Dans l’engrenage de la terreur. Cinq conflits entremêlés

Par Pierre Conésa*

L’engouement quasi unanime des responsables politiques pour la « guerre » traduit une grave méconnaissance de la réalité du terrain. Décidé durant l’été 2014, l’engagement militaire occidental ajoute une cinquième strate à une superposition de conflits qui embrasent l’aire arabo-islamique.

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En 1979, la révolution iranienne mettait en place le premier régime politique officiellement « islamique », mais en réalité exclusivement chiite. Elle revivifiait ainsi le conflit ancestral entre sunnites et chiites, qui représente la première strate d’une lente sédimentation. Quand, après sa prise du pouvoir à Téhéran, l’ayatollah Rouhollah Khomeiny demande une gestion collective des lieux saints de l’islam, le défi apparaît insupportable pour l’Arabie saoudite. Un an avant de trouver la mort près de Lyon à la suite des attentats de 1995 en France, le jeune djihadiste Khaled Kelkal déclarait au sociologue allemand qui l’interrogeait : « Le chiisme a été inventé par les juifs pour diviser l’islam » (1). Les wahhabites saoudiens ont la vieille habitude de massacrer des chiites, comme en témoignait dès 1802 la prise de Kerbala (aujourd’hui en Irak), qui se traduisit par la destruction de sanctuaires et de tombeaux, dont celui de l’imam Hussein, et le meurtre de nombreux habitants.

Cette « guerre de religion » déchire aujourd’hui sept pays de la région : Afghanistan, Irak, Syrie, Pakistan, Liban, Yémen et Bahreïn. Elle surgit sporadiquement au Koweït et en Arabie saoudite. En Malaisie, le chiisme est officiellement banni. A l’échelle de la planète, les attentats les plus aveugles, comme ceux commis durant des pèlerinages, tuent dix fois plus de musulmans que de non-musulmans, les trois pays les plus frappés étant l’Afghanistan, l’Irak et le Pakistan. L’oumma, la communauté des croyants, que les salafistes djihadistes prétendent défendre, recouvre aujourd’hui un gigantesque espace d’affrontements religieux. Dans ce contexte, on comprend pourquoi Riyad mobilise beaucoup plus facilement ses avions et ses troupes contre les houthistes du Yémen, assimilés aux chiites, que pour porter secours au régime prochiite de Bagdad. On voit mal pourquoi les Occidentaux devraient prendre position dans cette guerre, et avec quelle légitimité.

La deuxième guerre est celle que mènent les Kurdes pour se rendre maîtres de leur destin, en particulier contre l’Etat turc. Elle est née en 1923, dans les décombres de l’Empire ottoman, avec le traité de Lausanne, qui divisait le Kurdistan entre les quatre pays de la région : Turquie, Syrie, Irak et Iran. Les nombreuses révoltes qui ont secoué le Kurdistan turc entre 1925 et 1939 ont toutes été écrasées par Mustafa Kemal Atatürk. Depuis les années 1960, tous les soulèvements, en Turquie, en Irak ou en Iran, ont été noyés dans le sang, dans l’indifférence de la communauté internationale. Depuis 1984, cette guerre a causé plus de 40 000 morts en Turquie, où 3 000 villages kurdes ont été détruits, pour un coût estimé à quelque 84 milliards de dollars (2).

Nul ne devrait être surpris qu’Ankara ait laissé affluer les candidats djihadistes vers les deux principales forces dans lesquelles ils se reconnaissent, le Front Al-Nosra et l’Organisation de l’Etat islamique (OEI), puisqu’elles combattent les Kurdes d’Irak et surtout de Syrie, très proches de ceux de Turquie. Principale menace pour Ankara, le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) reste classé comme groupe terroriste par l’Union européenne et les Etats-Unis, et ne peut recevoir d’aide militaire occidentale. Seul pays de la région à appartenir à l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) et à avoir la capacité de modifier la situation militaire sur le terrain, la Turquie a fini par rejoindre la coalition. Mais elle concentre ses moyens sur la reprise des affrontements avec le PKK et voit d’un mauvais œil les Kurdes d’Irak et de Syrie gagner une indépendance de fait.

Troisième guerre en cours : celle qui déchire les islamistes entre eux depuis la guerre du Golfe (1990-1991) et plus encore depuis les révoltes arabes. La rivalité la mieux connue oppose les Frères musulmans, soutenus par le Qatar, et les salafistes, soutenus par l’Arabie saoudite, en Egypte, en Libye ou en Tunisie. Plus nouvelle est la concurrence entre, d’une part, Al-Qaida et ses franchisés et, d’autre part, les affidés de M. Abou Bakr Al-Baghdadi, le chef de l’OEI. Au cours des premiers mois de 2014, ces derniers ont pris le pas sur le Front Al-Nosra, filiale locale d’Al-Qaida en Syrie, au prix de plus de 6 000 morts (3). La proclamation du « califat » a suscité de nombreux ralliements. Les combattants étrangers de l’OEI proviennent d’une centaine de pays. En désignant M. Al-Baghdadi comme leur ennemi principal, les pays occidentaux orientent de façon décisive la mobilisation des djihadistes à ses côtés.

