En se défaussant sur la préfecture de police, la présidence ne convainc pas. On attendrait de François Hollande qu’il assume un acte de cette importance.
Y’a-t-il un pilote dans l’avion ? Ou plutôt qui est-il ? Alors que la préfecture de police de Paris, fait historique, a interdit ce mercredi matin la manif syndicale de jeudi contre la loi travail – reprenant mot pour mot l’argumentaire de Matignon –, voilà que l’Elysée fait savoir en pleine tempête qu’il ne s’agit pas d’un «arbitrage» du chef de l’Etat mais d’«une décision de gestion opérationnelle de l’ordre public». Et l’entourage du président de la République de rappeler qu’il «appartient aux autorités préfectorales de décider». Courage, fuyons, alors que même la CFDT a dénoncé ce choix radical qui heurte de plein fouet la liberté de manifester !
Cette irresponsabilité présidentielle revendiquée ne convainc pas et même inquiète, alors que ce bras de fer ultra sensible et 100% politique est forcément remonté jusqu’au Château. L’inverse serait pour le moins incongru. Plutôt que de s’abriter derrière une décision technique, on attendrait de François Hollande qu’il assume un acte de cette importance. On aurait surtout aimé qu’il contraigne son Premier ministre à trouver une issue, sur le mode «je décide et il exécute», refrain entonné en son temps par Chirac contre Sarkozy – il est vrai sans succès. En l’espèce, Hollande se comporte davantage comme Emmanuel Macron, lorsque celui-ci s’est abrité, dans une affaire de moindre importance, derrière la «faute» de sa femme après la publication de photos privées et de propos polémiques dans Paris Match.
Si ce mercredi, les tirs contre cette (nouvelle) offense faite à la gauche se concentrent sur Manuel «coup de menton» Valls, qui a pesé de tout son poids en faveur de l’interdiction, l’Elysée semble faire le pari qu’il est possible de s’extraire de la polémique pour passer entre les gouttes. Une stratégie petit bras qui ne peut profiter au chef de l’Etat. Et une faiblesse qui n’augure rien de bon alors que, jeudi, l’interdiction de manifester sera forcément bravée. Et pas qu’un peu.
Jonathan Bouchet-Petersen Chef de service France @BouchetPetersen