Rupture pathétique assumée

 Roman
Dans la série les histoires d’amour finissent mal, celle de Mathilde qui carbure au cocktail MD-electro mecs contée par Hélène Couturier dans un monologue sauvage et contemporain.

il-etait-combien-de-fois-9782842638795_0Avec Fils de femme, son premier roman sortie en 1996, l’auteure montpelliéraine Hélène Couturier a été la première femme française publiée dans la prestigieuse collection Rivage noir dirigée par le grand dénicheur de talent François Guérif. Vingt ans plus tard elle vient de publier son sixième roman Il était combien de fois, chez Le Dilettante.

Ce n’est pas un roman noir, bien qu’on sente parfois à travers le style sans figure, limpide, débridé, le virus du genre s’agiter sous la peau de l’intrigue. Le rythme aussi, comme le squelette du roman qui nous embarque dans une errance nocturne à Barcelone – sa nouvelle ville d’adoption – indique le caractère contestataire de l’écrivain qui prend le revers de la société de consommation.

De consommation festive il est pourtant question avec Mathilde, personnage principal s’exprimant à la première personne du singulier. Une femme d’âge mure qui carbure au cocktail MD-electro mecs.

« Un nombre totalement avouable puisque je couche le premier soir mais jamais une seule fois. Je pratique la relation sporadique longue durée non par choix mais par nécessité – c’est si rare de rencontrer un homme qui m’éveille un véritable désir que lorsque j’en découvre un je le dorlote

Avec ce drame éternel, Hélène Couturier saisit les maux du monde moderne dans une dimension intime. Mathilde est une forme d’aventurière attachante par son côté border line. Son désir de vivre la pousse à braver des situations inconcevables pour la plupart des gens de sa génération. Cela la conduit à se trouver dans des situations cocasses comme sa rencontre hilarante avec un apollon dénommé Valentin.

Côté psycho, l’héroïne connaît plusieurs problèmes de dépendances : drogues, sexe, fêtes nocturnes… Elle tente en vain de s’enfuir de la dure réalité par des moyens peu orthodoxes tout en assumant parallèlement sa vie de couple et son boulot d’agent immobilier dans la métropole catalane.

« L’infidélité n’est pas un enjeu dans le couple mais pour beaucoup une réalité qui doit se vivre dans la clandestinité et je suis en train de me rendre compte qu’il n’y a pas de clandestinité parfaite, ils y a juste des hommes et des femmes qui choisissent de ne pas voir et d’autres qui choisissent de voir ! »

En somme, l’absence de meurtre tient lieu de passeport à ce livre pour la  blanche mais son côté corrosif qui défie la caste des bien-pensants pourrait très bien nous amener à le caler dans les étagères dédiées aux romans noirs .

Jean-Marie Dinh

Il était combien de fois, Le Dilettante 2017 15€

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Source La Marseillaise 25 03 2017