Les intermittents du Festival « in » d’Avignon brandissent la menace de la grève

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La machine serait-elle en train de s’emballer contre l’accord du 22 mars sur l’assurance-chômage, et tout particulièrement contre les nouvelles annexes 8 (techniciens) et 10 (artistes) de l’Unedic ? On serait tenté de le croire, à lire l’avalanche de communiqués annonçant l’annulation de tel ou tel spectacle, ces dernières quarante-huit heures, ou à découvrir des initiatives inattendues, comme ce refus de siéger en commission des experts de la culture en Ile-de-France.

La mobilisation est partie du Printemps des comédiens, à Montpellier, en grève depuis mardi 3 juin, avec désormais une quinzaine de spectacles annulés, soit la presque totalité de cette vingt-huitième édition. Les salariés du Printemps des comédiens peuvent à présent déclarer « Nous ne sommes plus seuls maintenant », en guise de clin d’œil au titre de l’un des spectacles annulés – Nous sommes seuls maintenant, mis en scène par Julie Deliquet.

Le dernier communiqué en date a été envoyé aux rédactions mardi 10 juin, à 23 h 50, et il retiendra particulièrement l’attention du gouvernement. Ce communiqué émane en effet des intermittents du festival « in » d’Avignon. Après une réunion avec le nouveau directeur du festival, Olivier Py, ainsi qu’avec la nouvelle maire socialiste, Cécile Helle, le syndicat CGT et la Coordination des intermittents et précaires (CIP), ils ont clairement brandi clairement la menace de la grève. Le spectre de l’annulation du Festival, en 2003, ressurgit.

« Si l’Etat devait agréer l’accord du 22 mars, nous nous réservons la possibilité d’appliquer notre droit de grève dès le 4 juillet », soit dès l’ouverture du festival, « et le gouvernement en assumera les conséquences », écrivent les salariés du « in ». Ils rappellent, comme tant d’autres, que François Rebsamen avait signé en faveur des propositions alternatives sur l’assurance-chômage des intermittents, quelques semaines avant de devenir ministre du travail. « Ce désaveu marque une rupture avec les positions soutenues par le Parti socialiste concernant les enjeux de la culture dans notre société et notre quotidien », ajoutent-ils.

Dans une lettre dévoilée par Le Monde le 3 juin, Olivier Py a demandé au premier ministre, Manuel Valls, de prononcer « un moratoire » sur l’accord du 22 mars et de rouvrir les négociations.

MÉFIANCE À L’ÉGARD DE LA MISSION DE MÉDIATION

Le robinet, lui, est ouvert. Pour l’instant, c’est du goutte-à-goutte, avec une dizaine de communiqués par jour. Mais c’est le signe que la nomination, le 7 juin, par Manuel Valls, du député Jean-Patrick Gille, chargé d’une « mission de propositions » sur les annexes 8 et 10, dans un délai serré de quinze jours, n’a absolument pas apaisé les tensions. Au contraire : Jean-Patrick Gille s’étant déclaré favorable à l’agrément de l’accord du 22 mars, il est perçu avec une certaine méfiance par les professionnels de la culture mobilisés. Toutefois, le plus gros syndicat des employeurs du spectacle vivant, le Syndeac, a fait savoir, dans un communiqué, sa disponibilité et sa bonne volonté pour coopérer avec la mission Gille.


Des intermittents tout nus, pour accueillir Aurélie Filippetti. Mardi 10 juin, au festival Furies à Châlons-en-Champagne, trois compagnies ont décidé « la mort dans l’âme » de faire grève. La ministre de la culture et de la communication, Aurélie Filippetti, en déplacement au familistère de Guise, a été accueillie par des intermittents qui se sont mis tout nus, comme le rapporte le Courrier Picard.

Les agents de la DRAC Ile-de-France refusent de siéger. Les membres du comité d’experts de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) d’Ile-de-France, l’antenne du ministère de la culture en région, ont décidé « à l’unanimité », mardi 10 juin, de refuser de siéger en commission les 10,11 et 12 juin. « Nous refusons de siéger pour donner nos avis artistiques dans ce contexte alarmant », expliquent ces professionnels chargés de sélectionner et distribuer les aides aux compagnies ou aux établissements culturels franciliens. Parmi les signataires figurent Xavier Croci, directeur du Forum du Blanc-Mesnil, en Seine-Daint-Denis ; Caroline Marcilhac, directrice de Théâtre Ouvert, à Paris, et ancienne directrice de production du Festival d’Avignon, entre 2003 et 2011)…

Huit théâtres toulousains ont voté la grève, mercredi 11 juin, et demandent le non-agrément de l’accord sur l’assurance-chômage : le Théâtre du Grand-Rond, le Hangar, le Ring, le Théâtre du Chien blanc, le Théâtre du Pont-Neuf, la Cave Poésie, le Théâtre du Pavé et Le Fil à Plomb.

Le studio de cinéma McGuff en grève le 16 juin. Mardi, les employés d’Illumination Mac Guff, le studio de fabrication de films d’animation 3D – Moi, Moche et Méchant 1 et 2, Lorax – ont voté à l’unanimité la grève pour le 16 juin, journée nationale de mobilisation. Dans un communiqué, ils soulignent que « le régime spécifique de l’intermittence permet à la France de conserver sa “diversité culturelle” et de réunir les conditions nécessaires pour créer des films internationalement reconnus. »

Clarice Fabre

Source : Le Monde.fr | 11.06.2014

Voir aussi : Rubrique Festival, rubrique Société Mouvement sociaux, rubrique Théâtre, Direction artistique. Des idées pour renouveler le théâtre à Montpellier ,