Enfin, l’une des guerres les plus meurtrières, qui a fait près de 250 000 morts et des millions de réfugiés, est celle que mène le président syrien Bachar Al-Assad contre tous ses opposants.

Riyad envoie une quinzaine d’avions de combat en Irak, contre une centaine au Yémen

 

La bataille que livrent les Occidentaux apparaît, elle, comme un nouvel épisode d’une guerre beaucoup plus ancienne, avec une autojustification historique insupportable pour les populations de la région. Faut-il remonter aux accords Sykes-Picot, ce partage colonial de la région entre la France et le Royaume-Uni sur les ruines de l’Empire ottoman ? Faut-il remonter à Winston Churchill, alors secrétaire à la guerre du Royaume-Uni, faisant raser des villes et des villages kurdes — bombardés au gaz chimique ypérite — et tuer les deux tiers de la population de la ville kurde de Souleimaniyé, ou réprimant violemment les chiites irakiens entre 1921 et 1925 ? Comment oublier la guerre Iran-Irak (1980-1988), dans laquelle Occidentaux et Soviétiques soutinrent l’agresseur (Bagdad) et mirent sous embargo l’agressé (Téhéran) ? M. Barack Obama est le quatrième président américain à envoyer des bombardiers en Irak, pays déjà meurtri par vingt-trois ans de frappes militaires occidentales. Après l’invasion américaine, entre 2003 et 2011, près de 120 000 civils ont été tués (4). En 2006, la revue médicale The Lancet estimait le nombre de décès imputables à cette guerre à 655 000, cette catastrophe démographique s’ajoutant aux 500 000 morts causés par l’embargo international entre 1991 et 2002. Aux dires de l’ancienne secrétaire d’Etat Madeleine Albright, le 12 mai 1996 sur CBS, cela en « valait la peine ».

Aujourd’hui, pourquoi les Occidentaux interviennent-ils contre l’OEI ? Pour défendre des principes humanistes ? Il est permis d’en douter lorsqu’on constate que trois pays de l’alliance continuent à pratiquer la décapitation, la lapidation et à couper les mains des voleurs : le Qatar, les Emirats arabes unis et — très loin devant les deux premiers — l’Arabie saoudite. La liberté religieuse ? Personne n’ose l’exiger de Riyad, où une cour d’appel vient de condamner à mort un poète palestinien pour apostasie (5). S’agit-il alors d’empêcher les massacres ? L’opinion arabe a du mal à le croire quand, deux mois après les 1 900 morts des bombardements israéliens sur Gaza, qui avaient laissé les capitales occidentales étrangement amorphes, la décapitation de trois Occidentaux a suffi pour les décider à bombarder le nord de l’Irak. « Mille morts à Gaza, on ne fait rien ; trois Occidentaux égorgés, on envoie l’armée ! », dénonçait un site salafiste francophone.

Pour le pétrole, alors ? L’essentiel des hydrocarbures de la région s’en va vers les pays d’Asie, totalement absents de la coalition. Pour tarir le flot des réfugiés ? Mais, dans ce cas, comment accepter que les richissimes Etats du Golfe n’en accueillent aucun ? Pour protéger les « droits de l’homme » en défendant l’Arabie saoudite ? Riyad vient d’en démontrer sa conception novatrice en condamnant M. Ali Al-Nimr, un jeune manifestant chiite, à être décapité puis crucifié avant que son corps soit exposé publiquement jusqu’au pourrissement (6).

Sur le plan militaire, les contradictions sont plus évidentes encore. Aujourd’hui, seuls les avions occidentaux bombardent réellement l’OEI. Les Etats-Unis en déploient près de 400, et la France une quarantaine, dans le cadre de l’opération « Chammal », avec l’arrivée du porte-avions Charles- de-Gaulle (7). L’Arabie saoudite dispose d’environ 400 avions de combat, mais elle n’en engage qu’une quinzaine en Irak, soit autant que les Pays-Bas et le Danemark réunis. En revanche, au Yémen, près d’une centaine d’avions saoudiens participent aux bombardements de la coalition des dix pays arabes sunnites contre les houthistes (chiites), menée par Riyad. Dix pays arabes contre les chiites du Yémen, cinq contre l’OEI : étrange déséquilibre ! C’est bien contre les houthistes que Riyad mobilise toutes ses forces, et non contre Al-Qaida dans la péninsule Arabique (AQPA), dont se revendiquait Chérif Kouachi, auteur des attentats contre Charlie Hebdo à Paris. Cette organisation que l’ancien directeur de la Central Intelligence Agency (CIA) David Petraeus qualifiait de « branche la plus dangereuse » de la nébuleuse Al-Qaida a pris le contrôle d’Aden, la deuxième ville du Yémen.

