La Techno, un fait social musical né à Détroit

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Détroit dans le Michigan berceau de la Techno mondiale. Photo dr

Novembre 2017. A Montpellier, le festival techno Dernier Cri propose des concerts mais il permet surtout d’échanger et d’enrichir nos connaissances sur ce mouvement culturel. Retour aux sources à Détroit avec la réalisatrice et productrice indépendante Jacqueline Caux autour de son dernier film Never stop une musique qui résiste.

Invitée de l’édition 2017 du festival dernier Cri, la réalisatrice Jacqueline Caux a donné une conférence sur les labels indépendants de Détroit à La Panacée. Son dernier film -?le troisième réalisé à Détroit?- Never Stop une musique qui résiste a été projeté au cinéma Diagonal. Dans ce documentaire Juan Atkins, Derrick May, Carl Crail, Jeff Mills, qui ont fondé la Techno, avant d’en devenir les ambassadeurs mondiaux, témoignent des premiers souffles du mouvement.

Née à la fin de la Seconde Guerre mondiale, Jacqueline Caux développe une passion pour le free jazz, puis pour la musique répétitive, Steve Reich, Philip Glass… «? La transe que je retrouve aussi dans la musique arabe me parle beaucoup cela comble l’intellect et satisfait le corps. Lorsque la techno est arrivée, au début des années 80, beaucoup disaient?: ce n’est pas de la musique, c’est n’importe quoi. Ce n’était pas ma génération mais pour moi c’était limpide.?»

Du blues de Bobo Jenkins au célèbre label Motown (Diana Ross, Marving Gaye, The Tentation…) qui épousait les volontés d’émancipation de l’époque, Détroit a toujours été un berceau pour la black music.

«? La techno, c’était la première génération de noirs qui faisait de la musique avec des machines. Je me demandais s’il y avait des liens inconscients machiniques avec les usines de voiture, commente Jacqueline Caux. Après les émeutes sanglantes de Détroit en 1967, les libéraux ont délocalisé les usines créant un chômage massif et une crise sans précédent. Les gens qui ne pouvaient plus vendre leur maison les brûlaient pour toucher l’assurance. Née dans ce contexte, la techno, comme le free jazz, revendique une volonté de dignité.

Jacqueline Caux se rend sur place pour mesurer la force d’exorcisme de ce mouvement créatif. «?Fallait qu’on trouve quelque chose pour ne pas mourir psychiquement?» lui confie Juan Atkins, artiste fondateur de Métroplex, le premier label techno indépendant.

La réalisatrice retrouve Electrifying Mojo le DJ secret et mythique qui joua un rôle essentiel de passeur en diffusant tous les soirs la musique des artistes de la ville dont personne ne voulait. Il aura permis à une contre-culture de trouver un écho dans le monde entier.

 

Jacqueline Caux

Jacqueline Caux

 

Solidaire attitude

Peu à peu la force créatrice de cette minorité s’organise. Chaque artiste fonde son propre label mais tous adoptent une attitude solidaire, qui va de la fabrication à la distribution et permet de contourner le barrage des majors.

Issue d’une énergie émancipatrice, la techno s’impose comme un art, qui rompt avec l’égo omniprésent dans le Rock’nRoll. Pour les adeptes de la techno, c’est la musique qui compte avant tout. Face à un quotidien et à un environnement insupportables, la seule issue de ces musiciens aura été de se doter des moyens leur permettant de développer une créativité et une liberté effervescentes .

Malgré la baisse des ventes de disques liée au nouveau mode de diffusion, ces labels indépendants existent maintenant depuis trente ans. Les artistes se sont adaptés ils écument les scènes d’Europe et du Japon en vendant leurs disques dans les concerts. Ils sont toujours victimes de ségrégation dans leur ville et plus largement aux Etat-Unis qui préfère la flexibilité du rap et du Hip hop.

Le film de Jacqueline Caux Never Stop rappelle la force de l’histoire sociale et culturelle de la techno et son lien intime avec Détroit. Ville laboratoire du monde contemporain hier à travers le modèle de réussite de l’industrie automobile, elle est devenue aujourd’hui le symbole de l’échec du modèle capitaliste.

