L’opportunisme en rupture avec la fiction

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Théâtre. Après Béziers et avant Alès, on peut voir «Tambours dans la nuit» de Bertolt Brecht au CDN de Montpellier dans une mise en scène de Dag Jeanneret.

« Ne trouvez pas naturel ce qui se produit sans cesse ! »  écrit Brecht en 1930, dans L’Exception est la règle. L’avertissement marque un engagement déjà présent dans sa seconde pièce Tambours dans la nuit créée en 1922 à Munich. On (re) découvre cette oeuvre de jeunesse avec plaisir en ce moment au Treize Vents dans une mise en scène de Dag Jeanneret.

Le théâtre didactique brechtien nous est restitué dans son jus. Tout part de la salle à manger familiale, de l’opulent ennui des bourgeois qui ont su prospérer avec la Grande guerre qui s’achève. Dehors gronde le début de la révolution allemande. L’auteur dessine avec une causticité jubilatoire l’ambivalence opportuniste qui préside.

On ne se soucie pas plus du bonheur de ses enfants que des revendications populaires. « La fin du cochon c’est le début du saucisson », s’enchante le patriarche qui impose un mariage d’intérêt à sa fille Anna. L’affaire semble dans le sac quand débarque Kragler l’ex fiancé d’Anna disparu sur le front africain depuis quatre ans.

La sincérité du soldat s’oppose à la désillusion ambiante et le pousse à rejoindre la révolution spartakiste qui court, avec coeur, au massacre. Alors qu’il s’apprête à rejoindre les insurgés, sa fiancé lui revient. Kragler décide alors de rentrer à la maison avec elle.

« Bretch fait partie de ces auteurs dont on apprend beaucoup, qui interrogent positivement notre pratique », indique Dag Jeanneret. Il y a dans cette affirmation l’intention d’un travail honnête sans lequel toute tentative brechtienne se mue en imposture.

Intention perceptible d’un bout à l’autre du spectacle qui comporte certaines faiblesses comme les malhabiles entrées et sorties dans le premier acte ou la force collective excessive et généreuse du groupe qui l’emporte parfois sur le drame intérieur des personnages. Mais l’oeuvre impose ici un exercice où ce dosage s’avère bien plus délicat que dans une comédie de caractère. Ces petites imperfections relèvent de réglages techniques qui ne trahissent pas l’horizon de nos attentes.

Les retrouvailles qui nous sont proposées avec ce texte, peuvent comme le souligne le metteur en scène, résonner avec notre incapacité à agir contre un monde déshumanisé. Elles rappellent aussi à quel point les effets du nihilisme politique nous menacent.

Jean-Marie Dinh

A Montpellier jusqu’au 22 nov à Alès les 28 et 29 novembre

Source : L’Hérault du Jour 22/11/2013

Vous dans le public « Ne faites donc pas des yeux si romantiques ! »

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