Désormais, l’OEI a atteint trois objectifs stratégiques. Tout d’abord, elle apparaît comme le défenseur des sunnites opprimés en Syrie et en Irak. Ses victimes sont à 90 % des musulmans. En Afghanistan, en Irak, en Syrie, au Pakistan, les victimes des attentats sont d’abord des chiites, ensuite de « mauvais musulmans » — en particulier des soufis —, puis des représentants des régimes arabes et, en dernier lieu seulement, des membres de minorités religieuses ou des Occidentaux.

Par ailleurs, l’OEI est parvenue à délégitimer Al-Qaida et sa branche locale en Syrie, le Front Al-Nosra. Les appels du successeur d’Oussama Ben Laden, M. Ayman Al-Zawahiri, mettant en demeure M. Al-Baghdadi de se placer sous son autorité, traduisent une impuissance pathétique. La somme des défections au sein des groupes djihadistes montre la dynamique nouvelle créée par l’OEI.

A terme, le « calife » Al-Baghdadi devra défier l’Arabie saoudite

 

Enfin, l’OEI est devenue l’ennemi numéro un de l’Occident. Celui-ci a déclenché contre elle une « croisade » qui ne dit pas son nom, mais qui peut facilement être présentée comme telle par les propagandistes du djihad. L’opération américaine « Inherent Resolve » (« Détermination absolue ») regroupe principalement douze pays de l’OTAN (plus l’Australie), et l’alliance retrouvée avec la Russie renforcera encore plus le caractère de « front chrétien » que la propagande sur Internet sait si bien utiliser. Selon une pétition en ligne signée par 53 membres du clergé saoudien, les frappes aériennes russes ont visé des « combattants de la guerre sainte en Syrie » qui « défendent la nation musulmane dans son ensemble ». Et, si ces combattants sont vaincus, « les pays de l’islam sunnite tomberont tous, les uns après les autres » (8).

La contre-stratégie militaire des Saoud ne laisse planer aucune ambiguïté : elle est essentiellement axée sur la lutte contre les chiites. Riyad, comme les autres capitales du Conseil de coopération du Golfe, ne peut considérer l’OEI comme la principale menace, sous peine de se trouver contesté par sa propre société. L’intervention militaire saoudienne à Bahreïn en 2012 était destinée à briser le mouvement de contestation républicain, principalement chiite, qui menaçait la monarchie sunnite des Al-Khalifa. Au Yémen, l’opération « Tempête décisive » lancée en mars 2015 vise à rétablir le président Mansour Hadi, renversé par la révolte houthiste. Il n’est évidemment pas question pour Riyad d’envoyer ses fantassins contre l’OEI alors que 150 000 hommes sont déployés sur la frontière yéménite. Pourtant, le prochain objectif de l’OEI devrait être d’asseoir la légitimité religieuse de son « calife », qui s’est nommé lui-même Ibrahim (Abraham) Al-Muminim (« commandeur des croyants », titre de l’époque abbasside) Abou Bakr (nom du premier calife) Al-Baghdadi Al-Husseini Al-Qurashi (nom de la tribu du Prophète). Une véritable compétition est engagée avec l’autre puissance qui prétend prendre la tête de l’oumma et représenter l’islam : l’Arabie saoudite est dorénavant contestée sur le terrain. Pour l’emporter, M. Al-Baghdadi doit défier le « défenseur des lieux saints ». On peut donc penser qu’à terme, une fois réduites les zones chiites, le « calife » visera l’Arabie saoudite.

Quelles conséquences probables pour l’Europe ? Après les réfugiés afghans, irakiens et syriens, elle devrait rapidement voir arriver les réfugiés yéménites. Pays plus peuplé que la Syrie, le Yémen ne peut évacuer ses ressortissants vers les pays frontaliers, tous membres de la coalition qui le bombarde. Depuis 2004, la guerre a fait plus de 340 000 déplacés, dont 15 % vivaient dans des camps, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies. En outre, le Yémen accueillait 246 000 réfugiés, somaliens à 95 %. Les pays du Conseil de coopération du Golfe montreront le même égoïsme que lors de l’exode syrien, c’est-à-dire : aucune place offerte aux réfugiés. Reste donc l’Europe.

