Parti
L’exercice n’était pas réussi d’avance, mais dans la course d’obstacles qui conduit le PS à la présidentielle, l’élaboration du projet n’était pas le plus difficile. Pour preuve, le processus arrive à son terme sans qu’il n’ait été accompagné d’un de ces débats byzantins dont les socialistes ont l’habitude. Adopté samedi à l’unanimité par le Conseil national, le texte se veut la feuille de route de la gauche social-démocrate pour l’échéance de 2012. Pourtant il ne devrait être qu’un rapport d’étape avant que les choses sérieuses ne débutent enfin : le lancement des primaires qui, à l’automne prochain, désigneront le champion socialiste dans la course à l’Elysée.
C’est là tout l’ambiguïté de la stratégie élaborée par Martine Aubry et l’actuelle direction du PS. D’un côté, un projet très consensuel qui vise à cimenter l’unité du parti, de l’autre, une machine à désigner le candidat qui ne pourra qu’aiguiser les oppositions internes. Pour autant, tel qu’il est conçu, le projet du PS propose un état des lieux significatif de la pensée socialiste. Cette gauche qui se revendique « ambitieuse et sérieuse » inscrit ses pas dans la vieille histoire d’un réformisme tiède, capable d’innovations progressistes mais réticent à affronter les logiques du libéralisme économique. Malgré les défaites politiques de 2002 ou de 2007, le projet du PS reprend globalement des recettes qui ont montré leurs limites dans le contexte de la crise du capitalisme mondialisé. La cohabitation d’inspirations généreuses et de propositions timides caractérise les limites de l’exercice. Qui a au moins un mérite : rassembler toutes les sensibilités du parti. « Il a l’avantage de parler à tous », estime Henri Emmanuelli, figure de proue de la gauche du parti. « Un ensemble cohérent et crédible », ajoute Pierre Moscovici, strauss-kahnien pur et dur. « Crédibilité » aussi pour le hollandais Michel Sapin.
Chacun des candidats potentiels pourra ainsi utiliser cette boîte à outils programmatique. Que restera-t-il pour les différencier ? Et si les écarts idéologiques entre eux n’étaient pas aussi grands que la mise en scène de l’opposition des ambitions ne le laisse supposer ? Martine Aubry apporte des éléments de réponse en affirmant qu’un pacte existe entre elle et le patron du FMI, Dominique Strauss-Kahn. Manière de souligner que peu de choses les sépare sur leur vision respective de l’alternative à la droite.
Le Front de gauche
Pour cette objet politique né lors des européennes de 2009, l’heure de vérité approche. Le Front de gauche est-il en mesure de « révolutionner la gauche » comme le souligne ses fondateurs ? Ou ne restera-t-il que comme une énième tentative avortée de redonner des couleurs à la gauche radicale ? La présidentielle et les législatives de 2012 vont apporter la réponse. Pour l’heure, le parcours est prometteur même s’il reste très tortueux et semé d’embûches. Au plan électoral, les messages envoyés par les urnes ont ratifié l’esprit de cette nouvelle construction politique sans pour autant signé un chèque en blanc à ces initiateurs. « Du potentiel, mais peut mieux faire » ont affirmé les électeurs. Lancé à l’automne, le travail sur « un projet partagé » est sur de bons rails. Même si toutes les questions n’ont pas encore été tranchées.
Reste la question des candidatures : à la présidentielle et aux législatives. Le Parti de gauche et la gauche unitaire se sont prononcés en faveur de Jean-Luc Mélenchon. Pour sa part, la position énoncée ce week-end par la direction nationale du PCF muscle les fondations du Front de gauche. Sans ambiguïté, elle confirme la pérennité de cette expérience. « Le Front de gauche est pour nous la meilleure chance de relancer la gauche et de contribuer à son rassemblement pour gagner une majorité de gauche à la hauteur de ces attentes » affirme la résolution adoptée par une large majorité du Conseil national du PCF. A cet appel s’ajoute la prise de position courageuse du secrétaire national, Pierre Laurent, estimant « que la candidature de Jean-Luc Mélenchon peut être envisagée par notre parti dans le cadre d’un accord d’ensemble avec nos partenaires, un accord qui garantisse le respect d’engagements collectifs à la hauteur des enjeux de la situation politique inédite que nous vivons, la diversité de notre rassemblement et la place majeure de notre parti ».
Il revient désormais à l’ensemble des adhérents communistes de se prononcer sur la candidature soutenue par le PCF et surtout à confirmer ou pas cette stratégie du Front de gauche que conteste une partie des responsables et des militants. Un choix essentiel pour le Parti communiste. Si l’heure de vérité va sonner pour le Front de gauche, elle concernera tout autant le PCF parvenu à un tournant majeur de sa longue histoire.
Europe-Ecologie-les Verts
Le contexte change mais l’histoire se répète pour l’écologie politique. Les poussées électorales et la naissance d’un nouveau parti n’ont pas empêché le retour des querelles de chapelle. Qui traduisent, en fait, l’ambiguïté du positionnement politique d’EE-Les Verts sur l’alternative au libéralisme ou encore sur les alliances politiques.
Plus encore que celle d’Eva Joly, la candidature annoncée de Nicolas Hulot renforcent ces zones d’ombre. L’animateur d’Ushuaïa et de TF1 devrait s’exprimer cette semaine. Choisira-t-il d’aller seul à la bataille ou acceptera-t-il le cadre des primaires vertes ? Son entourage entretien le doute. Les supporters d’Eva Joly évoque la nécessité de « travailler ensemble » mais exprime leur scepticisme sur la ligne choisie par Nicolas Hulot.
Christian Digne (La Marseillaise)