Festival Voix Vives. Sans frontière les poèmes disent l’essentiel

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Le poète Jihad Hudaib.

Festival. Alors que la guerre cause rage et désespoir, Voix Vives consacre la poésie comme territoire de paix en Méditerranée. A Sète jusqu’au 26 juillet.

La poésie contemporaine méditerranéenne occupe pacifiquement depuis vendredi le quartier haut de Sète et plusieurs enclaves de l’île singulière. C’est dans ce quartier populaire que les mots d’une centaines de poètes venus de toutes les rives accostent.

En levant la tête, on décrypte des extraits de poèmes pris au piège des banderoles qui les offrent à nos regards, mais la plupart des mots parcourent librement les rues. Portés par un vent émancipateur, ils pénètrent les ruelles, les parcs, et les jardins. L’imaginaire collectif se trouve enrichi de ce grand partage inédit qui aiguise notre savoir-vivre.

A l’instar de ses éditions à Sidi Bou Said (Tunisie), Gènes et Tolède (en septembre), le festival Voix Vives privilégie les relations maritimes en élargissant sa sphère géographique à la Méditerranée, africaine, latine, orientale et à celle des Balkans. Une escale au festival Voix Vives permet de saisir à quel point la grande bleue vivifie le monde en mouvement.

La poésie : territoire de paix

« Je suis né sur le chemin de l’exil et n’ai jamais connu la mer même si je viens d’une famille qui dort sur son épaule, explique le poète palestinien Jihad Hudaib. Du fait de la colonisation, la seule mer que j’ai connue était une mer morte, en Jordanie

Le regard de Jihad se veut lucide sur les sociétés, leurs entrecroisements et dysfonctionnements : « Le dialogue n’est toujours pas instauré entre les deux rives défend-il, heureusement qu’il existe entre les personnes et les citoyens, même s’il est le plus souvent basé sur l’idée du vainqueur et du vaincu. Soyons honnêtes, personne ne veut prendre la responsabilité de cette différence. La mer est bleue, obscure et claire, entre deux idées et le poète un oiseau qui voyage continuellement entre les deux rives.»

Le poète France-Maximin Daniel

Le poète France-Maximin Daniel

Pour le poète romancier guadeloupéen Daniel Maximin, la Méditerranée n’est pas seulement une mer qui noie et sépare les ennemis. L’ami de Césaire, revendique un cousinage :

« Comme la Méditerranée la Caraïbe est un lieu à la croisée des cultures où l’on doit trouver une solution de paix parce que nous sommes cousins et pas parce que nous sommes différents. C’est la raison pour laquelle nous comprenons la Méditerranée. Comment être prétentieux lorsque l’on dépend comme nous des cyclones, des tremblements de terre, des éruptions volcaniques et des raz de marée ? La nature est notre modèle elle est la source même de la poésie. En Méditerranée, la proximité des civilisations explique la violence. Tout le monde est cousin et chacun veut marquer sa personnalité

La Méditerranée comme la Caraïbe sont des terres débordantes de créativité, « des terres de poésies » souligne Daniel Maximin qui fait un lien géographique et géologique entre les deux cultures « issues d’une terre en éruption, animées par un feu intérieur. »

Et le poète de se demander pourquoi les religions monothéistes ne parlent que de l’homme, et pas de l’homme et de la nature. « La mer est une fatalité au bout de chaque sentier et en même temps elle permet d’aller des deux côtés.»

Se pourrait-il que la poésie lave de sa pluie tous les affronts…

Jean-Marie Dinh

Source : L’Hérault du Jour 22/07/14

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Printemps des poètes Vénus Khoury-Ghata : Métaphores percutantes

Sète. Vénus Khoury-Ghata dimanche au Musée Paul Valéry.

Une femme aimante et libre.

Une femme aimante et libre.

Dans le cadre du Printemps des Poètes, une grande dame de la poésie est attendue dimanche à Sète; la poétesse d’origine libanaise Vénus Khoury-Ghata répondra à l’invitation du musée Paul Valéry en collaboration avec la Maison de la poésie de Montpellier-Languedoc. Insatiable et passionnée, Vénus Khoury-Ghata a su s’imposer très naturellement dans un monde d’homme et devenir l’une des plus célèbres écrivains et poétesses françaises.

