Paul
Veyne décrit l’homme sceptique, jusqu’à douter de la véracité et de l’avenir de sa propre entreprise, et qualifie sa pensée d’anthropologie empirique dont l’originalité est de se fonder sur la critique historique.
« Il vaut mieux partir du détail des pratiques, de ce qui se faisait et se disait, et faire l’effort intellectuel d’en expliciter le discours ; c’est plus fécond que de partir d’une idée générale et bien connue, car on risque alors de s’en tenir à cette idée, sans apercevoir les différences ultimes et décisives qui la réduirait à néant. » Foucault, nous apprend Paul Veyne, espérait voir l’école historique française s’ouvrir à ses idées. Mais les historiens n’étaient guère disposés à changer de grille méthodologique pour s’aventurer sur la problématique du discours ou celle d’une histoire de la vérité.
A propos du discours, l’auteur de L’histoire de la folie, souligne comment le discours de la déraison met en jeu tout un dispositif : « un ensemble résolument hétérogène, comportant des discours, des institutions, des aménagements architecturaux, des décisions réglementaires, des lois, des mesures administratives, des énoncés scientifiques, des propositions philosophiques, morales, bref : du dit aussi bien que du non dit. » Il semble que cette observation qui portait sur le XVIIe siècle n’ait guère évolué s’il nous vient à l’esprit de la transposer par exemple sur la délinquance sexuelle.
En revenant sur les trois vocables savoir, pouvoir, vérité, qui ont frappé les lecteurs de Foucault, le livre de Paul Veyne offre un regard éclairé sur la vie du philosophe et nous replonge dans son œuvre. Une invitation à contester les réalités toutes faites qui nous accablent.
Foucault sa pensée, sa personne, éd Albin Michel, 16 euros