On comprend mieux pourquoi l’alliance mène une guerre pour laquelle elle ne peut fixer un objectif stratégique clair : chacun de ses alliés est en conflit avec un autre. Les interventions en Irak, en Syrie, au Mali ou en Afghanistan s’apparentent au traitement de métastases ; le cancer salafiste a son foyer dans les pays du Golfe, protégés par les forces occidentales. Peut-on détruire l’OEI sans renforcer d’autres mouvements djihadistes, le régime de M. Al-Assad ou Téhéran ? La guerre sera longue et impossible à gagner, car aucun des alliés régionaux n’enverra de troupes au sol, ce qui risquerait de menacer ses propres intérêts.

La stratégie occidentale fondée sur les bombardements et la formation de combattants locaux a échoué en Syrie et en Irak comme en Afghanistan. Européens et Américains poursuivent des objectifs qui ignorent les mécanismes des crises internes au monde arabo-musulman. Plus l’engagement militaire s’accentuera, plus le risque terroriste augmentera, avant l’affrontement prévisible et ravageur qui devrait finir par opposer l’OEI à l’Arabie saoudite. Est-ce « notre » guerre ?

Pierre Conesa

* Maître de conférences à Sciences Po Paris, ancien haut fonctionnaire au ministère de la défense. Auteur du rapport « Quelle politique de contre-radicalisation en France ? », décembre 2014, et du Guide du petit djihadiste, à paraître en janvier 2016 aux éditions Fayard.

(1) Lire Akram Belkaïd, « Une obsession dans le monde arabe », dossier « Vous avez dit “complot” ? », Le Monde diplomatique, juin 2015.

(2) Lire Allan Kaval, « Les Kurdes, combien de divisions ? », Le Monde diplomatique, novembre 2014.

(3) Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, cité par Le Monde, 25 juin 2014.

(4) Décompte établi par le site Iraq Body Count

(5) Selon l’organisation Human Rights Watch, citée par Reuters, 20 novembre 2015.

(6) « Arabie saoudite : un jeune de 21 ans risque la décapitation », Amnesty International France, 24 septembre 2015.

(7) Selon le ministère de la défense, l’opération mobilise 3 500 hommes, 38 avions de combat et divers moyens de logistique et de protection. « “Chammal” : point de situation au 19 novembre », Ministère de la défense.

(8) « Des religieux saoudiens appellent au jihad contre Assad et ses alliés », L’Orient Le Jour, Beyrouth, 6 octobre 2015.

Source : Le Monde Diplomatique Decembre 2015
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En Turquie, Erdogan retrouve les moyens de poursuivre sa dérive autoritaire

4801293_6_df22_portrait-de-tayyip-erdogan-a-ankara-le-2_02f0603fd6af02b94770fa5927934508Editorial du Monde.

Recep Teyyip Erdogan empoche un beau succès personnel. Le président turc voulait continuer à gouverner son pays en autocrate plus ou moins éclairé. Il en a, à nouveau, les moyens. Sa formation islamo-conservatrice, l’AKP, a très nettement remporté les élections législatives du dimanche 1er novembre. Elle obtient la majorité au Parlement et permettra à M. Erdogan de rester le maître d’une Turquie qu’il dirige de façon de plus en plus autoritaire – et, bien souvent, inquiétante.

Ce résultat va peser lourd sur l’évolution de la guerre en Syrie, sur une crise des réfugiés qui s’installe dans la durée et, enfin, sur les relations de ce pays membre de l’OTAN avec ses partenaires européens, au moment précis où ils ont plus que jamais besoin de la Turquie.

Elu président en 2014, M. Erdogan n’était pas satisfait du résultat des dernières élections générales, en juin. Pour la première fois depuis 2002, l’AKP avait perdu la majorité absolue. Elle était condamnée à gouverner en coalition. Le président s’y est refusé. Il a convoqué un nouveau scrutin et, contrairement à la lettre de la Constitution, mené lui-même une campagne conduite d’un bout à l’autre sur un seul registre : la stratégie de la tension.

La guerre avec les autonomistes armés du PKK kurde – organisation considérée comme terroriste par l’UE et les Etats-Unis – a été relancée avec l’intention de séduire une partie de l’électorat de la droite ultranationaliste. Les militants de l’AKP ont vandalisé plusieurs centaines de permanences d’une formation kurde modérée (le HDP, le Parti démocratique du peuple), qui avait réalisé une percée spectaculaire en juin. Plus grave, des rassemblements du HDP ont été la cible de deux attentats, qui ont fait plus d’une centaine de morts, en général attribués à des cellules djihadistes.

Le président a donné le ton en qualifiant ses adversaires de traîtres ou de terroristes. Sa stratégie a payé. Dans ce climat de peur, les électeurs turcs – y compris parmi les Kurdes – ont voté pour la stabilité. Avec un peu plus de 49 % des voix, l’AKP retrouve la majorité absolue (316 sièges sur 550). Qu’il réussisse ou non à faire changer la Constitution – passer d’un système parlementaire à un régime présidentiel –, M. Erdogan a les moyens de poursuivre une dérive amorcée il y a ou trois ou quatre ans : l’exercice d’un pouvoir de plus en plus personnel. Pour lui, la démocratie se résume aux élections : le vainqueur a le droit de mettre au pas tous les contre-pouvoirs, qu’il s’agisse des élus, de la justice ou de la presse – tous intimidés, malmenés, voire persécutés.

