Laurent Gbagbo doit admettre sa défaite

laurent Gbagbo

Il arrive que des élections prennent une importance toute particulière dans l’histoire d’un pays. En Côte d’Ivoire, l’élection présidentielle dont le second tour a eu lieu dimanche 28 novembre en fait partie. Depuis plus de dix ans, le pays est enfermé dans une longue crise. La Côte d’Ivoire a vécu successivement un coup d’Etat, une rébellion, la partition de son territoire national et un climat de grande animosité politique. Pour rompre avec ce cycle mortifère et destructeur, les Ivoiriens ont voté en masse (plus de 80 % de participation) et attendu avec la même ferveur teintée d’inquiétude le résultat de ce scrutin. Vendredi, le pays s’est subitement retrouvé avec, en apparence, deux présidents. L’un, Alassane Ouattara, candidat de l’opposition, a vu sa large victoire annoncée par la Commission électorale indépendante (CEI). Ses 54 % des voix ont été « certifiés » par les Nations unies selon la procédure exceptionnellement mise en place pour ce scrutin particulier. Il a aussitôt été félicité par plusieurs dirigeants internationaux, dont les présidents américain, Barack Obama, et français, Nicolas Sarkozy.

L’autre, Laurent Gbagbo, le président sortant, a été déclaré vainqueur par le Conseil constitutionnel. Cet organisme, qui lui est totalement acquis, affirme avoir examiné, en l’espace de quelques heures, quelque 22 000 procès verbaux émanant des bureaux de vote pour justifier l’annulation des résultats dans neuf départements du pays. Ces annulations permettent d’inverser les chiffres du scrutin. Laurent Gbagbo a été félicité par la Guinée. Cette situation est dangereuse. En 2002, une guerre civile a éclaté en Côte d’Ivoire en raison, déjà, de fortes tensions politiques. A l’époque, l’armée s’était scindée, mais aucun des deux camps ne disposait de forces importantes. Aujourd’hui, les ex-rebelles, qui n’ont pas été désarmés au cours du processus de paix qui a rendu l’élection possible, se trouvent à Abidjan, où les forces loyalistes disposent de matériel et d’hommes. Des miliciens venus de l’ouest pourraient aussi être utilisés si les violences éclatent.

Un homme, à présent, porte la responsabilité du sort de la Côte d’Ivoire : le président sortant, Laurent Gbagbo. Il peut continuer de refuser le verdict des urnes, s’enfermer dans une situation de rupture avec la communauté internationale, mais cela ne pourra pas se passer sans violences. Il peut aussi permettre à un pays divisé de bénéficier de l’effet apaisant d’une élection exemplaire, admettre sa défaite et quitter le pouvoir la tête haute. La période où les coups de force électoraux s’opéraient dans l’indifférence générale est révolue. L’Afrique est en voie d’intégration accélérée dans les échanges de la planète. Cela crée des responsabilités nouvelles.L’histoire, si chère au président Gbagbo, oubliera rapidement les arguties juridiques en cours à Abidjan pour tenter de justifier son hold-up électoral. Elle n’oubliera pas, en revanche, celui qui ferait plonger la Côte d’Ivoire dans le chaos.

Le Monde (éditorial)

La France et la Centrafrique signent un nouvel accord de défense

Le secrétaire d’Etat français à la Coopération, Alain Joyandet, a signé jeudi à Bangui un nouvel accord de défense avec la Centrafrique, le quatrième renégocié entre Paris et ses anciennes colonies africaines.

« C’est un texte qui sera public. Il n’y aura plus de secrets », a déclaré le responsable français, après la signature de ce document avec le ministre centrafricain des Affaires étrangères, Antoine Gambi. Ce nouveau « partenariat de défense », qualifié d' »historique » par M. Joyandet, prévoit que la France contribue à appuyer la restructuration et la formation des forces armées centrafricaines, tout favorisant l’émergence de forces africaines de maintien de la paix.

