Actoral 16

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Festival international des arts et des écritures contemporaines
propose de découvrir chaque automne à Marseille,
à travers le travail d’une cinquantaine d’artistes, la
richesse et la diversité des écritures d’aujourd’hui.
La 16eme édition se déroule actuellement
à Marseille jusqu’au 15 octobre

Notre époque aime les frontières. Elle aime cloisonner, simplifier,
rétrécir. Elle aime ce qui est facile à définir, facile à nommer, facile à
ranger. Elle aime nommer les incompatibilités : si c’est noir ce n’est pas
blanc, si c’est dehors ce n’est pas dedans, si tu es toi tu n’es pas l’autre.
Comme si le réel ne pouvait être défini que par ses bords, par la surface
qui l’oppose à ce qu’il n’est pas.
Mais ce que notre époque préfère entre tout, c’est l’identité. Son petit
plaisir, celui qui la fait vibrer et saliver, c’est la division en groupes,
sous-groupes et sous-sous-groupes, jusqu’à obtenir quelque chose
d’unique et d’absolument seul. L’individu, indivisible car isolé du reste,
défini par une liste sans fin de critères identitaires. Tu es celui qui aime
les chats mais pas les chiens, celui qui est né ici et pas là bas, tu crois
en cela et le reste t’est infâme, tu es moral à ta manière, tes goûts te
portent à tel endroit et tout le reste tu n’aimes pas, ça ne t’intéresse pas
car tu es comme ça, c’est cela que tu es.
Etonnant comme on se laisse enfermer par des limites imaginaires. Car
les frontières sont des concepts théoriques, qui n’engagent que ceux qui
y croient. Et dans le domaine de l’art, justement,
Hubert Colas n’y a
jamais cru.
Pour la 16ème fois cette année, il nous prouve l’inadéquation
des limites que l’on pose parfois entre les pratiques plastiques et
scéniques, musicales et écrites. Alors pour moi, qui ai tendance à
confondre scène et atelier, ma gauche de ma droite, c’est un immense
honneur que d’être invité à parrainer le Festival actoral.
Cette année encore, nous nous acharnerons à piétiner les limites.
Marseille, cette vieille transformiste folle qui a passé les siècles à se
réinventer, invite notre époque à la grande partouze. Elle y goûtera
enfin au plaisir des mélanges, allongée sur le dos, offerte entièrement
à la curiosité. Elle verra le musée s’accoupler au théâtre, la techno à la
philo, la science-fiction à la tragédie grecque. Les teuffeurs se mêleront
aux chercheurs, aux islamistes gays, aux chiens et aux chats, sous l’œil
bienveillant d’un Hubert Colas sévère et exigeant, déguisé en panda.
Les frontières sont ouvertes, passez quand vous voulez.
Théo Mercier
Voir aussi : Rubrique Festival, La révolution par l’écriture, Théâtre,  rubrique Livre Littérature française, rubrique Danse,