Trois mandats et puis s’en va ? Les députés sont divisés

Un amendement déposé par une trentaine de députés PS a été adopté lors du passage en commission du projet de loi sur le non-cumul des mandats. Il propose, au grand dam d’une majorité d’élus, de limiter le nombre de mandats successifs à trois.  ;

Trois mandats et puis s'en va? Les députés sont divisés

Tout comme l’entrée en vigueur de cette réforme: 2017, soit à la fin de la législature. L’enjeu est ailleurs,

Ces jeunes députés ne respectent décidément rien. Contre l’avis d’une majorité de parlementaires, souvent bien installés au Palais-Bourbon, ils poussent pour durcir la future loi instaurant le non-cumul des mandats. Y parviendront-ils? Pour une fois, la semaine de discussions dans l’hémicycle, qui s’ouvre ce mercredi, fera l’objet d’un certain suspense.

Le principe d’interdire l’exercice d’une fonction parlementaire et d’un mandat local est acté et ne bougera pas. accroché à un article qui tient en quelques mots: « Nul ne peut exercer plus de trois mandats successifs.« 

Celui-ci a fait son entrée par surprise dans le projet de loi, mardi soir, à la faveur d’une offensive menée par Philippe Baumel , député PS de Saône-et-Loire, accompagné d’une trentaine de camarades , pour la plupart élus pour la première fois en juin dernier. Et qu’importe si le rapporteur socialiste du projet de loi, l’expérimenté Christophe Borgel y était opposé.

Un amendemant qui bouscule un équilibre précaire 

Cet amendement met en difficulté tout l’équilibre d’un texte, qui compte énormément pour François Hollande et Jean-Marc Ayrault . Clé de voûte de leur opération de moralisation de la vie politique, le non-cumul des mandats a du mal à passer à l’Assemblée et encore plus au Sénat .

Expert de la synthèse, François Hollande avait réussi à repousser l’entrée en vigueur de la loi à 2017 -s’appuyant sur un avis du conseil d’Etat bien tombé – tout en la faisant voter dès cet été. Le groupe PS avait ensuite repris le flambeau garantissant aux adversaires de la réforme de ne pas en accélérer l’application, tout en assurant aux partisans d’un durcissement d’élargir les fonctions soumises au non-cumul (des présidences des collectivités locales aux syndicats mixtes).

L’idée de limiter le nombre de mandats successifs dans le temps remet en cause cet équilibre et risque de faire voler en éclat le fragile consensus, qui existait à gauche sur ce projet de loi.

Un tel amendement soutenu par les primo-députés va obliger le gouvernement et les cadres du groupe PS à dire publiquement leur opposition à un durcissement du projet de loi s’ils veulent éviter une opposition interne entre Modernes et Anciens. Pas du meilleur effet quand on veut passer pour les réformateurs du système politique.

« Le juge suprême de l’élection, c’est l’électeur « 

A moins que l’exécutif ne laisse la situation se décanter d’elle-même. Car, la majorité sur cet amendement sera difficile à atteindre. A la trentaine de socialistes qui le défend, ne s’ajoutent que les écologistes et quelques UMP isolés, tels que le jeune Gérald Darmanain et les ambitieux Bruno Le Maire et Xavier Bertrand .

Pour le moment, cette solution semble être la meilleure au vu des dernières prises de position. Ce jeudi, le président du groupe UMP et l’ancien président de l’Assemblée nationale, deux voix qui comptent, ont dit tout le mal qu’ils pensaient de cet amendement. « Arrêtons de vouloir tout encadrer dans tous les sens! Laissons la démocratie s’exercer! Que les électeurs puissent choisir leurs parlementaires, cela me semble un minimum!« , s’exclamait Christian Jacob au micro de Canal+ . Invité de Radio Classique et Public Sénat, Bernard Accoyer prolongeait l’idée: « Le juge suprême de l’élection, c’est l’électeur.« 

Matthieu Deprieck

Source L’Express 27/06/13

Voir aussi : Rubrique Politique, rubrique Citoyenneté, Origine de la démocratie représentative

Démocratie de quartier et légitimité politique

La démoctatie participative à construire

La démoctatie participative à construire

Essai. A la lumière de l’histoire, l’ouvrage d’Anne Lise Humain-Lamoure analyse les enjeux politiques et les pratiques sociales de la démocratie de proximité.