Lors d’un discours au Cap (Afrique du Sud) en février 2008, le président français Nicolas Sarkozy avait annoncé la révision des accords de défense signés après leur indépendance avec huit pays africains, affirmant que Paris n’avait pas vocation à rester « le gendarme de l’Afrique ».     Ces anciens accords, très décriés, dont des clauses sont restées secrètes, ont souvent servi à justifier, sur le plan juridique, des interventions militaires françaises pour défendre des régimes africains « amis » en difficulté.

Trois accords rénovés, qui prévoient la « non-intervention en cas de crise intérieure » selon Paris, ont déjà été signés avec le Togo et le Cameroun en 2009, et avec le Gabon en février 2010.     Des négociations ont été engagées pour réviser les accords restant avec les Comores, la Côte d’Ivoire, Djibouti et le Sénégal.

En février, la France et le Sénégal s’étaient entendues pour fermer les bases françaises à Dakar (1.200 hommes) une des trois installations permanentes de l’armée française en Afrique, avec Libreville et Djibouti.
Paris veut maintenir un « pôle de coopération militaire à vocation régionale » mais avec seulement 300 militaires à Dakar.

M. Joyandet a aussi signé un Document-cadre de partenariat (2010-2013) axé notamment sur l’éducation, le développement des infrastructures et la réduction de la pauvreté, puis s’est entretenu avec le président centrafricain

François Bozizé AFP

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Côte d’Ivoire : le président Gbagbo suspend le processus électoral

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Le président ivoirien Laurent Gbagbo Photo Issouf Sanogo

Les incertitudes qui planaient sur l’organisation de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, au mois de mars, viennent d’être levées d’une façon spectaculaire par le président Laurent Gbagbo. En annonçant, vendredi 12 février, la dissolution du gouvernement ainsi que celle de la commission électorale indépendante (CEI), le chef de l’Etat renvoie en effet le scrutin, sans cesse reporté depuis 2005, à une date indéterminée et risque de plonger le pays dans une nouvelle crise.Officiellement, M. Gbagbo a pris cette décision « afin de lever toute hypothèque sur le processus de paix et permettre à la Côte d’Ivoire d’aller en toute confiance à des élections propres », a-t-il annoncé dans une allocution télévisée. Il a demandé à Guillaume Soro, premier ministre sortant, de former lundi une nouvelle équipe. Un dirigeant du parti présidentiel, le Front populaire ivoirien (FPI), nous a précisé que M. Soro « a accepté de constituer un nouveau gouvernement dont seront exclus les ministres des deux principaux partis d’opposition ». Il s’agit du Rassemblement des républicains (RDR), d’Alassane Dramane Ouattara (68 ans), et du Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA), dirigé par Aimé Henri Konan Bédié (76 ans).

Guillaume Soro (38 ans), l’ancien chef de la rébellion des Forces nouvelles qui tenta de chasser Laurent Gbagbo (65 ans) du pouvoir par la force en 2002, dirigeait, jusqu’à vendredi, un gouvernement « d’union nationale » (pro-Gbagbo, ex-rébellion, opposition) en vertu de l’accord politique d’Ouagadougou en 2007. Depuis, les deux anciens adversaires semblent partager le même objectif : retarder les élections. Le chef de l’Etat, élu en 2000 pour un mandat qui n’aurait dû durer que cinq ans, s’accroche à un pouvoir que les urnes pourraient lui contester. Quant au premier ministre, le temps gagné lui permet d’épaissir sa stature politique en comptant sur l’épuisement de la vieille garde des partis historiques.

Enième report

On pressentait ce énième report du scrutin présidentiel depuis le début de l’année. Une polémique avait alors éclaté avec les accusations de « fraudes » lancées par le camp présidentiel contre le chef de la commission électorale, Robert Meugré Mambé, membre de l’opposition. Il était soupçonné d’avoir voulu inclure illégalement quelque 430 000 électeurs supposés proches de l’opposition sur les listes électorales. Ce dont il s’est toujours défendu. Le processus électoral, l’un des plus chers au monde, financé par la communauté internationale, s’était alors grippé. Quelle sera la réaction d’une opposition qui, depuis des années, demande vainement l’organisation d’élections libres et transparentes ? Osera-t-elle lancer ses militants dans les rues ? Chacun a encore en mémoire les manifestations de 2004, noyées dans le sang par les forces de l’ordre et les milices du pouvoir.

