Biélorussie : Le régime de Loukachenko contesté

Le régime de Loukachenko contesté

En Biélorussie, le président Alexandre Loukachenko a réuni 79,7 pour cent des suffrages aux élections présidentielles, d’après des sources étatiques. Des dizaines de milliers de manifestants à Minsk qui l’accusaient de fraude électorale ont été violemment dispersés par la police. Pour la presse, l’Ouest doit intervenir plus durement contre la dictature, même si l’on suit une politique incohérente à l’égard de Moscou.

Rzeczpospolita – Pologne

L’Occident doit s’opposer à Loukachenko

L’Ouest doit enfin intervenir contre la dictature biélorusse et soutenir les aspirations de liberté des citoyens, demande le quotidien conservateur Rzeczpospolita : « Comment réagir aux résultats officiels ? Doit-on revenir aux sanctions contre le gouvernement biélorusse ou interdire à ses dignitaires de se rendre à l’Ouest ? Ou empêcher Loukachenko de se rendre dans les Alpes [où il va faire du ski] et chez Berlusconi. Comment réagir à la répression du candidat de l’opposition Vladimir Neklaïev ? C’est simple, en opposant une forte critique et l’indignation. Il faut toutefois éviter de prendre des mesures radicales sous l’emprise des émotions. … L’Ouest doit se demander sérieusement s’il ne doit pas tourner le dos à Loukachenko. Mais il ne doit en aucun cas tourner le dos aux Biélorusses. Le pays n’est pas encore perdu pour le monde occidental. » (20.12.2010)

Sme – Slovaquie

Minsk ressemble à Moscou

Il est évident que la Biélorussie est une dictature, estime le quotidien libéral Sme, mais elle n’est pas la seule en Europe : « Dans des pays où les informations sont exclusivement unilatérales et où les peurs sont viscérales, il n’est pas nécessaire de falsifier complètement les résultats. … A l’Ouest, on aime à dire que le régime de Loukachenko est la dernière dictature en Europe, alors que cela est faux et même injuste. … Les analystes ne risquent pas grand-chose en pronostiquant la victoire de Vladimir Poutine aux prochaines élections en Russie. Les différences entre Poutine et Loukachenko sont plutôt formelles. Lorsque l’Europe parle de la dernière dictature européenne, elle le fait pour ne pas devoir admettre qu’elle coopère allègrement avec des régimes de la trempe de Loukachenko. » (20.12.2010)

La Repubblica – Italie

Une fraude électorale évidente

La victoire électorale du président sortant Alexandre Loukachenko en Biélorussie repose manifestement sur une fraude électorale, constate le quotidien de centre-gauche La Repubblica : « Le dernier dictateur européen reste au pouvoir grâce aux matraques et aux lacrymogènes de ses forces de l’ordre. La police occupe les rues de Minsk de façon militaire afin d’étouffer la contestation désespérée de l’opposition. … Les protestations déjà annoncées au préalable condamnent le résultat d’un scrutin que les observateurs internationaux auront du mal à qualifier de légitime et de régulier. Dans la semaine précédant l’élection a été introduite l’initiative étrange du ‘vote anticipé’ ; celle-ci a contraint les citoyens, avant l’ouverture officielle des bureaux de vote le jour J, à remettre leurs voix dans des urnes spéciales dont le contrôle a échappé aux observateurs. L’appareil étatique a œuvré sans relâche pour réunir des centaines de milliers de bulletins de vote, en contraignant les autorités municipales et provinciales à opérer ce vote anticipé. » (20.12.2010)

Source : euro/topics

Commentaire : En novembre 1995, lors d’une interview accordée à un quotidien allemand Handelsblatt, Loukachenko rend ainsi hommage à Adolf Hitler :

alexandre-loukachenko« L’histoire de l’Allemagne est d’une manière ou d’une autre une copie de l’histoire de la Biélorussie sur certains points. Au moment où l’Allemagne s’est relevée grâce à de solides ouvriers. Tout ce qui est lié à Adolf Hitler n’est pas mauvais. Rappelez-vous sa politique en Allemagne. L’autorité allemande s’était accrue pendant des siècles. Sous Hitler, ce processus a atteint son point culminant. C’est parfaitement en conformité avec notre vision d’une république présidentielle et du rôle de son président. Je veux souligner qu’un homme ne peut pas être tout noir ou tout blanc. Il y a des côtés positifs aussi. L’Allemagne est sortie des ruines par le passé avec l’aide d’une force présidentielle forte. L’Allemagne s’éleva grâce à cette force, grâce au fait que toute la nation était unie autour de son chef. Aujourd’hui, nous passons par une période semblable, quand nous devons nous unir autour d’une personne ou un groupe de personnes afin de survivre, tenir le coup, et rester droit dans nos bottes… »


Voir aussi : Rubrique Roumanie Mircea Cartarescu sur la chute de la dictature, rubrique Hongrie Les médias sous contrôle, rubrique Russie Avis de haine sur Moscou et les grandes villes,

Kourmanbek Bakiev : « Aucun pouvoir ne peut m’arrêter »

 Bakiev Kourmanbek mercredi 21 avril, à Minsk.

Le président déchu du Kirghizistan, Kourmanbek Bakiev, réfugié en Biélorussie, a affirmé mercredi 21 avril être toujours le chef d’Etat de ce pays stratégique d’Asie centrale. Le gouvernement kirghize intérimaire réclame pour sa part l’extradition de ce « criminel » et de ce « sadique ».