Entre France et Liban; entre Orient et Occident, de  «l’araméen caillouteux» à «l’arabe houleux» et dans un français puissant, la mémoire des êtres aimés et blessés, une mère, un frère et celle d’un époux perdu, donnent à cette voix de femme aimante et libre un échos rapidement reconnu et une profondeur universelle.

Elle a bâti au fil des ans une œuvre riche, alternant poésie et roman, couronnée par de nombreux prix : prix Apollinaire pour «Les ombres et leurs cris», prix Mallarmé pour «Un Faux pas du soleil», grandprix de Poésie de la SGDL pour l’ensemble de son œuvre, grand prix de poésie de l’Académie Française.

Lecture poétique  et musicale de dim 16 mars à 16h, dans les jardin du Musée Paul Valéry entrée libre.

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Festival Voix vives : Le grand brassage poétique

 

Pour sa seconde édition sétoise, le festival Voix Vives tisse les passerelles entre le port languedocien et l’ensemble du pourtour méditerranéen. Cette liaison éphémère empruntée par les poètes de 33 pays provoque une confrontation avec les musiciens, acteurs et poètes français conviés à ce rendez-vous où l’art se décline en transversale. Le festival reçoit cette année Carole Bouquet, Marie Rouanet, Fanny Ardant, Marie-Christine Barrault, Arthur H, Juliette, Michel Bismut, Sapho, Combas…

Neuf jours durant, Voix Vives réinstalle l’échange entre la population sètoise et le vaste monde bleu qui la berce. L’espace qui s’ouvre revient aux origines. De tous temps, les terres du Mont St Clair ont servi de refuge aux navigateurs et d’inspiration aux artistes. Le festival  investit le quartier haut des pêcheurs et la proximité des côtes maritimes via une flotte de voiliers et de barques à rames où cohabiteront  poètes et passagers d’imaginaire. Il va sans dire que ce bouillonnement de sens et de lumière ravit les visiteurs de passage.

Les bouleversements à l’œuvre dans le monde arabe donnent à l’édition un attrait particulier. « Que signifie être poète aujourd’hui au cœur d’une géographie en mouvement ? », questionne Maïthé Vallès Bled. Une autre interrogation, plus pratique, occupe l’esprit de la directrice du festival : elle concerne l’obtention des visas de ses invités. On attend l’arrivée de 99 poètes étrangers, parmi lesquels la Palestinienne  Salma Khadra Jayyusi, le Syrien  Nourri Al Jarrah, l’Irakien  Salah Falk, l’Egyptien  Fathi Abdallah. L’Espagnol Antonio Gamoneda, la Portugaise Maria Joào Cantinho ou le Grec Georges Veltos feront résonner l’âme des poètes de l’Europe du sud sous le signe de la rigueur.

En 2011, il sera assurément moins question de la sempiternelle crise de la poésie que de la situation des poètes en temps de crise.

Jean-Marie Dinh

Voix vives Rens : 04 99 04 72 51

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Salah Al Hamdani : « Je voudrais être ordinaire »

Rencontre avec le poète irakien Salah Al Hamdani invité du festival Arabesques.

Salah Al Hamdani fait jaillir des mirages où se dessinent les contours flous de son pays avec des mots synthétiques qui disent comment saigne toujours son cœur. « Sur la ligne du soleil mon horizon galope. J’entends sous les nuages les battements de Bagdad et toi, toujours aussi loin de l’éclipse ». L’Irak qu’il a quitté à l’âge de 23 ans fuyant le régime de Saddam Hussein, il en colporte toujours la beauté pour « ne pas laisser faire les bourreaux » de tous bords.

