Cinemed. Tunç Davut : « La caméra comme un stylo »

En compétition au CINEMED

Par Jean-Marie Dinh

" Le désespoir c’est la perte du pouvoir que nous avons de changer. » photo dr

 » Le désespoir c’est la perte du pouvoir que nous avons de changer. » photo dr

Dolanma. Avec son premier long métrage, le réalisateur turc Tunç Davut révèle une maîtrise esthétique et formelle.

Dolanma, le premier long métrage du réalisateur turc Tunç Davut en compétition pour l’Antigone d’Or au festival Cinemed à Montpellier, confirme s’il le fallait la qualité du cinéma d’auteur turc, qui s’y est souvent illustré.  » Pour moi, faire du cinéma, ce n’est pas raconter une histoire » , indique Tunç Davut qui situe ses influences du côté de  Bresson, Bergman et Kurosawa. Dolanma, (Méandre pour la version française ) n’est pas un film bavard.

« Pour faire un film j’ai besoin de deux stylos, l’un me sert à écrire le script, l’autre, c’est la caméra », confie le réalisateur qui aborde la notion du désespoir, version Kierkegaard dans un somptueux huis clos réunissant trois personnages dans une cabane perdue dans les bois au Nord de la Turquie.

Kemal et Cemal, deux frères bûcherons unis et désorientés depuis le décès de leur mère, se retrouvent dans la maison de celle-ci quand l’aîné revient avec sa compagne Nalân pour s’y installer. « Les trois personnages incarnent chacun à leur manière une représentation du désespoir, explique Tunç Davut. Rongé par l’angoisse, Kemal n’a pas conscience de son comportement. Nalân ne parvient pas à s’accepter. Et Cemal voudrait être lui-même sans y parvenir.« 

Coupés du monde extérieur, les personnages sont en proie à leur propre existence.  Tournée vers les gestes et les mouvements, la caméra assure seule les liens du récit. Dans les scènes intérieures elle rend palpable la présence de la mère dont les deux frères n’ont pas déclaré le décès pour continuer à percevoir une pension mais aussi pour ne pas faire face à leur désoeuvrement.

« Le désespoir c’est l’incapacité à changer. C’est la perte de ce pouvoir essentiel. La vie meurt dans ce film, comme le désir... » expose Tunç Davut qui se défend ici d’évoquer la situation turque. Il en sera question dans son prochain film qui devrait être plus politique.

Good luck Algeria. Une comédie aigre-douce

Le défi d’un scénario inspiré d’une histoire vraie. photo dr

Le défi d’un scénario inspiré d’une histoire vraie. photo dr

«Good luck Algeria». Porté par Sami Bouajila, le premier long métrage du réalisateur Farid Bentoumi tient la piste.

Le monde entier souhaitera  bonne chance à l’Algérie pour sa participation aux Jeux Olympiques en ski de fond. Le réalisateur Farid Bentoumi se saisit de cette idée farfelue pour son premier long métrage. Le scénario (inspiré d’une vraie histoire, celle du frère du réalisateur) retrace les mésaventures de Sam, 43 ans. Pour sauver son entreprise de production de skis de fond, il se lance dans un pari fou : participer aux prochains JO pour le pays de son père, l’Algérie.

Dans le rôle titre, Sami Bouajila (prix d’interprétation à Cannes en 2006, pour Indigènes) fait une nouvelle démonstration de son talent d’acteur, jouant sur le registre du décalage pour produire un effet comique qui exprime aussi toute la profondeur des conflits culturels rencontrés par les français issus de l’immigration. A ses côtés sa femme, (Chiara Mastroianni) se distingue par une interprétation très juste. Les questions d’identité et d’intégration sont au coeur de la comédie. Le scénario transversal co-signé par Noé Debré s’avère  singulièrement pertinent.

Source :  La Marseillaise 27/10/2015

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