Le patron de l’AKP se retrouve à la tête d’un pays de 75 millions d’habitants qu’il a contribué à polariser chaque jour davantage et dont la moitié de la population lui est farouchement opposée : laïcs contre religieux, Turcs contre Kurdes, sunnites contre alévites, élites urbanisées contre conservateurs du plateau anatolien. Ce paysage politique fragmenté est encore fragilisé par une situation économique des plus médiocres et par un environnement extérieur dominé par la guerre en Syrie.

Loin d’être le pôle de stabilité qu’elle a pu être, durant les deux premiers mandats de l’AKP, la Turquie d’Erdorgan présente le profil d’un pays largement déstabilisé sous l’effet cumulé des choix politiques de son président et du chaos proche-oriental. Obnubilée par la question kurde, sera-t-elle un partenaire sérieux dans la lutte contre l’Etat islamique ? Volontiers irascible, et parfois imprévisible, M. Erdogan peut-il contribuer à la rechercher d’une issue politique en Syrie ? Rien n’est moins sûr.

L’UE est la première concernée. Elle a besoin de la Turquie pour freiner, voire enrayer l’exode des réfugiés de Syrie. Plus de deux millions d’entre eux ont été généreusement accueillis par les Turcs. Les Européens sont prêts à toutes les concessions pour qu’Ankara continue à les héberger et contribue à empêcher une migration sauvage qui s’est encore traduite, ces derniers jours, par des dizaines de noyades.

M. Erdogan est en position de force. Mais jusqu’où faut-il lui céder, s’il s’obstine à diriger la Turquie en autocrate aussi agressif à l’intérieur qu’à l’extérieur ?

Source : Le Monde 02/11/2015

Voir aussi : Actualité Internationale, Rubrique Turquie, Après l’impasse l’implosion ? rubrique Politique, Politique Internationale.

Turquie. Si la guerre pouvait résoudre le problème, « ce serait fait depuis longtemps »

L’Agence France Presse a obtenu une interview exclusive du chef du PKK et du KCK, à l’abri des bombardements du régime Erdogan depuis les montagnes de l’extrême-nord du Kurdistan irakien.

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Depuis trois mois, les combats font à nouveau rage entre l’armée turque et les rebelles kurdes. Pourtant, de son repaire irakien, leur chef Cemil Bayik se dit prêt à faire taire les armes, et prévient que la « logique de guerre » d’Ankara risque d’étendre le conflit.

« Nous sommes prêts à cesser le feu dès maintenant », assure le dirigeant du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). « Mais si (le gouvernement turc) persiste dans cette logique de guerre (…) le conflit va s’étendre à toute la Turquie, à la Syrie et à tout le Proche-Orient », menace-t-il. Dans son impeccable « battle dress » vert pàle, Cemil Bayik a accordé un entretien à l’AFP au cœur des monts Kandil, dans l’extrême nord du Kurdistan irakien. Dans ce dédale de vallées étroites, le PKK règne en maître absolu. Les flancs des montagnes y sont recouverts de portraits du fondateur historique du mouvement, Abdullah Ocalan, qui purge depuis 1999 une peine de réclusion à perpétuité dans une prison turque. A l’entrée de chaque village, des combattants rebelles, Kalachnikov à l’épaule, filtrent le trafic. Mais l’essentiel de leurs unités reste caché dans les montagnes, pour se protèger des bombardements réguliers des F16 turcs.

Légitime défense

Dissimulé sous un bosquet d’arbres, assis devant deux drapeaux kurdes frappés de l’étoile rouge, Cemil Bayik accuse le Président islamo-conservateur turc Recep Tayyip Erdogan d’être le seul responsable de la reprise des hostilités. « Nous ne voulons pas la guerre (…) Nous avons tenté jusque-là par une voie politique et démocratique de faire avancer le dialogue », affirme le chef de l’Union des communautés du Kurdistan (KCK), qui regroupe tous les mouvements de la rébellion. « Mais Erdogan a empêché ce processus-là (…) il n’y a jamais cru ». Le PKK dément également alimenter la récente escalade de violence déclenchée par un attenta de l’EI qu’Ankara est accusée de soutenir. Il évoque la « légitime défense ». « La guérilla n’est pas encore entrée en guerre », se défend Cemil Bayik. « Ce que l’on voit, ce sont plutôt les jeunes qui sont montés au créneau, qui se protègent et protègent le peuple et la démocratie ».