La poésie il l’a découvre sur les murs de la prison où il séjourne aux côtés d’intellectuels opposés au régime baassiste. « On m’a considéré comme prisonnier politique parce qu’après m’être engagé dans l’armée à 17 ans – le seul moyen qui s’offrait à moi pour subsister – je me suis opposé au traitement que nous réservions aux Kurdes. En prison quelqu’un lisait des poèmes tous les soirs. Moi, je ne savais rien, la poésie est venue à moi. Avec le temps j’ai compris la force des mots, qui peuvent tuer. »

Condamné par le régime, il quitte son pays sous la contrainte et choisit la France sans la connaître, par estime pour Camus. Quatre ans plus tard, après s’être marié, il connaît le succès en tant que comédien. Il fonde La ligue des artistes irakiens démocrates pour poursuivre son combat politique. « Nous considérions que le régime ne laissait aucune place à l’expression libre. Et menions la lutte de l’extérieur. Ce combat n’était pas de tout repos. En France, je me suis fait tabasser par des fascistes arabes qui étaient à la solde de Saddam. »

Durant trente ans Salah Al Hamdani vit sans voir l’aurore de son pays. Il coupe toute communication avec sa famille pour les protéger des représailles. Cette situation qui nourrit sa poésie est vécue comme une douleur constante. « Je voudrais échapper à mon exil, être quelqu’un d’ordinaire. Mais rien ne me sauve de cette situation. Je n’y parviens pas. » Un an après la mort de Saddam, Salah retourne clandestinement en Irak. Il retrouve les siens. « Quand je les ai vus j’ai eu peur, je me suis dit qu’en me prenant dans leurs bras ils allaient me tuer. On ne savait pas quoi faire, pas quoi se dire. Ma mère avait déjà fait son deuil… » Le poète traduit cette situation de l’exil dans le film documentaire Bagdad-Paris de Emanuèle La grange programmé en sa présence  dans le cadre d’Arabesque.

Jean-Marie Dinh

Dernier recueil paru « Au large de la douleur » éditions l’Harmattan 12 euros

Voir aussi : Rubrique Méditerranée, rubrique Irak,  rubrique Festival, Arabesques 2011, rubrique Rencontre, Rabah Mézouane,

Festival Arabesques : Ces chevaux qui passent les frontières

Photo Audrey Le Mault

Arabesques est un festival qui s’est bâti ici sur l’enthousiasme et la volonté d’échanges avec les cultures de l’autre rive de la méditerranéenne. En rendant compte d’une pluralité d’expression artistique où se mêle tradition et modernité, il offrait en perspective le désir d’une jeunesse que confirme le mouvement de démocratisation impulsé dans les pays arabes qui surprend le monde depuis six mois. Il faut rendre hommage à l’équipe d’Uni’Sons pour la volonté de conduire ce projet et au Conseil général de l’Hérault de lui avoir fait confiance, car souvent les vérités ne sont pas bonnes à dire avant l’heure.

On peut s’attendre à ce que cette sixième édition soit emprunte d’un vent de joie et de liberté particuliers dont la mesure nous en sera  offerte dès ce soir. A 18h débute sur l’esplanade royale du Peyrou de Montpellier – qui porte singulièrement bien son nom pour l’occasion –  la parade équestre et musicale marocaine. Un avant goût des réjouissances à retrouver au Domaine D’O du 20 au 22 mai.

Cette année Arabesques investit l’ensemble du site départemental dédié à la culture. Al andaluz, le paradis éternel ouvre vendredi la grande soirée de l’amphithéâtre avec le spectacle Rêves d’Andalousie qui fusionne l’esprit andalou. Une ébullition joyeuse et colorée de musiques et de danses arabes, de flamenco et de poésie s’inscrit sur scène sous le signe de la tolérance propre à cette civilisation.
Samedi ce sera au tour de l’orchestre national de Barbès de faire vibrer la grande scène qui donne la part belle aux « péchés originaux ».

Dimanche l’orchestre traditionnel Marrakechi Jil Jilala jouera sur les modulations vocales pour exhumer les textes malhouns du terreau de la culture maghrébine et renouer avec les maîtres musiciens de l’art gnaoua. Les spectacles de 19h de la Kasbah D’o sont très alléchants. A ne pas manquer notamment le Trio Joubran qui fera parler le oud avec la Palestine au cœur et de nombreuses rencontres autour du monde arabe.

