Congrès PS : ce texte que les ministres auraient dû mieux lire avant de signer

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Le Joker Macron qui n’a pas sa carte au PS…
DÉCRYPTAGE

Tous les socialistes du gouvernement ont apposé leur nom sur la motion Cambadélis. A lire le détail, ils se sont engagés à beaucoup d’ici la fin du quinquennat…

C’est le titre du dernier paragraphe : «Les orientations de notre congrès devront avoir prise sur le cours du quinquennat.» On le trouve à la fin de la «motion A», ce texte d’orientation porté par le Premier secrétaire sortant du PS, Jean-Christophe Cambadélis, pour le 77e congrès du PS à Poitiers et… signé par tous les ministres socialistes du gouvernement. Le premier d’entre-eux compris. Et à quoi se sont-ils engagés en le signant ? Si personne ne trouvera à redire aux chapitres «écosocialisme», «égalité réelle», «accès à la culture» ou encore «santé partout et pour tous», d’autres points sont en contradiction avec les prises de positions récentes de certains ministres. De quoi rappeler, dans les deux ans à venir, aux locataires de Bercy et de la rue de Grenelle (voire de la Commission européenne puisque Pierre Moscovici a aussi signé) ce que les parlementaires PS seront censés porter. Car, sur ce point, le texte est clair : «Les parlementaires devront en faire une référence pour guider leur action. De même, les grands textes de loi devront donner systématiquement lieu à un débat avec vote en conseil national». Morceaux choisis.

Sur le pacte de responsabilité

Si cette motion garantit le cadre du pacte de responsabilité, elle émet un bémol. «Les engagements ne semblent pas, à ce stade et par toutes les branches professionnelles, respectés», est-il écrit. Conséquence: «Si cette situation est confirmée par l’évaluation nationale, nous estimons que les 15 milliards du pacte qui restent à utiliser devraient dorénavant l’être plus directement pour favoriser l’emploi, l’investissement privé productif et les investissements publics.» Suffisant pour réallouer les sommes destinées à baisser les «charges» des entreprises ? A voir… Et si un premier passage demandant des «contreparties» a été supprimé, les ministres de Bercy s’engagent ainsi à «mieux cibler les dispositifs d’intervention pour les entreprises qui en ont un réel besoin – et d’abord les PME et ETI industrielles, ainsi que les secteurs exposés à la concurrence internationale – et sur les leviers réellement utiles à la compétitivité comme la recherche, l’innovation, la formation.»

Sur la fiscalité

«Plus que jamais, la grande réforme fiscale que nous avons voulue doit être menée à bien.» Au temps de Jérôme Cahuzac, on nous avait pourtant expliqué que cette réforme fiscale était «faite». Pas totalement apparemment… Le texte ressuscite donc l’engagement de campagne du candidat Hollande. Et il ne reste plus que le budget 2016 (discuté au Parlement à l’automne 2015) pour le tenir : «Pour les ménages, nous souhaitons que le chantier de l’impôt citoyen soit engagé dès le projet de budget pour 2016 par un prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu et une réduction de la CSG sur les premières tranches de revenus, est-il écrit. Lisible pour le contribuable, cette première étape permettra de poser le socle du rapprochement entre l’impôt sur le revenu et la CSG.» On attend donc Christian Eckert et Michel Sapin – tous deux signataires – lorsqu’ils présenteront le prochain projet de loi de finances.

Sur le contrat de travail

Passons au ministre du Travail, François Rebsamen. En signant ce texte, finie l’idée du contrat unique ou de tout autre nouveau contrat : «Les règles qui le régissent, qu’il soit à durée déterminée ou indéterminée, doivent permettre une sécurité pour les salariés et combattre la précarité qui les frappe, est-il rappelé. Ainsi une réforme telle que le contrat unique ou l’extension des contrats de chantiers à d’autres secteurs que le bâtiment, et a fortiori à l’ensemble des secteurs, est pour nous exclue.» Ça ne peut pas être plus clair.