Christophe Châtelot (Le Monde)
Voir aussi : Rubrique France diplomatie L’élection doit absolument avoir lieu, Rubrique Afrique Un rapport sur les   manifestations de 2004,  Rencontre L’Afrique doit prospérer Rubrique Affaires, La Françafrique se porte bien, Simone Gbagbo entendue par les juges,

Côte d’Ivoire: l’élection doit « absolument » avoir lieu le 29 novembre

Le secrétaire d’Etat à la Coopération, Alain Joyandet, a déclaré mardi qu’il fallait « absolument » organiser l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire le 29 novembre comme prévu, estimant que « les listes » électorales « ne sont jamais parfaites ».

« Ces élections doivent être organisées absolument telles qu’elles ont été prévues », a déclaré M. Joyandet à TV5Monde.

« Quand il y a 6 millions et demi de personnes qui sont recensées en Côte d’Ivoire d’une manière sérieuse, peut-être qu’il n’y en a pas assez, mais en tout cas, ça permet d’organiser une élection qui soit le reflet de ce que souhaitent les Ivoiriens, et je pense qu’il faut maintenant rapidement aller à cette élection et ne pas la reporter », a-t-il ajouté.

Interrogé sur la question des listes électorales, M. Joyandet a répondu: « Vous savez les listes, elles ne seront jamais parfaites. Elles ne sont d’ailleurs nulle part jamais parfaites ».

Sur près de 6,4 millions d’électeurs potentiels recensés, plus de 2,7 millions posent problème car ils n’ont été retrouvés ni sur la liste électorale de la présidentielle de 2000 ni sur les registres administratifs retenus et pour l’heure rien ne garantit donc leur nationalité.

Le Premier ministre ivoirien, Guillaume Soro, a appelé vendredi à ne pas « escamoter le travail sur la liste électorale » sous « la pression du temps ».
Reportée depuis 2005, l’élection est censée clore la crise née du coup d’Etat manqué de 2002, qui a coupé le pays en deux.

Voir aussi : Rubrique Afrique Côte d’Ivoire Gbagbo suspend les élections, Un rapport sur les   manifestations de 2004,  Rubrique Affaire Simone Gbagbo entendue par les juges ,*

Affaire Kieffer: les juges français à Abidjan pour entendre Simone Gbagbo

Les juges français chargés de l’enquête sur la disparition du journaliste Guy-André Kieffer en Côte d’Ivoire en 2004 sont actuellement à Abidjan pour entendre cette semaine comme témoin Simone Gbagbo, l’épouse du président ivoirien.

Les juges d’instruction Patrick Ramaël et Nicolas Blot sont arrivés dimanche soir en Côte d’Ivoire, ont indiqué ces sources.

Ils doivent auditionner jeudi Mme Gbagbo, ainsi que le ministre d’Etat ivoirien chargé du Plan et du Développement, Paul-Antoine Bohoun Bouabré, selon des sources proches du dossier.

Mme Gbagbo et M. Bohoun Bouabré, qui ont par deux fois refusé de déférer à une convocation des magistrats à Paris, ont accepté d’être entendus à Abidjan, en présence de leurs avocats français, Georges Kiejman et Pierre Cornut-Gentille.

Ces auditions, auxquelles assisteront également des magistrats ivoiriens, sont toutefois conditionnées à trois autres auditions qui doivent se dérouler dans les jours précédents.

Les juges souhaitent notamment entendre Patrice Baï, à l’époque chef de la sécurité de la présidence, mis en cause notamment par le beau-frère de Simone Gbagbo, Michel Legré, qui est depuis revenu sur ses déclarations.

Les enquêteurs français ne soupçonnent pas le couple présidentiel ivoirien d’être impliqué directement dans cette affaire, mais certains cadres du régime liés aux milieux d’affaires.

Journaliste franco-canadien indépendant enquêtant sur diverses malversations en Côte d’Ivoire, notamment dans la filière cacao, Guy-André Kieffer a été enlevé le 16 avril 2004 à Abidjan. Il aurait été assassiné par ses ravisseurs. Son corps n’a jamais été retrouvé.

Voir aussi : Rubrique Françafrique : Elections