La politique empoisonnée par le spectacle

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A près de huit mois du premier tour de la présidentielle, le couple médias-politique n’a jamais été aussi infernal. Entre journalistes avides de spectacle et politiciens obsédés par leur image, l’espace est saturé

Nicolas Sarkozy a gagné. Depuis lundi, sa candidature présidentielle est en pole position dans les médias. Oubliée presque, la persistante avance dans les sondages d’Alain Juppé. Négligés, les 75% de Français qui refusent le retour de Sarko à l’Elysée en mai 2017 et, pire, rejettent un remake de son duel de 2012 avec François Hollande.

Burkini, identité, fermeté de l’Etat… l’ancien président sature l’espace médiatique à force de déclarations tonitruantes comme jeudi soir à Châteaurenard (Bouches-du-Rhône), où il a affirmé vouloir «rétablir l’autorité de l’Etat sur chaque centimètre carré du territoire»!

«La déferlante ne fait que commencer, pronostique un influent conseiller en communication. On est dans la course de petits chevaux. A chaque déclaration, les candidats avancent d’une case. Et les journalistes sont complices, car ils tendent les micros.»

Cascade de rentrées politiques

Cette surenchère est patente. Interviews politiques à la chaîne. Livres politiques en cascade. Documentaires politiques sur la vie à l’Elysée, à Matignon (dont un réalisé par la propre fille de l’ancien premier ministre Jean-Marc Ayrault). Rentrées politiques successives: après Sarkozy, Juppé samedi, Fillon dimanche… Une frénésie largement engendrée par la primaire, ce premier acte de la présidentielle des 23?avril et 6?mai 2017.

Treize candidats déclarés pour la primaire de la droite les 20 et 27 novembre. Sept déjà possibles pour celle de la gauche fin janvier. «Or que recherchent la plupart de ces candidats, sans aucune chance d’être élus? Un moment de notoriété. La présidentialite est d’abord une maladie médiatique», explique l’essayiste Christian Salmon, auteur de «Storytelling» (Ed. La Découverte). Même constat pour Alain Bergougnoux, l’un des experts électoraux du PS: «A droite, tout va se jouer sur les personnalités, donc sur le style, la capacité à créer de l’empathie, l’incarnation de la rupture après le quinquennat Hollande.»

Addiction mutuelle

Or les médias français sont friands de cette compétition. Notamment les chaînes d’information continue (quatre au total, donc la dernière née du secteur public, France Info): «Le théâtre politique est une constante française, raconte un éditeur. Politiques et médias sont mutuellement accros.» D’autant que le casting actuel est plutôt bon.

A droite: Sarkozy le fonceur revanchard, Juppé le sage introverti, Fillon le provincial trop terroir, Le Maire l’ambitieux forcené. A gauche: Montebourg l’étatiste éloquent tout droit sorti d’un roman de Balzac, Macron le social-libéral qui sait parler aux jeunes, Valls le socialiste autoritaire arc-bouté sur la laïcité et Hollande, ce président trop «normal». Plus la guest star Marine Le Pen, la présidente du Front national donnée déjà qualifiée pour le second tour.

Ce qui compte, c’est la posture. Faire chef de guerre. Faire président. Faire réformateur. Le risque populiste est dès lors maximal.

Le locataire de l’Elysée – qui dira en décembre s’il se représente ou non et qu’un premier sondage donnait hier battu par Arnaud Montebourg aux primaires de la gauche – joue, lui, une partition originale dans ce théâtre du pouvoir: celle du confident, ravi de laisser les journalistes s’asseoir sur les canapés de La Lanterne, sa résidence de week-end près du château de Versailles. Ou pénétrer dans son bureau après un échange décisif sur la Syrie avec Barack Obama. Un livre tiré de ces «confessions» vient de sortir. Quatre autres sont annoncés.

Même objectif que Sarkozy: occuper le terrain, accréditer son image de président à la fois ferme et transparent, accessible. Mais méthode inverse. Complicité plutôt que confrontation. Addiction médiatique savamment entretenue. «On est dans le concours de beauté permanent, déplore le sociologue de la communication Dominique Wolton, auteur d’Avis à la pub (Ed. Cherche Midi). La substance? Ce n’est plus le sujet. Ce qui compte, c’est la posture. Faire chef de guerre. Faire président. Faire réformateur. Le risque populiste est dès lors maximal.»