Sur le «repos dominical»

Ce dossier concerne Rebsamen mais aussi le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron. Lequel, certes, n’a pas sa carte au PS… Sa loi sur la «croissance et l’activité» doit revenir à l’Assemblée avant l’été ? Le texte – qui engage donc les députés – est limpide : «Nous sommes opposés à une nouvelle extension du travail du dimanche.». Exit en principe les 12 dimanches travaillés présents dans la loi ? En tout cas, cette motion reprend les arguments défendus par les opposants à cette extension, Martine Aubry en tête : «C’est d’abord un choix de société. La consommation ne peut être l’alpha et l’oméga de nos vies. Le dimanche doit d’abord être un moment du vivre ensemble. C’est une question de protection des salariés les plus fragiles pour lesquels la liberté de choix n’existe pas réellement, de protection des petits commerces qui restent souvent les dernières activités présentes dans les quartiers en difficulté et dans les zones rurales désertifiées.» A suivre dans l’hémicycle…

Sur la «réorientation» européenne

Enfin, pas sûr que cette motion soit allée jusqu’à Bruxelles… Car ce texte engage aussi le commissaire européen, Pierre Moscovici, chargé des Affaires économiques, monétaires et de la fiscalité… donc de faire respecter la réduction des déficits. Or, cette motion demande à ce que «les disciplines budgétaires» soient «assouplies» et qu’«une part des investissements d’avenir [soient] exclus du calcul des déficits». L’Union bancaire doit être parachevée, «notamment par la garantie européenne des dépôts des épargnants», demandent aussi ces socialistes. Quant au plan Juncker, Moscovici trouve donc aussi qu’il est sous-doté et souhaite que «sa capacité de prêt [soit] portée à 200 milliards d’investissements par an (contre 100 actuellement prévus)». Le texte plaide enfin aussi «pour une initiative forte en Europe en vue d’une directive ambitieuse de séparation des activités des banques d’investissement et des banques de dépôt». Ce que Moscovici, lorsqu’il était à Bercy, a enterré.

Lilian ALEMAGNA

Source Libération :14/04/2015

Voir aussi : Actualité France, Rubrique Politique, Politique économique, rubrique UE,

Olivier Poivre d’Arvor : »La culture doit se retrouver au centre d’un projet politique »

OPA : "Il faut rester dans la famille et faire des enfants"

en 1958, auteur édité par Jean-Edern Hallier, titulaire d’un DEA de philosophie,  Olivier Poivre d’Arvor, a entrepris une carrière dans la diplomatie culturelle (Alexandrie, Prague, Londres) après avoir été nommé directeur de l’AFFA par Hubert Védrine. Il est le directeur de France Culture depuis août 2010.

Près d’un an après votre nomination à la direction de France Culture,  vous avez fait connaissance avec la maison. Avez-vous eu des surprises ?

Plutôt des confirmations que des surprises. C’est un lieu sacré avec ses rites. Il faut les éprouver si l’on veut les épouser. C’est une véritable exception culturelle. Il y a dans notre maison, une population que l’on ne trouve pas dans les autres radios composées de producteurs et de journalistes. Nous sommes une radio de flux qui traite des grands événements de la société et dans le même temps nous faisons appel à de grands savants qui analysent la situation. C’est un exercice très singulier. En un an, nous avons gagné 100 000 auditeurs en restant fidèles  à ces principes. Une enquête lancée au sein de Radio France sur le traitement de l’affaire DSK vient de démontrer que c’est notre démarche qui a été le plus apprécié au sein des radios publiques. Sur ce dossier complexe, nous avons abordé tous les aspects en trouvant la bonne distance.

Les auditeurs vont bientôt découvrir la nouvelle grille de rentrée qui porte votre marque. Quels en sont les axes fondateurs ?

Un certain renouvellement, une féminisation et aussi plus de lisibilité avec des tranches horaires plus claires. Certains producteurs partent d’autres arrivent, ce qui conduit à un rajeunissement. Ce n’est pas facile de trouver des producteurs. Souvent la notoriété pose problème. Il faut rester dans la famille et faire des enfants. Il y a aussi une place plus importante accordée à la culture, plus de théâtre, de musique, de cinéma… Nous renforçons aussi les tranches du week-end qui étaient un peu notre point faible.

A Montpellier après 25 ans de Rencontres Pétrarque, la présence de France Culture se décline cette année sous le sigle La Semaine des Idées…

Nous souhaitons développer les Rencontres Pétrarque dans un cadre plus large. Il y aura deux fois plus d’émissions avec des rendez-vous en direct. Et puis de nouvelles rencontres comme L’esprit d’escalier qui permettront au public d’échanger avec un intervenant des Rencontres de la veille, des soirées avec des artistes et des intellectuels sont également prévues. Cette édition préfigure l’édition 2012 où nous lancerons le Marathon des idées, une sorte de petit festival autour de la pensée.

