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Rencontre. Michel Terestchenko est venu présenter chez Sauramps, la célèbre expérience sur la soumission à l’autorité de

Milgram, dont il signe la préface.

En 1961, alors que le procès Eichman fait la une des journaux, le psychologue américain Stanley Milgram imagine un programme de recherche sur l’obéissance à l’autorité. Présenté comme une expérience sur l’apprentissage, les sujets actionnent un panneau de commande doté d’une série de commutateurs allant graduellement du choc electrique très léger au choc extrême. Au fil du déroulement, les sujet reçoivent l’ordre de délivrer des chocs de plus en plus élevés aux personnes  qui se trompent de réponse.

En réalité, l’expérience visait à déterminer le point de rupture, définit comme le moment où les personnes refusent d’obéir aux ordres des scientifique. A 300 volts, les victimes frappe violemment sur la cloisons, à partir de 315 volts, ils cessent de répondre et les coups s’arrêtent. A la fin de la séance 65% avaient poussé l’obéissance jusqu’à accepter d’envoyer , par trois fois, la décharge maximale de 450 volts.

« Les résultats sont terrifiants et déprimant » constate Milgram qui cherchait, comme Arendt,  à  s’expliquer les causes de l’extermination massive durant la seconde guerre mondiale. Cette expérience  démontre que des gens ordinaires, dépourvus de toute hostilité, peuvent massivement accomplir des actions abominables au nom de l’obéissance. « L’expérience Milgram met à mal un certain nombre de présuposés, comme celui que les gens ne sont nullement enclin à faire souffrir un innocent. Celui qui voudrait qu’en l’absence de coercition, le sujet reste libre et maître de ses actes, ou encore celui qui pose que le moi profond décide de ses actions à partir d’un choix raisonné de valeurs »,  souligne Michel Terestchenko.

Plusieurs expériences scientifiques conduites depuis confirment cette tendance « L’expérience a été critiquée en raison des problèmes déontologiques qu’elle soulève. Il serait impossible de  la reconduire dans un cadre scientifique aujourd’hui. En même temps, on a autorisé en 2010 la diffusion sur France Télévision de l’émission Le jeu de la mort, où le pouvoir de l’animateur de télévision conduit les gens à commettre des choses cruelles. A un autre niveau, la situation de tournage de la palme d’Or 2013, pose la question du cinéma en tant que système, est ce que l’art a tous les droits ? »

Pour  Terestchenko, il faut avoir conscience « de notre vulnérabilité » face aux conséquences potentiellement destructrice de l’obéissance, et au-delà de nous-même, et veiller à contrôler les structures hiérarchiques, qui par nature , s’organisent en exigeant la docilité et la soumission de leur membre, dans les institutions et les entreprises.

Jean-Marie Dinh

Expérience sur l’obéissance et la désobéissance à l’autorité, ed de La Découverte  Zone

Voir aussi : Rubrique Essais, La torture une pratique institutionnelle,