Difficile de renoncer à la surexposition

Cas type: Emmanuel Macron. Le jeune ministre de l’Economie incarne une offre politique nouvelle. Problème: à part les médias et les sondages, où sont ses soutiens? Et pourquoi entretenir un vrai-faux suspense sur sa candidature en 2017? «Il ferait mieux de dire clairement qu’il ne se présentera jamais contre François Hollande», s’énerve ces jours-ci l’essayiste Alain Minc, un de ses plus fervents soutiens, dans un entretien aux Echos.

Sauf que dire cela, ce serait décrocher, cesser d’alimenter l’usine à buzz. Dangereux sevrage. «Nous avons fait le choix de rester en retrait, confiait au «Temps» un proche d’Alain Juppé après l’annonce de la candidature de Nicolas Sarkozy. Nous parions sur le fait que les Français veulent autre chose que du théâtre et qu’un comédien de plus à l’Elysée.» Pari risqué.

Richard Werly

Source Le Temps 28/08/2016

Voir aussi : Actualité France,  Rubrique Politique, rubrique Société, Vertus et vices de la comédie sécuritaire, Citoyenneté , rubrique  Médias «Moins les politiques sont légitimes, plus ils courtisent les journalistes»

Philippe Poutou élu candidat du NPA pour 2012

Philippe Poutou, ouvrier dans l’automobile, a été élu samedi soir candidat du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) pour la présidentielle de 2012, par 53% des délégués réunis à Nanterre en conférence nationale, succédant ainsi à Olivier Besancenot.

Selon le décompte final, 122 délégués ont voté pour sa candidature, 50 contre, il y a eu 11 abstentions et 47 personnes n’ont pas pris part au vote, donnant un score de 53% sur le total des délégués et de 66,67% des exprimés.

Ouvrier de l’usine automobile Ford de Blanquefort (Gironde), où il est syndicaliste CGT, M. Poutou a déjà été tête de liste du NPA aux élections régionales en Aquitaine (2,52%) mais aussi aux législatives de 2007 (2,7%) en Gironde sous l’étiquette de la Ligue communiste révolutionnaire (devenue NPA).

En début de semaine, la commission de candidatures du NPA s’était « majoritairement prononcée » pour Philippe Poutou pour remplacer Olivier Besancenot qui s’est retiré début mai après avoir représenté deux fois la LCR, en 2002 (4,25%) et 2007 (4,08%).

Réunis à l’université de Nanterre en conférence nationale, sorte de mini-congrès, les délégués ont donc confirmé, après des débats longs et parfois tendus, la candidature de M. Poutou.

A la tribune, plusieurs militants se sont toutefois demandé pourquoi aucune des deux femmes porte-parole, Christine Poupin ou Myriam Martin, n’avait été désignée.

Un vote serré dans une ambiance de division. Les délégués ont en effet confirmé le vote des congrès locaux, coupant quasiment en deux le NPA : 50,4% des militants soutenant la ligne « identitaire », contre 40,1% favorables à des discussions avec le reste de la gauche radicale dont le Front de gauche (FG), pour l’après-2012.

Le premier texte était soutenu notamment par Mme Poupin, MM. Besancenot et Poutou, le deuxième étant porté par Myriam Martin et Pierre-François Grond.

AFP

Guinée: Paris annonce la suspension immédiate de sa coopération militaire

La France a décidé la suspension immédiate de sa coopération militaire avec la Guinée et réexamine l’ensemble de son aide bilatérale, après la répression « sauvage et sanglante » d’une manifestation à Conakry, a annoncé mardi Bernard Kouchner. La France, ancienne puissance coloniale, annonce également une réunion de l’Union européenne mercredi à Bruxelles pour « examiner les mesures complémentaires ».

« Le bilan des massacres et des graves violations des droits de l’Homme commis hier à Conakry par l’armée guinéenne s’alourdit d’heure en heure. La France réitère sa condamnation de cette répression sauvage et sanglante », déclare le ministre des Affaires étrangères, dans un communiqué. « La France a décidé la suspension immédiate de sa coopération militaire avec la Guinée. Elle réexamine parallèlement l’ensemble de son aide bilatérale », annonce-t-il. « A notre demande, l’Union européenne se réunit dès demain à Bruxelles pour examiner les mesures complémentaires, notamment individuelles, qui pourraient être prises rapidement », poursuit-il. « La France se concerte avec les responsables de l’Union africaine et ses partenaires au Conseil de Sécurité, afin d’envisager les conséquences à tirer de ces événements dramatiques », écrit encore M. Kouchner.

Voir aussi : Rubrique Afrique L’Afrique doit prospérer