La thématique « Le peuple a-t-il un avenir ? » adjoint-elle à la culture une dimension sociale ?

Probablement, la question est en tout cas posée malgré nous par certains partis politiques qui ont recours  à un discours populiste. Celui-ci sera au cœur du questionnement lors du débat de mardi.

On vous dit proche de Martine Aubry ?

C’est une de mes plus proches amies. C’est la marraine de ma fille. Au-delà de cela je pense que c’est quelqu’un qui a une vraie conscience de l’importance de la culture. Je m’occupe du service public, il ne m’appartient pas  de me prononcer. Tous les discours politiques m’intéressent. Mais à titre privé, je ne vais pas me mettre en refus d’amitié pendant un an pour cause de primaires. Je pense que la question de la culture doit revenir au centre d’un projet politique.

Recueillis par Jean-Marie Dinh

Voir aussi :  Rubrique Festival, Festival de Radio France, rubrique Médias, rubrique Politique culturelle, rubrique Rencontre, Jérome Clément,

La gestion Guérini : Des Bouches à incendie pour le PS

Jean Noel Guerini à Marseille. Reuter Jean-Paul Pelissier.

Sale histoire et mauvais tempo. Un an après la campagne des régionales polluée par les dérapages nauséabonds de feu Georges Frêche le féodal languedocien, voilà Martine Aubry aux prises avec une nouvelle affaire de potentat local, cette fois à Marseille. «Montebourg balance une grenade sur le parti à quinze jours des cantonales», s’étranglait hier un proche de la première secrétaire du PS. Et ça fait un gros boum.

Dans un rapport «confidentiel» daté du 8 décembre sur «les pratiques de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône» révélé mercredi par Lepoint.fr, Arnaud Montebourg, secrétaire national à la rénovation et candidat à la primaire socialiste, dresse un réquisitoire contre Jean-Noël Guérini, homme fort des Bouches-du-Rhône, à la fois président du conseil général et «président autoproclamé» de la fédération socialiste «en violation des statuts» du parti.

Montebourg met en cause «un système de pression féodal reposant sur l’intimidation et la peur» et qualifie le conseil général «d’instrument clientéliste» pour «asseoir sans partage le pouvoir de son président».«Le contrôle sans limite de Jean-Noël Guérini sur le parti s’exerce par la mise en place systématique à la direction des sections marseillaises d’employés du conseil général» dans «13 des 18 secteurs marseillais».

Déflagration. Le député de Saône-et-Loire fait état de «menaces physiques et d’intimidations» subies par un «élu résistant aux méthodes du président». Et demande à Martine Aubry «la mise sous tutelle de la fédération du PS» et «la destitution» de son patron. Guérini a riposté, hier, en annonçant qu’il portait plainte pour diffamation contre Montebourg. Jean-David Ciot, premier secrétaire fédéral, lui a emboîté le pas, accusant en sus le député de Saône-et-Loire de «collusion avec la droite».

Rue de Solférino, on appliquait hier la stratégie de l’édredon. Objectif : limiter la déflagration, alors que la première secrétaire s’évertue à mobiliser les cadres et les militants en faisant le tour des cantons et vient de préfacer un ouvrage d’intellectuels Pour changer de civilisation, premier étage de la fusée du projet pour 2012 lancée début avril. «Il n’y a pas d’éléments précis dans ce rapport, avait réagi mercredi Martine Aubry. Il faut laisser la justice faire son travail.» Hier, François Lamy, son premier lieutenant, déminait. «Dans le Languedoc, on a réagi. Là il n’y a rien, aucun témoignage ni document. C’est du déclamatoire. Les comptes et les fichiers de la fédération ont été expertisés comme ailleurs. Ils ne posent pas de problème.»

