Cinéma. Les combattants de Thomas Cailley « Il ne s’attend à rien, elle se prépare au pire »

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Cinéma. Thomas Cailley de passage au Cinéma Diagonal pour présenter son premier long-métrage : « Les Combattants » avec Adèle Haenel et Kévin Azaïs.


Qu’il est loin le temps de Pauline à la plage, Dans Les Combattants, on est toujours en été dans une petite ville balnéaire des Landes mais la lumière c’est légèrement voilée. Dans la jeunesse, l’insouciance n’est plus vraiment de rigueur. Pour son premier long métrage, Thomas Cailley met en scène une histoire entre deux jeunes de 20 à 25 ans, une tranche d’âge assez peu présente sur grand écran.

thomas-cailley« Il y a Arnaud, un jeune homme tranquille pour qui chaque jour ressemble au précédent. Son chemin croise celui de Madeleine, une météorite qui fonctionne avec un instinct de guerre. Il est fasciné et va découvrir son monde avant d’y tenir une place mais cette rencontre, importante pour Madeleine, ne vient pas à bout de ses angoisses. Je n’avais pas envie qu’elle change, qu’elle guérisse, explique le réalisateur venu présenter son film au cinéma Diagonal de Montpellier.

J’ai conçu ce film comme un voyage, où l’environnement définit les parties. Dans la première il y a la plage, qui correspond un peu à l’univers d’Arnaud (Kévin Azaïs), dans lequel le camion de recrutement de l’armée apparaît comme un contraste un peu trivial, puis on entre dans la communauté étrange de l’armée pour finir dans la nature ».

Introspection fragile

Le réalisateur qualifie son film de comédie à laquelle on peut adjoindre l’adjectif dramatique même si celui-ci ne manque pas d’humour. A l’instar du premier plan où Arnaud, fils de menuisier, cloue le bec à l’employé des pompes funèbres qui veut lui vendre un cercueil pour son père.

La force naturelle de Madeleine (Adèle Haenel) propulse le film dans un mouvement permanent plein d’énergie. « Elle ne laisse aucun espace entre décision et action, commente Thomas Caillet, c’est elle le moteur de la fiction , qui bouscule, percute l’univers d’Arnaud, fait bouger les choses ».

Le film très bien servi par les dialogues est bâti sur la relation. Arnaud personnage un peu flottant qui n’attend rien et Madeleine qui pense que tout est perdu et se prépare au pire. Y compris à l’entraînement aux techniques de combats qu’elle envisage comme suite logique à son Master en macroéconomie. Le réalisateur joue de cette ironie mordante en se gardant de tout cynisme. De même sa caméra montre comment l’armée exploite le rapport à l’inconscient des jeunes – en leur promettant aventure, action et dépassement – et la drôle de réalité qu’ils trouvent à l’arrivée mais en se gardant de tout jugement. Un peu comme si l’on tolérait les crises existentielles de la jeunesse tant qu’elles se plient à un certain conformisme. Ce qui vaut peut-être aussi pour les jeunes réalisateurs français.

Le montage permet de suivre l’évolution de la relation amoureuse qui se nourrit de la valeur initiatique des expériences traversées. L’influence mutuelle des deux personnages comble progressivement la distance qui les sépare. Une nuit ils se perdent dans la nature. Le réalisateur d’origine auscitaine dessine celle-ci comme une allégorie de la relation entre Arnaud et Madeleine. Le verdoyant et paisible paysage s’enflamme soudain et cette collision entre les éléments ouvre les portes à la fiction. On passe alors du réel à un autre monde, proche du film catastrophe. La composition lumière suit la partition de l’introspection fragile des personnages aux effets sublimes et menaçants de la mère nature. L’altérité serait-elle une alternative à la fin du monde ?

JMDH

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