La ville tente de renaître de ses cendres en réduisant sa dette faramineuse de 20 milliards de dollars. Sécrétée par la culture noire tout droit sortie des marges où le système ségrégationniste l’a cantonné, la musique techno née au coeur de ce chaos, ne se laisse pas apprivoiser. Elle demeure un authentique reflet de notre société mondiale.

Jean-Marie Dinh

Source : La Marseillaise 14 /11/2017

Voir aussi : Rubrique Musique,  rubrique Festival,  Dernier cri, le festival qui laisse sans voixDernier cri. État de la culture techno,

Jeff Mills et l’Orchestre du Capitole

Jeff Mills et l'Orcherstre du Capitole de Toulouse. Photo JMDI

Jeff Mills et l’Orchestre du Capitole de Toulouse. Photo JMDI

Concert Toulouse
Le pape de Dédroit au touché légendaire mixe avec l’Orchestre national du Capitole dirigé par Christophe Mangou. Ce soir à la Halles aux grains

Light from the Outside World marque la première collaboration entre le DJ Jeff Mills et l’Orchestre national du Capitole de Toulouse dirigé par Christophe Mangou. Une expérience hors du commun, mêlant l’effectif symphonique aux platines, le son aux lumières, l’acoustique au sample.

Né en 1963 à Détroit, berceau de la culture électronique nord-américaine, où l’on prend la musique au sérieux, le Jeff Mills est l’un des pionniers de la musique techno. Il était d’Underground Resistance, un  mouvement s’appuyant sur un l’engagement social qui a développé une forme de radicalisme artistique. Il suffit d’écouter The Bells, et les inoubliables Amazon et Sonic Destroyer, issus de cette  l’époque, pour s’en convaincre. Jeff Mills est à la source du genre. Mais comme tous les grands artistes, le défi est d’avancer là où on n’est pas attendu.

Capter et redéfinir
Avec plus de 25 cinq ans de pratique musicale, Mills a toujours su évoluer et surprendre en se frottant à différents styles. Son répertoire passe des titres amples et mélodieux comme Imagine et The March,  à de la techno deep et classieuse Gamma Player, ou à des morceaux tirés de ses bandes originales Entrance to Metropolis, Keaton’s Theme.

L’artiste développe un goût prononcé pour les compositions avant-gardiste Medium C ou l’obsédant Man From Tomorrow, sans oublier bien sûr des hymnes dancefloor. Mais il ne faut pas se méprendre, sa musique n’est pas une musique de club, c’est un art total et engagé, qui regroupe plusieurs disciplines et différents concepts.

Jeff Mills ne s’est jamais arrêté. Il parcours le monde fait des escales, parfois prolongées comme à Berlin qu’il quitte  en estimant le schéma trop figé. « On fait de la techno là-bas comme on fabrique des stylos ». A l’instar des artistes hors normes tels Franc Zappa ou Elvis Costello, Jeff Mills initie un projet orchestrale en 2005 et poursuit dans cette voie  en Norvège en 2011 avec l’Orchestre symphonique de Stavanger  déjà dirigé par Christophe Mangou.

Jeff Mills et le chef français l’interprètent ensuite à la Salle Pleyel à Paris en 2012, puis tourne dans le monde. Jeff Mills est reconnu pour sa technicité hors-pair il a développé une gestuel quasi instinctive à trois platines.

Les petits veinards ayant assisté au premier concert mettant en présence le maître de Détroit avec un Orchestre symphonique  ( celui Montpellier) sous la baguette d’Alain Altinog, au Pont du Gard en 2006, s’en souviennent encore. Gageons qu’ils sont prêts à faire le déplacement vers la ville rose. Il reste encore quelques places !

JMDH

Une rencontre avant-concert avec le chef d’orchestre Christophe Mangou, est organisée ce soir de 18h45 à 19h15 à la Halle aux grains Renseignements : (0)5.62.27.62.0
www.theatreducapitole.fr.

Source La Marseillaise 30/11/2016

Voir aussi : Rubrique Musique, rubrique FestivalDernier cri, le festival qui laisse sans voixDernier cri. État de la culture techno, rubrique