«Mousser». A Marseille comme à la direction parisienne du PS, on accuse Montebourg «d’avoir fuité cette affaire pour se faire mousser» et relancer sa candidature à la primaire. Ce dernier reconnaît que la publication de son rapport «ne tombe pas à la bonne date».«Le problème, ce n’est pas la fuite mais ce qu’il y a dedans. On a mis Frêche sous tutelle pour 40 fois moins grave», explique son entourage. Côté Aubry, on assure n’avoir reçu le rapport que la semaine dernière. Chez Montebourg, on affirme que la première secrétaire était saisie de l’affaire depuis la mi-novembre et a fait l’autruche. «Un secrétaire national à la rénovation qui découvre de telles pratiques et se tairait serait fautif !» s’exclame Arnaud Montebourg.

Matthieu Ecoiffier

Vaguelettes au PS

La secousse provoquée par le rapport d’Arnaud Montebourg sur la fédération PS des Bouches-du-Rhône commence à faire bouger certains socialistes. Si la direction du parti continue de laisser filer une polémique dont elle se serait bien passée à deux semaines des élections cantonales, des voix s’élèvent pour demander de ne pas laisser s’enkyster l’affaire.

Ainsi, «compte tenu du climat délétère», le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, propose la création d’un «collège constitué de personnalités incontestables» pour «rendre compte de la situation» dans la fédération dirigée par Jean-Noël Guérini, également président du conseil général des Bouches-du-Rhône – ce que les statuts du PS interdisent. «On ne peut pas rester inerte face à cette situation», alerte le chef des députés PS. Avant lui, Malek Boutih avait demandé, vendredi matin sur France Inter, la création d’une «commission d’enquête sur ce qui se passe dans les Bouches-du-Rhône».

«Féodal». Dans son rapport révélé cette semaine par Lepoint.fr, Montebourg dénonce un «système de pression féodal». Le député de Saône-et-Loire accuse aussi le conseil général des Bouches-du-Rhône d’être un «instrument clientéliste» pour «asseoir sans partage le pouvoir de son président». Il réclame une mise sous tutelle de la fédération et la «destitution» de Jean-Noël Guérini, dont le frère est mis en examen et incarcéré depuis le 1er décembre pour soupçons de malversations touchant à des marchés publics.

En déplacement à Nantes, Ségolène Royal a remis la tunique de chevalière blanche qu’elle affectionne : «Le Parti socialiste doit être exemplaire si nous voulons bâtir une société de la transparence, de l’équité, de la fraternité.»«Le PS doit bâtir une société basée sur la démocratie, la justice et les valeurs morales», a poursuivi la présidente de la région Poitou-Charentes.

Chez les proches de François Hollande, on s’est mis doucement en marche, par la voix de Stéphane Le Foll : «Arnaud Montebourg pointe un certain nombre de problèmes que nous avons pointés dès le départ. Dans les statuts du Parti socialiste, on ne peut pas être président du conseil général et premier secrétaire fédéral.»

Et à la direction ? Circulez, on ne bouge pas. Le rapport Montebourg ne comporte que «des affirmations»,«des allégations»,«des impressions personnelles», pour Harlem Désir. «Depuis que Martine Aubry est arrivée, poursuit le numéro 2 du PS, les fichiers d’adhérents ont été nettoyés. […] 50 000 noms de personnes qui ne renouvelaient pas leurs cotisations ont été rayés des listes. Très honnêtement, on a beau être candidat aux primaires, […] ça ne veut pas dire que tout est permis.» Même le strauss-kahnien Pierre Moscovici s’est mis au diapason de la direction. Pour le député du Doubs, ces accusations «ne reposent sur rien. Je crois que Montebourg fait de la politique».

Soucis.«Ce n’est pas le fonctionnement d’Arnaud de faire campagne comme ça, rétorque-t-on dans l’entourage du candidat à la primaire. Toutes les semaines, il fait au moins un déplacement, les thèmes qu’il porte et les sondages progressent… On regrette que ce rapport sorte maintenant. Il n’était pas fait pour être publié. Le Point nous met dans la merde. Mais maintenant, ce rapport existe, il faut en faire quelque chose.»

Prenant exemple sur les soucis de la direction PS avec la fédération de l’Hérault et Georges Frêche, les proches d’Arnaud Montebourg mettent en garde : «A ne pas traiter cette question, elle va nous poursuivre jusqu’à la présidentielle.»

