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Le dossier portait essentiellement sur une vente d’armes à l’Angola dans les années 1990, pour un montant 790 millions de dollars, gagés sur les recettes futures du pétrole de ce pays d’Afrique australe alors en guerre civile. L’enquête, conduite par le juge Philippe Courroye, avait considéré cette vente illicite et débusqué une série de bénéficiaires des énormes bénéfices. Une quarantaine de personnes avaient comparu en première instance, une vingtaine en appel.
Pierre Falcone ainsi que son partenaire, le Franco-israélien d’origine russe Arcadi Gaydamak, 59 ans, avaient été condamnés à six ans ferme le 27 octobre 2009. En fuite, Gaydamak avait échappé à la prison, mais Falcone était immédiatement écroué. L’enquête avait aussi épinglé Charles Pasqua, pour trafic d’influence et recel d’abus de biens sociaux dans un volet connexe: il lui était reproché d’avoir reçu 230.000 euros en échange de l’attribution à Gaydamak de l’ordre du Mérite. Sanction du tribunal pour l’ancien ministre de l’Intérieur: trois ans de prison dont un ferme.
Au procès en appel, du 19 janvier au 3 mars, Pierre Falcone a bataillé pour faire valoir qu’il n’y avait pas eu de commerce « illicite », mais une opération menée sur « mandat » du gouvernement légitime angolais du président Dos Santos, confronté à une rébellion (l’Unita) condamnée par l’ONU.
Le parquet n’avait pas été convaincu, requérant des peines voisines de celles de première instance. Mais pour la cour, « il a été démontré tant par l’Etat (angolais) lui-même que par les actes accomplis, que MM. Falcone et Gaydamak ont agi au nom et pour le compte de l’Angola ». Dès lors, la fourniture d’armes à Luanda « ne relève que du droit international et (est) soustraite à l’appréciation des tribunaux français ».
En revanche, la cour a considéré que Pierre Falcone était bien « l’auteur de nombreux abus de biens sociaux » et l’a condamné à deux ans et demi ferme. Sa peine ayant été purgée, avec deux séjours en prison durant l’instruction et sa détention depuis 2009, la cour a donc constaté qu’il n’y avait plus « lieu à maintien en détention ».
Contre Arcadi Gaydamak, elle n’a retenu que la fraude fiscale et le blanchiment et l’a condamné à trois ans de prison ferme. Des amendes de 375.000 euros ont été infligées aux deux hommes. Quant à Charles Pasqua, il sort blanchi après avoir accusé la classe dirigeante de l’époque, dont Jacques Chirac et Alain Juppé, d’avoir tenté de lui nuire politiquement.
La cour s’est notamment déclarée convaincue, au vu des différents témoignages, du rôle d’Arcadi Gaydamak dans la libération de deux pilotes français otages en Bosnie en 1995. Pour la défense, c’est ce fait d’armes qui lui avait valu d’être décoré de l’ordre du Mérite.
« C’est une belle journée pour la justice française, voilà dix ans que nous disons qu’il n’y a pas eu trafic d’armes, pas de trafic de décoration « , a réagi un des avocats d’Arcadi Gaydamak, Me William Goldnadel. « Mais en même temps quelle amertume, car c’est une justice tardive », a-t-il ajouté.
Parmi les 15 autres prévenus, l’ancien préfet du Var Jean-Charles Marchiani a été condamné à 24 mois dont 8 ferme, n’échappant pas au recel d’abus de biens sociaux et l’avocat Allain Guilloux a écopé de la même peine.
AFP
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