Carton plein de sons

 

Photo Sandrine Alouf

Photo Sandrine Alouf

Nuit blanche et rayon vert. Plongée dans le nouveau coffret Nova. Deux tours de cadran en musique pour atteindre la vingt-cinquième heure.

On ne s’en lasse pas et c’est pour ça qu’ils sont toujours là. Max Guiguet, RKK, Emilien Aumard, Bintou Simporé ou encore Jean Croc jouent quotidiennement avec les platines de Radio Nova. On rend grâce à leur dévouement en écoutant le dernier coffret de la station parisienne. 25 CD, 260 titres et deux tours d’horloge non stop pour un nouveau cube en carton incontournable.

Tchin à ceux qui écoutent le monde du haut de leurs ailes de verre à l’affût de la note renversante qui brisera le cristal. Tchin à ceux qui n’ont rien des trafiquants de single officiels et vulgaires. A ceux qui persistent dans l’entêtante idée qu’il reste encore quelque chose de grandiose à découvrir à chaque heure.

Il est 8 h, on ouvre un œil dans l’attente d’une voie céleste. I want you tonight, un sample vocal sirupeux de Guts surgit sans avoir la moindre chance de mettre un peu d’ordre dans vos pensées. On est en 2009 mais il faudra rejoindre l’année 1970, cinq morceaux et trois bols de café noir plus tard, pour émerger presque en trombe avec le M Fortune de The Hitch-Hikers feat myghty pope. La journée s’annonce hot et la nuit pas tiède. Surprise Trip hop à 9 h, l’optimisme de Portishead marche dans la chambre avec the Rip et se dissipe avec and I love him d’Esther Philips celle qui connut une fin précoce, usée par les excès toxiques. A 13 h, Seun Kuti procure beaucoup de pensées parmi lesquelles celle de s’éloigner d’une dur journée de labeur. On poursuivra l’écoute jusqu’au bout de la nuit. Les samaritains de Nova vous offrent la possibilité d’éloigner idées noires, contextes professionnels et sombres histoires de cœur et de cul. Manier blues, funk, soul, jazz, afro beat, reggae, electro, hip hop…, ne s’improvise pas. La musique n’est pas un agrément accessoire. C’est une expression de la vie confirme l’Ethiopien Alemayehu Eshete à l’heure du goûter et le chanteur de The Spécials Terry Hall et ses musiciens du moyen Orient quelques tirs croisés plus tard.

A 21 h, les DJ new-yorkais de Soho vous font renouer le contact avec vos frères et sœurs automobilistes qui viennent juste de sortir des bouchons. La nuit débute sous hypnose avec les syncopes du balafon et du vibraphone de Neerman & Kouyatè. Elle se poursuivra jusqu’à la déraison luxueuse et zénithale. Ce coffret c’est l’essence intime du monde Nova. Un nouveau voyage à travers le temps et les cultures. Il est 7 h la diva Minnie Riperton nous transporte vers les rêves. Tchin à ceux qui se lèvent !

Jean-Marie Dinh

Coffret Nova 24 H 60 euros
 
 

 

Une éthiopique et fauve soirée

Mahmoud Ahmed

L’enivrant et lumineux festival Fiest’A Sète donne un sens au concept un peu fourre-tout de la world music. Colorée, variée et exigeante, la programmation concoctée par José Bel renoue avec les racines culturelles les plus profondes pour offrir des perles rares plus ou moins connues. Il faut saluer le travail primordial de passeur pour sa qualité autant qu’il faut rappeler que ce sont les artistes, par leur ouverture d’esprit, qui nourrissent cette aventure depuis maintenant 12 ans.

Sous les auspices de Francis Falceto, le directeur de la collections CD éthiopiques chez Buda Music, la soirée de mardi consacrée à l’Éthiopie entre directement dans les annales du festival avec un plateau unique associant deux monstres emblématiques de la musique, Alèmayèhu Eshèté et Mahmoud Ahmed venus spécialement d’Ethiopie. Quatre heures durant, on a vu Le Théâtre de la mer subjugué par une prestation bienveillante et enflammée des deux chanteurs magistralement accompagnés par l’orchestre breton Badume’s Band.

En grand spécialiste de la musique éthiopienne, le musicographe Francis Falceto, qui a remonté toutes les filières pour en rencontrer les témoins vivants, ne cache pas sa satisfaction.  » Ce concert est un des plus beaux qui s’est fait. C’est drôle parce que je n’ai jamais anticipé sur ce phénomène. Passionnés par l’Ethiopie, les musiciens des Badume’s Band m’ont contacté un jour. Ils voulaient inviter Mahmoud Ahmed en Bretagne. Celui-ci a accepté, et après avoir répété trois heures, m’a demandé : pourquoi on ne jouerait pas avec eux ? «  Depuis les liens se sont renforcés.  » J’ai invité Badume’s Band à L’Ethiopian Music Festival que je programme depuis 7 ans à Addis Abeba. Je n’étais pas sûr de mon coup. Mais au bout de quelques morceaux, comme à Sète, ils avaient le public avec eux. C’est l’antithèse des musiciens de studio. Ils aiment vraiment ce qu’ils font. C’est un honneur pour eux de partager la scène avec les vétérans de l’âge d’or de l’ethio-groove « .

On a découvert à Sète un chaînon manquant de la musique africaine d’une grande singularité.  » Du fait que l’Ethiopie n’ait jamais été colonisée, à l’exception d’une courte période par Mussolini, le pays a vécu en autarcie sans métropole pour faire haut-parleur. C’est une fierté qui participe, au même titre que le nationalisme, à l’identité éthiopienne. On doit la prendre d’un bloc « , indique Francis Falceto. Le public qui a goûté à la musique traditionnelle fortement teintée de soul de Alèmayèhu et aux subtilités de la voix de Mahmoud Ahmed, n’est pas prêt d’oublier la culture musicale éthiopienne.

Jean-Marie Dinh

La collection compte 20 CD à découvrir également les productions de ethioSonic

Voir aussi : Rubrique Musique