Lilian Alemagna

Guerini demande un audit à Aubry

Dans un courrier adressé à Martine Aubry, première secrétaire du PS, Jean-Noël Guérini, premier secrétaire fédéral demande qu’un « un audit spécifique de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône soit réalisé, dans le cadre des statuts du parti socialiste ».

Dans un communiqué PS local dit vouloir « jouer la transparence » et ainsi « mettre un terme aux rumeurs mensongères et malveillantes relayées par la presse à la suite de la publication d’un pseudo-rapport rédigé par Arnaud Montebourg »

Il rappelle que « Deux plaintes en diffamation ont été déposées contre l’auteur de ce rapport : l’une au nom de Jean Noël Guérini, l’autre au nom de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône »

Invité de France inter, Malek Boutih membre du bureau national du PS demandait pour sa part la mise en place d’une « commission d’enquête »‘à la première secrétaire du PS.

AFP 04/03/11

Le PS se résout à enquêter

Le secrétaire national chargé de la rénovation, Arnaud Montebourg, qui a mis le feu aux poudres avec un rapport interne publié par Le Point la semaine dernière, a maintenu ses accusations dans une lettre adressée au Premier secrétaire du PS Martine Aubry qu’il publie sur son blog.

Il y dit détenir des « éléments de preuves précis et concordants » de ce qu’il avance et accuse Martine Aubry et son entourage de faire régner « la loi du silence » au PS. La commission d’enquête « vient bien tard mais je lui destinerai mes informations si elle est composée de personnalités indépendantes », écrit-il.

La création d’une commission d’enquête était réclamée par le chef du PS local, Jean-Noël Guérini, gravement mis en cause par le rapport Montebourg.La commission, qui sera formée dans les jours qui viennent, devra rendre ses conclusions avant l’été, a précisé lundi le porte-parole du PS, Benoît Hamon, lors d’un point de presse.

En tout état de cause, le PS doit agir vite pour ne pas risquer de voir ses primaires présidentielles, prévues en octobre, entachées des mêmes soupçons de fraude qui avaient terni le congrès de Reims où, fin 2008, Martine Aubry avait emporté la direction du parti d’un cheveu sur Ségolène Royal.

Toute commission d’enquête doit faire l’objet d’un vote du Bureau national, l’exécutif du parti. Elles sont composées au prorata des courants internes du PS. « Puisqu’il y a un doute, pour qu’il n’y en ait plus cette commission sera réunie et investiguera » dans la fédération des Bouches-du-Rhône, l’une des plus importantes de France, derrière le Pas-de-Calais et Paris, a dit Benoît Hamon lors d’un point de presse. « Notre main ne tremblera pas mais (nous agirons) à partir de faits et seulement de faits (…) On ne peut pas fonder des mesures de suspension à partir de témoignages et de on-dit », a ajouté le porte-parole.

Dans son rapport, Arnaud Montebourg réclame la destitution de Jean-Noël Guérini et la mise sous tutelle de la fédération. Il dénonce un « système de domination sans limite » et de « clientélisme féodal » entourant le président du conseil général des Bouches-du-Rhône, dont le frère, Alexandre, est incarcéré depuis décembre dans le cadre d’une enquête sur les marchés publics du département.

Dans sa lettre à Martine Aubry, le secrétaire national du PS dit tenir à sa disposition « des éléments de preuves précis et concordants » et réaffirme qu’il lui a fait porter son rapport début décembre alors que le premier secrétaire assure ne l’avoir reçu que ces derniers jours. « Tes collaborateurs zélés ont depuis le mois de décembre commis l’erreur dans cette grave affaire de nous emmener sur le terrain de la loi du silence », écrit Arnaud Montebourg.

Pour nombre de dirigeants socialistes, le secrétaire à la rénovation a fait son « chevalier blanc » au détriment du jeu collectif. « Il a un parti idéal dans la tête et voudrait faire table rase de tout le reste mais nous avons des statuts qu’il faut respecter », explique Pascale Boistard, secrétaire nationale aux adhésions.

Mais les proches de deux présidentiables, François Hollande et Ségolène Royal, ont réclamé à leur tour que la lumière soit faite sur les agissements de la fédération des Bouches-du-Rhône.

