Municipales Montpellier. La culture du XXIe sur ordonnance politique

soiree culturePolitique culturelle. Jean-Pierre Moure précise la place de la culture et le soutien
à la création dans un nouveau modèle de gouvernance métropolitaine.

Le 5 mars dernier, devant 250 représentants du monde culturel montpelliérain, Jean-Pierre Moure a présenté ses engagements pour la culture. Le candidat socialiste à la mairie de Montpellier entend porter une dynamique collective à partir de trois axes qu’il a déclinés en suscitant espoir et scepticisme.

Le premier axe entend « promouvoir une culture de proximité avec les jeunes et pour le vivre ensemble. » Il s’agirait de favoriser les cultures urbaines pour « en faire un nouveau marqueur identitaire », avec la volonté de créer un « Printemps des cultures urbaines » qui associerait le Fise, la Battle, des expos…

L’idée générale consiste à s’appuyer sur la jeunesse de la population pour bâtir l’offre et intégrer la culture urbaine dans une réflexion urbanistique et de communication. La rénovation du skate park de Gramont, l’ouverture d’espaces polyvalents et des Maisons pour Tous ainsi que la mise à disposition de friches (avec le concours de la SERM et d’ACM) font partie des intentions qui étayent cette proposition.

Concernant le « vivre ensemble », la ZAT serait « vouée à évoluer » pour répondre à trois critères : « Plus simple, plus souple, moins onéreux ». Le nouveau projet qui rappelle Quartiers Libres s’étirerait sur toute l’année et concernerait tous les quartiers, « avec des projets co-construits avec les artistes locaux et les habitants ».

« Sécuriser les artistes »

Le candidat propose aussi la gratuité des activités périscolaires avec la création d’un pacte d’éveil éducatif et culturel. Les artistes seront invités à accompagner l’aménagement des rythmes scolaires…

Le second grand axe vise à soutenir les artistes et impulser une économie de la culture. Jean-Pierre Moure s’engage à signer des conventions pluriannuelles de trois ans avec les artistes. Pour s’adapter aux soucis de trésorerie des associations, il propose de verser les subventions en début d’exercice en conditionnant un quart du budget alloué, sur objectifs.

Le candidat souhaite mailler le territoire urbain de résidences artistiques qui seraient mises à disposition par les bailleurs sociaux. Il est aussi très attaché à la dimension économique de la culture, appelant de ses voeux des incubateurs d’entreprises culturelles, il veut encourager les investisseurs en capital risque à miser sur ces entreprises.

Le troisième axe concerne la mise en exergue du patrimoine et de la culture scientifique. Il s’agit d’élever la ville à travers un appel à projet autour de la valorisation des cultures méditerranéennes, d’une candidature au label « Art et Histoire » de l’Unesco, ainsi que d’un travail de mise en réseau des artisans d’arts, et des sites de collections scientifiques universitaires.

Le président de l’Agglo dispose d’une assez bonne image auprès des acteurs culturels qu’il a souvent défendus. Le budget culturel de l’Agglo a augmenté de 18% depuis 2011. Le schéma qu’il porte aujourd’hui relève d’une vision politique assez partagée en France et en Europe.

Cette politique culturelle repose sur une interprétation de la création dans une dimension matérielle et sociale de la ville. Jean-Pierre Moure imagine la ville de demain mais dans une configuration où le rêve légitime du politique englobe et sécurise celui des artistes dont on oublie d’interroger la vocation sociétale. Qu’est-ce que la culture ? Il y a là un thème de réflexion passé sous silence qui conditionne fortement l’avenir de l’offre et de la demande culturelle montpelliéraine.

Le passage de l’équipement culturel au mode de vie

Point de vue

imagesLe concept de ville et les fonctions urbaines connaissent un profond changement que va venir renforcer la loi sur la décentralisation et l’émergence probable d’une métropole montpelliéraine. Jean-Pierre Moure qui évoque désormais le terme Agglo-métropole pour désigner le territoire qu’il vise à conquérir l’a bien compris.

La politique culturelle qu’il a présentée intègre la culture dans le jeu relationnel urbain avec les flux de personnes et les marchandises qui y circulent. Lieux de production, lieux de création, lieux de divertissements, lieux sportifs, lieux de diffusion culturelle, sphère publique et privée, concourent indistinctement au même schéma directeur.

Aujourd’hui la ville est certes autant un lieu de production que de consommation mais la culture rappelons-le, n’est pas un produit comme les autres. Les dimensions de la culture sont multiples, hétérogènes, diverses et il semble important qu’elles le demeurent.

A l’instar d’une saison lyrique, un projet comme la Zat, pour ne citer que celui-là, ne se mesure pas en terme de coût mais de valeur et précisément, à travers la qualité du travail artistique réalisé pour l’espace public. De même, la construction d’une identité urbaine ne se décrète pas d’un perchoir.

C’est justement de la culture qu’émerge l’identité. Le pragmatisme utile en politique n’est pas de bon conseil en matière culturelle et l’inversion des valeurs qui pose l’action politique comme matrice de l’identité ne sort pas du flou les motivations qui déterminent les choix culturels, leurs effets sur la consommation, et sur l’espace urbain. Comment ce discours sera lu par les acteurs culturels ?

Jusqu’ici la culture reste un lieu où la confiance dans les élus est forte. Dans la crise de la démocratie que nous traversons, c’est un élément qui doit être mesuré à sa juste valeur. Non seulement la culture peut infléchir les résultats électoraux mais elle garantit notre dimension critique et par la même notre capacité à penser par nous-mêmes. La culture reste une réponse possible à cette crise, la gardienne d’une authenticité, d’un engagement, d’une liberté de vivre et d’expression.

Jean-Marie Dinh

Source L’Hérault du Jour 11/03/2014

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