Islamabad et Washington en désaccord sur la réconciliation avec les talibans

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En coulisse, les négociations de paix du processus de réconciliation impliquant le Pakistan, les Etats-Unis, l’Afghanistan et les insurgés talibans ont fait peu de progrès car le Pakistan et les Etats-Unis diffèrent sur la question des acteurs à impliquer dans la réconciliation, ont déclaré lundi à Xinhua des sources.

Pour trouver une solution politique à l’insurrection talibane longue de neuf années contre le gouvernement afghan soutenu par les forces de l’OTAN en Afghanistan, le Pakistan a présenté un groupe lié à Al-Qaïda, « le réseau Haqqani », dirigé par Jalauddin Haqqani et son fils Sirajuddin Haqqani, dont les bastions se situent dans le Waziristan Nord, région tribale du nord-ouest du Pakistan bordant l’Afghanistan, et dans les provinces de l’est Afghan de Paktika, Khost et Paktia.

Mais les Etats-Unis n’ont pas voulu que ce groupe intègre les négociations de paix car les autorités américaines considèrent ce groupe comme l’ennemi le plus malveillant des forces de l’OTAN.

« C’est l’étape vraiment controversée : pour le Pakistan, le réseau Haqqani doit faire partie des négociations mais les Etats- Unis voient cela sous un angle totalement différent », a expliqué lundi à Xinhua un diplomate qui souhaite garder l’anonymat.

Les diplomates américains ont également remis en question la sagesse du Pakistan qui considère qu’il est possible de négocier avec un groupe proche d’Al-Qaïda. C’est la principale raison qui pousse l’administration Obama à demander au Pakistan d’éliminer « les lieux sûrs » du groupe dans le Waziristan Nord.

Mais le Pakistan, qui a lancé une offensive militaire contre les militants dans les régions tribales ces deux dernières années, ne pense pas du tout comme les décideurs américains.

« Le Pakistan ne prendra jamais le risque d’agir contre le Réseau Haqqani car à un moment donné les Américains quitteront la région et le Pakistan souhaite garder ce dernier groupe ami proche de lui pour une réconciliation future », a expliqué Aslam Khan, analyste proche des Haqqanis.

Critiquant la politique déroutante des Etats-Unis, M. Khan a déclaré que les Américains veulent la réconciliation mais demandent au Pakistan d’évincer ce groupe ami qui peut être utile pour une résolution politique dans le futur. M. Khan a aussi démenti tout lien entre Al-Qaïda et le réseau Haqqani et a indiqué que le groupe est indépendant et le vrai disciple du chef suprême des Taliban, le Mollah Omar.

Roustam Shah Mohmand, ancien ambassadeur du Pakistan en Afghanistan, a vivement recommandé au Pakistan de ne pas prendre des mesures contre le réseau Haqqani sinon il paierait cela « trop cher ». « Si le Pakistan, pour 2 milliards de dollars d’aide américaine, attaque le réseau Haqqani, il devra faire face à de graves conséquences », a prévenu M. Mohmand.

Des sources officielles ont révélé que le président afghan Hamid Karzaï a réellement souhaité dialoguer avec les Taliban par le truchement du réseau Haqqani, mais la pression américaine l’a amené à changer son point de vue.

Il a été rapporté qu’une rencontre s’est tenue il y a deux semaines entre M. Karzaï et un groupe de trois anciens dirigeants Taliban, Abdoul Kabir, Sedre Azama et Anwaroul Haq Moujahed, qui ont été transportés par hélicoptère vers Kaboul en provenance de Peshawar au Pakistan.

Le principal but de la rencontre a été, selon les reportages, de trouver des moyens pour réduire l’influence du réseau Haqqani. A l’issue de la rencontre, des sources ont affirmé que les autorités afghanes ont décidé de libérer certains chefs militaires Taliban en échange d’un émissaire au Pakistan Abdoul Khaliq Farahi kidnappé par les militants en 2008 alors qu’il venait de Peshawar.

Les experts pakistanais de la questions ont indiqué que les Taliban sont une clé à la paix en Afghanistan et l’itinéraire qui mène aux Taliban se trouve au Pakistan et son groupe identifié du réseau Haqqani. « Tôt ou tard tous les acteurs clé en Afghanistan auront besoin de parler directement avec les Taliban s’ils veulent la paix dans leur pays », ont-ils estimé.

Xinhua

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