Alors qu’on l’accuse de tirer contre son camp en alimentant les divisions internes à quelques jours des élections cantonales, il se défend d’avoir fait fuiter son rapport et déplore une publication « malheureuse et inappropriée ». « Je n’ai pas voulu être lâche en fermant les yeux (…) et je ne souhaite pas que le parti dont je suis un des leaders soit fait de ce triste bois-là », souligne Arnaud Montebourg, qui appelle à un PS « nouveau et débarrassé de ses compromissions ».

Laure Bretton Reuter 07/03/11

Repères

La fédération des Bouches-du-Rhône a longtemps été la plus importante du PS, après celle du Pas-de-Calais. Elle perd de son influence après la mort de Gaston Defferre, maire de Marseille de 1953 à 1986, qui ouvre une lutte fratricide entre Michel Pezet et Robert Vigouroux. Le PS perd la mairie de Marseille en 1995. En 2008, au congrès de Reims, la fédération a soutenu à 72,5 % Ségolène Royal.

Alexandre Guérini (52 ans), entrepreneur spécialisé dans les déchets publics et le plus jeune des deux frères, est très brut de décoffrage. Il menace, traite ses interlocuteurs de «p’tit pédé», «gros enculé», ou «tapette». Tête brûlée, il n’est pas toujours prudent. Un jour, il évoque au téléphone l’enquête en cours. A l’autre bout, son frère le reprend : «Parlu corsu, enfin  !» Comme si ça suffisait pour ne plus être compris. Il était sous écoute. Les enquêteurs ont traduit et bien rigolé. Mis en examen, Alexandre Guérini est incarcéré depuis le 1er décembre. photo claude almodovar . fedephoto

«J’ai constaté qu’il y avait des dysfonctionnements dans la fédération. A partir du moment où je constate, j’en fais part à la direction et c’est à la direction de s’en emparer.»

Arnaud Montebourg député et dirigeant du PS

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C’est le nombre d’adhérents à jour de cotisation que comptait la fédération PS des Bouches-du-Rhône fin 2009. A l’époque de Defferre, elle en revendiquait trois fois plus.

Voir aussi : Rubrique Politique locale , La rénovation du PS patine en Languedoc-Roussillon, On Line, Derrière l’affaire la bataille pour Marseille,

La rénovation du PS patine en Languedoc-Roussillon

La réconciliation du PS du Languedoc-Roussillon serait-elle plus ardue que la rénovation du parti au niveau national ? A l’heure où le PS entérinait vendredi, à la quasi-majorité sa rénovation avec primaire et non-cumul des mandats, Martine Aubry qui se propose de  » reconstruire «  la démocratie et de  » réparer la France «  des dégâts du Sarkozisme, doit toujours faire face au village gaulois du Languedoc-Roussillon. Le DVG Georges Frêche poursuit son combat indépendamment de Paris en faisant la pluie et le beau temps au sein des fédérations de la Région.

Comme prévu après le scrutin qui a vu le camp Frêche et le PS se déchirer, une délégation du PS s’est rendue en juin dans les cinq départements de la région pour tenter de renouer le dialogue. Le PS a exclu pour deux ans 58 adhérents restés sur les listes de M. Frêche alors que le PS avait investi ses propres candidats.  » On verra s’il faut raccourcir le délai pour certains camarades. Je ferai des propositions différenciées au bureau national, selon les départements. Dans l’Aude et les Pyrénées-Orientales, cela se passe bien. Pas dans l’Hérault « , a déclaré sans autre précision François Lamy, proche de Martine Aubry, mandaté pour cette mission. Un bras de fer se dessine, car le vice-président de Région, Didier Codorniou, a averti que la réintégration des exclus ne pouvait se faire que dans une  » démarche collective et solidaire  » et qu’il s’opposerait à toute réintégration partielle ou étalée dans le temps.

L’Aude, qui pèse 4.000 cartes, fait figure de bon élève.  » On a parlé d’avenir, pas du passé. Nous avons réitéré notre demande de réintégration des exclus.  » A indiqué le secrétaire par intérim de la fédération audoise, André Viola qui attend une réponse avant le 14 juillet.  » En cas de refus, a-t-il prévenu, il y a un risque de démission massive « .

C’est la puissante fédération de l’Hérault (environ 6.000 adhérents), vilipendée par les opposants à Frêche pour son manque de transparence, qui risque de poser plus de problèmes. La fédération  » ne respecte pas les règles, il n’y a pas de réintégration globale en vue « , affirme le membre du bureau national Paul Alliès, Georges Frêche a pour sa part dénoncé une  » commission bidon « . Mais Le président de Région s’affiche optimisme  » je pense que cette affaire finira par se terminer mieux qu’on ne l’imagine « .

