C’est
On s’interroge parce qu’après No et moi (prix des Libraires 2008), traduit dans le monde entier, son cinquième roman est redoutablement efficace. Style simple, fluide, résonances percutantes, écrit comme un synopsis avec des phrases clés du genre : » Il n’arrive pas à dormir parce qu’il l’aime et qu’elle s’en fout. «
Il, c’est Thybault, le médecin de ville antihéros. » Sa vie se partage entre 60% de rhinopharyngites et 40% de solitude. Sa vie n’est rien d’autre que ça : une vue imprenable sur l’ampleur du désastre. » Elle, c’est Lila sa compagne. Thybault va trouver la force de s’en séparer, puis il sera pendu à son portable dans l’attente de son appel.
Il y a aussi la pauvre Mathilde. » Elle n’est pas malade. Elle est fatiguée. Comme les centaines de gens qu’elle croise tous les jours. » Dans le métro, elle a rejoint le cortège de ceux qui s’accrochent aux rampes. Le harcèlement moral dont elle est l’honnête victime la démolit. L’auteur en décrit merveilleusement le processus. Les milliers de lecteurs qui connaissent la situation ne pourront que l’attester. Mathilde est une mère courage qui élève seule ses trois enfants. Son mari est mort dans un accident de voiture. Elle a su remonter la pente.
Ce qui lui arrive est vraiment injuste. C’est l’héroïne des temps modernes qui rêve de s’oublier en se perdant à nouveau dans la culture de son entreprise. Mathilde refuse la compassion. C’est pourtant ce sentiment, que l’auteur suscite de ses lecteurs. On ne peut se résoudre à la voir souffrir. On est tenu en haleine, on demande l’happy end… Mathilde trouvera-t-elle Thybault sur sa route ?
Un roman miroir en somme sur la silencieuse misère humaine. Au cœur du déséquilibre, le livre est un succès annoncé.
Jean-Marie Dinh