Police : comment fonctionne le fichier S

Depuis plusieurs années, le nombre de fichiers de police s’est multiplié, mais leur inter-connexion reste interdite.

La police dispose pour ses enquêtes de plusieurs fichiers dont le contenu et le nombre de personnes concernées sont, au fil des années, devenus très conséquents. Le plus connu est le fichier qui regroupe les fameuses fiches S, pour « sûreté de l’Etat ». Les fiches S sont une des sous-catégories du fichier des personnes recherchées (FPR), qui regroupe aussi le fichier M (pour les mineurs fugueurs), le fichier V (pour les évadés), ou encore le fichier T (pour les débiteurs du Trésor). Au total, 400.000 personnes figurent dans ce FPR qui a été créé en 1969.

10.500 personnes

Les fiches S, quant à elles, recensent autour de 10.500 personnes suspectées de faire partie de groupes pouvant porter atteinte à la sécurité de l’Etat. Il peut s’agir de personnes qui fréquentent des mosquées salafistes, qui ont voyagé dans des pays tels que la Syrie ou l’Irak. Mais certains activistes d’extrême droite ou d’extrême gauche, des zadistes ou encore des membres des Black blocs, peuvent aussi avoir une fiche S.

Les potentiels djihadistes sont classés dans les fiches S14. Ils seraient près de 850. Ces personnes sont suspectées mais ne sont pas passées à l’acte. La fiche S est un moyen de surveillance, mais il ne s’agit nullement d’une preuve de culpabilité. Certaines personnes peuvent faire l’objet d’une filature ou d’écoutes, mais une poignée seulement.

Exigence de la CNIL

Un autre fichier, beaucoup moins connu mais très proche dans ses critères des fiches S, est celui tenu par l’UCLAT (Unité de coordination de lutte anti-terroriste). Il comporterait quelque 10.000 noms également. On peut encore ajouter le fichier européen SIS qui contient les noms de personnes recherchées ou placées sous surveillance et sert à mieux contrôler les entrées dans l’espace Schengen. Enfin, un fichier des passagers européens, à l’image de ce qui se fait aux Etats-Unis ou au Canada sous l’appellation « Passager Name Record » pourrait également voir le jour bientôt. Il regrouperait les informations données par les passagers lors de la réservation d’un vol.

La multiplicité de ces fichiers et la variété de leur contenu pourraient laisser croire que les services de renseignement disposent d’un arsenal complet et efficace. Ce n’est pas le cas, la loi interdisant de recouper ces fichiers. Leur interconnexion pourrait permettre de refaire remonter des noms de personnes à surveiller en priorité sur les milliers d’autres personnes fichées. Mais la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) est très à cheval sur le principe de non recoupement des fichiers au nom du respect des libertés publiques et individuelles.

Marie Bellan

Source : Les Echos 16/11/15

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