Pragmatique, Frêche garde en ligne de mire la course à l’investiture du futur candidat PS en 2012 et mise sur un fléchissement de Martine Aubry pour y concourir au détriment des principes de la maison PS. Une vision politique nihiliste qui néglige l’institution et le retour attendu dune certaine rigueur morale.

Jean-Marie Dinh avec l’AFP

 

 

 

Voir aussi : rubrique politique, Aubry organise  un Happening féministe Frêche et le serment du Jeu de paume, Mandroux et le village Gaulois, Le problème frêche : copie à revoir ! , rubrique livre, La guerre des chefs au PS

Rénové et uni, le PS face à l’écueil des primaires

martine-aubry_34Quand, le 25 novembre 2008, Martine Aubry prit les rênes d’un Parti socialiste en pleine crise existentielle, elle n’avait pas fait de la rénovation du vieux « parti d’Epinay », refondé par François Mitterrand en 1971, sa priorité. Cet objectif était porté par sa rivale, Ségolène Royal. Toute l’intelligence politique de la maire de Lille a été de comprendre que si elle voulait être l’artisan d’un « nouvel Epinay », elle devait se saisir de cette rénovation au point de l’incarner.

Avec persévérance et détermination, Mme Aubry a surmonté les résistances de ses propres amis et a conduit le chantier à son terme. La convention nationale du PS, réunie le 3 juillet à Paris, va graver dans ses statuts d’importantes innovations : des « primaires populaires », à l’automne 2011, pour désigner le (la) candidat(e) à l’élection présidentielle de 2012, le non-cumul des mandats, qui sera mis en oeuvre « à chaque renouvellement parlementaire « , la « parité intégrale » et la diversité dans toutes les instances. Le PS inaugure une nouvelle pratique de la politique qui mérite d’être saluée.

Il est toutefois regrettable que cette rénovation n’ait pas suscité d’élan chez les militants du PS. Le 1er octobre 2009, moins d’un adhérent sur deux avait participé au référendum organisé par Mme Aubry. Le 24 juin, seuls 34,16 % des 167 162 socialistes inscrits se sont déplacés pour voter sur le projet de rénovation, approuvé à 77 %. Comme si la rénovation, pourtant si nécessaire, était plus affaire de raison que d’enthousiasme.

Le plus difficile pour le PS sera de conjuguer l’exemplarité démocratique qu’il revendique avec la réalité. Il en est ainsi des « primaires populaires », ce « talisman de la victoire », selon leur concepteur, Arnaud Montebourg. Elles seront ouvertes à tous les électeurs qui s’engageront à « soutenir les valeurs de la gauche », moyennant une obole de 1 euro, soit un corps électoral potentiel de plusieurs millions de citoyens.

Indépendamment du risque de voir des électeurs de droite se glisser dans le scrutin, il y a déjà deux écueils. Au départ, l’idée était d’ouvrir les primaires aux « formations de gauche qui le souhaitent ». Si Daniel Cohn-Bendit est tenté de participer, les Verts y sont hostiles. Jean-Pierre Chevènement a déclaré forfait et songe à se présenter… Les radicaux de gauche se tiennent aussi à l’écart.

Mme Aubry a évoqué elle-même le second écueil, ironisant sur ceux qui craignent que l’unité du PS soit « en train de tuer dans l’oeuf les primaires ». Non, dit-elle, il y aura une « pluralité de candidatures ». Mais elle n’affrontera pas Dominique Strauss-Kahn, s’il se décide, et vice-versa. A son tour, Mme Royal exclut de se présenter contre Mme Aubry et contre « DSK ». François Hollande et les autres candidats s’opposent à tout ce qui pourrait ressembler à un « pacte » préalable.

On sera d’autant plus loin d’une primaire à l’américaine, où deux lignes s’affrontent, que le projet présidentiel du PS sera adopté avant, au printemps 2011. Un PS uni, à la différence de 2007, c’est un atout. Mais il ne faudrait pas que des jeux d’appareil réduisent la portée d’un exercice démocratique aussi novateur.

Le Monde 03/07/10