Mayotte. 13 jours de grève générale dans un silence médiatique assourdissant

Photo Mayotte hebdo

Photo Mayotte hebdo

Les habitants « d’Outre-Mer » ont l’habitude du mépris colonial des médias hexagonaux. Mais dans le cas de la grève générale mahoraise, en plein mouvement contre la Loi Travail, ce silence est évidemment très politique.

Depuis treize jours les syndicats et travailleurs de Mayotte, ce département français depuis janvier 2011 situé dans l’Océan Indien dans l’archipel des Comores sont en grève générale illimitée. Les grévistes et les manifestants veulent… l’application de la loi, tout simplement ! Car si Mayotte est un département français, elle a le droit à un régime d’exception défavorable.

C’est la raison pour laquelle les travailleurs réclament, notamment, l’application immédiate et intégrale à Mayotte du Code du Travail de droit commun, l’application immédiate à Mayotte des Conventions collectives nationales de branches ayant cours en France métropolitaine, l’alignement immédiat des pensions minimum au même niveau que la métropole, le reclassement avec reconstitution de carrière reprenant en compte la totalité de l’ancienneté de services des agents concernés par les intégrations dans les fonctions publiques ainsi que l’alignement au niveau de la métropole de toutes les prestations sociales.

Ces revendications sont donc tout simplement des demandes d’égalité ! Car Mayotte est le département le plus pauvre avec un coût de la vie extrêmement élevé et une situation proprement coloniale, relevant de l’indigénat, puisque les habitants n’ont pas les mêmes droits que ceux de la métropole. On le voit dans l’usage de la violence, face aux grévistes et à leurs barrages, le pouvoir de la « République » sort les blindés, comme déjà en octobre-novembre (lorsque ce mouvement avait commencé, interrompu un moment par l’état d’urgence). En octobre la police avait tiré à balles réelles sur les jeunes mobilisés.

Rompre le silence sur la grève générale à Mayotte c’est une nécessité absolue, pour créer des solidarités et pour nous renforcer dans nos combats respectifs.

A Mayotte les syndicalistes ont érigé des barrages routiers. A Koungou, par exemple, les jeunes ont mis en place un barrage, expliquant qu’ils en ont assez d’attendre en vain les transports scolaires. Un autre barrage est en place à Bandrélé, tandis que la mairie a été envahie, dans le calme, par des jeunes. Pourtant, de tout cela, pas un mot dans nos journaux et médias métropolitains. Une raison supplémentaire pour populariser leur mouvement et que la méthode et la détermination des jeunes et des travailleurs de Mayotte nous inspirent à l’heure où va s’ouvrir un second round dans la lutte contre la Loi Travail.

Léo Serge

Source : Révolution permanente 11/04/2016

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Mayotte: le mouvement contre la vie chère est reconduit

Grève à Mayotte contre la vie chère, jeudi dernier

La situation reste tendue à Mayotte, qui entre lundi dans sa troisième semaine de lutte contre la vie chère, après la décision d’un collectif de syndicats et de consommateurs de reconduire le mouvement jusqu’à jeudi.

Signe de cette tension sur les deux îles (Petite-Terre et Grande-Terre) qui composent Mayotte, 101e département français, les responsables mahorais du Parti socialiste ont annulé dimanche le scrutin de la primaire PS pour la présidentielle.

Faute d’accord avec le patronat et les représentants de la grande distribution, le collectif de syndicats et de consommateurs à l’origine du mouvement a décidé samedi soir de poursuivre son action jusqu’à jeudi.

Jeudi dernier, des barrages routiers avaient été le théâtre d’affrontements entre jeunes et gendarmes mobiles. Pour la première fois à Mayotte, des cocktails Molotov ont été confectionnés, puis lancés sur les forces de l’ordre. Plusieurs casseurs interpellés ont été condamnés, selon la procédure de comparution immédiate, à de la prison ferme.

Vendredi, à Longoni, la cité portuaire de Mayotte, une fillette de 9 ans a été blessée par un projectile de flash-ball tiré par un gendarme. La fillette a été hospitalisée sans que ses jours soient en danger.

Le mouvement contre la vie chère avait débuté le 27 septembre, à l’initiative des deux syndicats CGT Mayotte et CFDT, rejoints par FO et la CFE-CGC. Le front s’est vite élargi à trois associations de consommateurs. Leur revendication est unique : baisse des prix des produits de consommation courante, avec alignement sur ceux pratiqués à La Réunion, l’autre département français de l’océan Indien, situé à 1.700 km au sud-est de Mayotte.

Après l’accession de Mayotte au statut de département, le 1e avril 2011, les Mahorais ont revendiqué davantage d’égalité en matière de coût de la vie.

« C’est pour cela que nous avons lancé l’appel à la grève », a expliqué à l’AFP Ousseni Balahachi, un responsable CFDT. En réalité, il s’agit d’un boycott des commerces que le durcissement du conflit, la semaine dernière, a contraint à la fermeture.

Si la plupart des barrages routiers étaient levés dimanche, les magasins étaient tous fermés, de même que les banques où les distributeurs de billets sont hors service.

Les négociations entre délégués du collectif d’une part, et représentants du Medef, de la grande distribution et des chambres consulaires d’autre part, ont enregistré quelques avancées : baisse du prix de la bouteille de gaz de 31 à 25 euros, baisse de 10% sur le riz. Quant au mabawa (aile de poulet rôti), plat favori des Mahorais, il est devenu le produit emblématique de ce conflit.

Importé d’Europe, de Madagascar ou encore du Brésil, et conditionné par carton de 10 kg, le mabawa était vendu 2,69 euros le kg à la mi-septembre. La grande distribution a proposé une première baisse à 2,41 euros puis à 2,13 euros, rejetée par la « base ».

Avant de signer tout éventuel accord, le collectif a pris l’habitude de consulter une partie de la population rassemblée sur la place du marché de Mamoudzou, chef-lieu de Mayotte. C’est là que s’expriment, avec détermination, les « bouenis », les mères de famille mahoraises.

Pour tenter de sortir de la crise, le préfet de Mayotte, Thomas Degos, a promis de « multiplier les rencontres séparées avec les différents partenaires des négociations ».

AFP

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