L’auteure et journaliste Naïri Nahapétian vient de signer le premier polar iranien. Invitée du Festival international de Roman noir, elle arrive à Frontignan aujourd’hui.
Pourquoi avoir choisi la littérature noire ?
J’en lis beaucoup. C’est un bon moyen d’aborder les arcanes du pouvoir, les réseaux de corruption et les pratiques troubles.
Le personnage de Narek comporte-t-il une part autobiographique ?
A travers ce voyage, il enquête sur son passé et la mémoire de son pays. Je lui ai donné un certain nombre de sensations que j’ai éprouvées en retournant en Iran. Le sentiment de se trouver en décalage, acculturée… Mais j’ai mis un peu de moi aussi dans les autres personnages, dans la féministe Leila, ou dans l’opposant laïc Mirza.
Leila est inspirée d’un personnage réel.
Elle a tenté de se présenter aux élections présidentielles de 2005. Et elle était cette année parmi les 400 candidats dont 4 – tous des hommes – ont finalement été retenu par le conseil.
Quelles sont les revendications des féministes ?
Je suis allée à la rencontre de féministes laïques en Iran qui m’ont présenté des féministes musulmanes. C’est un courant important qui émet une critique du mouvement religieux de l’intérieur. Leur thèse défend l’idée que l’Islam est défavorable aux femmes parce que ce sont les hommes qui l’interprètent, cette vision est aussi soutenue par les hommes réformistes.
Avec ce livre vous souhaitiez sortir des stéréotypes que porte l’occident sur l’Iran.
Les gens confondent souvent les fanatiques du régime avec la population qui serait, si l’on se fie aux médias, fanatique et anti-américaine. Paradoxalement, cette image correspond à ce que le régime au pouvoir souhaite montrer.
Comment réagissez-vous à l’actualité ?
On a vu un million de personnes défiler dans le calme. C’est un signe de maturité. Je suis étonnée que le pouvoir ait commis une erreur aussi grossière lors de ces élections. Cela exprime la peur et la difficulté des conservateurs de saisir la main tendue par Obama. Tous les éléments sont réunis pour un changement : l’impasse économique qui fait suite à la gestion désastreuse d’Ahmadinejad, la maturité politique de la société civile et la division très forte au sein du régime. Attendons de voir…
Recueilli par Jean-Marie Dinh
Voir aussi : Rubrique Iran Cinéma Téhéran, Les Chats persans
Qui a tué l’ayatollah Kanuni, éditions Liana Levi, 17 euros