Racines politiques

De plus, pour ce vétéran de la lutte kurde, ce retour aux « années de plomb » a des racines purement politiques. « Erdogan a perdu aux élections la majorité absolue, c’est pour ça qu’il a commencé à faire la guerre ». Le 7 juin, le Parti de la justice et du développement (AKP) de M. Erdogan a de fait perdu le contrôe qu’il exerçait depuis treize ans sur le pays. En raflant 80 sièges de députés, le Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde), a largement contribué à ce revers. A l’approche des législatives anticipées du 1er novembre, l’homme fort du pays a concentré ses attaques sur le HDP, accusé d’être complice des « terroristes ». Si le HDP répugne à reconnaître tout lien avec le PKK, Cemil Bayik, lui, affiche sans complexe sa proximité avec le parti. Il promet même une « initiative » pour le soutenir. « Il est nécessaire d’aider le HDP », juge-t- il. Un autre dirigeant du KCK, Bese Hozat, a même laissé entendre cette semaine dans la presse que le PKK pourrait suspendre ses opérations « pour contribuer à la victoire du HDP ». Cemil Bayik se dit in fine prêt à reprendre les discussions avec la Turquie, mais à condition qu’un « cessez-le-feu bilatéral » soit imposé et qu’Ankara libère des prisonniers kurdes dont Abdullah O calan.

Soutien occidental

Il compte aussi sur le soutien des Occidentaux. Américains et Européens « ont compris que les Kurdes étaient devenus une force stratégique dans la région », se réjouit-il. « Si la communauté internationale retire le PKK de la liste des organisations terroristes, la Turquie sera obligée d’accepter la réalité du problème kurde et acceptera le dialogue ». A 64 ans, le dirigeant du PKK, un modèré du mouvement, affirme avoir toujours « l’espoir » d’une « solution pacifique ». « S’il était possible de résoudre le problème par la guerre », dit-il, « ce serait fait depuis longtemps ».

Source AFP 10/10/2015

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En Turquie, Erdogan voit son rêve de sultanat lui échapper

4649155_6_e57e_le-president-turc-recep-tayyip-erdogan-dans-un_a561cc0e014e99adfbdf7e561ba83e49Les législatives du 7 juin en Turquie sont un sérieux revers pour le parti de la Justice et du développement (AKP, islamo-conservateur) qui, pour la première fois depuis 2002, perd la majorité absolue au Parlement. Avec 40 % des suffrages, soit 254 députés sur 550, l’AKP reste le premier parti politique du pays mais sa défaite est cinglante.

Pour la première fois en treize ans, les islamo-conservateurs vont être contraints de former un gouvernement de coalition. Ils ne régneront plus en maîtres absolus sur le pays. « Si Dieu le veut, la décision de la nation est la bonne », a déclaré le premier ministre Ahmet Davutoglu à l’annonce des résultats. Le président Recep Tayyip Erdogan ne s’est pas exprimé.

Le tableau des résultats par région montre combien la désaffection est grande, en premier lieu dans les régions kurdophones de l’Est et du Sud Est, mais aussi sur toutes les côtes (Marmara, Méditerranée, Egée) où le vote en faveur de l’AKP a reculé par rapport aux législatives de 2011.

Avant tout, il s’agit d’un revers pour M. Erdogan qui se voyait déjà en hyperprésident. En mettant son projet de « sultanat » au centre des législatives, il en a fait un référendum sur sa personne. La réponse de l’électorat est sans appel. Il imaginait avoir 400 députés de l’AKP au Parlement ? Il ne les a pas. Il rêvait de modifier la Constitution pour renforcer son pouvoir ? Il ne le pourra pas. Non seulement, son projet de super-présidence est mort-né mais son étoile a considérablement pâli.

Autoritarisme sans limite

En se jetant à corps perdu dans la campagne — en dépit de la neutralité due à la fonction présidentielle — en polarisant la société dans ses discours (laïcs contre religieux, sunnites contre alevis, Kurdes contre Turcs) M. Erdogan a perdu l’adhésion d’une bonne partie de son électorat. On est loin du Tayyip de 2002, qui captait l’attention des foules en parlant de pluralisme, de liberté et de réformes. En 2015, les mots « complot » « terrorisme » et « structure parallèle » sont au centre de chacun de ses discours.

Son autoritarisme est sans limites. La presse, la justice, la police ont été placés sous son étroit contrôle. Engagé, depuis décembre 2013, dans une vaste purge contre la confrérie de son ancien mentor, l’imam Fethullah Gülen exilé aux Etats-Unis, il a fait muter, destituer ou arrêter policiers, juges et procureurs.

Un journaliste émet une critique ? Il est brimé, au mieux licencié, au pire accusé de « terrorisme » ou de « complot contre l’Etat ». Une vidéo qui ne lui plaît pas court sur You Tube ou Twitter ? Il les fait bloquer. Ses opposants sont des « traîtres » et M. Demirtas, le chef du parti démocratique du peuple (HDP), qui lui a fait de l’ombre pendant toute la campagne, est un « athée ».

