Quelle place donnerons nous à la culture en 2018 ?

Concert du Festival de Radio France Montpellier Occitanie place de l’Europe à Montpellier.

Concert du Festival de Radio France Montpellier Occitanie place de l’Europe à Montpellier.

Tels qu’ils sont présentés par les institutions et les responsables politiques, les intentions et les budgets en faveur de la culture sur le territoire sont au beau fixe. Mais peu d’acteurs s’interrogent sur ce que sous-tend vraiment la notion de culture et de compétence culturelle…

Alors que la Valette (Malte), capitale européenne de la culture en 2018, débute en préambule les festivités avant la cérémonie officielle d’ouverture prévue pour le 20 janvier, les conditions climatiques, politiques, sociales et démocratiques du monde, ne cessent de se dégrader. Si bien qu’on peut s’interroger au niveau global comme local, sur le rôle que pourra bien jouer la culture cette année pour défendre l’ouverture d’esprit, la tolérance, et les idées si nécessaires au savoir vivre ensemble qu’au domaine démocratique.

L’aspect culturel de la construction européenne devrait être un élément essentiel mais le chemin pour y parvenir paraît bien long. L’idée de désigner une capitale européenne de la culture s’inscrit sur le papier avec une volonté affichée de rapprocher les Européens en mettant en avant la richesse et la diversité des cultures du continent. En pratique cette précieuse désignation sert souvent à mettre en oeuvre des plans de rénovation urbaine assez éloignés des objectifs affichés. Ce n’est alors pas la culture qui transforme la ville mais la ville qui se transforme en prenant la culture pour alibi.

Ambitions culturelles
Après Marseille en 2013, le maire Philippe Saurel a annoncé sa volonté de candidater pour que Montpellier soit Capitale Européenne de la culture en 2028. L’idée n’est pas saugrenue et elle a le mérite de se trouver en correspondance avec un axe de développement culturel structurant et constant que les différents maires de Montpellier ont maintenu depuis Georges Frêche.

« Il faut bâtir  hashtag #MontpellierDestination Culture. Nous disposons des ingrédients pour y parvenir, se félicité Philippe Saurel,  la croissance de la ville, sa jeunesse, 30% des habitants ont moins de 30 ans. Le caractère universitaire  d’une ville monde . C’est-à-dire une ville dans laquelle se reflète tous les visages de la planète.» Cette volonté de conforter l’image de Montpellier à la culture se traduit dans les chiffres. Elle représente 64M d’investissement en fonctionnement jusqu’à la fin du mandat de Phillipe Saurel.

Le budget national de la culture sera conforté en 2018. Il avoisine les 10 milliards d’euros. Le ministère de la Culture  fixe « la vie culturelle, la cohésion sociale et le dynamisme économique des territoires» au rang de ses priorités.  En 2018, le ministère de la Culture augmentera la part de ses crédits déconcentrés,  » pour que son action se déploie au plus près des acteurs de terrain» a assuré la ministre de la Culture Françoise Nyssen  lors de sa première visite à Montpellier.  Dans sa profession de foi pour 2018, la ministre de la Culture assure que les collectivités locales, associations, et citoyens bénéficieront d’un montant de 860 M, (en hausse de 6 %) afin de renforcer, sur tout le territoire, l’action publique en faveur de la culture et de lutter contre le sentiment d’abandon qu’exprime une partie des Français.

Une Chambre en Inde d’Ariane Mnouchkine au Printemps des Comédiens 2017.

Une Chambre en Inde d’Ariane Mnouchkine au Printemps des Comédiens 2017.

Zones blanches et paupérisation artistique
Sur le terrain pourtant ce sentiment est bien réel. A travers les différences sociales et territoriales s’expriment les zones blanches de la culture. La perception des inégalités culturelles s’observe à travers le caractère plus ou moins élitaire de la fréquentation des lieux de culture consacrés comme les théâtres et les musées. Mais pas seulement, les études sur le sujet laissent apparaître que la sensibilité aux inégalités culturelles s’inscrit dans une vision critique de la société française et traduit un intérêt marqué pour les questions de justice sociale.

Dans le secteur du spectacle le développement des activités artistiques sur le territoire est en recul. Les artistes subissent une crise qui s’inscrit dans la durée. Le phénomène de paupérisation  artistique est intimement lié à la mutation d’un secteur ou les prescripteurs eux-même peinent à s’y retrouver entre les objectifs de remplissage, et la qualité de l’offre.

Maillage culturel du territoire
Dans un contexte de baisse des dotations publiques, pour renforcer l’égalité d’accès à la culture et maintenir un aménagement culturel équilibré du territoire, la Région Occitanie a adopté un budget (96,1M) en augmentation de 12% pour la culture et le patrimoine. Le Conseil Départemental de l’Hérault maintient lui aussi une politique volontariste en matière culturelle. Il versera 4,8 M à la Métropoles de Montpellier pour le maintient des festivals sur le Domaine d’O dont de la partie Nord relève depuis le début de l’année de La Métropole. Les festivals Arabesques, Folie Lyriques ; Nuits d’O, le Printemps des comédiens et Saperlipopette seront donc pérennisés ainsi que la saison d’hiver du Domaine d’O. Plus à l’Ouest, l’institution départementale projette de lancer cette année un vaste projet sur le Domaine départemental de Bayssan à Béziers. Un Théâtre en dur va remplacer le chapiteau et un amphithéâtre de plein air verra le jour.

