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« La situation est devenue instable, car l’opposition socialiste n’est pas prête à servir de béquille à un gouvernement de droite aussi pro-austérité », a commenté à l’AFP Marina Costa Lobo, politologue à l’Université de Lisbonne.
L’alliance gouvernementale sortante a réussi la prouesse de remporter les élections législatives après quatre années sous le signe de la rigueur budgétaire, avec 38,6% des suffrages, contre 32,4% au Parti socialiste (PS), qui reste la principale formation d’opposition.
« Les électeurs ont envoyé un double message: ils veulent rester dans l’euro et, dans le même temps, ils ont exprimé un rejet de l’austérité », a expliqué Mme Costa Lobo, estimant que « la stabilité du gouvernement dépendra de la capacité de la coalition à faire des concessions ».
Car le score de la coalition, formée par le Parti social-démocrate (PSD, centre droit) et son partenaire conservateur (CDS), se situe bien en dessous des 50,4% obtenus en 2011, et lui a fait perdre sa majorité absolue dans un Parlement qui bascule à gauche.
Dès dimanche soir, M. Passos Coelho s’est dit prêt à former un nouveau gouvernement, tout en reconnaissant que ce nouveau rapport de forces demanderait « plus d’efforts à tous ».
– Main tendue –
Il a ainsi tendu la main au Parti socialiste en se disant prêt à négocier « les accords indispensables à la mise en oeuvre de réformes importantes », et affirmé que sa « tâche la plus urgente » était d’adopter un budget pour 2016 « qui garantisse la maîtrise des comptes publics et la réduction de la dette ».
M. Passos Coelho sera reçu mardi par le Président conservateur Anibal Cavaco Silva, qui doit nommer un Premier ministre en « tenant compte des résultats des élections », dont les chiffres définitifs seront connus le 14 octobre.
Après avoir menacé pendant la campagne de ne pas voter le budget d’un éventuel gouvernement minoritaire de droite, le patron du PS Antonio Costa s’est montré plus conciliant le soir des élections.
« Le PS ne contribuera pas à une majorité de blocage s’il n’est pas en mesure de proposer une alternative crédible de gouvernement », a indiqué l’ancien maire de Lisbonne à l’adresse de la gauche antilibérale, qui a enregistré dimanche une forte poussée.
Le Bloc de gauche, formation apparentée au Syriza au pouvoir en Grèce, réalise le meilleur score depuis sa création en 1999, avec 10,2% des suffrages, et dépasse pour la première fois le Parti communiste, qui obtient 8,3% des voix, tout de même son meilleur résultat en 15 ans.
– ‘Mesures difficiles’ –
Si M. Costa a prévenu M. Passos Coelho qu’il continuerait à se battre pour que le Portugal « tourne la page de l’austérité », il a également réaffirmé qu’il ne remettrait pas en cause les engagements du Portugal envers ses créanciers.
Le pays est sorti en mai 2014 d’un plan de sauvetage international sur trois ans, négocié en échange d’un prêt de 78 milliards d’euros accordé par l’Union européenne et le Fonds monétaire international.
« Les prochains mois s’annoncent particulièrement compliqués pour le gouvernement, qui aura davantage de difficultés à maintenir le rythme des réformes », a estimé Jesus Castillo, économiste à la banque Natixis.
« C’est une bonne nouvelle de savoir qu’un gouvernement peut encore gagner des élections après avoir pris des mesures difficiles, mais la suite reste incertaine », a réagi lundi le président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem.
Dans les rues de Lisbonne, les Portugais se montraient également inquiets. « J’espère que les socialistes sauront être raisonnables et que le pays ne sera pas ingouvernable, mais je ne crois pas que ce gouvernement tiendra quatre ans », craint Manuel Fernandes, un serveur de 49 ans.
D’éventuelles élections législatives anticipées ne pourront en tout cas pas se tenir avant juin 2016, dans la mesure où la Constitution portugaise empêche pendant six mois la dissolution d’une assemblée nouvellement élue.
Source : AFP 05/10/2015