L’historienne Agnès Carayon retrace  » la destinée héroïque des cavaliers zénètes berbères « 

Agnès Carayon est historienne, spécialiste du cheval dans le monde arabe médiéval. Elle s’est intéressée au statut du cheval et du cavalier dans la civilisation  d’al-Andalus, notamment au rôle décisif des berbères zénètes et de leur chevaux à barbes dans l’armé musulmane d’opposition à la Reconquista (reconquête chrétienne des royaumes musulmans de la péninsule ibérique).  Elle consacre aujourd’hui ses recherches  à un autre peuple d’éminents cavaliers en terre d’islam : les Mamlûks d’Egypte.

D’où vient l’origine des Fantasias dites aussi Tbourida ?

« A l’origine la Tbourida provient des zénètes une branche de la confédération berbère qui  occupait les hauts plateaux du Sahara et les franches côtières au Moyen âge. Les membres de la cavalerie légère des Berbères zénètes étaient renommés  pour être de grands guerriers. A l’époque il n’y avait pas d’arme à feu. Durant la Reconquista, la cavalerie lourde des Chrétiens s’est trouvée dans un premier temps décontenancée par cette façon de combattre. Puis ils décidèrent de l’adopter, lui donnant le nom de monta a la gineta (Le bon cavalier) en l’honneur de ces Berbères qui excellaient en sa maîtrise. Les Zénètes qui étaient nomades se sont progressivement sédentarisés. Ils ont fondé des dynasties importantes notamment au Maroc. Ils ont mis le cavalier à l’honneur. Ce sont les ancêtres de la Fantasia.

L’Andalousie actuelle reconnaît-elle ou ignore-t-elle plutôt l’héritage de ses cavaliers Berbères ?

Cet héritage a été accepté dès le Moyen âge. A l’époque, l’art équestre des cavaliers guerriers a été intégré dans toutes les cours d’Espagne. On montrait  ainsi une certaine  admiration à l’égard des Maures. Les cavaliers zénètes sont également entrés dans la littérature. Le cheval andalou provient du croisement avec des purs sangs arabes.  Aujourd’hui toutes ses choses sont un peu noyées.

Le Maroc célèbre ses fêtes nationales et religieuses avec des Fantasias, ces manifestations véhiculent-elles une dimension spirituelle ?

La destinée fantastique du cheval arabe est étroitement liée à l’Islam. Selon la légende, Allah aurait créé le cheval arabe. « Deviens chair, car je vais faire de toi une nouvelle créature, en l’honneur de mon Saint Dieu, et pour la défaite de mes ennemis, afin que tu sois le serviteur de ceux qui me sont soumis », aurait-il dit au vent du Sud avant de prendre une poignée de vent, de souffler dessus et de créer l’animal. Ce qui donne au cheval un statut particulier. Mais aujourd’hui  les Fantasias font partie du folklore. Ce sont surtout des mises en scène qui donnent à voir le savoir-faire des cavaliers.

De quelle façon ?

L’équipe de cavaliers se met en place. Elle vient saluer le jury puis exécute une charge suivie d’un arrêt brusque et d’une salve de tirs. La rapidité de la charge et la simultanéité de l’arrêt et des coups de feu donnent toute la beauté à la chevauchée.

L’invitation d’Arabesques concernait la troupe cavalière de Sofia Balouk. A l’arrivée on trouve des cavaliers n’est ce pas significatif d’une certaine crispation à l’égard des femmes ?

La société royale d’encouragement du cheval est le principal levier du développement de la filière équine au Maroc. Elle est dirigée  par la princesse Lalla Anima qui avait donné son accord. Le fait que cette tradition marocaine soit représentée par des femmes qui sont pourtant de plus en plus nombreuses à accéder à cette discipline, n’a pas été apprécié au plus au niveau marocain. Ce qui est de mon point de vue assez significatif ».

Jean-Marie Dinh

Agnès Carayon évoquera les origines de la Fantasia lors des veillées équestres les 20 et 22 mai au Domaine d’O.

Tout le programme du festival Abesques en ligne

Parade équestre et musicale ce soir à 18 h sur esplanade du Peyrou à Montpellier.

Voir aussi : Rubrique Méditerranée, rubrique Festival