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« Le cinéma est une pensée dont les œuvres sont le réel. » Fidèle à ce précepte, Alain Badiou aborde le cinéma en tant qu’art de vivre et de penser. Il existe selon l’auteur, « un témoignage sur le monde propre au cinéma ». Le philosophe revient sur son approche personnelle du 7ème art à travers la compilation d’une trentaine de textes qu’il a consacrés au cinéma.
L’ouvrage présenté par Antoine de Baecque, permet une approche particulière et spécifique, assez caractéristique de la pensée de Badiou. Les textes proposent un parcours varié dans le cinéma de ces cinquante dernières années, des cinéastes de la modernité (Murnau, Rossellini, Oliveira, Antonioni, Godard) à certains films de l’Amérique contemporaine (Matrix, Magnolia), en passant par des expériences singulières (Guy Debord, le cinéma de 68…).
De film en film, par effet de ricochet, le livre nous invite à définir ou à redéfinir notre propre rapport au cinéma, ce qui n’est pas le moindre de ses mérites. De quoi nous donner du cœur à l’ouvrage pour tirer certains films du flou et de l’oubli. Ainsi qu’un peu d’exigence pour que notre interprétation révèle quelques bribes de vérité contemporaine.
Alain Badiou, comme d’assez nombreux penseurs de sa génération a été nourri jeune par le cinéma. Pour lui, parler d’un film procède d’un cheminement entre la perception et le trajet de l’idée qui l’accompagne. Ce passage de la cinéphilie à l’écriture s’est opéré chez Badiou avant l’engagement qu’on lui connaît pour la philosophie politique. Ce n’est pourtant pas un simple retour aux sources car l’auteur n’a jamais cessé de traquer les registres de sens qui traversent nos idées. En somme Badiou poursuit son travail critique.
Jean-Marie Dinh
* Alain Badiou, Cinéma, Nova éditions, 366 p, 26 euros.
Voir aussi : Rencontre Alain Badiou , Rubrique livre, Mai 68 en surchauffe, Rubrique Philosophie Deleuze et les nouveaux philosophes, Rubrique Politique entretien Jean-Claude Milner, Michela Marzano, Daniel Bensaïd,