Faire une démocratie de quartier ? L’ouvrage d’Anne-Lise Humain-Lamoure tombe à pic à l’heure où Montpellier reconduit l’opération Printemps de la démocratie sur fond de bataille pour devenir kalif surdoué. Sur le papier, notamment celui de la presse institutionnelle, il est question  » d’aller à la rencontre de l’expression citoyenne, au plus près des habitants, et de consacrer la prise en compte de l’expertise d’usage des habitants dans l’acte décisionnel.  » L’objectif affiché ne pouvant être que louable et désintéressé, tout citoyen comprend naturellement que l’intérêt de nos élus locaux pour la démocratie locale s’inscrit avant tout dans un souci électoral. Ce dont convient l’auteur en pointant   » le souci de légitimation de leur représentativité dans le cadre d’un contexte politique qui valorise fortement le principe d’une proximité. « 

Qu’est ce que la proximité ?

democratie-particip-arbreCette proximité incontournable et cruciale, devenue en quelques années une valeur politique de premier plan sans que l’on puisse pourtant en donner une définition claire, trouve place dans la recherche pluridisciplinaire (géographie, aménagement, sociologie et sciences politiques ) d’Anne-Lise Humain-Lamoure. L’auteure y consacre un chapitre. Sous le titre Quartier et proximité une nouvelle idéologie ? elle analyse le mécanisme de production de légitimité politique comme une rupture symbolique avec une légitimité naguère liée à la distance. Distance de l’intérêt général par rapport à l’intérêt particulier, de l’administration rationnelle par rapport à la relation personnelle et de l’Etat par rapport à la société civile.

De quel quartier parle-ton ?

 Si le quartier apparaît unanimement comme le territoire à construire, la division spatiale administrative comme la pertinence de son échelle dans l’espace urbain ne sont ni discutées ni imposées par le cadre légal.  » Le quartier apparaît comme une catégorie abstraite dont l’échelle et les critères de délimitation ne sont jamais définis.  » En fonction du contexte, les acteurs municipaux peuvent ainsi mobiliser le quartier différemment pour le mettre en lien avec les axes politiques qu’ils entendent mettre en valeur. Tandis que les habitants font référence, dans leur grande majorité, à l’idée de rencontre et d’interaction sociale. Pour la population  » Le quartier se définit avant tout par la diversité des personnes qui s’y côtoient. « 

 Critique du mode électif

L’objet de la loi de démocratie de proximité, adoptée en février 2002 est de lier gestion de proximité et démocratie locale. Le texte se fixe pour objectif de renouveler le lien entre élus et citoyens pour renforcer la démocratie, améliorer l’efficacité de l’action publique, et retrouver un lien social considéré comme érodé.

mosquee-manifCette loi répond avant tout à la crise de représentation  » souligne la chercheuse, en fournissant un cadre  » pour mieux décider au nom des gens en refondant la légitimité des élus.  » Le régime représentatif assuré par les élections certifie théoriquement la légitimité des décisions prises et de ceux qui les prennent. Mais il est aujourd’hui de plus en plus contesté comme l’indique les records atteints par l’abstention dans toutes les élections intermédiaires aux présidentielles.  » L’élection suppose une compétition pour la conquête des mandats et des pouvoirs qu’ils confèrent. Or, cette compétition, organisée par et dans les partis politiques, est souvent ressentie comme des réseaux de pouvoir dans lesquels une part croissante de citoyens se sent exclue et oubliée.  » A cela s’ajoute la litanie des promesses non tenues, autant que l’impression d’une caste fermée de politique issue des classes les plus favorisées. La critique du modèle républicain revendique aussi l’ouverture des systèmes décisionnels, et la reconnaissance de la différence entre les groupes sociaux, sur la base de leurs origines ethniques et religieuses.

La démocratie de proximité aurait donc pour but d’abolir ou d’atténuer la domination politique, sociale et culturelle. Mais pour la plupart de ses promoteurs officiels, ce n’est guère concevable.  » Pour la première fois depuis la Révolution, on choisit de découper un des territoires de la République  » rappelle Anne-Lise Humain-Lamoure dont l’essai ausculte la démocratie à partir du plus petit des territoires. Un miroir édifiant sur les pratiques et les questions que suscite notre système politique.

Jean-Marie Dinh

Faire une démocratie de quartier ? Editions Le bord de l’eau, 22 euros

Voir aussi : Rubrique Montpellier Rubrique Politique locale : Frêche et le serment du Jeu de paume , Mandroux et le village Gaulois, Tramway ligne trois,  Un petit dernier avant les régionales, Un îlot de soleil sous un ciel menaçant Petit Bard Pergola rénovation urbaine,