Festival. Les sept escales lumineuses de Jazz à Sète

 

Stanley Clarke à l'affiche de Jazz à Sète cette année

Stanley Clarke à l’affiche de Jazz à Sète cette année

21 ème édition du festival Jazz à Sète, juste pour le plaisir du 13 au 19 juillet.

Fidèle au poste, le capitaine et directeur artistique Louis Martinez, a présenté jeudi au Dôme l’édition 2016 de Jazz à Sète, 21ème du nom. Un moment renouvelé qui met les fidèles amateurs en appétit. Sept soirées d’exception où l’amour du jazz est rythmé par la relation à l’espace qu’offre le Théâtre de la mer. Tandis  que le souffle de la musique se diffuse le regard porte nos esprits vers d’autres rivages, avec cette vertu particulière qui fait éclater les sphères individuelles.

Ce lieu d’échange est d’autant plus propice à la sérénité que le goût du jazz se trouve en partage, ouvert à l’air libre et marin. S’il est une sensation qui caractérise la programmation de Jazz à Sète, c’est bien celle du plaisir pure. Elle appréhende simultanément les dimensions du genre généralement séparées par la spécialisation. Cette année encore, le jazz traditionnel côtoiera la soul, le jazz-rock, la folk, le rythm ’n blues et même le hip hop.

Le  souffle du rêve
L’ouverture sera marquée par le retour de Snarky puppy qui, outre le fait d’avoir fait entrer la tempête dans le théâtre l’an passé, peut symboliser par sa vitalité et sa fusion instrumental l’esprit du festival. Le collectif basé à Brooklyn, compte plus d’une cinquantaine de musiciens qui se produisent selon des géométries variables entre neuf et quinze d’entre eux sont attendus pour mettre le feu. La saxophoniste Géraldine Laurent, élue musicienne de l’année par Jazz Mag, apportera à cette soirée un complément de souplesse appréciable.

Le lendemain la jeunesse virtuose prend le pouvoir avec Cory Henry dont le jeu d’orgue capture l’essence même du jazz et du gospel. Il est accompagné de cinq musiciens dont le plus vieux n’a que 24 ans. Le jeune trompettiste (28 ans) Christian Scott natif de la Nouvelle-Orléan partage cette soirée en y faisant entrer des touches rock, soul et hip hop.

Le 15 juillet annonce l’accueil de la légende vivante Stanley Clarke pour son troisième passage à Sète de retour avec son dernière album  «Up». Un autre bassiste et contrebassiste marquera cette soirée de son élégance avec Kyle Eastwood qui a démontré son talent de compositeur dans les film de son père avant de s’affirmer sur les scènes internationales.

Le samedi 16 juillet la soirée spéciale Fip sera pleine de couleurs avec le pianiste Thomas Enhco emporté par la magie de l’amour.  L’accordéoniste Vincent Peirani, étoile montante du jazz européen et son quintet, enfin la rencontre prolifique entre les guitaristes  Sylvain Luc & Luis Salinas.

La soirée du 17 juillet est une ouverture sur le hip hop avec le collectif Jurassic 5 qui feront la démonstration que le genre fait bien partie de la famille Jazz. La première partie de la soirée est assurée par la talentueuse NDobo-Emma  lauréate du tremplin national organisé par Jazz à Sète. Le 18 juillet soirée tonic avec les californien Vintage Trouble révélation rythm’n blues et Soul de la décennie. Malted Milk & Toni Green et leur cocktail bluesy funky seront là pour donner le change. La fin du festival est pensée en douceur avec le duo soyeux Jell-OO et la rayonnante Diana Krall.

JMDH

Source La Marseillaise 21/05/2016

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Concert Marcus Miller. La boite noire de la musique

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Photo. Jmdi

C’est un paradoxe, les moments de haute musique en live se font rares alors que les propositions  émanant des festivals explosent. Dimanche, le concert de Marcus Miller en clôture de l’édition 2015 de Jazz à Sète compte parmi ces instants inoubliables.

On le doit sans doute à une conjonction de phénomènes comme le lieu, l’antre magnifique du Théâtre de la mer que ce bassiste hors pair foulait pour la première fois, une formation sans égal soudée au titane, un public avide d’oxygène, et l’énergie prodigieuse, positive et spirituelle, d’un moment unique qui vient de loin.

L’héritage vient des work-songs des esclaves, pour devenir les negro spirituals, le gospel, le dixieland, le jazz original, le blues, le R’n’B, la soul, le jazz, le funk, le hip hop. Aujourd’hui Marcus Miller remonte à la source des rythmes qui font la richesse de ce patrimoine musical, partant de l’Afrique pour les suivre, comme à la trace, jusqu’aux États-Unis en passant par le Brésil et les Caraïbes.

Né en 1959, il est devenu l’ambassadeur naturel des racines de la musique noire. « Après avoir été sélectionnés dans des conditions inhumaines sur l’île de Gorée au Sénégal, les esclaves franchissaient la porte de non retour vers l’Afrique. On les entassaient dans les cales comme des bêtes. Ils n’avaient pas le droit de se parler. Alors ils chantaient. La musique était plus que de la musique, c’était le seul et dernier lien avec l’Afrique. Cette musique a transporté toute l’histoire » explique celui qui a accepté d’être porte parole du projet de l’UNESCO. « La route de l’esclave » source d’inspiration de son dernier album « Afrodeezia ».

A l’instar de Miles Davis qui lui avait donné sa chance à 25 ans, Marcus s’entoure de musiciens confirmés et de jeunes très prometteurs avec une forte volonté de transmission.

