Au 4e jour des 100 jours pour convaincre les Français.es, l’espace d’intervention du président Macron n’est plus rempli que de gens triés sur le volet.
Ganges 20 avril 2023. Parmi les autorités, dans la cour du collège Louise Michel de Ganges on voit le président de la République assis au centre d’une petite assemblée, vêtu d’une chemise blanche aux manches retroussées. Ces scènes comme celles où, il arrive dans l’établissement tout sourire, entouré d’élèves et d’une poignée de journalistes, on les observe sur les photos des médias de masse. Ce sont les images scénarisées qui vont tourner sur les écrans de télé. Sur le terrain, ni les 1500 d’Héraultais qui ont fait le déplacement, ni les habitants de la commune n’ont pu voir Emmanuel Macron officiellement venu à la rencontre des Français.es.
Nichée au pied des Cévennes, Ganges se réveille dans un autre monde en ce jeudi 20 avril 2023. Pour un jour, à la lumière de mille feux, la petite cité peuplée de 4 000 âmes n’est plus la ville oubliée dont on vient de fermer la maternité en envoyant les femmes accoucher dans la Métropole. Elle se met a rêver d’un avenir imminent où l’État prendrait courageusement la mesure de la fracture numérique, des déserts médicaux et des besoins en termes de sécurité civile.
En ce jour à marquer dans le calendrier, les Gangeois.es n’ont pas pu voir Emmanuel Macron, mais ils ont pu avoir un aperçu de son dispositif de sécurité avec le bouclage complet de la cité dès le lever du jour par 600 gendarmes. Les quatre agents de la police municipale avaient vraisemblablement besoin d’un peu de renfort. Ils n’auraient pas pu repousser les manifestants souhaitant entrer dans le périmètre quadrillé de la ville comme l’ont fait les escadrons de CRS tôt dans la matinée. Il aurait été difficile pour ces agents de fouiller toute personne désirant entrer en ville comme de refouler courtoisement les dangereux détenteurs.trices de casseroles pour appliquer l’arrêté préfectoral pondu la veille pour la circonstance.
Mercredi à Sélestat (Bas-Rhin), Emmanuel Macron avait assuré qu’il continuerait d’être sur le terrain malgré la colère qui s’exprime. « Il faut entendre la colère, je ne suis pas sourd à celle-ci », avait affirmé le chef de l’État. Mais dans la nuit, le président a vraisemblablement eu les oreilles qui bourdonnent. Alors le scénario a changé.
Les enseignants sécessionnistes du collège Louis Michel de Ganges qui se sont mis en grève et les enfants absents que les parents ont souhaité garder à la maison ce jeudi ne font pas partie du scénario. Et tous ceux qui font œuvre de subversion contre le violent mode de pouvoir de leur président doivent savoir en off qu’ils pourraient être rendus complice de violence. Encore de dangereux gauchistes dira sans doute le ministre de l’Intérieur, comme ces femmes qui sortent taper sur leur casserole dans la rue au lieu de rester en cuisine pour nourrir leurs enfants. Mais en la circonstance, on passera là-dessus car on est là pour tourner la page et ouvrir le dialogue direct. Une nouvelle ère commence.
Seul au pouvoir, seul à vouloir tourner la page
Pour imposer sa feuille de route néolibérale, Emmanuel Macron pense être l’élu. Sa conception de la hiérarchie paraît antidémocratique et antilibérale, mais pour lui cette révolution n’a qu’un seul chef. Rejetant tout « état d’âme », il a assuré que « la mission d’un président de la République n’est ni d’être aimé, ni de ne pas être aimé, c’est d’essayer de faire bien pour son pays et d’agir ». Tout dépend de lui, seulement de lui.
« C’est un homme qui marche seul, maintenant il marche dans le noir » ironise, le secrétaire de la CGT de l’Hérault, Serge Ragazzacci à l’occasion d’une coupure d’électricité dans le quartier du collège, revendiquée par le syndicat : « la coupure de courant pour l’arrivée d’Emmanuel Macron à Ganges durera moins longtemps que celle de ceux qui n’arrivent pas à payer leurs factures ». Qu’a cela ne tienne, on rectifie immédiatement le scénario avec un président manches retroussées qui prend le soleil dans la cours pour un débat ouvert. Au 4e jour des 100 jours pour convaincre les Français.es, l’espace d’intervention du président n’est plus rempli que de gens triés sur le volet.
Dans ce cadre, on voit Emmanuel Macron prendre la parole. Il accueille l’assentiment de ses sujets comme une marque de confiance : « Merci pour ce dialogue. Si on est là, c’est parce que le collège Louise Michel est un établissement dynamique. On part d’un constat : on veut que nos enfants soient mieux éduqués, qu’ils aient confiance en eux, qu’ils développent un esprit critique et ouvert au monde. »