Arrivé sous bonne escorte au siège de la Communauté des Etats indépendants (ex-URSS moins les Etats baltes et la Géorgie), à Minsk, sa terre d’exil, Kourmanbek Bakiev a lu un communiqué dans lequel il s’est posé en dirigeant de son pays. « Moi, Kourmanbek Bakiev, je suis le président élu du Kirghizistan et reconnu par la communauté internationale. Je ne reconnais pas ma démission. J’ai été élu président (…) et aucun pouvoir ne peut m’arrêter. Seule la mort peut m’arrêter. »

« DES BANDITS TENTENT DE S’EMPARER DU POUVOIR »

Kourmanbek Bakiev a été renversé au début du mois par un soulèvement populaire sanglant à Bichkek, la capitale du Kirghizistan, à l’issue duquel l’opposition s’est emparée du pouvoir. Il s’était envolé le 15 avril du Kirghizistan pour le Kazakhstan voisin, remettant sa démission après des négociations coordonnées par la Russie et les Etats-Unis, les deux puissances qui disposent de bases militaires sur le sol kirghiz. Puis il a rejoint la Biélorussie, lundi 19 avril.

M. Bakiev n’a pas mâché ses mots à l’égard du gouvernement intérimaire, formé à la suite des affrontements sanglants du 7 avril entre manifestants de l’opposition et policiers, qui ont fait quatre-vingt-cinq morts. « Tout le monde doit savoir que les bandits qui tentent de s’emparer du pouvoir sont les exécutants d’une force extérieure et n’ont aucune légitimité », a-t-il lancé, sans pour autant préciser ses accusations sur l’identité de la puissance étrangère.

LE POIDS DE LA RUSSIE

Certains analystes estiment que la Russie soutenait en sous-main l’opposition à M. Bakiev, ce dernier étant revenu sur une promesse de fermer la base aérienne américaine, près de Bichkek, qui est essentielle au déploiement des troupes en Afghanistan. Moscou s’est d’ailleurs empressé d’établir des relations avec le gouvernement provisoire, débloquant une aide financière de 50 millions de dollars, sous forme de crédit et de don à cette ancienne république soviétique au bord de la ruine.

Les autorités kirghizes, qui accusent M. Bakiev de corruption, de népotisme, et d’avoir approuvé l’usage des armes contre les manifestants de l’opposition, ont pour leur part prévenu qu’elles allaient demander l’extradition du président déchu. « Tous ceux qui ont souffert pensent qu’il ne peut y avoir de refuge nulle part au monde pour ce sadique. Ce criminel doit être extradé vers notre pays », a ainsi lancé mardi la chef du gouvernement provisoire, Rosa Otounbaïeva, s’adressant à des journalistes.

Le Monde fr et AFP 21/04/10

Manifestation contre la corruption du régime du président Kourmanbek Bakiev

Quelque 3 000 partisans de l’opposition du Kirghizistan ont manifesté mercredi 17 mars à Bichkek pour protester contre la corruption du régime du président Kourmanbek Bakiev et les pressions dont sont victimes les médias indépendants et opposants, a constaté sur place une journaliste de l’AFP.

Les manifestants brandissaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Bakiev, cesse de voler ton peuple » ou encore « Liberté pour Ismaïl Issakov« , un ex-ministre de la défense passé à l’opposition et condamné en janvier à huit ans de prison. Les protestataires ont aussi crié des slogans de soutien à la radio en langue kirghize de Radio Free Europe/Radio Liberty (RFE/RL), qui est privée d’antenne depuis plusieurs jours. « Il faut créer des organes parallèles à ceux du pouvoir et avoir pour but de prendre le pouvoir », a déclaré devant les manifestants Omourbek Tekebaïev, un des dirigeants de l’opposition.

Kourmanbek Bakiev est arrivé au pouvoir en mars 2005 à l’issue d’une révolution émaillée de violences, promettant de démocratiser le Kirghizistan. Mais depuis, la plupart de ses compagnons de route ont rejoint l’opposition, accusant le président de corruption et de dérive autoritaire. Les militants des droits de l’homme sont de plus en plus critiques du régime, notamment en raison de la multiplication des attaques contre les journalistes et des poursuites judiciaires contre les opposants.

AFP 17/03/10


Le coup d’Etat au Kirghizistan montre la tragédie de l’Asie centrale

Après de violents affrontements, l’opposition a renversé le gouvernement au Kirghizistan. C’est le signe général de la mauvaise gestion et de la répression dans les pays d’Asie centrale que sont le Kirghizistan, l’Ouzbékistan, le Turkménistan, le Tadjikistan et le Kazakhstan, estime le quotidien The Times : « Les cinq pays, qui formaient autrefois le bas ventre musulman prospère et relativement stable de l’Union soviétique, affichent depuis leur indépendance un bilan misérable : régimes autoritaires, stagnation économique, violations des droits de l’homme et instabilité. … L’Asie centrale est une région immense, stratégiquement importante et potentiellement très riche. Les cinq nations disposent d’énormes ressources, très demandées en Chine, leur voisin oriental, et dans le sous-continent. Aucune d’entre elles n’a pourtant compris qu’un minimum de bonne gestion, de cohésion sociale et de tolérance politique sont nécessaires afin d’attirer les investissements étrangers. Le Kirghizistan est seulement l’exemple le plus récent de cette tragédie post-soviétique. »

The Time 08/04/10

Voir aussi : Rubrique Asie centrale: Bichkek promet une enquête sur le déclenchement des violence au Kirghizistan, Kirghizistan l’armée mobilisée,