« 40 % des profits des multinationales sont délocalisés dans les paradis fiscaux »

7e5b853_25367-1yx8kyq.4k3wok1emiEconomiste français, professeur à l’université de Berkeley et spécialiste de l’évasion fiscale, Gabriel Zucman dévoile des chiffres inédits sur les pertes de recettes pour les Etats engendrées par les paradis fiscaux.

Tribune.

Depuis les années 1980, une puissante industrie s’est développée aux îles Caïmans, au Luxembourg et à Hongkong, à l’abri des regards indiscrets. Les institutions financières et les cabinets d’avocats établis dans ces pays offrent leurs services à des particuliers fortunés et aux multinationales du monde entier. Parmi ces services variés, beaucoup sont légaux, mais la plupart réduisent les recettes fiscales des autres nations, accroissent les inégalités et alimentent l’instabilité financière mondiale.

En scrutant les données macroéconomiques et en suivant à la loupe les flux financiers internationaux, il est possible de se faire une idée des coûts que les paradis fiscaux imposent aux autres pays. A l’échelle mondiale, plus de 40 % des profits réalisés par les multinationales sont délocalisés artificiellement dans les paradis fiscaux, et 8 % de la richesse financière des particuliers y est dissimulée. Avec à la clé un manque à gagner pour les Etats qui dépasse les 350 milliards d’euros par an, dont 120 milliards pour l’Union européenne et 20 milliards pour la France.

Le point de départ de mon enquête est le montant ahurissant des bénéfices que les grandes entreprises prétendent réaliser dans une poignée de petites îles et enclaves dépeuplées. En moyenne dans le monde, pour un euro de salaire versé, les entreprises font environ 50 centimes de profit ; on observe cette régularité aux Etats-Unis, en Allemagne ou en France depuis que les données existent. Mais prenons maintenant le cas du Luxembourg. Au Grand-Duché, pour chaque euro qu’elles payent en salaire, les entreprises déclarent gagner pas moins de 3,50 euros. Qui savait que les courageux travailleurs luxembourgeois – dont la moitié sont en réalité des Français, des Allemands et des Belges qui traversent la frontière matin et soir – étaient si productifs ?

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Source Le Monde 07/11/2017

 

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