Le nouveau directeur évoque les conditions de sa nomination à la tête du festival du Printemps des comédiens et le projet artistique de la 25e édition du 1er juin au 1er juillet.
A 44 ans, le comédien issu du conservatoire de Montpellier et créateur de SortieOuest, Jean Varela est le nouveau directeur du Printemps des Comédiens. Retour sur les conditions de sa nomination après le départ précipité de son fondateur Daniel Bedos. Et levée de rideau sur les enjeux futurs de la manifestation qui se tiendra du 1er juin au 1er juillet prochain à Montpellier.
Peut-on revenir sur la feuille de route que vous a confié le Conseil général en vous nommant à la direction du Printemps après le départ précipité de Daniel Bedos ?
« J’ai été sollicité en septembre par la voie de Jacques Atlan en accord avec Jean-Claude Carrière qui préside l’association pour assurer l’édition 2011. Je suis le directeur de sortieOuest créée pour rééquilibrer l’offre culturelle en faveur de l’Ouest du département donc j’étais déjà un bras séculier de l’action culturelle du Conseil général.
Vous avez demandé un court délais de réflexion que vous est-il passé par la tête à ce moment ?
Quand on vous fait ce type de proposition c’est très angoissant. Que faire ? Comment faire ? On se dit j’y vais, j’y vais pas… Et en même temps cela fait plaisir, je l’ai vécu comme une reconnaissance de mon travail à SortieOuest, mission que je souhaitais poursuivre.
Avez-vous négocié ?
Il n’était pas question de négocier, vu que le Conseil-général m’a tendu la main le jour où je me suis fait licencier par le Maire de Sérignan alors que je venais lui présenter ma saison. Cela fait partie de notre profession de prendre des engagements et de relever des défis. Il fallait essayer de maintenir la manifestation dans un temps difficile avec les incertitudes liées à la réforme des collectivités territoriales tout en bénéficiant d’un soutien politique. J’ai accepté cette mission qui prend fin au 1er juillet prochain.
Entreteniez-vous des relations avec le fondateur du Printemps des comédiens ?
C’est un ami. Je ne pensais pas que Daniel quitte le navire si vite. Je sortais du Conservatoire de Montpellier quand il a créé le Printemps des Comédiens il y a plus de 25 ans. Avec Daniel Bedos, on partage la même géographie héraultaise, autour de Pézenas notamment, la ville de Molière.
Le Conseil général semble manifester la volonté de poursuivre le festival. Ce qui laisse présager que votre contrat pourrait être reconduit. Comment trouver un nouveau souffle après 25 ans d’existence ?
Je suis entré dans mes nouvelles fonctions en novembre dernier. On apprend à marcher en marchant. La réponse à cette question ne se trouve pas dans l’édition 2011. En arrivant à Montpellier j’ai trouvé une équipe enthousiaste et ouverte sur l’avenir sans idée préconçue.
Les préoccupations politiques que vous avez évoquées se traduisent-elles par une baisse du budget* en 2011 ?
L’Etat nous a annoncé via la DRAC un retrait de l’ordre de 60 000 euros. Pour le reste on est à peu près sur la même base que l’année précédente.
Vous qui êtes artiste comment concevez-vous le rôle d’un programmateur culturel ?
Il faut rassembler le public autour d’un projet artistique, faire une proposition de programmation et tenter d’en donner les clés. Pour l’édition 2011 du Printemps des Comédiens, j’ai prévu entre 15 et 20 présentations du programme dans le département. Je vais aller à la rencontre du public. J’essaie de défendre le service public en créant du lien. La façon dont on conçoit les saisons fait évoluer le public. Le public actuel de SortieOuest n’est pas le même que celui de la Cigalière en 2003. Nous avons grandi ensemble. Une confiance commence à naître entre la direction artistique et le public. Les gens viennent voir un spectacle qu’ils ne connaissent pas. Ils se déplacent parce qu’ils savent qu’ils peuvent y trouver quelque chose. Cela implique un travail sur la durée qui peut s’évaporer très vite. C’est pour cela qu’il faut sauver les institutions.
Comment avez-vous abordé la programmation du 25e Printemps des Comédiens ?
Ce n’est pas la même chose qu’à SortieOuest. Là-bas nous avons creusé un sillon pied à pied, ici le bateau est en marche et cette édition présente un enjeu particulier. Par ailleurs beaucoup de choses diffèrent : la géographie, l’offre culturelle, la population… L’objectif n’est pas de transformer mais de mener le festival à bon port.
L’identité forte de la manifestation est en partie liée à la composition de son public et notamment à la déambulation que Daniel Bedos avait mis au cœur de la programmation et qui représentait 30% des entrées. Comment prenez-vous cette problématique en charge ?
En effet, il a fallu répondre à ce questionnement du 18h/20h et des cultures du monde autour duquel était construit le festival. Après un temps de réflexion, il nous a semblé que le moment était venu de passer à autre chose. Je ne suis pas Daniel Bedos. Le nouveau projet artistique souhaite redonner au théâtre une place importante. Est-ce qu’un festival de théâtre peut trouver sa place ? Nous pensons qu’une exigence artistique plurielle et populaire, peut ouvrir de nouvelles perspectives.
Quelles seront les grandes lignes de la programmation 2011 ?
La programmation qui a été conçue dans l’urgence fera place à des metteurs en scène qui jalonnent notre histoire de spectateurs. Georges Lavaudant qui vient présenter sa Tempête, un hommage à deux pièces de Shakespeare, Peter Brook, pour une libre adaptation de La Flûte enchantée. Il y aura aussi des personnalités plus jeunes comme Dorian Rossel, ou Dag Jeanneret. Richard Mitou monte Les règles du savoir vivre de Lagarce en déambulation festive. On pourra assister à des spectacles où le théâtre croise d’autres disciplines artistiques, la musique, le cirque… Un travail sur la figure du clown avec le retour de Pierre Etaix, le grand clown russe Slava Polinin et Pierre Rigal qui développe des images drôles sur le rapport du musicien et de son instrument. Cette édition propose un large éventail du théâtre d’aujourd’hui. Le festival est dédié à Gabriel Monnet qui représente les grand idéaux de la décentralisation du théâtre public. »
Recueilli par Jean-Marie Dinh
* Le budget du Printemps 2010 était de l’ordre de 2,2 M d’euros.
Voir aussi : Rubrique Théâtre, rubrique Festival, Printemps des Comédiens 2010 une Orageuse réussite , Connaisseur en la chose, Rubrique Politique culturelle, Politique cuturelle 34, Crise : l’effet domino,