Aux volontés politiques affirmées de  la Région, du département et de la Métropole s’ajoute l’initiative volontariste des villes comme Sète, Frontignan ou Lodève qui ont fait de la culture un axe de développement.

Difficile maillage culturel du territoire
La multiplicité des acteurs publics naguère à l’origine des financements croisés qui pouvaient bénéficier aux acteurs et aux structures artistiques a été remise en question. Par la réduction des budgets publics, d’une part, notamment celle de l’Etat qui garantissait une certaine qualité de l’offre artistique, et par la réforme territoriale d’autre part. On peut le mesurer avec la menace qui plane sur l’Opéra Orchestre national de Montpellier depuis la création de la grande Région Occitanie. Les économies d’échelle impactent par ailleurs les mécanismes de la gouvernance des politiques culturelles comme on le constate à l’échelle de la Métropole de Montpellier dans la redistribution des postes et des fonctions en dépit de l’expérience acquise.

L’aspect culturel sous-tend la notion d’appartenance commune et de lien à cultiver. Universalité des valeurs et diversités des expressions sont les deux faces d’une même monnaie qui ne peut sonner au fond d’un tiroir caisse.

Jean-Marie Dinh

Source La Marseillaise 20/01/2018

Voir aussi : Actualité locale, rubrique Politique, Politique culturelle, rubrique Montpellier,

Saison Montpellier Danse. « Le juge de paix, c’est la salle Berlioz du Corum »

Sankai Juku Meguri.  Photo dr

Sankai Juku Meguri. Photo dr

La saison 2016/2017 de Montpellier Danse sera attractive. Elle vise une reconquête du public. Dans le même temps les programmateurs cherchent de nouvelles cohérences.
Montpellier

Montpellier Danse a présenté sa nouvelle saison la semaine dernière à l’Agora. L’éclectisme reste de rigueur, Flamenco, Hip hop, Butô… figurent entre autres réjouissances des propositions à venir. La facture générale de la programmation s’oriente vers une consolidation de la fréquentation à un moment où les changements et les questionnements interrogent sur les processus artistiques mobilisables.

« Mes récentes déclarations ont souvent été mal comprises », a tenu à signifier Jean-Paul Montanari qui lors du dernier festival Montpellier Danse avait évoqué la fin de la danse contemporaine. « Ce que je voulais exprimer, c’est que nous sommes en train de muter. Que les artistes comme Cunningham, Béjart, Pina Bausch… et les traces laissées qui ont été à l’origine du mouvement, sont en train de disparaître. On passe à autre chose, sensiblement différent. »

Le ballet romantique Giselle, dansé par le Ballet du Capitole de Toulouse mis en musique par l’Orchestre national de Montpellier illustre en ouverture de saison la naissance de la nouvelle Région Occitanie. Tandis qu’en coulisses les acteurs culturels cherchent une nouvelle cohérence.

« Nous voulons prendre nos métiers en charge, l’idée consiste à nous regrouper en GIE  entre structures de taille similaire, comme le théâtre/garonne à Toulouse, afin de poursuivre notre mission, notamment le soutien aux artistes et à la diffusion de leurs oeuvres

Des réunions  ont débuté pour envisager la transition. De fait, le changement de périmètre territorial, la réduction générale des budgets, et celle du pouvoir d’achat des spectateurs pèsent de plus en plus lourdement sur les programmateurs artistiques qui naguère, disposaient  de plus d’autonomie pour constituer leur programmation.

« Cela ne veut pas dire que nous sommes condamnés aux consensus permanent, affirme Jean-Paul Montanari, on peut aussi tomber d’accord pour soutenir et programmer dans plusieurs lieux des artistes comme Didier Wampas dont le travail n’est pas des plus faciles à défendre. »

Gérer les contraintes

Dans ce contexte, le rapport entre  artistes programmateurs et tutelles s’avère complexe. Mais il donne l’occasion aux acteurs de travailler ensemble. C’est le cas de l’Orchestre de Montpellier qui réitère son partenariat avec Montpellier Danse et l’artiste issue du hip hop Hamid El Kabouss qui s’attaquera cette année aux quatre saisons de Vivaldi (version remix) en avril à l’Opéra Comédie après avoir présenté l’an passé la très convaincante Boîte à Joujoux de Debussy.

Le budget de Montpellier Danse  qui tourne autour de trois millions d’euros se compose de 21% de recettes propres. Sur les 29 représentations payantes (une trentaine sont gratuites) d’où l’importance de remplir le Corum. « Contrairement à l’idée répandue, il est plus facile de faire des entrées en proposant des pièces pointues ou expérimentales dans des petits lieux que de remplir le Corum, affirme Jean-Paul Montanari. Ce qui est plus difficile, c’est de faire se retrouver les gens dans une grande salle autour d’une belle proposition artistique.  Le juge de paix c’est la salle Berlioz. »

Giselle, Mourad Merzouki, José Montalvo, Philippe Decouflé, sont des spectacles calibrés à cet effet. Sur la même scène mais dans une veine assez  différente on pourra voir  en janvier la création Butô  Meguri de Sankai Juku. A découvrir également la création Mass B de Béatrice Massin à l’Opéra Comédie, le duo intercontinental I-Fang Lin et François Marry dans  En chinoiseries, donné au Théâtre La Vignette, Am I an Ashke Nazi, du sud africain Steven Cohen,  spectacle accueilli à hTh. Et les propositions des artistes en résidences, Fabrice Ramalingom, Rita Cioffi, Matthieu Hocquemiller, Marlene Monteiro Freitas

JMDH

Source La Marseillaise

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