Poussée à son paroxysme lorsqu’il s’est installé dans un palais de plus de 1 000 pièces à Ankara après son élection à la présidence en août 2014, sa folie des grandeurs lui a valu le surnom de « sultan ». La création d’une garde présidentielle en costumes dignes de la série « Game of Thrones » a ajouté le ridicule à la mégalomanie.

Jusque-là, les Turcs avaient tout avalé, y compris les révélations de corruption qui avaient éclaboussé en décembre 2013 son entourage familial et son gouvernement — M. Erdogan était alors premier ministre. Une conversation malheureuse avec son fils, Bilal, incapable de « remettre les compteurs à zéro » (faire disparaître le liquide) au moment où des perquisitions menées chez les fils de plusieurs ministres avaient révélé des boîtes à chaussures remplies de devises, laissa un goût amer à ceux qui croyaient en la blancheur immaculée du parti AK (en turc Ak veut dire blanc, propre).

Mais cela n’empêcha pas le « parti de l’ampoule » (le symbole de l’AKP) de remporter haut la main les municipales de mars 2014 et son chef historique la présidentielle d’août 2014. En revanche, lorsqu’il s’est agi de donner à M. Erdogan les pleins pouvoirs, les électeurs ont dit non. Piégé par son rêve de grandeur, l’étoile filante de la scène politique turque a été stoppée dans son ascension par les urnes.

Tournant dans l’histoire du pays

Et si 88 % des électeurs se sont déplacés pour aller voter, ça n’était pas tant pour élire leurs députés que pour dire non aux visées autocratiques du chef historique de l’AKP. Mission accomplie, puisqu’il n’a pas d’autre perspective que de retourner à son rôle de président sans grands pouvoirs, comme le stipule l’actuelle Constitution.

« C’est le triomphe de la paix sur la guerre, de la modestie sur l’arrogance, de la responsabilité sur l’irresponsabilité », a déclaré Sirri Süreyya Önder, député du HDP, dès l’annonce des résultats, dimanche soir. En remportant 13 % des voix, la petite formation kurde de gauche a brisé net le rêve du chef historique de l’AKP. Tout s’est joué sur ces voix-là.

En Turquie, le seuil nécessaire pour qu’un parti soit représenté au Parlement est de 10 %. Le pari était risqué pour le HDP car en cas d’échec, il aurait favorisé son adversaire, ses voix étant automatiquement portées au crédit de l’AKP, selon le système proportionnel en vigueur.

L’entrée d’un parti pro-kurde au Parlement marque un tournant dans l’histoire du pays. Elle a été possible grâce à Selahattin Demirtas, un avocat charismatique de 42 ans, qui l’a habilement conduit à la victoire. Sous l’impulsion de cet ancien militant des droits de l’Homme, né dans une famille kurde modeste de Elazig (est du pays), le HDP a estompé son aspect pro-kurde, prenant ses distances avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, interdit en Turquie) pour élargir sa base aux déçus du « tayyipisme ».

Bon tribun, doté d’un solide sens de l’humour, M. Demirtas, qui avoue « repasser ses chemises », s’est imposé comme le porte-parole d’une autre Turquie, celle des minorités ethniques et religieuses, des femmes, des homosexuels, des écologistes. Sa victoire est aussi un puissant message à l’adresse du PKK, indiquant qu’il est temps de penser aux élections et d’oublier les armes.

Marie Jégo

Source Le Monde.fr |07.06.2015

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Questions sur l’armement des Kurdes d’Irak

Photo Rick Findler. AFP

Photo Rick Findler. AFP

par Alain Gresh

La récente décision de la France, suivie par d’autres pays européens, d’armer les Kurdes d’Irak, a soulevé des commentaires plutôt positifs. Enfin, Paris se décidait à faire quelque chose au Proche-Orient, après une très coupable passivité, pour ne pas dire complaisance, face à l’agression israélienne contre Gaza. Pourtant, à l’examen, cet envoi d’armes suscite plusieurs questions.

