Montpellier Danse. De la maîtrise du discours à l’art du langage…

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L’avant-gardiste McGregor met évidence l’intelligence et la perception du corps . Photo dr

Montpellier Danse. Deux créations données au Corum : Sidi Larbi Cherkaoui & Yabin Wang pour Genesis  et Wayne McGregor pour Atomos .

La rencontre du chorégraphe belge d’origine marocaine Sidi Larbi Cherkaoui et de Yabin Wang, chorégraphe chinoise connue en occident pour avoir dansé dans le film de Zhang Yimou, Le secret des poignards volants, aboutit à la création Genesis présentée au Corum vendredi et samedi dernier. Souvent le fruit des rencontres interculturelles vise une inscription dans le registre universel. Il est question en l’occurrence, des origines et du rapport à la science.

La pièce spectaculaire débute par une habile scénographie qui ouvre de belles pistes de regard sur les danseurs en éprouvette. Les mouvements se libèrent avec une belle virtuosité gestuelle. Mais l’omniprésence des musiciens compartimentés en arrière scène, le discours de la Génèse en voix off et la recherche permanente d’effets visuels avec boules de cristal et chevelure dans la lumière, prennent rapidement le pas sur la danse. La confrontation entre les cultures disparaît pour ne laisser qu’une surface consensuelle où l’effort de lisibilité devient manipulation. On entre dans l’esprit kermesse, un peu comme à la télé quand la volonté de fédérer frise le populisme.

Atomos
Sur la même scène cette semaine, le chorégraphe britannique Wayne McGregor, résident au royal Ballet depuis 2006, a présenté sa création Atomos. Une entreprise esthétique qui vise à dire le monde, en tant qu’espace commun partagé. Dans cette pièce, McGregor interroge les liens entre individus et groupe à partir du corps. Une ambitieuse orchestration qui s’organise en séquences de mouvements. Dans une précise partition, les danseurs semblent conduits par une énergie vibratoire qui ne se limite pas aux frontières du plateau.

L’écriture des gestes, la composition des mouvements qui se répondent sont directement liés à l’environnement visuel et sonore. La pièce débute dans une origine brumeuse où les corps se déploient librement. Elle évolue de manière constante faisant échos à la transformation inaltérable des sociétés humaines.

Atomos affiche un certain optimisme. Si par moments le flux binaire de la machine codifie les mouvements et l’inflation d’informations tarie l’espace onirique, le corps parvient à trouver la brèche qui le sort de l’anesthésie des pixels

. McGregor s’intéresse à l’énergie transmise et aux circuits de détection. Il joue sur la densité spectrale du mouvement en fonction de la tension des polarisations, met en évidence les singularités et les dépendances. Les ajustements qui s’opèrent d’un corps à l’autre pour finalement modifier le groupe. Son travail artistique agit en profondeur et en interactions.Wayne McGregor nous invite à nous déplacer, à faire un pas.

On ne peut pas comparer l’utilisation du discours et l’art du langage.

Jean-Marie Dinh

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