à une interrogation de l’infiniment grand des constellation. Des années 1939-1941 au composition des années 70 l’artiste fait un triomphe au Comos et à l’admirable nature. « Cette échelle de l’évasion qui est souvent mise en valeur dans mon oeuvre représente une envolée vers l’infini, vers le ciel en quittant la terre.»

Cet axe également présenté au Musée Paul Valéry confirme son éloignement de toute représentation de la réalité visible. Aux antipodes du descriptif et de la matériologie Miro nous rappelle que l’art n’est jamais l’objet que l’on a devant les yeux. L’invisible est partout, son oeuvre est une porte d’entrée que l’on traverse pour aller vers d’autres espaces un passage vers l’expérience non visible.

Jean-Marie Dinh

Source : La Marseillaise 25/08/2014

Photo : Blog en revenant de l’expo

Voir aussi : Rubrique Art, rubrique Exposition, rubrique Espagne,