Et si François Hollande succédait à Abdelaziz Bouteflika

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Comment ne pas souscrire à ce souhait auquel nous invite François Hollande, à savoir une transition démocratique et pérenne en Algérie qui passe, immanquablement, par une succession pacifique de Bouteflika à la tête de l’Etat algérien laquelle évitera à l’Algérie un énième « chaos ».

Lors de sa dernière interview télévisée accordée à France 24 et RFI, le Président français ne s’est pas contenté d’exprimer un souhait, mais il a été également généreux avec ses téléspectateurs algériens puisqu’il s’est prêté volontiers au jeu des questions-réponses à propos de l’Algérie et a révélé plusieurs informations et renseignements sur la situation actuelle de l’Algérie. En réalité, François Hollande semble mieux connaître l’Algérie que nos propres actuels dirigeants. François Hollande n’a guère hésité à parler de l’état de santé d’Abdelaziz Bouteflika. Il s’est même attardé sur « la solidité des institutions algériennes ».

Aucun haut responsable algérien n’a réussi à communiquer aussi brillamment sur notre pays que François Hollande. Les Algériens ont obtenu la confirmation officielle que la succession de Bouteflika est à l’ordre du jour grâce au locataire de l’Elysée, lequel a été élu, rappelons-le, par des citoyens français. François Hollande a réussi à éclairer la lanterne des Algériens en les rassurant et en leur expliquant de composer avec leur propre institution. A cet exercice politique à l’importance stratégique, aucun homme politique algérien, ministre, Premier ministre, dignitaire de l’armée ou simple chef de parti, n’a voulu s’y prêter. Bien au contraire, nos responsables politiques notamment ceux qui exercent le pouvoir ont affiché un mépris intolérable à l’égard de notre peuple. Ils n’ont pas cessé d’insulter son intelligence. Depuis plusieurs semaines, Abdelmalek Sellal et ses ministres, les députés comme les sénateurs, n’ont eu de cesse de nous indiquer uniquement que Bouteflika se porte bien tout en nous invitant à dissiper nos inquiétudes légitimes.

Aucun de ces décideurs n’a éprouvé le besoin de communiquer sur le transfert du Chef de l’Etat vers un autre établissement spécialisé, à savoir les Invalides à Paris. Les Algériens ont appris cette nouvelle grâce au ministère français de la Défense et à François Hollande qui a confirmé en direct cette information. De la part de leurs autorités, les Algériens n’ont eu droit qu’à des communiqués laconiques et des déclarations courtes destinées à clamer ce « chahut de gamins ». Oui, des gamins qui n’ont le droit de rien savoir et de ne rien connaître au destin de leur propre pays, voilà ce que représentent les Algériens pour leurs dirigeants. L’alternative, la succession d’un Président malade, l’élection présidentielle de 2014, les affaires de l’Etat qui demeurent paralysées à cause de cette vacance du pouvoir, aucun débat n’a été proposé par nos hauts responsables sur toutes ces questions délicates qui engagent, pourtant, l’avenir de nos enfants.

Fort heureusement, un certain François Hollande existe. Lui au moins, élu en France par des électeurs français, a éprouvé de la pitié pour ce peuple avec lequel personne ne veut communiquer. Un peuple avec lequel aucun dirigeant ne veut débattre ni discuter de son avenir. Un peuple à qui on fait croire tout le temps que son pays est dépourvu d’institutions capables d’assurer la succession d’un Président de la République. Un peuple à qui on ne cesse de faire d’inculquer la peur et la terreur pour le maintenir dans le silence et la soumission. Au final, François Hollande a lancé un véritable pavé dans la marre. Un pavé qui a brisé cette mer d’indifférence qui est en chaque Algérien. L’avenir de l’Algérie intéresse au moins un Président étranger, de surcroît français. Et si François Hollande succédait donc à Abdelaziz Bouteflika ? On l’aura compris, cette boutade nous renvoie à notre plus profond cauchemar : un jour cette question se posera légitiment  au regard de la démission de nos élites politiques qui sont incapables de proposer à leur peuple : une communication digne de ce nom, et donc du respect,  un futur président et une alternative sérieuse,  et un avenir débarrassé de tout chaos.

Abdou Semmar

Source Algérie Focus 3 juin  2013

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