Les détectives en quête d’éthique

Parmi les sujets au cœur des débats  de la profession, les  enquêteurs aspirent à modifier les représentations qui portent sur leur métier. L’adoption d’une charte éthique est à l’ordre du jour avec le concours attentionné de Marc Agi qui a siégé pendant 12 ans à la Commission nationale des droits de l’Homme

« J’agis en citoyen externe à la profession précise Marc Agi (1), mais la profession peut être amener à s’occuper de vous, il faut donc s’occuper d’elle, indique-t-il avec une sagesse dénuée de malignité. « Nous avons le droit de les aider à universaliser leur profession, » plaide l’illustre défenseur des droits de l’Homme qui met volontiers sa compétence au service des professions à éthique (policiers, magistrats, avocats, médecins, enseignants, journalistes…)

Loin des idées communes chères à la littérature et au cinéma, la démarche éthique ne vise pas à corriger les défauts supposés du détective peu scrupuleux se livrant quotidiennement à des activités illégales ou illicites pour le compte de ses clients. D’ailleurs, les entorses au droit concerneraient plutôt la divulgation de renseignements personnels. Mais là encore ce serait faire fausse route car comme l’explique Marc Agi : « L’éthique concerne justement tout ce qui n’est pas encadré par le droit. Dans les pays totalitaires, il y a beaucoup de droits et très peu de liberté. L’éthique ne consiste pas à relever et à corriger les défauts mais à trouver le côté positif dans l’exercice de sa pratique. Ce sont les professionnels eux même qui doivent établir leur charte. Ma mission consiste à les aider à rechercher les éléments qui vont leur redonner une crédibilité et une confiance tout en faisant progresser les droits de l’homme » explique l’auteur de l’Encyclopédie des libertés. Il faut une fois encore aller contre les idées reçues pour constater que dans le cadre du travail de détective, les opportunités d’améliorer les libertés, ne concernent pas les poules de luxes mais plutôt les gens pauvres. En effet, dans la majorité des cas les personnes ayant recours aux enquêteurs, le font parce que la justice n’a pas pu faire valoir leurs droits.

« En approchant les praticiens des droits de l’homme on fait progresser les droits de l’Homme en le faisant respecter par les professionnels, explique Marc Agi dont la méthodologie commence par une clarification des concepts, la déontologie régule les comportements à l’égard des confrères. La morale s’adresse au passé au nom de certaines valeurs, alors que l’éthique c’est qu’est ce que je fais devant ce problème ? »

Exercer sa pratique sur la personne humaine revient pour les enquêteurs à mettre en œuvre certains droits fondamentaux comme l’accès à l’information. Pour Marc Agi, il faut aller plus loin et étendre le débat : « si chacun exerce éthiquement son métier, il peut se rendre universellement utile et, ainsi, contribuer au bien commun. » La démarche repose sur le volontariat, à qui le tour ?

(1) Marc Agi a été, entre 1991 et 2002, membre de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme, où il a notamment œuvré pour l’adoption d’une Charte d’éthique commune aux professions s’exerçant directement sur la personne humaine.