JMDH

Source : La Marseillaise 20/07/2015

Voir aussi : Rubrique Festival, rubrique Musique, rubrique Afrique,

Une notion du plaisir musical renouvelée

Herbie Hancock hors du temps et toujours présent. Photo DR

Herbie Hancock hors du temps et toujours présent. Photo DR

Festival. Du 12 au 17 juillet, la quatorzième édition de Jazz à Sète creuse un sillon musical essentiel. Six jours de jazz non stop. Herbie Hancock et George Benson en invités légendaires.

Ray Charles, Pacco de Lucia, Hank Jones, Michel Portal…, depuis 1985, les moments musicaux inoubliables de Jazz à Sète font légion. Au point de s’interroger sur ce sentiment de bonheur pas entamé, cette forme de candeur toujours renouvelée qui saisit les fidèles amateurs à l’approche du festival. D’évidence, la magie du lieu tient son rôle. Le majestueux Théâtre de la mer souffle ou aspire, selon les cas, nos esprits vers d’autres rivages, avec cette vertu particulière de faire éclater les sphères individuelles. Ce lieu d’échange est d’autant plus propice à la sérénité quand le goût du jazz se trouve en partage ouvert libre et sans frontières. A l’image de son capitaine Louis Martinez, directeur artistique et musicien qui tient la barre parfois contre les vents. « ?Assurer une programmation c’est autre chose que de mettre un paquet de pognon sur des têtes d’affiches? », a-t-on rappelé  lors de la présentation de l’édition 2010.

Celle-ci se tenait à l’Atelier du Garage, espace de travail commun d’Isabelle Marsalla et de Bocaj qui signe l’affiche. Depuis de nombreuses années, les personnages féminins colorés et provocateurs du peintre sont devenus l’emblème du festival. On pourra faire plus ample connaissance avec les muses de Bocaj grâce à l’expo qui s’ouvre salle Tabouriech durant le festival. A découvrir aussi, l’exposition du photographe Eric Morère qui propose une rétrospective du festival au bistrot du marché.

La vie d’un festival se mesure souvent à ce qu’il se passe en dehors de la scène. A l’occasion du centenaire de la naissance de Django Reinhardt, le festival organise cette année une conférence à la Médiathèque qui sera donnée par Francis Couvreux suivie d’un concert manouche sur le parvis. Les instrumentistes pourront parfaire leurs techniques d’impro en suivant les ateliers jazz au conservatoire. A suivre également, l’aboutissement du Tremplin Jazz à Sète permettant aux groupes de jazz non distribués d’ouvrir l’une des soirées phare du festival. Le lauréat 2010 est Riad Klaï Project Un groupe de sept musiciens œuvrant dans un registre allant du jazz à l’Afrobeat. Ils joueront en première partie de George Benson.

En quatorze éditions, Jazz à Sète s’est forgé une identité forte à l’image d’une ville qui n’en manque pas. L’idée d’un off impliquant toute la population est plus que mûre mais ne trouve pas de financement, dommage !

La programmation jazz concoctée par Louis Martinez passe du subtil à l’émotion brute

Avec des mots simples, Louis Martinez a eu le plaisir de dévoiler le programme de Jazz à Sète 2010. « ?Je me dis que cette programmation me serait apparue inespérée il y a quelques années.? » Le temps a, semble-t-il, plaidé pour une reconnaissance qualitative du travail engagé. Et si le budget demeure modeste (300 000 euros dont 65% de fond propre), le festival s’annonce une fois de plus riche est varié. A l’image de son équipe et de ses cinquante bénévoles fous de jazz. A l’image aussi de l’œuvre d’Herbie Hancock qui en assurera l’ouverture lundi 12 juillet. On ne présente plus le maître de l’électro jazz funk tant sa traversée des générations le place hors du temps. Membre du Miles Davis Quintet dans les années 60, le pianiste s’est toujours distingué par la complexité de ses rythmiques autour de la mélodie. Alors qu’il s’apprête à fêter ses 80 ans, son œuvre demeure à la fois expérimentale et populaire, ce qui n’est donné qu’aux géants. Le guitariste Angelo Debarre présentera le 13 juillet le spectacle Manoir de mes rêves en hommage au père spirituel du jazz manouche Django Reinhardt. Le 14 juillet, au moment où les feux de lumière répandront leurs éclats dans le ciel national, un nouveau diamant vocal éblouira le Théâtre de la mer. Nul doute que les imparables mélodies de Melody Garbot auront raison des artificiers à moins que l’ensemble ne se conjugue sur front de mer en clair obscur…

La soirée du jeudi s’intitule Bass Leaders. Le contre bassiste virtuose Diego Imbert en assurera la première partie accompagné de son quartet sans instrument harmonique. La soirée se poursuivra dans le climat arabo-andalou et hébraïque d’Avishai Cohen. Beaucoup de chemins et de cultures se sont croisés entre le premier disque Avishai Cohen produit par Chick Coréa et son dixième album sorti en 2009, où il rejoint le prestigieux label Blue note. Un autre géant est attendu vendredi avec George Benson. Un guitariste de jazz avant que sa rencontre avec Quincy Jones ne l’entraîne dans le tourbillon du funk et de la soul où il a commis quelques tubes planétaire comme « ?Give me the night? ». George Benson n’en demeure pas moins un fameux compositeur de jazz comme le démontrent les instrumentaux de son dernier album. L’influence des chorus du guitaristes légendaires n’est plus à démontrer mais toujours à apprécier.

La clôture s’annonce hot samedi 17 avec Lena and the deep soul et le groupe londonien The Brand New Heavies, l’un des premiers à investir la scène acid jazz, en croisant l’esprit funk des années 1970 au hip hop de la fin des années 1980. Tout est dit ou presque, car traduire en mots l’expérience vécue d’un concert est toujours impossible. Le mieux est de s’y rendre.

Jean-Marie Dinh