Selon Le Monde (« Irak : la France décide de livrer des “armes sophistiquées” aux combattants kurdes », 14 août) : « La France va livrer des “armes sophistiquées” aux combattants kurdes en Irak pour les aider dans leur lutte contre l’Etat islamique (EI). L’Elysée a annoncé, mercredi 13 août, que François Hollande avait décidé, “en accord avec Bagdad, de faire acheminer des armes dans les heures qui viennent”. “Nous voulons aider les Kurdes et les Irakiens à éviter les massacres, et pour cela nous livrons des armes qui permettent aux combattants de combattre et, nous l’espérons, de l’emporter”, a expliqué Laurent Fabius, sur TF1. »

« Le ministre des affaires étrangères a indiqué que la France allait livrer des “armes sophistiquées”, en refusant de préciser le type d’armements et leurs quantités. Il s’agit, selon M. Fabius, de “rééquilibrer les forces”. “Les terroristes ont des armes extrêmement sophistiquées qu’ils ont prises aux troupes irakiennes et qui, à l’origine, étaient américaines”, a souligné le ministre. »

Décision prise en accord avec Bagdad ? Mais qui à Bagdad ? Il n’y a plus de gouvernement légitime, Nouri Al-Maliki ayant refusé de démissionner. Le moins que l’on puisse dire est que « Bagdad » reste un concept flou. Est-ce avec M. Maliki que Paris a négocié une telle livraison ? C’est peu probable, car la France demandait qu’il quitte son poste de premier ministre. Avec son successeur désigné ? Mais il n’a formé ni gouvernement, ni coalition.

D’autre part, la position de Paris a toujours été qu’une intervention militaire nécessiterait une décision du Conseil de sécurité de l’ONU. Il ne s’agit certes pas d’une intervention, mais on peut penser que les armes « sophistiquées » seront livrées avec les conseillers chargés d’en apprendre le maniement aux Kurdes. Début d’un engrenage ?

La décision d’armer les Kurdes semble aller de soi. Le gouvernement régional du Kurdistan (KRG) est souvent présenté comme un modèle de démocratie, de bonne gestion et de respect des droits humains. Pourtant, rien n’est moins sûr. Certes, en comparaison avec ce qui se passe à Bagdad, la situation dans la région autonome du Kurdistan est meilleure. Mais cela n’empêche « ni le clientélisme, ni les dérives autoritaires ». Et, surtout, la division en deux zones que se sont partagées (dans tous les sens du terme) les deux partis au pouvoir à Erbil, nonseulement les stratégies de ces deux formations sont contradictoires, mais leurs alliances aussi : ainsi, le Parti démocratique du Kurdistan est allié avec Ankara, et l’Union patriotique du Kurdistan regarde vers Téhéran. Sans parler du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) de Turquie, dont les combattants affluent pour faire face à l’Etat islamique, mais qui sont considérés par l’Union européenne comme une « organisation terroriste ».

Enfin, dans le cadre de quelle stratégie ces armes seront-elles utilisées ? Pour défendre les Irakiens contre la poussée de l’Etat islamique ? On peut en douter, quand on voit comment les peshmergas (les combattants kurdes) ont abandonné à leur sort les chrétiens d’Irak qu’ils auraient très bien pu défendre. Plus probablement, pour affirmer l’autonomie grandissante de leur région, voire leur volonté d’indépendance, ce qui serait un pas décisif vers l’éclatement de l’Irak.

Il est bon de rappeler, comme le fait Elias Muhanna dans The New Yorker, (« Iraq and Syria’s Poetic Borders », 13 août), que, loin d’être une entité artificielle, l’Irak a une longue histoire et de fortes particularités depuis les débuts de l’islam et que, malgré les empires qui se sont succédé à la tête du pays, il a conservé sa cohésion à travers les siècles.

Que faire alors, face à l’avancée de l’Etat islamique ? Il n’existe sans doute pas de réponse facile, tant les problèmes se sont accumulés depuis la guerre menée contre l’Irak en 1990-1991, le long embargo qui s’en est suivi et l’invasion irakienne qui ont détruit non seulement l’Etat mais la fabrique sociale de la société (lire sur ce blog « “Pétrole contre nourriture” : qui jugera les responsables de la destruction de l’Irak ? », 23 janvier 2013). En tous les cas, le pouvoir ne pourra se recomposer sur la base confessionnelle que Washington a imposée en 2003.

Même si je ne partage pas, loin de là, toutes les analyses de Stephen M. Walt (« Ne pas faire (plus) de mal : cela devrait être l’objectif des Etats-Unis au Moyen-Orient », Slate, 14 août), il faudrait que les Occidentaux suivent ses conseils :

« Les Etats-Unis ont passé une bonne partie de ces dix dernières années à traquer cet insaisissable Graal, et le résultat en a justement été le genre de chaos et de rivalités religieuses à l’origine de cette toute dernière crise. Nous avons peut-être la possibilité de faire un peu de bien aux minorités en danger, mais, par-dessus tout, qu’on ne fasse pas davantage de mal, ni à la région, ni à nous-mêmes. »

Alain Gresh

Source Nouvelles d’Orient les blogs du Diplo 18/08/14

Voir aussi :  rubrique  Méditerranée, rubrique Moyen Orient, Irak, Iran, Syrie, Cinglante débâcle de la diplomatie française, rubrique  Rencontre Gilles Kepel, Antoine Sfeir,