Rencontre Cinemed : Pour évoquer Marco Ferreri, Noël Simsolo révèle d’autres facettes du réalisateur.
Réalisateur, comédien, scénariste, historien du cinéma et auteur de roman noir, Noël Simsolo est l’invité du Cinemed. L’homme aux yeux doux et espiègles arbore un joli plâtre au bras gauche. Il participait hier à une table ronde dans le cadre de l’hommage rendu à Marco Ferreri qu’il a bien connu en tant qu’acteur et scénariste.
Né en 1944, Noël Simsolo a collaboré avec les grands noms du cinéma français, Eustache, Chabrol, Vecchialli, Godard, Tavernier… » Je viens d’appeler Mocky avec qui je dois bientôt tourner pour lui dire que j’avais le bras dans le plâtre. Il m’a répondu : très bien je n’aurais pas à t’en mettre un. » Un certain esprit de répartie qu’affectionne particulièrement Simsolo. » Ferreri était un peu comme ça, il captait les idées au vol. Il disait : je suis dans la rue. Je vois deux hommes qui se parlent, puis se disputent, ça me suffit pour en faire un film. » C’est ainsi que naissent des chefs d’œuvre connus comme La Grande Bouffe. Présenté dans la sélection française à Cannes en 1973, le film fait scandale. Avec un goût certain de la provocation, le réalisateur milanais signe des films moins connus, mais tout aussi hallucinant, comme Touche pas à la femme blanche (1974). » Dans l’appartement que lui avait prêté Piccoli, Marco faisait des concours de pâtes, avec Tavernier et Mocky et après ils regardaient des films. C’est ainsi que lui est venue l’idée de faire un film sur des gens qui meurent en mangeant. Pour Touche pas à la femme blanche, il voulait faire un film différent. Il a vu ce trou des Halls, ça lui a donné envie de faire un western dans une époque contemporaine. » Le film où l’on voit Custer (Mastroianni) et Buffalo Bill (Piccoli) débarquer dans le Paris des années 7O pour karchériser les Indiens traverse les âges sans en pâtir, ce qui témoigne de sa modernité. » Ces Indiens que l’on veut faire disparaître, c’est une parabole pour parler des algériens. Aujourd’hui cela peut très bien s’appliquer aux Roms « , souligne Noël Simsolo qui s’est fait embarquer dans le tournage alors qu’il était simplement venu dire bonjour.
A propos de la dimension politique de Ferreri, Simsolo met en lumière le réalisme du réalisateur italien. » Il était de gauche. Mais il restait lucide sur sa condition d’artiste bourgeois. D’ailleurs dans la plupart de ses films ses personnages principaux sont des bourgeois en rupture. Un peu comme Chabrol qui démonte la bourgeoisie de l’intérieur. » Un réalisme qu’il exprime aussi à travers son style : » C’était un amis d’Antonioni, de Pétri, de Rossellini et de Pasolini avec qui il entretenait une relation plus complexe, mais au niveau stylistique il est plus proche de l’éthologie de Godard dans son approche des motivations comportementales humaines. Il s’intéressait à la petitesse du désespoir. On l’a pris pour un comique, mais ce n’est pas ça. Il allait jusqu’au bout. A quel moment on met une balle dans le revolver et on tue sa femme comme dans Dillinger est mort. » Comme tous les grands réalisateurs modernes et subversifs, Ferreri n’a pas d’héritier même si certains cinéastes comme Mocky poursuivent leur chemin dans la même veine. » Ferreri était un moraliste pessimiste, pense Simsolo, Mais les pessimistes, on le voit actuellement avec les mouvements sociaux, sont les seuls à agir. Tout le monde savait que le gouvernement ne reculerait pas sur les retraites, les optimistes pensent que tout est pourri et qu’il n’y a rien à faire. Les pessimistes y vont quand même, ce sont les seuls qui ont de l’espoir. L’avenir leur appartient. «
Jean-Marie Dinh
Angoisse
Journée Dario Argento
Aujourd’hui un hommage est rendu au Maître du thriller italien, Dario Argento qui a présenté hier le film de Sergio Léone Il était une fois dans l’Ouest auquel il est associé en temps que scénariste. On retient de ce réalisateur sa période dite des années surnaturelles avec Suspiria, sorti en 1977, qui est un thriller surnaturel extrêmement violent considéré par beaucoup comme son meilleur film. Libéré des contraintes du format plus conventionnel, Suspiria est un essai irréel où l’histoire et les personnages ont moins d’importance que le son ou l’image. Argento avait prévu que ce film serait le premier opus d’un trilogie sur les trois mères (Mater suspiriarum, Mater tenebrarum et Mater lachrimarum), trois anciennes sorcières vivant dans 3 villes modernes différentes. Le second volet fut Inferno en 1980, va encore plus loin dans l’art pur. La trilogie des trois mères est aujourd’hui achevée grâce au troisième opus sorti en Italie le 2007 intitulé la troisième mère que l’on pourra voir ce soir à 21h suivi de quatre autres de ses films lors de Une nuit d’enfer au Centre Rabelais. A noter également une table ronde en présence du réalisateur à 17h espace Joffre au Corum.